Pâle en ses rides

[Gabriel]

Depuis la première heure, au chevet de la terre,
moi, Lune, j’ai veillé. J’ai vu sévir le mal
et suis restée ici, muette et solitaire,
n’osant jamais répondre aux cris de l’animal.

Maléfice engravé dans mes éphémérides,
cette apathie encor m’enferme chaque nuit.
Ces heures répétées, elles ont fait mes rides
et dilaté mon cœur de langueur et d’ennui.

Mais à cette heure, non, je ne veux plus me taire.
Car quand le crépuscule a posé son rempart,
je suis seule à prêter ma clarté salutaire;
et très rares sont ceux qui n’y prennent leur part.

Moi-même j’ai bordé ceux qui n’ont plus de mère,
offert aux meurtriers leurs plus fervents remords,
fait s’aimer les amants qui jamais ne s’aimèrent
et gardé les jardins où s’endorment les morts.

Je suis vielle aujourd’hui; je sais bien. Je suis lasse.
Pourtant si j’étais femme et qu’il m’était donné
de descendre là-bas, je céderais ma place;
je viendrais me mêler au monde abandonné.

Par une étrange nuit où l’orage s’enrhume,
près du feu que la foudre allonge dans le soir,
j’irais à pas feutrés, sous mon châle de brume,
jusqu’à quelque chaumière où je viendrais m’asseoir.

Et, là, posant sur vous ma grise houppelande,
à vous mes chers enfants qui rêvez sous le drap,
je dirais que les loups sont tendres, que la lande
est belle et que le mal jamais ne reviendra.

Et ce serait mentir ! Car au loin l’épouvante
et la rage ont levé leurs nombreux bataillons.
Mes amours, n’allez pas vers l’aurore suivante !
Laissez-moi vous garder sous mes pâles rayons !

Mais je parle trop tard; Et trop tard je soupire.
Car enfin j’ai vu tant des ces pantins hideux
vous bercer de mensonge et vous cacher le pire.
Oui, les hommes sont faux ! Et j’ai trop appris d’eux.

Ô mes doux orphelins qui savez mon visage,
qui savez mieux que moi la douleur d’être né,
ils me voudraient tenue à quelque heureux présage.
Et bien qu’ils soient déçus ! Je viens vous emmener.

[Gabriel]

C'est bien parce que c'est vous Mon cher Hellian.

[Hellian]

Grand merci, Gabriel !

Dans le registre classique, et plus particulièrement sur le mode romantique, je trouve ce poème d'une facture absolument remarquable. Les verts sont d'une grande fluidité, chargé d'images fortes et quant à la complainte de la Lune, elle prend ici une dimension tragiquement maternelle qui m'a plongé dans une profonde émotion.

Vraiment, bravo !

Quant à l'interprétation, elle d'une subtile sensibilité.félicitations à l'interprète.

[Invité]

Je viens de vivre un instant de vrai bonheur. Très beau poème, sans mièvrerie aucune.
On a tant écrit, souvent mal, sur la lune ! Régal aussi la voix de la comédienne.
Merci Gabriel.

[Phylisse]

Moi qui n'aime habituellement pas les poèmes en version lues, j'ai goûté celui-ci, vraiment.

Il faut dire que le texte est superbe, l'histoire s'écoute et se lit avec un plaisir tel que je m'en vais le réécouter, merci d'avoir si joliment oeuvré Gabriel.

[Phylisse]

"lus" ou "lue" peut-être...

[Gabriel]

Merci à tous. C'est l'interprète justement qui occupe toutes mes pensées. Je lui fais part de vos commentaires, malgré qu'elle soit abominablement loin et peu disponible. Ca lui fera plaisir.

[Rimbaudelaire]

Waouhhh ! Ça coule, ça ruisselle, c'est délicieux, le rythme est excellent !

[Anachrona]

Je suis ; sublime.

[Anachrona]

( l'avis général, j'entends )

[Arielle]

Envoûtant.
Cette lune si profondément humaine a trouvé sa voix et je ne saurais trop remercier la lectrice qui lui donne de tel accents, de si fines modulations. Une communion que je trouve parfaite entre le texte et son interprétation.

[Lucie Fuge]

Sublime de pureté, d'élégance et de fluidité .
Merci pour ce beau moment de lecture .
LF

[Marine]

Ça m'a bouleversée. Je ne peux rien dire de plus.

[Rebecca]

Comme d'hab: du travail ciselé. Avec une belle mise en valeur sonore.

[hi wen]

superbe texte,
je suis moins emballé par l'interprétation. la lecture est pour certaines strophes scolaire, monocorde, dans un soucis d'é-pé-la-tion. la lecture se ressent plus que l'interprétation.
je suis gené aussi par les finales des rimes qu'elle prononce dans une tonalité descendante , alors que je m'attendrais à plus de relief, en direction ascendante.
certains partis pris dans la ponctuation et le rythme, je ne sais pas s'ils vont dans le sens de ce qu'a imaginé l'auteur.

[Philippe]

Bonjour

J'ai préféré le lire, et le relire encore.

Amicalement

Philippe

[Maryse]

Tout simplement superbe!

[Janis]

Impressionnant
(les autres, que je suis allée lire du coup, aussi)
je préfère le lire avec ma voix dans ma tête
mais quand même, c'est beau aussi, la voix, les dessins, les cadrages.

[Contenu sponsorisé]