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La captive aux yeux clairs

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La captive aux yeux clairs Empty La captive aux yeux clairs

Message  Phylisse Jeu 12 Mai 2011 - 20:45


Si la vie avait été un long fleuve tranquille, c'est sûr, elle se serait laissée porter sur la rivière sans retour, bercée par la grande illusion que derrière l'écran les visiteurs du soir n'étaient pas ceux des jeux interdits. Elle était née un quatre juillet, et lorsque ses parents l'avaient prénommée Ninotchka, comment auraient-ils pu penser qu'elle n'aurait rien de l'ange bleu dont ils avaient tant rêvé. Elle en avait la couleur, par ses yeux, mais sa chevelure noire n'avait rien de celle d'un ange.

Quand le beau Serge l'avait invitée un soir à pousser les portes du paradis, elle avait craint que cette chevauchée fantastique dont il l'entretenait quotidiennement la fasse chavirer vingt mille lieues sous les mers, elle ne supportait pas les profondeurs. Aussi avait-elle pris la poudre d'escampette et se souvenait-elle encore de ces mots qui longtemps l'avaient froissée : "De toute façon, les hommes préfèrent les blondes".

Elle avait bien pensé changer de prénom, de couleur de cheveux, de décor... Sept ans de réflexions ne vinrent pas à bout de ses tourments. Elle voulait être tout à la fois la comtesse aux pieds nus, Blanche-Neige, la Reine Christine, la fille de d'Artagnan, Cléopâtre, le voleur de Bagdad, King-Kong, ou Betty Boop. Mais être elle-même, lorsque le labyrinthe des passions était si vaste, elle ne pouvait s'y soumettre.

Lorsqu'elle déambulait sous les lumières de la ville à la rencontre du troisième type, un seul désir l'animait : s'accrocher à la remorque afin de s'embarquer pour le voyage fantastique au pays de Willow ou des Visiteurs, et vivre libre à l'Est d'Eden. L'incessant désir de découvrir de nouvelles sensations la poussait encore et toujours, sa fureur de vivre était sans limite.

***

Enfant, quand elle allait chez son grand-père, Ninotchka aimait retrouver ce héros malgré lui qu'il était devenu à ses yeux, et la guerre des mondes qui bataillait en elle ne savait s'apaiser qu'au rythme de ses récits : il était l'aigle des mers de l'Antartica, le fugitif de la guerre du feu, la chute de l'Empire romain à lui tout seul ! Elle se sentait alors devenir la confidente d'un des derniers aventuriers de l'arche perdue... Les coéquipiers de son grand-père l'ayant abandonné sur les quais lors d'un été meurtrier : 37,2 le matin, ils n'avaient pas supporté. Avec Ninochka, au moins avait-il une oreille attentive à ses rocambolesques histoires, et la leçon de piano qu'il lui offrait à travers la lettre à Elise l'envahissait comme une majestueuse aile du désir, jetant en elle l'espoir que sous les toits de Paris, le monde du silence existait et que les temps modernes s'étaient enfuis. Dans ces moments là elle n'était plus Ninotchka, mais la tendre Elisa.

Et lorsque la mélodie prenait fin, laissant place à la grande bouffe du dimanche, Parrain et les cousins lui rappelaient le difficile sacrifice de sa présence. Ô combien elle aurait souhaité, dans ces instants de confrontation familiale, danser le dernier tango à
Paris dans la baie des Anges ! Au bras du Prince de Hombourg, elle aurait fait les quatre cent coups de Paris à Citizen Kane, sous l'oeil hagard de son père, sa mère, ses frères et ses soeurs ! Ses rêveries s'évanouissaient avec l'après-midi... Ainsi s'achevait l'avventura dominicale à la maison du lac.

***

Adolescente, la guerre des boutons était devenue une histoire sans fin, et son visage, qu'elle jugeait ingrat, ne faisait qu'accentuer ce quo vadis intérieur. La bataille du siècle qui mûrissait en elle la rendait impitoyable et ceux qui l'approchaient ne pouvaient que coiffer leur casque bleu face à cette Parisienne arrivée d'un train en gare de La Ciotat, qui choisissait sur la strada sa prochaine victime. Prisonnière du désert, elle attendait que la fête commence et le pigeon se transformait vite en ours lorsque cette Juliette
des esprits libérait le fleuve de fantasmes qui bouillonnait dans son chaudron infernal.

***

Aujourd'hui, son journal intime restait la grande évasion de ses longues journées passées à guetter le voleur de bicyclette, celui-là même qui la plongea dans la folie quelques années auparavant...

Elle l'avait rencontré un jour de pluie alors qu'elle avait la mort aux trousses, poursuivie par un dictateur qui voulut jouer à la Belle et la Bête en profitant de ses folies de femmes où se mêlaient souvent ombres et brouillard. Mais la Belle et la Bête, non ! Ce jeu ne lui plaisait pas et Ninotchka décida de mettre un terme aux caprices de son amant. Elle l'entraîna dans le jeu de la chèvre, leur divertissement favori. Il ne vit rien venir : elle lui cloua l'arbre aux sabots ! Bien évidemment il hurla tandis qu'elle s'enfuyait... Des jours durant il la poursuivit, elle était devenue son ennemi public numéro un. Cependant, Ninotchka possédait une telle fureur de vaincre, qu'elle finit par semer cet amant malheureux.

Le hasard, dans sa course, la conduisit sur la piste des géants, en l'occurrence celle de son Prince de Hombourg, le Tarzan de la maladie d'amour après la guerre sur le grand chemin... Il suscita en elle l'Eveil dont elle ne soupçonnait pas même l'existence, l'âge d'or de tous les matins du monde. Il l'avait baptisée Hiroshima mon amour et la mélodie du bonheur qu'il lui chantait faisait exploser l'arme fatale qui les unissait, les entraînant dans un même élan... Les enfants du paradis étaient en route pour le voyage fantastique...

Cependant, ce monde parfait dans lequel elle papillonnait, tour à tour discrète, effrontée ou petite voleuse, toujours sous l'oeil vigilant de son Prince, devait s'achever sous les parapluies de Cherbourg : son popeye avait été enlevé par les sept mercenaires pour une poignée de dollars, et depuis, elle était une autre femme, pesant sans cesse l'insoutenable légèreté de l'être.

Toutes ses recherches pour le retrouver étaient restées vaines et le silence des agneaux régnait sur le champ de ses pensées...

C'est ainsi qu'elle était arrivée dans cette chambre avec vue, envahie d'une grosse fatigue, éreintée par toutes ces années de lutte.
Ses beignets de tomates vertes terminés, elle visionnait les séquences de sa vie. Son écran géant, c'était le coin de ciel bleu à travers les carreaux, et lorsque sur l'horizon se dessinaient les vestiges du jour, elle était la captive aux yeux clairs à l'aube d'un autre monde, à bout de souffle...


(C'est un texte qui date un peu, c'est pourquoi ne figurent pas de titres de films récents. J'avais à l'origine mis en italique tous les titres de films mais je trouve que ça gâche un peu la lecture)
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Message  elea Jeu 12 Mai 2011 - 21:44

Concernant l’exercice : chapeau !
Je n’ai pas compté les titres il y en a trop mais parvenir à monter un récit avec c’est du boulot.
Par contre, niveau narratif, par moments, les phrases semblent là juste pour caser un titre et pas pour construire l’histoire, ce qui fait qu’au final, je retiens les films, la forme, mais pas le fond du texte.
En outre il est un peu long et est devenu une énumération pour moi à la fin.
Mais c'est une jolie manière de se constituer une liste pense-bête cinématographique.

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Message  midnightrambler Jeu 12 Mai 2011 - 22:08

Bonsoir,

La performance est là sans doute ...
L'intérèt est-il de saluer la tenue du Festival de Cannes ... le dernier ? demande à l'instant Frédéric Taddéi è ses invités ...

Amicalement,
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Message  Phylisse Ven 13 Mai 2011 - 7:10

Elea, tes remarques sont tout à fait justifiées sur la longueur et cette impression de n'avoir plus qu'une énumération en fin de texte. J'ai bien tenté de couper certains passages, mais je n'y suis pas parvenue car les titres sont le ciment et du coup il aurait manqué quelques pans du mur par endroit.

Concernant ceci : Par contre, niveau narratif, par moments, les phrases semblent là juste pour caser un titre et pas pour construire l’histoire. J'ai construit le texte avec les titres et n'ai donc pas cherché à les caser à tout prix. La difficulté étant de donner à lire quelque chose de lié dont les épisodes s'enchaineraient parfaitement (et ce n'est pas chose facile quand aucun titre ne correspond à ce que l'on a en tête pour la suite de l'histoire). Je crois c'est ce qu'il manque et qui rejoins ce que tu as noté.

Midnightrambler, ce texte a été écrit en 1995, et hors festival de Cannes. Il s'agissait d'un concours de nouvelles ayant pour sujet le cinéma. Et je n'avais pas fait le rapprochement avec l'actualité...
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Message  Phylisse Ven 13 Mai 2011 - 7:12

Me suis mal relue... "rejoint"
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