Berceuse
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Berceuse
Berceuse
Mon chemin prend sa source peu avant le col.
Le chemin qui mène à mon chemin est un chemin ardu, pentu. Il y suinte, plus qu’il n’y coule, un flux sombre qui rend le sol glissant et parfois comme spongieux. S’il pleut, alors, on y tombe plus souvent qu’un jésus et sa croix.
Il est possible, toutefois, de ne pas emprunter le chemin qui mène à mon chemin pour se rendre à mon chemin. Mais cet autre chemin est fort long, aussi, la plupart choisissent celui dont je vous ai parlé.
Pour être exact, cet autre chemin n’est pas un autre chemin mais le même chemin, quand on le prend dans un autre sens.
Vous ne me demandez rien concernant mon chemin ? Grande sagesse ? Confiance, justifiée ou non, en vos moyens ? Extrême et peut-être excessive politesse ?
Vous partirez de bon matin, je vous vois déjà, la jambe alerte, le sac au dos, le pied et la cheville pris dans une authentique chaussure de marche, une chaussette de sport atténuant ce contact.
En mangeant votre en-cas, vous regretterez probablement de ne pas m’avoir questionné sur l’état de mon chemin. Ni sur sa longueur. Vous soufflerez un coup, satisferez quelque besoin corporel, et reprendrez votre ascension qui, martelée par vos pas répétés, rimera toujours davantage, jusqu’à l’obsession, avec crucifixion.
Fatigue et rythme aidant, votre esprit, presque en transe, tissera des liens fébriles. Un chemin ? un liquide, un flux, une pluie ? Et cette analogique chaussette de sport recouvrant un membre tout aussi analogique…
Épuisé, vous réaliserez, à un moment ou un autre, mais plus probablement au soir, après de longues descentes, que, votre fièvre ayant amoindri votre vigilance, vous avez dû passer devant le chemin que vous cherchiez sans le voir.
Il ne sera plus question alors ni d’érection ni de pénétration. Pour ce qui est de la crucifixion, pourtant, un grand sentiment de solitude emplira aussi votre cœur. Quant à l’ascension… elle vous attendra, à nouveau.
Il est probable que vous vous assiérez alors, tâterez votre gourde, croquerez un biscuit sec de marche, une quelconque barre de céréale sur-vitaminée. Pourquoi pas : une lichette de whisky bue à même la flasque ? Ce serait bien. Vous me feriez plaisir.
Dépourvu de toute tente, n’ayant vu nulle maison, nulle masure, nul hangar, il vous faudra bien revenir sur vos pas. Autant le faire héroïquement, n’est-ce pas ?
Un insidieux crachin se mêlera à la nuit, votre cape de pluie, jaune, sans doute ou vert kaki, résistera un temps, puis cèdera ; alors l’humide coulera sur votre peau.
Vous jurerez, j’en jurerais. Mais vous êtes coriace, vous poursuivrez, glisserez, grognerez, vous blesserez au menton, parviendrez à nouveau à ce col, seul repère en votre possession.
Vous soufflerez. L’ascension aura été rude. Vous vous en voudrez. Vous douterez même, alors, non seulement de l’existence de mon chemin, mais de la raison qui vous aura poussé à ne pas continuer plus avant sur votre lancée pour retrouver la terre partagée par l’humanité.
Non. Aucun loup ne hurlera. On dit pourtant qu’il en rôde, non loin. On n’entendra pas de patou, non plus. On n’entendra rien d’autre que le souffle du vent sur les étoiles.
Vous vous assiérez à nouveau, le dos collé contre le fût rectiligne d’un arbre d’une espèce inconnue, et, sans crainte ni rancune, pour la première fois depuis longtemps, vous vous endormirez.
Mon chemin prend sa source peu avant le col.
Le chemin qui mène à mon chemin est un chemin ardu, pentu. Il y suinte, plus qu’il n’y coule, un flux sombre qui rend le sol glissant et parfois comme spongieux. S’il pleut, alors, on y tombe plus souvent qu’un jésus et sa croix.
Il est possible, toutefois, de ne pas emprunter le chemin qui mène à mon chemin pour se rendre à mon chemin. Mais cet autre chemin est fort long, aussi, la plupart choisissent celui dont je vous ai parlé.
Pour être exact, cet autre chemin n’est pas un autre chemin mais le même chemin, quand on le prend dans un autre sens.
Vous ne me demandez rien concernant mon chemin ? Grande sagesse ? Confiance, justifiée ou non, en vos moyens ? Extrême et peut-être excessive politesse ?
Vous partirez de bon matin, je vous vois déjà, la jambe alerte, le sac au dos, le pied et la cheville pris dans une authentique chaussure de marche, une chaussette de sport atténuant ce contact.
En mangeant votre en-cas, vous regretterez probablement de ne pas m’avoir questionné sur l’état de mon chemin. Ni sur sa longueur. Vous soufflerez un coup, satisferez quelque besoin corporel, et reprendrez votre ascension qui, martelée par vos pas répétés, rimera toujours davantage, jusqu’à l’obsession, avec crucifixion.
Fatigue et rythme aidant, votre esprit, presque en transe, tissera des liens fébriles. Un chemin ? un liquide, un flux, une pluie ? Et cette analogique chaussette de sport recouvrant un membre tout aussi analogique…
Épuisé, vous réaliserez, à un moment ou un autre, mais plus probablement au soir, après de longues descentes, que, votre fièvre ayant amoindri votre vigilance, vous avez dû passer devant le chemin que vous cherchiez sans le voir.
Il ne sera plus question alors ni d’érection ni de pénétration. Pour ce qui est de la crucifixion, pourtant, un grand sentiment de solitude emplira aussi votre cœur. Quant à l’ascension… elle vous attendra, à nouveau.
Il est probable que vous vous assiérez alors, tâterez votre gourde, croquerez un biscuit sec de marche, une quelconque barre de céréale sur-vitaminée. Pourquoi pas : une lichette de whisky bue à même la flasque ? Ce serait bien. Vous me feriez plaisir.
Dépourvu de toute tente, n’ayant vu nulle maison, nulle masure, nul hangar, il vous faudra bien revenir sur vos pas. Autant le faire héroïquement, n’est-ce pas ?
Un insidieux crachin se mêlera à la nuit, votre cape de pluie, jaune, sans doute ou vert kaki, résistera un temps, puis cèdera ; alors l’humide coulera sur votre peau.
Vous jurerez, j’en jurerais. Mais vous êtes coriace, vous poursuivrez, glisserez, grognerez, vous blesserez au menton, parviendrez à nouveau à ce col, seul repère en votre possession.
Vous soufflerez. L’ascension aura été rude. Vous vous en voudrez. Vous douterez même, alors, non seulement de l’existence de mon chemin, mais de la raison qui vous aura poussé à ne pas continuer plus avant sur votre lancée pour retrouver la terre partagée par l’humanité.
Non. Aucun loup ne hurlera. On dit pourtant qu’il en rôde, non loin. On n’entendra pas de patou, non plus. On n’entendra rien d’autre que le souffle du vent sur les étoiles.
Vous vous assiérez à nouveau, le dos collé contre le fût rectiligne d’un arbre d’une espèce inconnue, et, sans crainte ni rancune, pour la première fois depuis longtemps, vous vous endormirez.
martial-- Nombre de messages : 2
Age : 52
Date d'inscription : 29/05/2011
Re: Berceuse
Merci à ceux qui n'ont pas commenté, j'adore être la première.
En principe en arrivant, on ne présente (ça permet de vous faire voir, donc c'est bien de ne pas l'avoir fait)
J'ai du parcourir votre chemin hier, et ce matin en effet tout est plus limpide.
Un contraste entre la chaussure et "l'éther émanant des pensées", puis cette rencontre ..avec dieu ?
je suis souvent très (trop ?) enthousiaste, mais là juste ce que ce texte vaut à mes yeux.
merci et bienvenue.
En principe en arrivant, on ne présente (ça permet de vous faire voir, donc c'est bien de ne pas l'avoir fait)
J'ai du parcourir votre chemin hier, et ce matin en effet tout est plus limpide.
Un contraste entre la chaussure et "l'éther émanant des pensées", puis cette rencontre ..avec dieu ?
je suis souvent très (trop ?) enthousiaste, mais là juste ce que ce texte vaut à mes yeux.
merci et bienvenue.
Invité- Invité
Re: Berceuse
Pour le première fois depuis longtemps vous vous endormirez!!!!!
J'ai aimé ce texte Martial et votre âge me parlent et me met sur un chemin (De mémoire) qui étrangement finit dans un long endormissement... Très long!
je ne peux l'expliquer ici bien sûr, mais un grand trouble me submerge.
J'ai aimé ce texte Martial et votre âge me parlent et me met sur un chemin (De mémoire) qui étrangement finit dans un long endormissement... Très long!
je ne peux l'expliquer ici bien sûr, mais un grand trouble me submerge.
Maryse- Nombre de messages : 811
Age : 80
Localisation : Montélimar
Date d'inscription : 22/09/2010
Re: Berceuse
Je remercie chaleureusement mes deux commentatrices.
J'imagine que les autres lecteurs étaient davantage occupés par ailleurs...
Au revoir.
J'imagine que les autres lecteurs étaient davantage occupés par ailleurs...
Au revoir.
martial-- Nombre de messages : 2
Age : 52
Date d'inscription : 29/05/2011
Re: Berceuse
Bonjour,
Martial, ne remerciez pas si vite : 68 lectures en deux jours ce n'est pas de l'oubli! Quant au nombre de commentaires, il ne veut pas dire grand chose ( très variable mais généralement autour de 15 pour 100 lectures vous n'en êtes pas si loin). Vous verrez, votre texte ne restera pas inlu. Il est d'ailleurs probable que pour ma part j'y revienne.
Martial, ne remerciez pas si vite : 68 lectures en deux jours ce n'est pas de l'oubli! Quant au nombre de commentaires, il ne veut pas dire grand chose ( très variable mais généralement autour de 15 pour 100 lectures vous n'en êtes pas si loin). Vous verrez, votre texte ne restera pas inlu. Il est d'ailleurs probable que pour ma part j'y revienne.
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