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Je me promenais innocent une après-midi

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Kilis
Infinitive
Alex_41
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Je me promenais innocent une après-midi  Empty Je me promenais innocent une après-midi

Message  Alex_41 Sam 15 Oct 2011 - 0:10

Je me promenais innocent une après-midi dans la vaste plaine cernant mon lotissement pavillonnaire, lorsque soudain, je me souvins, en un éclair effrayant de fulgurance mentale (lorsqu'une image vous vient à la face, vous frappant, vous blessant, vous renversant, alors même que vous vous trouvez dans une position peu propice à ce genre d'acrobaties involontaires, comme, par exemple, dans la rue de votre lotissement, ou bien dans une baignoire, ou dans tout autre espace fréquenté ou exigu, voire les deux, où l'affolement bruyant et la chute brutale sont, entre gens de bien, entre gens civilisés, à proscrire) qui n'a eu d'égal, je crois, chez aucun autre être doué de mémoire, et n'en aura probablement jamais. L'évocation d'un seul Mot, pourtant commun, réussit donc à me jeter dans un état second, entre la démence et le ridicule, à la plus grande peur des gens de bien, des gens civilisés, et à la plus grande hilarité de mes voisins habitués à ce genre de turpitudes, malgré l'excellence, il faut bien le dire, de la réputation de notre lotissement. Ce Mot qui fit frémir tant de générations depuis l'Antiquité était : "Apocoloquintose." Je tremble de tout mon être rien qu'en traçant ces quinze lettres à la puissance mystique, certes singu-lièrement pures, ou même deux par deux, ou même trois par trois, ou même quatre par quatre, ou même dix par dix (mais pas plus, car après, l'éclair a tendance à ressurgir), mais bien maudites de par ce nombre maudit (quinze) et dans cet ordre maudit. Pourtant, si l'on réfléchit bien, on peut s'apercevoir que je semble jouer de malchance : si en effet il y a, comme on le raconte, vingt-six lettres dans notre alphabet, et que, comme j'en suis cer-tain, il y a quinze lettres dans le Mot, nous pouvons légitimement en conclure - et je suis certain que personne de bien, que personne ne civilisé ne viendra ici me contredire - qu'il y avait une chance infime (disons, une sur trois cent quatre-vingt-dix) pour que cet éclair apparaisse en toute sa fulgurance désormais familière à vos yeux comme aux miens. Mais bref. Le Mot ressurgit et d'horribles souvenirs s'enchaînèrent : je vis l'abjecte quinquagénaire brune à la santé (autant physique que mentale) déclinante me reprocher devant la haute assemblée de ne pas savoir prononcer trois fois de suite le Mot sans réussir sur la longueur à conserver une élocution sublime, je vis l'infâme H. prononcer quinze fois de suite le Mot sans à aucun moment perdre son élocution sublime, je vis l'idiot du lotissement à ma poursuite en essayant - étant idiot, il n'y arrivait pas - de me jeter ce Mot - il savait que je l'abhorrais - à la face, je vis l'irascible mégère me traquer en me reprochant de terroriser les chastes enfants du quartier par la simple évocation, y compris implicite, du Mot, je revis en somme mes cauchemars supposés trop profondément enfouis pour ressurgir du temps passé. Maintenant que j'examine les causes rationnelles de cet égarement délirant à la lumière de la sage nuit enténébrée (malgré les timides offensives sélénites pour forcer l'empire de la nuit), je dois dire que je comprends. Je comprends pourquoi ce Mot me fait frémir, je comprends pourquoi il m'égare tant, je comprends pourquoi je veux fuir ce que je crois être sa seule et unique et véritable et idéale signification, je comprends qu'il s'agit d'un égarement, en croyant que cette signification est telle alors qu'elle est contraire dans sa vérité pure à ce que je pense dans mon égarement. L'"Apocoloquintose". Je ne sais ce que ce Mot signifie. Une personne quinquagénaire et brune que j'ai par trop connue me reprochait souvent mon ignorance sur la signification du Mot ; je lui répondais que je cherchais encore et toujours, parcourant les manuels des agrégés, les traités du Lycée, les dictionnaires des lettrés, mais que, malgré l'ampleur de mes prospections, je ne trouvais désespérément rien ; elle disait que je ne serai jamais philosophe, et qu'elle l'était de son côté, puisqu'elle savait qu'elle savait, et qu'elle pouvait par conséquent s'arrêter de philosopher, ce qu'elle avait d'ailleurs fait dès qu'elle eut commencé à travailler. Je lui rétorquais alors qu'elle n'était pas (ou plus) philosophe puisqu'elle s'arrêtait de penser ; et, me glaçant d'un regard vert d'un genre nouveau, elle me prédit la foudre, l'ouragan et le blizzard si je ne retirais mon accusation blasphématoire ; je lui répondais que tout ce que je savais, c'est que je n'avais rien dit et que c'était pour elle l'occasion de redevenir sagace en me secondant dans ma Recherche du Mot perdu.
Alex_41
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Message  Infinitive Sam 15 Oct 2011 - 7:36

Ouf : 115 mots dans la première phrase ce n'est pas loin d'être 100 de trop !
Une parenthèse de plus de 75 mots, me laisse pantoise quant au sens général de la phrase.
J’ai beaucoup de mal à m'y retrouver, du coup, je pars relire la première partie, fait abstraction la parenthèse et me dit que finalement, sans...

D’un point de vue orthographique juste deux ou trois points :

- un après-midi ou une après-midi ?
- elle disait que je ne serai (s) jamais philosophe
- que personne ne (de) civilisé ne viendra ici me contredire
- en traçant ces quinze lettres à la puissance certes singulièrement pures (est-ce la puissance qui est pure ou les quinze lettres ?)

Attention aussi aux répétitions : le mot « égarement » ressort trois fois et de plus doublé du verbe égarer et ce, quasi dans la même phrase !

Des phrases trop longues qui nuisent (pour moi en tous les cas) à la compréhension. J’ai vraiment eu du mal à suivre ce texte.
Dommage, car le sujet du mot perdu, sacralisé et/ou interdit qui jette l'émoi pouvait être diaboliquement drolatique !

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Message  Kilis Sam 15 Oct 2011 - 9:41

J’aime beaucoup, beaucoup.
Cette manière fouillée d’écrire, cette langue pointue et corrosive, ce rythme essoufflé et qui entretient par à-coups bien posés la soif du lecteur.

Me fais penser aux romans d’Eric Laurrent, édité chez Minuit . Je suppose que tu connais.
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Message  Lifewithwords Sam 15 Oct 2011 - 10:14

Il n'y a clairement pas assez de points !! Les phrases sont trop longues, aucun espace dans le texte, c'est dur. Certaines choses sont réussies mais je reste perplexe devant le titre, que tu reprends dans ta première phrase, qui je trouve est tout bonnement affreux...

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Message  Rebecca Sam 15 Oct 2011 - 10:28

Un petit hommage au bon vieux Marcel qui cherchait lui le temps perdu en n'hésitant pas à nous perdre le long des mille méandres de ses phrases parfois interminables ?
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Message  Invité Sam 15 Oct 2011 - 11:26

Très habile c'est certain, on devine un esprit fébrile derrière tout ça, pointu, le sens du détail et de la dérision. C'est très bien oui, mais ça n'est toutefois pas ma tasse de thé, pas le genre d'écriture où j'aime me promener autrement que par hasard.

Pour Infinitive : "après-midi" peut être indifféremment masculin ou féminin. Certains recommandent l'emploi masculin puisque "midi" l'est.

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Message  abstract Sam 15 Oct 2011 - 12:59

Moi j’aime bien que VE soit le lieu de rencontre de ceux qui cherchent leurs mots perdus.
La longueur des phrases ne me gêne pas, elle est justifiée par le rythme du texte. J’ai aussi pensé à Éric Laurrent vu que je ne lis pas Proust.
Je me permets de signaler que le dernier roman de Mauvignier ne contient qu’une seule phrase. J’apprécie les auteurs qui explorent l’écrit sous toutes ces formes, c’est ici le cas.
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Message  Janis Sam 15 Oct 2011 - 13:37

J'aime aussi, beaucoup, bien que (ou justement parce que ?) mes propres textes sont souvent plutôt secs et concis. J'aime et le ton, comique, et le phrasé, ample, houleux, c'est vrai que ça donne envie de relire Mauvignier. Et puis j'ai appris un mot et je ne regarderai plus jamais une citrouille de la même façon.
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