Veille
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Chako Noir
Tristan
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Veille
Par la suite tout se confondit avec la lenteur du vin.
La tête peu propice alors. On y crut quand même quelques instants, les mains serrées, ces gerbes de fleurs jetées dans des paniers à linge.
Parfaitement immobiles dans toute cette mouvance, le coeur coi : saisir.
Ou plutôt : non. Se tenir assis gorge oppressée. On fait l'inventaire : bras, épaules, tronc, jambes, pieds. On y croirait presque.
Puis le soleil frappe au carreau jusqu'à ce que le reste d'ombres détale. On s'aperçoit que c'est fini, qu'encore une nuit est passée lourde sur le corps, qu'encore une fois il a fallut veiller jusqu'à la ruine.
Et dans tout cela l'idée obsédante comme un drap sur le visage. Il suffirait de gonfler un peu les joues pour s'apercevoir que l'on respire encore. En cachette.
C'est l'heure où l'on allume les lampes pour mieux les éteindre. c'est l'heure où il est possible de constater le rien.
Et puis, dans tout cela, le vide.
Trou béant. Vie qui absorbe la vie. On en sort difficilement. On s'épuise. Un peu de terre, du gravier qui crisse, la fenêtre fermée.
On poursuit.
La tête peu propice alors. On y crut quand même quelques instants, les mains serrées, ces gerbes de fleurs jetées dans des paniers à linge.
Parfaitement immobiles dans toute cette mouvance, le coeur coi : saisir.
Ou plutôt : non. Se tenir assis gorge oppressée. On fait l'inventaire : bras, épaules, tronc, jambes, pieds. On y croirait presque.
Puis le soleil frappe au carreau jusqu'à ce que le reste d'ombres détale. On s'aperçoit que c'est fini, qu'encore une nuit est passée lourde sur le corps, qu'encore une fois il a fallut veiller jusqu'à la ruine.
Et dans tout cela l'idée obsédante comme un drap sur le visage. Il suffirait de gonfler un peu les joues pour s'apercevoir que l'on respire encore. En cachette.
C'est l'heure où l'on allume les lampes pour mieux les éteindre. c'est l'heure où il est possible de constater le rien.
Et puis, dans tout cela, le vide.
Trou béant. Vie qui absorbe la vie. On en sort difficilement. On s'épuise. Un peu de terre, du gravier qui crisse, la fenêtre fermée.
On poursuit.
Re: Veille
Je trouve cette prose beaucoup plus fluide que ce que tu as l'habitude de nous proposer (la lenteur du vin, c'est ça?), ce n'est pas déplaisant pour autant.
Je l'aime bien cette veille, toujours cette dérision dépitée du temps qui passe sans bouger. Bon, la fin (vie qui absorbe la vie... etc) relève chez toi du déjà vu, et plus d'une fois, mais j'aime bien l'ensemble, cette existence à gueule de bois.
Je l'aime bien cette veille, toujours cette dérision dépitée du temps qui passe sans bouger. Bon, la fin (vie qui absorbe la vie... etc) relève chez toi du déjà vu, et plus d'une fois, mais j'aime bien l'ensemble, cette existence à gueule de bois.
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 34
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: Veille
Comme une hâte dans ce texte, je trouve, chaque phrase court vers sa suivante. Quelque chose de décousu aussi, qui m'échappe, qui me fuit.
Je n'ai guère aimé, mais suis intriguée.
Et, oui, j'ai aimé "Il suffirait de gonfler un peu les joues pour s'apercevoir que l'on respire encore. En cachette."
Je n'ai guère aimé, mais suis intriguée.
Et, oui, j'ai aimé "Il suffirait de gonfler un peu les joues pour s'apercevoir que l'on respire encore. En cachette."
Invité- Invité
Re: Veille
Tristan, tu excelles à décrire l'instant, la vacuité de l'instant.
Etrange texte, une ambiance mortifère
Des images fortes, dérangeantes, celle des fleurs dans les paniers à linge et puis celle-ci, dont je ne sais quoi faire mais qui me glace :
Enfin le couperet, la résignation :
J'ai à coeur un jour de prendre certains de tes textes, d'en faire une lecture croisée, de les décortiquer, en disséquer les images, je suis sûre que ce serait un exercice prodigieusement intéressant, passionnant même.
Etrange texte, une ambiance mortifère
Des images fortes, dérangeantes, celle des fleurs dans les paniers à linge et puis celle-ci, dont je ne sais quoi faire mais qui me glace :
Et dans tout cela l'idée obsédante comme un drap sur le visage.
Enfin le couperet, la résignation :
On poursuit.
J'ai à coeur un jour de prendre certains de tes textes, d'en faire une lecture croisée, de les décortiquer, en disséquer les images, je suis sûre que ce serait un exercice prodigieusement intéressant, passionnant même.
Invité- Invité
Re: Veille
Merci pour vos commentaires. Pour information, le texte fait partie d'un projet de "journal" (même si le mot me déplaît fortement), écrit en prose, dont chaque texte ne doit pas dépasser la longueur de la page. Ca force à un autre type d'écriture.
Chouette ! un début de théories sur ce que je fais ;-)
Easter(Island) a écrit:
J'ai à coeur un jour de prendre certains de tes textes, d'en faire une lecture croisée, de les décortiquer, en disséquer les images, je suis sûre que ce serait un exercice prodigieusement intéressant, passionnant même.
Chouette ! un début de théories sur ce que je fais ;-)
Re: Veille
C'est l'heure où l'on allume les lampes pour mieux les éteindre. c'est l'heure où il est possible de constater le rien
J'ai vraiment aimé ceci.
Je dénote une hésitation entre une volonté de simplicité et une tendance à vouloir composer un tableau avec des notes colorées plus chatoyantes. Pas inintéressant du tout, même si déséquilibré de ci de là.
Cette expérimentation dans l'écriture se ressent mais ne gêne en rien car elle aboutit à quelque chose de construit.
J'ai vraiment aimé ceci.
Je dénote une hésitation entre une volonté de simplicité et une tendance à vouloir composer un tableau avec des notes colorées plus chatoyantes. Pas inintéressant du tout, même si déséquilibré de ci de là.
Cette expérimentation dans l'écriture se ressent mais ne gêne en rien car elle aboutit à quelque chose de construit.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Veille
Sans avoir ni esprit d'analyse, ni connaissances pointues en poésie, je retiens ce texte comme un de ceux qui me touchent le plus de toi, en raison de ce que j'y perçois : un vivace désir sans cesse aplati, dévalué, déçu, un sentiment de vie interminablement habitée de manque, une résignation sans lâcheté.
Mais curieusement, tu verras, la vie gagne en densité à mesure qu'elle raccourcit ! Ou peut-être l'exigence moindre permet-elle de jouir de ce que nous aurions dédaigné plus jeunes...
J'ai beaucoup aimé et particulièrement : On s'aperçoit que c'est fini, qu'encore une nuit est passée lourde sur le corps, qu'encore une fois il a fallut veiller jusqu'à la ruine.
( qui est singulièrement d'actualité pour moi !)
Mais curieusement, tu verras, la vie gagne en densité à mesure qu'elle raccourcit ! Ou peut-être l'exigence moindre permet-elle de jouir de ce que nous aurions dédaigné plus jeunes...
J'ai beaucoup aimé et particulièrement : On s'aperçoit que c'est fini, qu'encore une nuit est passée lourde sur le corps, qu'encore une fois il a fallut veiller jusqu'à la ruine.
( qui est singulièrement d'actualité pour moi !)
Invité- Invité
Re: Veille
Je n'ai pas commenté, tu sais bien ce que j'aime déjà:
le vide , la thématique Tristannèsque, et les valses-hésitations ; "ou plutôt non" "presque". Tout est dit, je te lis.
le vide , la thématique Tristannèsque, et les valses-hésitations ; "ou plutôt non" "presque". Tout est dit, je te lis.
Invité- Invité
Re: Veille
Je passe par là et je tombe sur ton texte... :p Ce poème est-il inclus dans ton nouveau recueil ? Il en porte toutes les caractéristiques en tout cas ;-).
Ce texte-ci est un peu plus long que ce que j'ai lu, mais son déroulement est assez similaire aux autres, avec ce "on" qui encadre tout, cette poursuite de quelque chose, de quelqu'un... sombre et intriguant, déstabilisant aussi.
Ces poèmes sont comme des cris dans le silence. J'aime davantage à chaque lecture !!
Ce texte-ci est un peu plus long que ce que j'ai lu, mais son déroulement est assez similaire aux autres, avec ce "on" qui encadre tout, cette poursuite de quelque chose, de quelqu'un... sombre et intriguant, déstabilisant aussi.
Ces poèmes sont comme des cris dans le silence. J'aime davantage à chaque lecture !!
Loreena Ruin- Nombre de messages : 1071
Age : 35
Localisation : Nancy
Date d'inscription : 05/10/2008
Re: Veille
J'aime beaucoup ce texte un peu oppressant, cette tentative de description du néant qui peut nous saisir au soleil levant.
Des impressions fugaces, des sensations légères et pesantes à la fois, un jeu d'ombres et de lumières sur les béances du cœur.
Des impressions fugaces, des sensations légères et pesantes à la fois, un jeu d'ombres et de lumières sur les béances du cœur.
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Veille
c'est peut être idiot, mais en lisant il me vient un nom à l'esprit:
Proust
(aucun rapport sans doute...)
Proust
(aucun rapport sans doute...)
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