Contre-jour

Frédéric Prunier Lun 5 Mar 2012 - 15:30

(petit texte à image)

Les lignes découpées en contre jour
les règles en équerres de la ville des hommes
sont pour moi paysage d'écriture
aujourd'hui
facile caricature débarrassée des couleurs

Route, mur, tronc d'arbre
tout
me prétexte à lignes droites et cassures
puisque le soleil m'aveugle
et me bannit la rondeur

c'est un enchevêtrement de ratures
et je ne recherche que l'étrange rigueur
de ce clocher de village
où j'attends que le temps sonne gravement
où j'attends pour me retourner
qu'un ami soit parti
aujourd'hui est pour lui

Marvejols Lun 5 Mar 2012 - 17:07

Prunier, quel bonheur. Vous prenez le jeu à l'envers et c'est l'image que vous faites surgir. Je dirais volontiers que c'est un des meilleurs textes de vous que j'aie lu sur VosE.

A part le D-D de "de la ville des hommes" qui persomoije m'égratigne un peu la glotte, j'apprécie beaucoup ça :
tout
me prétexte à lignes droites et cassures
puisque le soleil m'aveugle
et me bannit la rondeur

Je note qu'enchevêtrement devient chez vous un motif (voir )...

Marvejols Lun 5 Mar 2012 - 17:12

Excusez ma fausse manoeuvre, j'ai envoyé au lieu de continuer..

sur le "motif" de l'enchevêtrement (voir http://www.vosecrits.com/t10549-d-une-main-enchevetree?highlight=enchevetr%E9e).

"enchevêtrement de ratures" : l'assimilation de l'image ou du tableau à la page brouillon d'un texe ou poème est forte et bienvenue (+ j'avais déjà pensé à Soulages plus haut à propos du soleil qui aveugle et perte des rondeurs: tout au trait N&B...).

La fin est plus que délicate et n'appelle que mon silence incliné:
je ne recherche que l'étrange rigueur
de ce clocher de village
où j'attends que le temps sonne gravement
où j'attends pour me retourner
qu'un ami soit parti
aujourd'hui est pour lui

Pussicat Lun 5 Mar 2012 - 17:25

Je pose la main sur mon front, en abat-jour, une lumière m'éblouit, voilà c'est mieux... la fin me pince le coeur,
un pli qui se referme... vous venez de m'offrir un moment de grâce poétique... superbe, vraiment... sincèrement,

Maryse Lun 5 Mar 2012 - 18:39

Moi aussi la main en abat jour et des mots qui m'éblouissent.

Invité Lun 5 Mar 2012 - 22:15

Révérence, mon prince !

Pascal-Claude Perrault Lun 5 Mar 2012 - 22:56

Un texte tout en rondeur dénonçant son contraire, j'aime bien... Émouvant sur la fin.

Invité Mar 6 Mar 2012 - 4:33

Je me suis demandée si les mots entre parenthèses signifiaient que le poème avait été conçu à partir d'une image ou s'ils la faisaient naître.

J'ai aimé la mise en page et ces mots isolés, et si j'ai trouvée déconcertante, sa force est très présente.

Invité Mar 6 Mar 2012 - 14:45

lire
et si j'ai trouvé la fin déconcertante

Spoiler:

Janis Mar 6 Mar 2012 - 15:14

ché beau, bravo

Arielle Mar 6 Mar 2012 - 15:50

Débarrassé des couleurs, banissant les rondeurs ... Quelle classe, quelle gravité ! Un contre-jour à mettre en pleine lumière, sans la moindre rature. Il a de la chance cet ami !

Janis Mar 6 Mar 2012 - 16:13

sauf qu'il est mort ?

Arielle Mar 6 Mar 2012 - 16:21

Mort peut-être, mais pas dans l'amitié de l'auteur !

la fille du pays du nord Mar 6 Mar 2012 - 18:24

Ce poème est magnifique, je suis admirative !...

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