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Message  Bliss Sam 18 Juin 2011 - 22:14

Bonsoir à tous,

Voici une nouvelle que j'ai eu l'occasion d'écrire il y a deux ans, dans le cadre de cours d'écriture. Je tiens à l'améliorer, n'hésitez donc pas à souligner les problèmes, incohérences et passages fragiles...
Voici la première partie :




La rue des calvaires semblait avoir été abandonnée depuis des années, comme un vieux jouet que l’on aurait épuisé, et que l’on aurait jeté par lassitude au fond d’un débarras poussiéreux. Il y régnait un état de décrépitude, comme pouvaient en témoigner les devantures des magasins et des brocantes, autrefois théâtres de conversations et de débats animés, et qui n’étaient à présent que des vieilles baies vitrées ternes et crasseuses. Des débris de verre jonchaient le trottoir et les caniveaux, et faisaient refléter sur les murs la lumière rougeâtre d’un vieux néon qui éclairait autrefois l’entrée d’un music-hall. Dans cette rue, longue et étroite s’étalaient des montagnes de sacs poubelles, dont certains avaient été éventrés par les chats du quartier qui avaient trouvé là de quoi s’approvisionner. Plus loin, au pied d’un réverbère était entassée une pile de vieux journaux aux titres criards qui, sous la pluie, ne ressemblait plus qu’à un amoncellement de papier mâché. Une flaque d’encre rouge s’était formée au pied du tas, et disparaissait progressivement dans le caniveau, comme si la pluie avait tenté de dissimuler un crime sordide. A l’exception du grésillement produit par l’enseigne lumineuse et de quelques miaulements, un silence pesant régnait dans la ruelle. Soudain, au milieu des ténèbres, un petit clic retentit, puis un flash blafard illumina furtivement les murs des immeubles, révélant un instant de vieilles affiches de concert de jazz.

Alex s’engagea à pas de loup dans la rue des Calvaires, les doigts agrippés à son appareil photo. Il avait erré dans le quartier la nuit précédente à la recherche d’un quelconque bar où terminer sa soirée et, par quelques détours chancelants, les vapeurs d’alcool l’avaient mené à cette ruelle. La singularité des lieux l’avait immédiatement marqué et il avait fait les cent pas chez lui en attendant la tombée de la nuit, dans l’attente nerveuse de reprendre quelques clichés.

Au loin, il vit un ombre s’engager dans la rue. Alors qu’elle se rapprochait de lui, il s’accroupit derrière un amas de poubelles afin de l’observer discrètement. « Intéressant, pensa-t-il. Jeune fille blanche. La vingtaine. Talons aiguilles noirs. Trench coat beige. Lèvres rouges. Démarche ? Rapide. Regard ? Fuyant…La victime parfaite… ». Alex attendit que la jeune fille passât devant lui, puis il s’extirpa discrètement de sa cachette, et se mit à la suivre de près tel un prédateur, guettant un moment de faiblesse avant de se jeter sur sa proie. La jeune fille ralentit et se mit à fouiller nerveusement dans son sac, peut-être à la recherche d’une arme potentielle. Alex s’arrêta, s’empara de son objectif, fit quelques réglages et appuya sur la…

- Ecartez-vous ! Je-je suis armée… !

Alex tressaillit. Pris de surprise, il déclencha malencontreusement le flash qui vint éblouir l’inconnue. Les bras tendus dans sa direction, elle tenait un spray coiffant entre ses mains tremblantes, et fixait Alex, affolée.

- Tout doux mademoiselle, baissez votre…arme.

La tenue sophistiquée de la jeune femme contrastait avec l’apparence débraillée d’Alex. Un fin trait de crayon noir lui donnait un regard de biche apeurée et sa silhouette fine et élancée était telle qu’un simple coup de griffe aurait suffi à briser son corps maigre et tremblotant. N’importe quelle femme de son espèce pouvait être effrayée par l’allure sauvage d’Alex. En d’autres circonstances, et dans d’autres mondes, Alex, avec son apparence crasseuse, sa crinière brune et son regard de prédateur, n’aurait fait qu’une bouchée de sa petite personne.
Constatant que l’objet du crime n’était autre qu’un appareil photo, la jeune femme baissa les mains et rangea le spray dans son sac, en prenant soin de ne pas quitter Alex des yeux.

- Vous êtes fou ! Ca vous arrive souvent d’effrayer les gens dans la rue ?, s’exclama-t-elle.

- Et vous, ça vous arrive souvent de menacer les gens ? On ne peut plus se balader tranquillement dans la rue sans manquer de se faire agresser…, bredouilla Alex tout en continuant de fixer attentivement la jeune fille.

Un mélange de terreur, de colère, mais aussi de curiosité se lisait sur le visage de la pauvre créature. Les joues légèrement rosies par le froid et la poussée d’adrénaline, elle était figée, attendant une réaction de la part d’Alex qui, au lieu de rétorquer violemment comme il le faisait fréquemment lorsqu’un individu quelconque se mettait en travers de ses clichés, ne put sortir un mot. Cette voix aigüe, cette fraicheur qui émanait d’elle…Cette beauté juvénile, innocente, n’était pas sans lui rappeler une jeune femme qui avait croisé son chemin quelques années auparavant. Une jeune femme qu’il avait également capturée le temps d’un cliché, mais qui l’avait dompté et qui lui avait fait croire à mille lendemains meilleurs. Et qui un jour, contre toute attente, avait broyé le peu de confiance qu’Alex avait envers lui-même, envers les autres. En glissant sous la porte un message griffonné au dos d’un ticket de caisse, sur lequel avaient été jetés quelques vulgaires mots. Je m’en vais, prends soin de toi. Rien de plus, rien de moins. Alors, la bête qui sommeillait en lui et qui, jusque là, s’était tue sous le poids de cet élan de bonheur éphémère, s’était soudainement réveillée. Depuis ce jour, Alex s’était juré de ne plus jamais se soumettre à une quelconque bonté humaine. Toujours faire souffrir plutôt que de souffrir soi-même, tel était devenu son leitmotiv. Depuis ce jour, il avait pris goût à épier les gens et à immortaliser leurs souffrances, leurs peines. Ses photos, pour lui, n’avaient de valeur que si elles lui permettaient de cracher sa haine contre un monde qu’il ne comprenait pas. Mais voilà que plein de vieux sentiments se mirent à jaillir à la figure d’Alex. Il pensait avoir oublié cette
garce, et voilà que cette fille se mettait à lui rappeler qu’un jour, il avait été quelqu’un de bon, de fragile. Quelqu’un de faible.

Un fracas métallique vint soudain interrompre ses pensées lugubres. Un des chats de gouttière qui s’était aventuré parmi les ordures avait dégringolé et entraîné avec lui un tas de sacs poubelles qui se déchirèrent en frappant le sol et vomirent plusieurs boîtes de conserves.

- Dites-moi, ça fait combien de temps que vous me persécutez comme ça avec votre appareil photo ?

- Vous perséc…pardon ? Vous pensez vraiment que je vous suis depuis des heures ?

- Il doit bien y avoir une raison à tout cela. De toute manière, il suffit de sortir à peine du travail pour qu’un timbré dans votre genre se mettre à harceler des personnes comme moi —comme moi—et voilà que maintenant, vous prenez des photos…Vous travaillez pour qui au juste ?

- Pour moi…en quoi ça vous intéresse ? Je croyais que j’étais qu’un pauvre timbré…Vous ne deviez pas rentrer chez vous d’ailleurs ? Faites gaffe, on pourrait vous agresser au couteau à un coin de rue…Dépêchez-vous !

La jeune fille réprima un grognement et tourna les talons. Alex la regarda s’éloigner, les talons claquant contre les pavés, et laisser échapper un « connard ! » avant de disparaître au coin de l’avenue.

...

Bliss

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Message  Invité Dim 19 Juin 2011 - 6:40

Bliss a écrit:

ce que je supprimerais
orthographe
maladresses
répétition
La rue des Calvaires semblait avoir été abandonnée depuis des années, comme un vieux jouet que l’on aurait épuisé, et que l’on aurait jeté par lassitude au fond d’un débarras poussiéreux. Il y régnait un état de décrépitude, comme pouvaient en témoigner les devantures des magasins et des brocantes, autrefois théâtres de conversations et de débats animés, et qui n’étaient à présent que des vieilles baies vitrées ternes et crasseuses. Des débris de verre jonchaient le trottoir et les caniveaux, et faisaient refléter sur les murs la lumière rougeâtre d’un vieux néon qui éclairait autrefois l’entrée d’un music-hall. Dans cette longue rue, et étroite s’étalaient des montagnes de sacs poubelles, dont certains avaient été éventrés par les chats du quartier qui avaient trouvé là de quoi s’approvisionner. Plus loin, au pied d’un réverbère était entassée une pile de vieux journaux aux titres criards qui, sous la pluie, ne ressemblait plus qu’à un amoncellement de papier mâché. Une flaque d’encre rouge s’était formée au pied du tas, et disparaissait progressivement dans le caniveau, comme si la pluie avait tenté de dissimuler un crime sordide. A l’exception du grésillement produit par l’enseigne lumineuse et de quelques miaulements, un silence pesant régnait dans la ruelle. Soudain, au milieu des ténèbres, un petit clic retentit, puis un flash blafard illumina furtivement les murs des immeubles, révélant un instant de vieilles affiches de concert de jazz.

Alex s’engagea à pas de loup dans la rue des Calvaires, les doigts agrippés à son appareil photo. Il avait erré dans le quartier la nuit précédente à la recherche d’un quelconque bar où terminer sa soirée et, par quelques détours chancelants, les vapeurs d’alcool l’avaient mené à cette ruelle. La singularité des lieux l’avait immédiatement marqué et il avait fait les cent pas chez lui en attendant la tombée de la nuit, dans l’attente nerveuse de reprendre quelques clichés.

Au loin, il vit unE ombre s’engager dans la rue. Alors qu’elle se rapprochait de lui, il s’accroupit derrière un amas de poubelles afin de l’observer discrètement. « Intéressant, pensa-t-il. Jeune fille blanche. La vingtaine. Talons aiguilles noirs. Trench coat beige. Lèvres rouges. Démarche ? Rapide. Regard ? Fuyant…La victime parfaite… ». Alex attendit que la jeune fille passât devant lui, puis il s’extirpa discrètement de sa cachette, et se mit à la suivre de près tel un prédateur, guettant un moment de faiblesse avant de se jeter sur sa proie. La jeune fille ralentit et se mit à fouiller nerveusement dans son sac, peut-être à la recherche d’une arme potentielle. Alex s’arrêta, s’empara de son objectif, fit quelques réglages et appuya sur la…

- Ecartez-vous ! Je-je suis armée… !

Alex tressaillit. Pris de Surprise, il déclencha malencontreusement le flash qui vint éblouir l’inconnue. Les bras tendus dans sa direction, elle tenait un spray coiffant entre ses mains tremblantes, et fixait Alex, affolée.

- Tout doux mademoiselle, baissez votre…arme.

La tenue sophistiquée de la jeune femme contrastait avec l’apparence débraillée d’Alex. Un fin trait de crayon noir lui donnait un regard de biche apeurée et sa silhouette fine et élancée était telle qu’un simple coup de griffe aurait suffi à briser son corps maigre et tremblotant. N’importe quelle femme de son espèce pouvait être effrayée par l’allure sauvage d’Alex. En d’autres circonstances, et dans d’autres mondes, Alex, avec son apparence crasseuse, sa crinière brune et son regard de prédateur, n’aurait fait qu’une bouchée de sa petite personne.
Constatant que l’objet du crime n’était autre qu’un appareil photo, la jeune femme baissa les mains et rangea le spray dans son sac, en prenant soin de ne pas quitter Alex des yeux.

- Vous êtes fou ! Ca vous arrive souvent d’effrayer les gens dans la rue ?, s’exclama-t-elle.

- Et vous, ça vous arrive souvent de menacer les gens ? On ne peut plus se balader tranquillement dans la rue sans manquer de se faire agresser…, bredouilla Alex tout en continuant de fixer attentivement la jeune fille.

Un mélange de terreur, de colère, mais aussi de curiosité se lisait sur le visage de la pauvre créature. Les joues légèrement rosies par le froid et la poussée d’adrénaline, elle était figée, attendant une réaction de la part d’Alex qui, au lieu de rétorquer violemment comme il le faisait fréquemment lorsqu’un individu quelconque se mettait en travers de ses clichés, ne put sortir un mot. Cette voix aigüe, cette fraicheur qui émanait d’elle…Cette beauté juvénile, innocente, n’était pas sans lui rappeler une jeune femme qui avait croisé son chemin quelques années auparavant. Une jeune femme qu’il avait également capturée le temps d’un cliché, mais qui l’avait dompté et qui lui avait fait croire à mille lendemains meilleurs. Et qui un jour, contre toute attente, avait broyé le peu de confiance qu’Alex avait envers lui-même, envers les autres. En glissant sous la porte un message griffonné au dos d’un ticket de caisse, sur lequel avaient été jetés quelques vulgaires mots. Je m’en vais, prends soin de toi. Rien de plus, rien de moins. Alors, la bête qui sommeillait en lui et qui, jusque là, s’était tue sous le poids de cet élan de bonheur éphémère, s’était soudainement réveillée. Depuis ce jour, Alex s’était juré de ne plus jamais se soumettre à une quelconque bonté humaine. Toujours faire souffrir plutôt que de souffrir soi-même, tel était devenu son leitmotiv. Depuis ce jour, il avait pris goût à épier les gens et à immortaliser leurs souffrances, leurs peines. Ses photos, pour lui, n’avaient de valeur que si elles lui permettaient de cracher sa haine contre un monde qu’il ne comprenait pas. Mais voilà que plein de vieux sentiments se mirent à jaillir à la figure d’Alex. maladroit Il pensait avoir oublié cette
garce, et voilà que cette fille se mettait à lui rappeler qu’un jour, il avait été quelqu’un de bon, de fragile. Quelqu’un de faible.

Un fracas métallique vint soudain interrompre ses pensées lugubres. Un des chats de gouttière qui s’était aventuré parmi les ordures avait dégringolé et entraîné avec lui un tas de sacs poubelles qui se déchirèrent en frappant le sol et vomirent plusieurs boîtes de conserves.

- Dites-moi, ça fait combien de temps que vous me persécutez comme ça avec votre appareil photo ?

- Vous perséc…pardon ? Vous pensez vraiment que je vous suis depuis des heures ?

- Il doit bien y avoir une raison à tout cela. De toute manière,il suffit de sortir à peine maladroit du travail pour qu’un timbré dans votre genre se mettre à harceler des personnes comme moi —comme moi—et voilà que maintenant, vous prenez des photos…Vous travaillez pour qui au juste ?

- Pour moi…en quoi ça vous intéresse ? Je croyais que j’étais qu’un pauvre timbré…Vous ne deviez pas rentrer chez vous d’ailleurs ? Faites gaffe, on pourrait vous agresser au couteau à un coin de rue…Dépêchez-vous !

La jeune fille réprima un grognement et tourna les talons. Alex la regarda s’éloigner, les talons claquant contre les pavés, et laisser échapper un « connard ! » avant de disparaître au coin de l’avenue.

...
Selon moi :

La longue description du début ne donne pas vraiment envie d'entrer dans ce texte. Il est souvent plus accrocheur de faire démarrer l'action immédiatement quitte à revenir sur les descriptions des lieux peu après. D'autant que tu sembles avoir le goût des longues phrases pleines d'adjectifs et de subordonnées, et que tu abuses carrément du "et".
Le personnage d'Alex, faux prédateur au coeur blessé est trop vite dévoilé, tu aurais pu laisser davantage planer l'inquiétude ( ce que tu cherches me semble-t-il à faire en décrivant un physique peu avenant, mais tu laisses tout de suite entendre que c'est un bon jeune homme que seule une déception a jeté dans le besoin de se protéger en " attaquant")
Quelques clichés comme " le regard de biche apeurée" ou "la bête qui sommeillait en lui ".
Sinon, j'ai noté un vocabulaire varié, une bonne articulation des phrases ( attention à varier leur longueur pour éviter la monotonie) une écriture très visuelle et qui coule bien.
J'attends la suite.

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Message  Invité Dim 19 Juin 2011 - 8:30

J'ai grincé fort à tous les clichés : la minette en trench, les talons aiguilles, la biche apeurée, beauté juvénile, le côté sauvage de Alex.
J'ai aussi trouvé que l'expression était bien trop brute ("victime", "garce", "dompter" "la bête qui sommeillait", "regard de prédateur"), tout cela est asséné, énoncé, là où il faudrait arriver à évoquer, suggérer. Beaucoup trop d'adjectifs catégoriques aussi " silence pesant", "crime sordide", etc).
Les dialogues sont aussi à l'emporte-pièce, j'ai l'impression d'être dans une mauvaise série tv.
Bref, il faudrait affiner tout ça, narration et dialogues.

Ce que j'ai trouvé bien, habile même, c'est l'inversion des rôles de la victime ici :

"- Et vous, ça vous arrive souvent de menacer les gens ? On ne peut plus se balader tranquillement dans la rue sans manquer de se faire agresser…, bredouilla Alex tout en continuant de fixer attentivement la jeune fille."

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Message  Bliss Dim 19 Juin 2011 - 9:12

Bonjour!

Merci pour ces commentaires, et surtout ces remarques sur les clichés, je m'en doutais un peu...
Voici donc la suite :

Les jours qui suivirent cette rencontre nocturne, Alex mitrailla comme jamais. En effet, les dernières pluies d’automne et les premiers flocons de l’hiver déposaient leur lot de tristesse, de froid, d’aliénation. Alex commençait ses journées en allant à la première heure chez le marchand de journaux du coin, achetait la presse locale et passait ses matinée, reclus dans son bureau, à éplucher les faits divers, les rubriques nécrologie et autre articles susceptibles d’éveiller ses pulsions créatrices. Il avait également tendance à fréquenter les mêmes lieux. Comme le métro qui, chaque jour, engouffrait des milliers d’âmes. Des femmes, hommes, pauvres, maigres, gros, BCBG, en Prada ou en loque, il y avait de quoi y trouver son compte. Ou tout simplement la rue, de préférence à la tombée de la nuit, quand les néons des bars commencent à clignoter, que la pluie n’a pas encore faire couler le maquillage des poupées qui arpentent les trottoirs en quête d’une âme perverse mais généreuse, quand les chats commencent à s’extirper de leurs trous et à envahir les quartiers souillées des détritus égrenés ça et là au fil de la journée.

En cette fin d’après-midi de février, la pluie qui avait martelé les pavés toute la journée avait à présent laissé une couche humide sur l’asphalte qui éblouissait sous la lumière des réverbères et des voitures roulant à vive allure et éclaboussant au passage les
passants armés de leurs parapluies.
Alex déambulait dans l’avenue Malbas, casquette vissée sur le crâne et clope au bec, son Leica M7 autour du cou. Un incendie avait ravagé la veille un pâté d’immeubles, et les flammes commençaient enfin à mourir sous les lances à eaux des pompiers, présents sur les lieux depuis des heures. Une vingtaine de personnes étaient agglutinés au pied des immeubles et observaient avec effroi et fascination le spectacle qui s’offrait à eux. Parmi eux, Alex qui s’empara de son objectif et se mit à effectuer quelques réglages. L’incendie s’était étendu sur plusieurs mètres et il était difficile d’avoir une vue d’ensemble des dégâts. Le regard fixé sur son objectif, il fit quelques pas en arrière. Trop près. Il recula encore de quelques mètres. La prise de vue était presque parfaite, plus que…

***
Lorsqu’Anna sortit de la galerie d’art, Avenue Malbas, la nuit était déjà tombée. Elle avait beau travailler dans le quartier depuis déjà trois ans, à chaque fois qu’elle quittait le seuil du Studio Galard et qu’elle devait parcourir les quelques rues qui la séparaient de la première bouche de métro, elle était submergée par un sentiment de dégoût et pressait le pas, de peur de se retrouver face à la misère ambulante qui hantait les lieux. Comment peut-on en arriver là, se disait-elle, tandis que ses escarpins rouge carmin claquaient de plus belle les pavés souillés de bouteilles et de journaux. Emmitouflée dans son manteau, serrant de près son sac à main, elle accéléra nerveusement la cadence, puis leva les yeux au ciel et vit un nuage de cendre flotter quelques mètres au-dessus d’elle. A la galerie, elle avait bien entendu qu’un fou avait encore une fois fait des siennes en mettant le feu à un immeuble de fortune, mais elle ne pensait pas être confrontée ce soir-là aux oeuvres du pyromane en question. Elle aperçut au loin les flammes s’évanouir, écrasées par des énormes jets d’eau. Absorbée par le spectacle sordide, elle ne remarqua pas la silhouette qui reculait rapidement dans sa direction. L’homme non plus d’ailleurs, qui heurta violemment Anna et par la même occasion, piétina malencontreusement le bout de son escarpin. Elle laissa échapper un cri tandis que la besace du jeune homme s’ouvrit en tombant au sol, répandant plusieurs dossiers en cartons qui commencèrent à s’imbiber d’eau. L’homme s’empressa de les ramasser, et alors qu’il se releva, Anna reconnut, sous sa casquette en jean délavé, celui qui l’avait poursuivi dans une sordide ruelle quelques jours auparavant. Il tenait entre ses mains plusieurs photographies en noir et blanc qu’il avait retirées des chemises en carton. Elles n’avaient visiblement pas été abîmées par la pluie. Anna fut immédiatement marquée par l’étrange beauté des clichés. Jamais elle ne se serait doutée qu’une espèce de dérangé dans son genre eût été doté d’un tel talent artistique. La plupart des photos était des portraits, noir et blanc, capturés dans un coin de rue, devant une vieille épicerie, de nuit, de jour…

- Pardon, j’aurais du …

- Vous me reconnaissez ? demanda Anna au jeune homme, tandis qu’il leva lentement les yeux vers elle, le regard jusque là dissimulé sous la visière de sa casquette. Un éclair de surprise jaillit dans le regard du photographe, il tressaillit, puis balbutia quelques mots.

- Oh…Bonjour…Décidément, vous allez vraiment finir par croire que je vous harcèle… » Anna remarqua son air beaucoup moins assurée que la dernière fois, comme si les rôles s’étaient inversés et qu’elle était cette fois-ci en position de force. Le regard fuyant, il semblait comme déstabilisé. Anna s’éprit soudainement de ce moment de faiblesse. Il l’avait en effet troublée durant leur première rencontre, mais elle s’était demandé durant les jours suivants si ce n’était pas l’incongruité de la situation qui l’avait poussée à ressentir cela.

- Encore en quête d’une proie à traumatiser ? ironisa-t-elle.

- Non. Je lui laisse un peu de répit aujourd’hui. Il y a cet immeuble qui m’intéressait…Un nouveau projet…Et je fais le tour des galeries pour leur montrer quelques photos, on ne sait jamais.

- A vrai dire, je suis galeriste, vous tombez bien. Nous recherchons quelques exposants en ce moment, je peux jeter un coup d’oeil à votre travail ?

Il lui tendit une dizaine de photographies. Bien sûr, le travail du jeune homme était susceptible d’intéresser la galerie d’art, mais elle ressentait avant tout un besoin avide d’en savoir un peu plus sur lui. Elle examina les photos et constata qu’elles étaient d’une qualité et d’une beauté à la fois saisissante et étrangement choquante. Cependant, l’une d’entre elles attira davantage son regard. Dans un parc, une jeune femme mince et raffinée tournait le dos à l’objectif. Anna fut troublée de constater à quel point toutes deux se ressemblaient. Vêtue d’un tailleur noir et perchée sur des escarpins en cuir, le modèle, comme immortalisée par surprise, dévisageait par-dessus son épaule le photographe, le regard brillant habillé d’un fin trait de crayon noir. Le soleil estival illuminait son visage et faisait scintiller une fine larme glissant sur sa joue. Visiblement embarrassé qu’Anna s’attarde sur ce cliché, le jeune homme tendit la main, comme pour l’interrompre dans sa contemplation :

- Je m’appelle Alex.

- Et moi Anna.

Les doigts d’Alex vinrent effleurer le creux de sa main, avant de la saisir fermement. Il esquissa un léger sourire tout en la regardant.

Bliss

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