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En quel honneur ?

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Message  ptipimous Lun 29 Aoû 2011 - 20:09

Maman se meurt.
Je suis là, dans cette chambre au papier peint fané, à lui tenir sa petite main frêle et diaphane. Ses doigts légers ne pèsent rien. Sa peau est si mince, si fragile que je n’ose serrer de peur de la déchirer, la froisser. Sa tête d’oiseau repose sur l’oreiller qui semble immense. Sa tête sans cheveux.

D’aussi loin que remonte ma mémoire, je n’ai jamais vu ma mère avec des cheveux.
Enfant, je n’en ai pas été tout de suite étonné. Les petits enfants sont comme les chiens, ils aiment sans condition. Pour moi, elle était la plus belle.
Elle a une collection incroyable de foulards et chapeaux, non pas pour cacher son crâne mais plutôt pour l’habiller, comme n’importe quelle autre partie de son corps. Je l’aidais à choisir, laissais filer entre mes doigts la soie douce des carrés Hermès, coiffais un béret et devenais berger ou un chapeau cloche que j’attribuais aux cloches !
Mon père n’était pas de saison, et vraiment pas la question. Ma curiosité un peu récurrente tombait non pas sur un champ d’hostilité, mais plutôt sur une souffrance tellement vivante que je renonçais à chaque fois, à pousser plus loin mes investigations.
Il arrivait que maman se fasse des amis. Des hommes qui, comme moi, ne voyaient que ses yeux lumineux, d’une couleur de feuille rousse d’automne, quand les arbres ne renoncent pas encore totalement à leur parure, sa peau sans défaut et sa bouche sensuelle qui avait beau se marquer de rides, ne perdait pourtant jamais la moindre parcelle de pouvoir du désir qu’elle inspirait.
Mais la routine.
Pourquoi s’acharne-t-on toujours à détruire la magie ? Pourquoi voulons nous toujours savoir pourquoi ? Découvrir le truc ?
La question finissait par venir puisque jamais maman ne s’étendait sur le sujet.
À moi, elle narrait des contes fabuleux d’origines diverses où ses cheveux tombaient pour de multiples raisons. Un jour, elle venait de Vénus, une autre fois, elle les vendait pour me combler à Noël, puis elle partait d’un grand éclat de rire devant ma mine déconfite.
Mais à eux, elle racontait quelque chose. Dès que j’entendais les murmures contenus d’une discussion dans la cuisine, je savais qu’elle l’avait fait. Je savais aussi que ces murmures iraient en s’emplifiant, jusqu’à rupture et porte close, point de non retour.
Je n’ai jamais considéré un de ces hommes comme un père potentiel. Car je savais. Je savais que les murmures dans la cuisine viendraient tôt ou tard. Et la suite logique, implacable.

Un jour, à l’école, une nouvelle fit son entrée. Elle avait un foulard comme maman. C’était une petite fille timide et discrète, ses grands yeux parlaient d’ennui, de fatigue, de résignation. Il m’a fallu une kyrielle de petits pas pour parvenir jusqu’à elle, une longue route de sourires sans question, de goûtés sacrifiés et de coups de poing dans le nez des enfants plus grands qui déjà rejettent ce qui leur semble étrange. Elle m’apprit le cancer, l’hôpital. La peur alors de son absence m’empêchait d’en parler à maman. Maman sans cheveux avait donc un cancer.
Mais elle n’allait jamais à l’hôpital comme Jérômine. Peut-être pendant que j’ânonnais péniblement mes conjugaisons à l’école ? L’angoisse m’a dévoré ce qui m’a semblé longtemps. Mais Jérômine avait un teint de cire, était malingre, souvent absente plusieurs jours de suite. Pas ma mère. Mon angoisse se calma.
Jérômine mourut et la vie reprit son cours.
L’école m’apprenait toujours plus, le nécessaire et le superflu. Me venaient alors des hypothèses toujours plus nombreuses et farfelues pour tenter de comprendre ce crâne lisse, toujours rasé de frais.
Impossible d’imaginer qu’elle n’avait tout simplement PAS de cheveux. Le soin que ma mère mettait à se raser la tête à chaque douche témoignait du contraire. Quel mystère, ces cheveux ! Est-ce qu’ils étaient clairsemés comme le pelage d’un chien galeux ? Ou d’une couleur impossible : bleus ou verts et prouverait ainsi son appartenance à je ne sais quelle peuplade extra-terrestre ? Dans mon imagination délirante, elle devenait prêtresse égyptienne, athlète de haut niveau, nonne, agent secret !

Beaucoup plus tard, la cible de mes interrogations changea. Je m’attaquais au sujet paternel. J’étais déjà plus âgé, il était donc plus difficile pour elle d’éluder le sujet d’une plaisanterie qui aurait provoqué un éclat de rire, emportant avec lui mon instant de curiosité. Elle avait à faire à un adolescent, solidement campé sur ses jambes, qui ne cillait pas sous son regard réprobateur, et qui avait une revendication assez légitime : qui était l’auteur de ses yeux bleus ?
Ma mère a dit alors «passade»... «histoire» puis elle la qualifia de «belle».
Elle me décrivit mon père comme un homme calme, assez grand, au sourire irrésistible et aux éclats de rire qu’elle retrouvait dans les miens. Je sus qu’elle l’avait aimé, très fort. Elle n’avait presque rien de lui, pas une seule photographie. Elle disparut dans sa chambre et revint avec un mouchoir soigneusement plié qui sentait encore l’eau de Cologne. Je m’emplissais de l’odeur tout en sachant que je pouvais la trouver chez n’importe quel parfumeur. Je n’en sus pas plus. Je n’en sus jamais plus.
Maman était fille unique. Ses parents étaient morts durant la guerre, aucun cousin connu, cela réduisait ma famille à deux personnes : elle et moi. Très peu de choses du passé nous avaient accompagnés lors de nos différents déménagements : trois photos de ses parents et de la maison de son enfance ; elle n’avait pas un seul souvenir d’elle, petite.
J’ai bien sûr poursuivi mes investigations sans lui en parler car je voyais bien que le sujet restait sensible. Un extrait de naissance précisait que mon père était déclaré inconnu. Il ne m’avait donc pas reconnu mais m’avait-il connu ?
Chaque fois que je devais poser une question à ma mère à ce sujet, une angoisse sourde me tordait l’estomac mais je trouvais tout de même le courage d’aller au bout. La réponse fut : non. Quand j’eus l’âge et le culot de demander pourquoi il était parti, est-ce qu’il était mort ? Un mur se dressa devant moi. Un mur plus solide que tout, que le temps qui passe, que mon désir de savoir, un mur de chagrin s’élevait que même mes colères ne parvenaient pas à faire trembler.
Finalement, lassé, fatigué de cette lutte qui abîmait ma mère question après question, je laissais tomber. L’amour qu’elle me donnait sans faillir, l’attention de tous les instants, le soutien et la confiance qu’elle avait en moi me comblaient bien assez. Après tout, cet homme avait disparu de nos vies, tant pis pour lui. Cette histoire était la leur. Je n’en étais qu’une conséquence, une pièce rapportée. En poussant plus avant, je risquais bel et bien d’endommager mon seul pilier familial. Et je me retrouverais seul, sans ce que j’avais, connaissais et aimais et pas plus avancé sur le reste.

La vie passa, pour elle et moi. Notre toute petite cellule familiale, plus close qu’un monastère ne permit pas l’entrée de nouveaux membres, ni pour elle, ni pour moi. Bien sûr, maman eut de nouveaux «amis», j’eus de mon côté quelques jeunes filles curieuses mais aucune n’eut la patience d’attendre que je m’ouvre plus que le strict minimum requis pour avoir quelques instants de plaisir.
J’étais donc seul aujourd’hui, assis près d’elle, sa main dans la mienne à écouter ses dernières respirations.

Maman chassa le docteur en le remerciant de ses efforts. Je le raccompagnais jusqu’à la porte, tâchais d’excuser la rudesse de l’adieu.
Quand je revins près d’elle, elle avait sorti de je ne sais où un morceau de journal, froissé qu’elle refusa de me donner encore.
Elle me parla tout doucement et moi je n’osais pas respirer de peur de louper le moindre mot qui sortait de sa bouche. Elle termina par : «Est-ce que toi, maintenant que tu sais, tu veux encore m’embrasser ?» Je me penchais sur elle et je la pris dans mes bras. Je l’embrassais de toute ma tendresse, ma main soutenait son crâne nu, si fragile, comme la tête d’un nouveau-né. Je reposais enfin son corps, abandonné d’elle.
Assis de nouveau sur ma chaise, j’écoutais le silence revenu. Ce qu’elle m’avait raconté était passé dans la chambre en hurlant. Durant ces quelques minutes j’avais vécu la fureur, la terreur et puis tout s’en était allé, jusqu’à son souffle.
Quand je retrouvais mon calme, je dépliais le morceau de journal qu’elle tenait encore dans sa main. Il y avait une photo de ma mère. Le papier était jauni, le cliché mauvais et piqué de grain mais je la reconnaissais sans peine, au milieu d’une foule vociférante, une croix gammée peinte sur le haut de son front fraîchement tondu et un ventre si gros qu’il semblait l’entrainer vers l’avant, décoré lui aussi du svastika.
Je me suis levé et j’ai ouvert la fenêtre pour laisser entrer le chant des oiseaux.
Dans la salle de bain j’ai regardé une dernière fois mon visage tel qu’il était, ce jour où j’appris qui était mon père et pourquoi ma mère se rasait la tête depuis soixante ans, refusant de laisser «les autres» oublier l’infamie commise. Puis j’attrapais le rasoir et perdis ma tête d’avant, ma tête d’ignorant des jours heureux avec mes cheveux qui tombaient dans le lavabo.
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Message  Invité Lun 29 Aoû 2011 - 21:08

Même si l'histoire m'a parue peu vraisemblable, elle est tellement belle que j'y suis entrée sans objection !

Rien à dire sur l'écriture ni sur la construction : nickel.

J'ai juste regretté que Jéromine s'efface si vite sans laisser plus de traces...

Un bon texte sensible sur un sujet sensible !

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Message  Rebecca Lun 29 Aoû 2011 - 22:51

J'ai été kidnappée , obligée de lire jusqu'au bout. Un réel talent d'écriture...
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Message  ptipimous Mar 30 Aoû 2011 - 0:07

merci beaucoup, beaucoup.
Mais tu as raison Colline toute cette histoire est invraisemblable. Que l'on ait pu défigurer des filles de vingt ans parce qu'elles étaient tombées amoureuses, qu'on les ait obligé à fuir le lieu de leur naissance, de leur enfance, souvent avec des enfants en bas âge pour éviter que ces derniers se fassent lapider par les enfants des collabos planqués et non jugés, eux au sein même de leur école républicaine, c'est totalement invraisemblable.
Que des hommes, des voisins, des commerçant du village soient devenus des hordes hurlantes en uniforme aient pu détruire, piller et brûler des magasins, des lieux de culte et que le gouvernement d'un pays ait non seulement autorisé cela mais en plus ait réclamé que les victimes de cette nuit de cristal paient les dégâts eux-même, c'est une utopie. Qu'on ait pu enfermer, torturer et tuer des gens sans aucune raison valable, qu'on ait marqué des enfants comme des bêtes (que l'on ne devrait même pas traiter ainsi, d'ailleurs) et qu'on les ait déportés pour servir de champs d'expériences à des médecins hystériques, c'est un rêve que l'on ne devrait pas faire. Que la police française ait tenté de vider Paris de ces 15 000 personnes, répertoriées comme des criminelles, que ceux qui sont censé nous servir et nous protéger puissent ainsi nous tomber dessus uniquement parce qu'elles en ont reçu l'ordre, sans plus de réflexion et que pour toute défense à l'accusation elle puisse répondre "c'est pas moi, c'est l'autre..." ce n'est qu'un mauvais film de science-fiction. Mais demain, cela peut être nous : les blonds, les petits, ceux qui chaussent du 43 ou encore une fois le métèques, les bazanés, les bronzés ou les yeux bleus... qui sait ?
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Message  Invité Mar 30 Aoû 2011 - 0:37

je pense pas que le sujet soit sensible, il est complexe. Par exemple la punition de rasage de la tête n'est pas sortie du cerveau d'un original, mais de la tradition juive. Je n'ai pas été envouté par la narration qui sait parfaitement le complexe de l'histoire et avance à petits pas pour ne pas s'emporter trop loin, pour ma part je vais prendre le texte pour un support de réflexion sur ces périodes de l'après ( les règlements, vengeances, erreurs, manipulations etc ). C'est d'actualité ? oui.

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Message  Invité Mar 30 Aoû 2011 - 12:35

Je ne parlais évidemment pas des abominations que tu énumères, mais du fait que cette femme se soit rasé la tête pendant toute sa vie, par fierté.

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Message  ptipimous Mar 30 Aoû 2011 - 15:52

Excuse moi Coline mais c'est vrai que depuis mon retour de Pologne, j'ai beaucoup lu autour du sujet et de tous les dommages collatéraux, je suis un peu chaude ! Je ne sais pas si elle se rase par fierté ou par désespoir, les humains ont des comportements si... imprévisibles parfois. Je sors du film de Lars von Trier et en matière d'irrationnel, c'est plus que balaise ! C'est toute la beauté de l'humain et peut-être la seule qui lui reste : être dans le profond de son être et de son émotion. Même sur une durée aussi longue. Après tout, des mecs qui épousent Jésus et passent leur temps à discuter avec une croix en bois... y'a matière, non ?
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Message  ptipimous Mar 30 Aoû 2011 - 16:01

Et pour répondre à Panda, il est effectivement une histoire de rasage chez les femmes juives pour qu'elles portent ensuite une perruque (je ne ferai aucun commentaire sur cet aspect extrêmement rationnel d'un comportement.)
Mais par contre je ne pense pas que les petits juges de la libération aient eu assez de culture pour y faire référence, et d'ailleurs par quel moyen alambiqué ? Je pense qu'on leur rasait la tête parce que la chevelure des femmes a toujours été considérée comme un élément de séduction. C'est juste une histoire d'humiliation. Et quand ces dernières n'avaient le svastika que peint et non tatoué sur le front, elles avaient encore de la chance.
Par contre, que dire des nombreux hommes qui ont eu des relations avec des femmes allemandes (nombreuses à Paris par exemple) ? A ma connaissance pas un n'a été tondu, ni traité de pute ou de je ne sais quoi d'autre. Pourquoi ?
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Message  Gobu Mar 30 Aoû 2011 - 21:06

ptipimous a écrit:
Par contre, que dire des nombreux hommes qui ont eu des relations avec des femmes allemandes (nombreuses à Paris par exemple) ? A ma connaissance pas un n'a été tondu, ni traité de pute ou de je ne sais quoi d'autre. Pourquoi ?

Là désolé mais faut que j'intervienne. A ma connaissance à moi, il y a eu très peu de français qui ont couché avec des Allemandes sous l'Occupation pour une raison très simple : il y avait très peu d'Allemandes en France à cette époque - à l'exception de celles, juives ou pas, qui fuyaient le régime nazi et se cachaient, mais je ne crois pas qu'on aurait poursuivi quelqu'un pour ça à la Libération ! En fait, il y avait en France plus d'un million de soldats allemands ou assimilés, mais seulement sept mille auxiliaires féminines (les fameuses souris grises) et je peux te garantir qu'elles étaient tellement surveillées qu'il y avait peu de chances qu'elles puissent faire fick-fick avec un français, fût-il collabo jusqu'à la moëlle. En fait, les nazis proscrivaient les relations sexuelles avec les peuples soumis, et ceux parmi eux qui avaient des maîtresses françaises prenaient de gros risques. Même les bordels étaient -normalement - interdits à la troupe, même si les officiers, eux, se privaient moins. Mais on sait ce que c'est : quod licet jovi etc... Mais ça va plus loin. Il ne faut pas oublier que la doctrine nazie en ce qui concerne la femme allemande était très stricte, les 3 K : Kinde Kirche und Küchen (Enfants, Eglise, Cuisine) Ce qui explique que contrairement à beaucoup de récits croustillants, il n'a jamais existé de femmes SS (la SS était un corps exclusivement masculin) et que le seul corps de l'armée où des femmes étaient tolérées en nombre était le service de Santé, et aussi quelques standardistes et secrétaires au sein du SD. Encore étaient-elles archi-surveillées et n'avaient pas le statut de membres de la Wehrmacht ou de la police, mais seulement d'auxiliaires. A mon avis, et sauf exception rarissime, ces histoires de français qui se seraient envoyé des allemandes sous l'occupation relèvent surtout de l'affabulation masculine... après la victoire !

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Message  ptipimous Mer 31 Aoû 2011 - 9:30

merci Gobu de ta réponse qui ouvre une discussion toujours passionnante. Je voudrais tout de même préciser que la moitié des bordels parisiens étaient réquisitionnés par les allemands (conf : Paris dans la collaboration) et qu'ils leur étaient réservés pour la troupe et les officiers.
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Message  Invité Mer 31 Aoû 2011 - 12:24

Je n'entrerai pas dans les arguments circonstanciés ci-dessus par incompétence. Pour ce qui est de mon ressenti face à ce récit, je peux dire en revanche qu'il est très prenant, très émouvant.
( les deux adjectifs se rapportent au récit, la phrase est mal construite mais vous aurez compris !)

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Message  Gobu Mer 31 Aoû 2011 - 13:34

ptipimous a écrit:merci Gobu de ta réponse qui ouvre une discussion toujours passionnante. Je voudrais tout de même préciser que la moitié des bordels parisiens étaient réquisitionnés par les allemands (conf : Paris dans la collaboration) et qu'ils leur étaient réservés pour la troupe et les officiers.

Oui. Mais ils ne l'ont fait que pour éviter, justement, que leurs soldats fricotent trop avec les petites französichen fraülein en toute illégalité. Il faut reconnaître que quand on doit gérer le quotidien de plus d'un millions de militaires (ou assimilés) dont la plupart sont de jeunes gens pétant de santé et bourrés d'hormones, il n'y a pas trente-six solutions : c'est soit le lupanar, soit la liberté de fôlatrer avec l'autochtone. Le pouvoir nazi étant par principe hostile à toute fraternisation sérieuse avec la population locale (sauf dans un objectif de propagande ou lorsque l'intérêt national était en jeu) le Haut Commandement a fini par se résoudre à officialiser le recours à la main d'oeuvre tarifée. Ce qui n'empêchait pas, naturellement, les fraternisations sauvages.

Le rôle des maisons closes (à l'époque parfaitement légales et ayant pignon sur rue) sous l'Occupation a d'ailleurs fait l'objet d'une prolifique littérature. Elles reflétaient au centuple les contradictions de l'époque, leurs animateurs, leurs pensionnaires et leur clientèle ayant à la fois un pied dans la légalité et l'autre dans l'illégalité. Elles furent tout autant le repaire des pires crapules collabos (on pense, entre autres, à la bande de la rue Lauriston, la sinistre équipe d'auxiliaires du SD dirigée par l'ex-inspecteur Bony et le truand Lafont) qu'un refuge pour nombre de clandestins cherchant à se dissimuler à l'Occupant. Vivier irremplaçable d'informations pour toutes les polices qui grenouillaient en France, elles ont aussi permis à la Résistance de se procurer de précieuses informations lâchées sur l'oreiller par des responsable allemands à la vigilance engourdie par la bonne chère, les vins fins et le savoir-faire de leurs pensionnaires. Enfin, elles étaient un des principaux centres des combines de toute sorte qui florissaient en ces temps de pénurie extrême, depuis le marché noir des produits alimentaires jusqu'au trafic de marchandises stratégiques ou de faux papiers. Le célèbre trafiquant de métaux Joanovici n'hésitait pas à y tenir table ouverte pour traiter ses affaires, autant avec l'Occupant et ses affidés qu'avec les émissaires de la Résistance. Il faut dire qu'il arrosait avec une égale libéralité aussi bien les pires tortionnaires nazis que la police de Vichy et les organisations résistantes qui se développaient en son sein, ce qui lui valut à la Libération, entre parenthèses, non seulement d'échapper au poteau, mais même d'être décoré par le préfet de police en personne pour services rendus à la Patrie !

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