Vivant

[Tristan]

Quoi ?
En fait
En fait quoi ?
En fait je suis toujours vivant en fait
En fait je suis toujours là
Oui toujours là en fait
T’en as déjà vu des comme moi ?
T’en as déjà vu des comme moi toujours vivants ?
Hein dis t’en as déjà vu ?
T’en as déjà vu hein des vivants ?
T’en as déjà vu ?
Ça fait quoi d’être vivant ?
Ça te fait quoi d’être vivant ?
Ça fait quoi de l’être toujours ?
Je suis vivant moi
Oui je suis vivant oui
Je suis toujours vivant et j’ai la pêche
Je suis toujours vivant et j’ai la pêche parce que demain je meurs
Demain je meurs parce que je suis vivant
Mais demain je suis toujours vivant
Parce que
Parce que ça s’arrête pas parce que
Parce que ça s’arrêtera jamais parce que
Parce que la mort ça n’existe plus
Parce que
Parce qu’on est trop vivants parce que
Parce qu’on n’a plus la force de mourir alors
Alors on vit
Oui on vit parce qu’on n’en a pas la force
Alors on continue
Alors on n’arrête pas oui
Alors on n’arrête pas non
Parce qu’on aime ça être vivants oui
Parce qu’on aime ça parce que c’est plus facile que d’être morts oui
Et on a la pêche
Et on est vivants
Et on va à la pêche aux vivants
En attendant la mort
Mais ça viendra jamais
Alors on a la pêche
Alors on reste vivants
Alors on attend
Et on s’oublie
On s’oublie sans arrêts
On s’oublie dans nos vies de vivants
Et on oublie que l’on s’oublie
Dans nos vies de vivants
Mais on est vivants
Pas encore morts ni jamais
Mais les heures ne passent pas
Mais tout est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre
Mais ça ne passe pas
Mais ça ne ferme jamais
Alors on est vivants
Alors tout est ouvert
Alors on est ouverts
On a les tripes dehors et on est toujours vivants
On a les tripes et le sang dehors et on est toujours vivants
On a l’âme dehors et on est toujours vivants
Parce que tout est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre
Et que ça ne ferme jamais
Parce qu’on est vivants même quand on est morts
Et que ça ne ferme jamais
Parce qu’on est des bons gros vivants toujours morts
Et on a la pêche
Et on vit
Et on vit toujours vivants
Et on veut que ça s’arrête
Mais on veut pas
Parce que la mort on n’aime pas ça
Parce qu’on ne veut pas que ça ferme
Parce qu’on a encore des courses à faire
Parce qu’on a la pêche
Et qu’on veut encore faire semblant d’être vivants
En fait
En fait on doit être des faux vivants
Oui ça doit être ça
En fait on traîne encore un peu nos carcasses avant que
Avant qu’elles ne puent
Oui
Avant qu’elles ne puent la vie
La fausse vie
La seule vraie vie qui pue et qu’on traîne
La fausse vie la fausse mort qui puent
Au fond de nos trous du corps
On est toujours vivants au fond de nos trous
Ouverts vingt-quatre heures sur vingt-quatre
On est vivants et on y fait nos courses pour la semaine
Dans nos vies en forme de trous qui puent
On est toujours vivants oui même quand on est morts

[Invité]

CQFD. On pourrait trouver l'ensemble un peu long, mais non, je crois qu'il faut ça. Du sans bavure !

[Invité]

Tu dévides, progression à l'envers... et tu retricotes, bien serré, un bel exemple d'unité, paradoxalement pour le sujet, tout trouve sa place, tout s'encastre. Je ne me lasse personnellement pas du thème, de ces questionnements désillusionnés sur le pourquoi d'être là.

[Ba]

Morituri n'est-ce pas, saluent dans l'enceinte !

[Rebecca]

Le genre de questionnements qui peut nous halluciner toute une vie. Pour rien. Le vertige de la marionnette dotée d'un peu de conscience. Ca dépend des vies aussi. Y'a des vies mieux foutues que d'autres qui permettent de se reposer de l'idée qu'on va mourir. Ou de l'idée qu'on vit pour rien. Des vies qui permettent d'oublier .
Un texte assez hypnotique .

[Hellian]

Je ferai mienne l'expression de Rebecca : un texte hypnotique, oui qui fonctionne à coups de pioche...

Pioches-tu pour creuser le trou ou briser le mur ?

Je crois que ce très beau poème a vocation à être dit tant les rythmes y sont puissants et viscéraux, comme un tam-tam africain ou quelque danse de mort ou/et de vie indienne.

Aussi, à moins que tu ne t'y opposes, j'aimerais beaucoup l'enregistrer 'dès que mon matériel sera réparé) et joindre cet enregistrement à ce fil.

[Invité]

C'est bien monté, laisse peu de place à la controverse. Indépendamment, j'éprouve un grande lassitude au contact du thème.

[Lyra will]

Comme d'habitude on ne sort pas indemne de tes textes! Enfin de cette série là.

Hypnotique oui, c'est vrai, c'est ça, et puis à la fin on s'en défait les yeux puis respire à grand coup, parce qu'en matière d'apnée c'est pas une balade de tout repos.

Enfin, c'est fort, ça fonctionne extrêmement bien dans ce rythme lancinant que tu sais parfaitement gérer.

[Arielle]

J'aurais tendance au sortir de ton tunnel à citer Proust, là, pour respirer un bon coup : Il vaut mieux rêver sa vie que la vivre mais comme il ajoute encore que la vivre soit aussi la rêver je me dis que si elle doit prendre de telles allures de cauchemar je ferais mieux, tout de suite, d'aller me pendre, mais ce que j'en dis, hein ! Je voudrais décourager personne ...

[Invité]

Eh bien moi j'ai trouvé ça... trop long, justement. Bien mené, rondement, mais... au bout d'un moment, le cri a perdu de son ampleur, de son intensité ; de mon côté en tout cas.
C'est en tout cas une question universelle et qui me taraude souvent, comme tout le monde.

[Tristan]

Je crois que ce très beau poème a vocation à être dit tant les rythmes y sont puissants et viscéraux, comme un tam-tam africain ou quelque danse de mort ou/et de vie indienne.

Aussi, à moins que tu ne t'y opposes, j'aimerais beaucoup l'enregistrer 'dès que mon matériel sera réparé) et joindre cet enregistrement à ce fil.

ça me ferait très plaisir, Hellian. Merci !
Je crois que je vais m'y mettre aussi, à la performance orale. j'ai plein de textes qui ne demandent qu'à être gueulés

[Sahkti]

Presque proche du slam me semble-t-il (mais je ne suis pas spécialiste du genre), un textes scandé qui gagne à être lu à voix haute, ça aide à faire passer certaines longueurs ou l'effet répétitif, malgré la véhémence de l'ensemble.

Sinon que dire, si ce n'est que le propos me touche à titre très personnel et que j'y retrouve nombre de mes interrogations malades. Fort, touchant, réussi à mes yeux.

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