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Les petits coquelicots

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Message  Calvin Lun 29 Aoû 2011 - 12:12

Je partage le corps avec la nuit. Elle me remercie, Galante. Je lui en donne deux parts pour les yeux, un bout sur la bouche, où je dépose le muscle vidé de son aliment d’étreinte. Oui, le corps est las, déposé au porte-manteau dans un geste négligé. J’esquisse dans un sourire toute la politesse que je suis capable d’exprimer. Je me suis déplacé lentement, de n’avoir plus de corps, entre les gestes et les choses, voulant faire honneur à chacune, puisque je n’ai plus de corps, de l’attention de mon esprit. La matière est cousine de la matière et d’en être ainsi dépourvu j’arrive en pays étranger. J’observe les us et coutumes. De grandes femmes passent, sans le moindre bruit, enroulées dans des étoffes, grands morceaux de lueurs, sinon celui de la mer. Comme j’ai l’air de ne pas savoir où aller, une femme poliment m’aborde, et je m’étonne de voir qu’elle traite avec moi comme on traite avec tous les autres corps. J’aurais voulu lui demander raison de la parenté qu’instruisais entre nous son sourire. Je ne peux parler avec vous, aurai-je aimé dire, et serai parti non sans avoir une dernière fois contemplé son visage. Cependant la femme ne semble pas remarquer mon absence de chair, et par la médiation de son corps, marque la civilité en me regardant dans les yeux, c’est à dire en s’adressant à mon esprit. Sourire. La nuit, voudrai-je lui dire, n’est jamais complète ; il manque à tous les corps de suicidés qui la comblent, les yeux, deux pans de lumière qui ne peuvent loger dans sa profondeur, de voir leurs rayons s’écarter à l’infini. La femme est belle. En parlant je la fixe tantôt à l’œil gauche tantôt au droit, car ses yeux sont pers, et je vais ainsi de gauche à droite et de droite à gauche, dans le sens du cœur. Je crois que le monde, à cet instant, marque pour moi une pause légère, polie. Des colombes (c’est ce genre d’oiseau qui s’ébat dans mon imaginaire) se suspendent aux branches comme l’aveu aux lèvres de l’amoureux. Il m’est impossible de savoir à présent, pourquoi il m’est devenu si nécessaire, madame, de vous étreindre. Ah. J’ai parlé haut. La dame ne se trouble pas, ce qui me trouble au plus haut point. Je m’émeus dans le manège familier des oiseaux. Mais on s’ennuie vite et bien de cette sorte d’enfantillage. Mon imaginaire abandonne le monde comme la nuit la couleur se retire des formes du jour. Alors la femme est là. Je continue la conversation, remue, plaisante. Il me semble que nous nous connaissons, dis-je, et l’empressement du cœur n'arrange rien quand son corps ménage une élégance dont l’expression me ravi. Je prends conscience de mon impertinence, veut m’éloigner, rougit. La dame, me rattrape. Je crois que mon manège l’amuse. Je voudrais lui expliquer. Quoi donc. Elle prend la moue de ceux qui attendent d’être convaincu. J’essaye de plaider mon cas. Je lui explique, que la vie c’est tellement grand, mais un corps tellement étroit, que j’ai essayé de ne plus avoir de corps, pour pouvoir mener plusieurs milliers de vies dans l'imaginaire. Cependant, le stratagème ne fonctionne qu’à moitié, puisque je reste toujours un peu absent à moi-même. Confronté aux autre, j’ai l’impression très aigüe de regarder un autre qui agit pour moi. Ainsi peu de choses m’atteignent. D’où ma maladresse de tout à l’heure. Elle s’est formée dans l’émoi. Je ne sais pas si l’explication convient. Il me semble que la sentimentalité ne pardonne qu’aux enfants et aux femmes. Mais la dame balaye mes châteaux d’un geste de marée. Très bien. Puisque toute ma délicatesse ne lui convient pas, je deviens boudeur, et d’une pensée je redescends sur terre, retrouve mon corps, m’incarne. Une légère nausée me vient. Je sens un bouillonnement dans le creux du ventre, que j’identifie comme venant de mon estomac. Mes poumons me font la respiration difficile. Aux épaules, une légère douleur. Mais tout cela se dissipe, dans l’extase molle et le sang épais qui caractérise la chair. Un corps, quoi. On peut à présent me prêter un nom, m’attribuer un caractère et des attitudes, enfin tout cela que la matière en figeant par la contemplation de l’autre objective et me force à tenir compte, de, mais moi je me prends les pieds dans ce bardas difficile et trébuche. Je deviens franchement maladroit. La femme me regarde. Ma chair m’informe du fait suivant : elle me plait. Je me mets en tête de la séduire, ce que je fais très mal. Précaution inutile, cependant : elle semble avoir déjà en tête notre rapprochement, ce qui ne m’étonne guère, puisque du peu de filles que j’ai eues toute semblaient décidées comme par avance et malgré toute mon idiotie à honorer mon corps de leur étreinte physique, ce qui m’a toujours fait conclure à un certain mauvais gout de leur part, à moins que ce ne soit une sorte de blague, ou une franche folie. Enfin. Les choses donc se poursuivent avec d’avantage de précision. Nous allons dans la chambre d’amour. Puisque j’ai besoin, pour traiter de ce genre d’affaire, de mon corps, je me borne à remarquer l’étrange disposition de la chambre, dont le lit n’est éclairé qu’aux oreillers par la raie de lumière que souffle l'unique fenêtre. J’essaye, malgré tout, de poétiser. Je dis que la chambre, est une sorte de mer, et que le lit, la barque amoureuse, etc, mais la fille conclut mon essai par le sourire qu’on adresse aux enfants, et puis après ! Je ne devrais plus avoir besoin de ce genre de chose : maintenant, j’ai vingt ans. Et devrais pouvoir me satisfaire du réel tel qu’il se présente.
Faire l’amour, ça ne m’amuse pas. Je trouve toujours ça rigolo, au début, de faire « oh, ah, ih » et de frotter dans ce geste bizarre deux bout de corps, mais comme je reste dans ces ébats, moins sérieux que le plaisir, immanquablement, je me lasse. La fille, est quand même bien faite, et par une concentration je parviens à honorer cet échange de la manière convenue. Elle me demande si c’était bien. Je ne m’en étonne pas. Je ne peux m’étonner qu’une fois par corps. Mon étonnement est parti dans ses yeux. Je les contemple. Ca ne la gêne pas. Ce qui sort de sa bouche, m’indiffère. Puisque j’ai jouis, me voilà mis au rang de plusieurs millions d’hommes, et surtout de la bonne dizaine qui ont déjà du jouir en elle, que j’imagine, et je lui demande de me les décrire. Elle prend ça pour de la jalousie. Elle se trompe. Chez une fille, j’aime la pensée de ses amants. Nous formons dans mon étreinte une charmante communauté. Et si je voudrais dépuceler une autre, c’est pour précéder tous le suivants dans mon geste fondateur. On couchera mon souvenir sur son corps excité. Mais suffit. La fille s’étire, câline, odore. Je respire une grande bouffée de chair, et trouve le sommeil. Je suis amoureux.
Ce que j’aime dans le sommeil, quand je le trouve, c’est de le quitter, parce qu’à son sortir je reste toujours dans l’état du songe, un assemblage de vapeurs au caractère de regret. Le matin c’est délicieux, parce que dans cette lumière on s’agrippe à la nuit, qui écarte de ma pensée le jour et ses lourdeurs futures. C’est le salut final, comme une danseuse se courbe une dernière fois, pour clore le théâtre, fermer les portes du songe, rappeler les spectateurs à leur corps direct qu’ils promèneront avec, dans le ventre, la faim d’une autre grâce. L'aurore est précisément un crépuscule. L’aube n’est la promesse de rien, sinon de la nuit à venir.
Je sais que si je reste avec madame je n’aurais pas loisir de songer tranquillement à cet état, et devrais repousser à plus tard mes rêveries pour accueillir à nouveau le sentiment du corps. En temps normal je l’eus embrassée et serais resté, pour encore, profiter de cette chair, étendre le bras du rêve jusqu’à ce que ses ongles griffent midi. Mais ce matin, je me sens mal. Peut-être suis-je malade. Alors je pars, et je regagne chez moi, léger, puisque j’ai bien vécu, étant donné que j’ai fait l’amour, constat dont l’objectivité sonne toujours en forme de plaisanterie,puisque je ne sais précisément qu’en penser. Mais très vite, il me vient une sorte de mélancolie. Je prends peur : puisque j’ai vécu, je n’ai pas pu laisser les autres vivre à ma place, j’ai ramené le monde entier au jeu étroit de ma chair, et pourtant c’est cela avoir un corps, c’est cela, vivre. Alors je retrouve la solitude, et l’apparente politesse de son silence, qui me fait pris dans son étreinte toujours balancer à son compte entre l’expression d’une grande noblesse ou d’une tragique idiotie.

Calvin

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Message  drayano Lun 29 Aoû 2011 - 15:16

Le texte s'étire mais il ne se passe rien; si vers fin; mais le lecteur est déjà mort d’ennuyé. Il faudrait aérer les paragraphes.
Bravo pour l'effort d'écriture, malheureusement le texte ne m'a pas assez emballé.
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Message  Calvin Mer 31 Aoû 2011 - 19:09



Peut-être que toute forme d’existence n’était pour moi condamnée qu’à se désagréger en malentendu. Tant pis. Comme le personnage qui au fil du récit s’étend lascivement sur plus de pages, je voyais cette fatalité prendre forme, et libérer sa chevelure, voilant ainsi tout ce qui l’attache à moi-même ; ce qui de la cause est manifeste. Elle peut voguer, cette raison, se laisser porter par le courant comme une épave heureuse. Et si souvent on m’a reproché [...] mon inconstance, j’y voyais le plus noble de mes défauts ; tout bruit, tout craquement, feulement, toute manifestation de la vie, se trouvaient selon mon humeur figurée dans un jeu de miroirs déformants. N’eusse été les autres, j’aurais consacré mon existence à comprendre ces mécanismes intérieurs. On m’a reproché mon opportunisme, on m’a dit que j’agissais sans plus de souci de la cause que de la raison ; et si effectivement j’agissais sans considération de l’acte, c’était uniquement pour comprendre dans son aboutissement ce qui avait fait sourdre de tels prémisses. Toute parole devenait à la fois matière et outil ; je n’avais pas de pensée propre ; mes figures de raisonnement étaient volatiles, et c’est par la dialectique que je me construisait en miroir qui par les paroles de l’autre allait se cristallisant. De là il me devenait aisé de faire croire au monde que j’étais son frère, son double, abandonnant tout orgueil pour me hisser ou descendre au niveau des fleurs. Comme l’abeille le pollen, j’allais butinant chaque bouche où la corolle libérait les paroles dans ces emportements fleuris. De chaque passion suscitée, je savais en distiller l’essence pour en obtenir une liqueur de mélancolie. Il n’y a pas plus triste que la brise qui effleure les chose a défaut d’empoigne ; mais bientôt dans cette désillusion, où je me comportais avec moi-même comme avec une de ces fleurs, je voyais avec quelle facilité il m’était permis de souffler sur les gens, de les faire voguer à mon seul grès. Qu’il suffisait que je gagne leur confiance pour les voir aller toutes voiles dehors. Je ne réussi pas à chaque coup ; le nombre important de paramètre dont je devais tenir compte, la densité de ces mers et l’appétit des écueils, me firent me briser plus d’une fois contre les falaises. Mais à force de pratique, vint le temps où je devins expert en navigation : et je pouvais distordre chaque être avec les pinces du sentiment. De mon inconstance qui m’apparaissait comme axiome, et de la volatilité même de mes actes et de ma pensée, j’en vins à véritablement devenir vent pour moi-même, et d’engendrer et de guider chaque émotion, incarnant la cause comme l’effet. Je ne tardais pas à élargir ce mode d’agir au monde des phénomènes : les sons qui me viennent, la main du vent dans les feuillages, tout témoigne de la concentration de l’univers dans un coin de ma chambre. Et d’avoir la vue si dense, j’en ai nié les contours. Chaque objet que je regarde, je l’élis ; cet homme qui pisse contre un mur, dans le printemps tiède où le bruit liquide à la texture de la mousse d’arbre, vient se refléter dans mon cerveau dénoué de vue d’où, de cet état aveugle, je l’élève. Je connu l’ivresse du non-voyant. Rien ne m’excitais plus que l’abordage de terres inconnues : paysages ou nouveaux êtres. Je m’imaginais réceptacle, où le sensible était appelé à reposer, à se déformer, pour à mon contact se modifier et disparaître. De là vinrent ces années de demi-solitude, où je [...] me complus lascivement.

J’en étais là dans mes pensées quand, sans prévenir, le printemps entra subitement dans le monde. Il défit les laines pesantes au dos des femmes et, d’un geste de la main, y disposa des fleurs. C’est alors que je me dis : décidément, Jack, il est temps de partir.

Trois jours plus tard, je reçu un télégramme pour m'annoncer que maman est morte.

Je ne me laissais pas abattre par mon manque d'abattement. Il me fut difficile, en effet, de feindre les pleurs, tant il est vrai que je détestais ma mère ; mais j'ai beau avoir le corps petit et laid, il est néanmoins assez large pour accueillir, sous le regard enrhumé de mes ancles et de mes tontes, un certain paraitre de politesse. C'est à l'enterrement que je rencontrais Cindy. Elle n'était pas spécialement belle, sinon assez vulgaire, mais sa façon de mâcher vigoureusement de la gomme avec la négligence la plus totale à l'égard d'une quelconque élégance me fit déduire de cette tête qu'elle était en plus d'être vide, parfaitement insouciante, comme cela va au reste souvent ensemble ; et je voyais dans ses mœurs une primitivité qui n'est pas sans rappeler l'idée unique que cultive le nourrisson à l'égard du sein maternel. Elle avait les mamelles généreuses d'une belle vache de la pampa : j'éprouvais donc à son égard une curieuse forme d'affection. Nous connûmes rapidement le point d'orgue de notre relation, l'amour physique qu'elle m'offrit, dès le premier soir, de sa bouche, à l'arrière du van qui nous ramenait du crématorium. C'est ainsi que pour la première fois de ma vie, moi, Jack S. Ribbentrop, m'épris d'une femme.

En effet, avant ce jour, le mot femme ne provoquait en moi pas plus d'écho érotique que ceux de vache, pygmée, ou bien crayon. Bien que le crayon par sa forme fière et longiligne ne fut pas sans me provoquer quelque émoi, quand je regardais mon camarade John T. Blumenberg tailler le sien qu'il avait solide et la mine épaisse (un B2) avec les gestes langoureux qui sied à l'ennui éprouvé dans une salle de classe de mathématiques. Vous l'avez compris, j'ai toujours été une tante, un pédé, une pédale, un gay, enfin un membre de la communauté homosexuelle. Les corps d'éphèbes beaux, flamboyant sous la ligne lunaire, je les imaginais allongés, alignés les uns à côtés des autres, en tenu d'Adam, caressés aux lèvres par le dos délicat des myosotis, cachés de tous sinon mon regard par l'écran de collines que formait à l'horizon, la vigueur montagneuse de mon désir. Rapidement alors j'appris à peupler mes songes. Je devenais expert dans la formation des fantasmes, pouvant à volonté faire surgir du néant auquel ils appartenaient nombres de membres, d'épaules, de bras, de visages dont j'empruntais la bouche à tel garçon, le nez à tel autre, pour les assembler ensemble et modeler ainsi, dans la moiteur de chaque nuit, une légion d'amants qui m'étaient tous dévoués et fidèles. Comme je n'avais pas le corps beau (le corbeau), j'aimais des mâles, comme des animaux, où ne se reflétait dans le jeu de leur muscle que l'éclat du nerf qui se tend et de la membrane qui se bombe mais rien, absolument rien, qui n'eut pu faire douter qu'ils étaient pourvus d'une âme ; ainsi je tirais vengeance contre mon existence.

Déboulant en trombe sur la cinquième avenue, évitant les autres véhicules comme un moucheron les gouttes de pluie, j'enfonçais la cassette dans le lecteur de cassette et fixa la numérotation à la quatrième piste de lecture. Je ramenais Cindy à la maisonaprès que nous nous soyons arrêtés au fast-food du coin où elle commanda un gros tas de

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Message  Calvin Jeu 1 Sep 2011 - 18:09

Depuis enfant j’étais frappé de ce que les choses me semblaient manquer d’une absolue forme de signification et d’ordre. Alors que ma naïveté naturelle me disposait, dans le premier geste, à accepter telles qu’elles se présentaient toutes choses, je ne tardais pas à remarquer dans les toiles étalées à ma vue les craquelures, les manquements au relief, toutes ce qui de détail devient la guêpe bourdonnante vous empêchant jamais de vous fondre dans la contemplation du paysage. Il me semblait que, malgré moi, l’univers me rejetait. Je ne lui en tint d’abord pas rigueur. Je cherchais l’explication dans une mauvaise complexion de ma nature ; dans cet équilibre précaire de naïveté et de paranoïa qui caractérisait mon rapport aux êtres, et qui - je le voyais bien - s’étendait aux choses. De ce qu’il me paraissait impossible d’appliquer au réel ses significations communes, que je devinais chez les autres, j’entrepris de rétablir cette absence de mon propre effort : je dardais mon œil, comme le muscle se gonfle de sang. Je voulais de l’inerte faire crier l’être sous son masque usité, faire émerger du néant auquel ils appartient ce ruban qui relie toutes choses, leur offrant sa cohérence, afin que le déroulant je puisse à mon tour exécuter sur le parquet souple du sens ces quelques pas de danseuse. J’interrogeais une abeille, une fleur, un clair de lune ; une feuille liserée de pluie et un lac gorgé d’étoiles. Je ne délaissais pas les choses obscènes ; les ordinaires ; les sordides ; rien ne devait échapper à ma soif de savoir, qui ne voulait retourner la peau de l’univers que pour le contenir entier. Mais jamais je ne fus capable de plaquer aux objets ce sens que je croyais pouvoir déceler chez les autres. Jamais je ne put de cette même intuition découvrir ce que je nommais l’agencement naturel du monde... Tout se passait comme si ce qui avait finit par devenir mon expérience personnelle fit jouer de secrètes connivences. Tout me devint familier ; me rappelait moi. Très vite d’une réalité vide de sens je fus confronté à un insupportable miroir. Les significations s’élançaient de mon cerveau jusqu’à la gorge du monde, sans laisser place à la moindre trace d’objectivité. Destin et hasard devenaient synonyme ; prescience et réminiscence ; moi et autrui. Je perdais peu à peu le sens des contours de mon être. Je le voyais se prolonger, plonger ses racines au vent qui caresse et qui brise, à la peau incrustée de ligne lunaire, au moindre feulement du monde, au moindre regard, à la moindre lèvre de femme ; il semblait se jouer pour moi un théâtre importun où je tenais tout les rôles, et j’exposais au monde cette pièce dérisoire, sous les directives d’une mise en scène qui m’était familière bien que je ne l’eusse pas choisie. Partout où j'allais je ne rencontrais que des organes, des fonctions orphelines de ma pensée ou de mon esprit. J’en vint alors à accorder une importance mortelle à toutes choses. Et me reconnaissant sans pouvoir m’atteindre, incapable de faire émerger quelque chose aux reins solides que je pusse empoigner, tout me faisait crier à mourir pour une attention, douter à jamais du sens d’un amour. Chaque matin annonçait ce jeu de hasard ; au soir, je savais que j’avais joué seul.

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