L'homme à la formule
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Pussicat
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Raoulraoul
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L'homme à la formule
Ce dimanche là, je décidai d’aller cueillir des champignons pour agrémenter mon omelette du soir. J’avais emporté en prévision de la soif qui ne manquerait pas de me saisir deux packs de bière. J’allais pénétrer dans le petit bois lorsque je vis en sortir un vieil homme qui marchait d’un pas décidé dans ma direction. Arrivé à ma hauteur, tout en reniflant comme un cochon truffier au pied d’un chêne, il me dit d’une voix glapissante :
-Je sens le houblon.
Visage parcheminé qui semblait près de tomber en miettes comme celui d’une momie oubliée en plein Sahara, longs cheveux blancs noués en chignon, l’homme paraissait une sorte de yogi. Yogi nerveux car son corps tout entier était agité de tremblements et ses yeux fureteurs semblaient vouloir sortir de leurs orbites. Je lui tendis une canette qu’il vida d’un trait.
Après avoir émis un long rot de satisfaction, il me prit par la main et me conduisit à sa caravane.
-Quel âge vous me donnez ? me demanda-t-il en m’invitant à m’asseoir sur une vieille chaise branlante.
Pour ne pas le vexer, je répondis :
-Euh, je ne sais pas, soixante-quinze ans?
-En vérité, reprit-il, j’en ai quatre cents bien sonnés.
-Vous ne les faites pas, dis-je dans un esprit de dérision.
-Je fus l’assistant du plus grand alchimiste que la terre ait jamais porté. Malheureusement il est mort en mettant la dernière main à son grand œuvre.
Mais il avait pris soin de noter toutes les indications à suivre. J’ai pu terminer les hauts travaux qu’il avait entrepris.
Tenez, tout est là dit-il en me tendant un vieux bouquin à l’aspect misérable.
J’ouvris l’espèce de grimoire, soufflai sur les pages pour en chasser la poussière, et lus quelques passages écrits en latin.
-Je n’entends pas cette langue, il faudrait que vous me traduisiez…
-Ecoutez vous m’êtes sympathique, je vais vous confier le grand secret. Vous assisterez tout à l’heure au rituel. Mais d’abord il fait soif, buvons un coup ou deux…
Une fois les packs de vingt quatre canettes vidés, il m’adressa un clin d’œil :
-Bon, quand vous sentirez l’haleine de la Camarde sur votre nuque, voilà ce qu’il vous faudra faire : il prit dans un placard ce qui ressemblait à un vieux cromorne duquel il tira quelques sons épouvantablement discordants et propres à nous faire perdre l’ouïe, vida le contenu du cendrier sur sa tête puis enleva méthodiquement tous ses vêtements. Quand il fut entièrement nu, il s’accroupit et pondit un abominable étron fumant, y planta un mégot, souffla dessus par trois fois, descendit de la caravane, cassa du petit bois dont il se servit pour former les cases d’une marelle, sauta à cloche-pied jusqu’au ciel sur lequel il urina longuement une bonne partie des douze litres qu’il avait ingurgités et prononça une série de vocables étranges (dont je ne retins qu’un Grouk guttural) en roulant des yeux hagards.
-Tout cela ne serait rien sans la formule finale, ajouta-t-il. C’est impératif, il vous faudra prononcer cent fois de suite les mots...
Mais ces mots, très chers lecteurs, vous pensez bien que je les garde pour moi.
Et je compte bien m’en servir lorsque je sentirai la Faucheuse approcher.
-Je sens le houblon.
Visage parcheminé qui semblait près de tomber en miettes comme celui d’une momie oubliée en plein Sahara, longs cheveux blancs noués en chignon, l’homme paraissait une sorte de yogi. Yogi nerveux car son corps tout entier était agité de tremblements et ses yeux fureteurs semblaient vouloir sortir de leurs orbites. Je lui tendis une canette qu’il vida d’un trait.
Après avoir émis un long rot de satisfaction, il me prit par la main et me conduisit à sa caravane.
-Quel âge vous me donnez ? me demanda-t-il en m’invitant à m’asseoir sur une vieille chaise branlante.
Pour ne pas le vexer, je répondis :
-Euh, je ne sais pas, soixante-quinze ans?
-En vérité, reprit-il, j’en ai quatre cents bien sonnés.
-Vous ne les faites pas, dis-je dans un esprit de dérision.
-Je fus l’assistant du plus grand alchimiste que la terre ait jamais porté. Malheureusement il est mort en mettant la dernière main à son grand œuvre.
Mais il avait pris soin de noter toutes les indications à suivre. J’ai pu terminer les hauts travaux qu’il avait entrepris.
Tenez, tout est là dit-il en me tendant un vieux bouquin à l’aspect misérable.
J’ouvris l’espèce de grimoire, soufflai sur les pages pour en chasser la poussière, et lus quelques passages écrits en latin.
-Je n’entends pas cette langue, il faudrait que vous me traduisiez…
-Ecoutez vous m’êtes sympathique, je vais vous confier le grand secret. Vous assisterez tout à l’heure au rituel. Mais d’abord il fait soif, buvons un coup ou deux…
Une fois les packs de vingt quatre canettes vidés, il m’adressa un clin d’œil :
-Bon, quand vous sentirez l’haleine de la Camarde sur votre nuque, voilà ce qu’il vous faudra faire : il prit dans un placard ce qui ressemblait à un vieux cromorne duquel il tira quelques sons épouvantablement discordants et propres à nous faire perdre l’ouïe, vida le contenu du cendrier sur sa tête puis enleva méthodiquement tous ses vêtements. Quand il fut entièrement nu, il s’accroupit et pondit un abominable étron fumant, y planta un mégot, souffla dessus par trois fois, descendit de la caravane, cassa du petit bois dont il se servit pour former les cases d’une marelle, sauta à cloche-pied jusqu’au ciel sur lequel il urina longuement une bonne partie des douze litres qu’il avait ingurgités et prononça une série de vocables étranges (dont je ne retins qu’un Grouk guttural) en roulant des yeux hagards.
-Tout cela ne serait rien sans la formule finale, ajouta-t-il. C’est impératif, il vous faudra prononcer cent fois de suite les mots...
Mais ces mots, très chers lecteurs, vous pensez bien que je les garde pour moi.
Et je compte bien m’en servir lorsque je sentirai la Faucheuse approcher.
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 51
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: L'homme à la formule
luS passé simple.
< C'est fait. Merci d'indiquer précisément l'emplacement de la faute à corriger à l'avenir.
La Modération. >
La Modération. >
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 51
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: L'homme à la formule
Ah, ah, très malin! Sais-tu qu'un tour pareil, est (en langage vélien ascendant janisois) coup-de-bûchable? Gaffe à ta nuque, saltimbanque! punkàchien! ladies-gâtas!
Polixène- Nombre de messages : 3298
Age : 62
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
re : L'homme à la formule
On s'attendrait à plus de crédibilité. J'ai l'impression de m'être fait avoir. C'est réussi si c'est le but recherché. En fait, c'est moi qui suis naïf. Sur ce genre de question il n'y a pas de réponse. Alors en effet, tu donnes la meilleure réponse possible : ironie, absurdité, etc... Pas mal ! Merci.
Raoulraoul- Nombre de messages : 607
Age : 63
Date d'inscription : 24/06/2011
Re: L'homme à la formule
Joli tour, je me suis fait avoir, j'attendais une autre chute !
Juste un bémol sur la fin, je pense que l'effet serait encore meilleur en atténuant un peu les bizarreries de l'homme, soit en mettre moins en nombre, soit les rendre plus mystérieuses et moins déjantées.
Mais je ne boude pas mon sourire final.
Juste un bémol sur la fin, je pense que l'effet serait encore meilleur en atténuant un peu les bizarreries de l'homme, soit en mettre moins en nombre, soit les rendre plus mystérieuses et moins déjantées.
Mais je ne boude pas mon sourire final.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: L'homme à la formule
j'ai pris plaisir à lire ton petit conte magique, et je suis tombée de l'arbre, à la fin.
(même pour moi ? dis, tu veux pas me la donner ?)
je retiens la rencontre entre deux hommes, entre deux mondes...
je retiens des phrases un peu faciles comme celle-ci, avec ses images usées à la corde :
Visage parcheminé qui semblait près de tomber en miettes comme celui d’une momie oubliée en plein Sahara, longs cheveux blancs noués en chignon, l’homme paraissait une sorte de yogi.
et ce mot... grrrrrr... qui m'horripile, je n'en peux plus de le lire :
"...quand vous sentirez l’haleine de la Camarde sur votre nuque..."
à la fin tu nous fais tourner chèvre avec ton rituel un poil longuet, longuet...
mais dans l'ensemble j'ai pris du plaisir, donc :
j'♥ !
(même pour moi ? dis, tu veux pas me la donner ?)
je retiens la rencontre entre deux hommes, entre deux mondes...
je retiens des phrases un peu faciles comme celle-ci, avec ses images usées à la corde :
Visage parcheminé qui semblait près de tomber en miettes comme celui d’une momie oubliée en plein Sahara, longs cheveux blancs noués en chignon, l’homme paraissait une sorte de yogi.
et ce mot... grrrrrr... qui m'horripile, je n'en peux plus de le lire :
"...quand vous sentirez l’haleine de la Camarde sur votre nuque..."
à la fin tu nous fais tourner chèvre avec ton rituel un poil longuet, longuet...
mais dans l'ensemble j'ai pris du plaisir, donc :
j'♥ !
Pussicat- Nombre de messages : 4846
Age : 57
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: L'homme à la formule
Histoire intéressante qui me donne envie d'en lire d'autres.
Bakary- Nombre de messages : 36
Age : 75
Localisation : Montreuil_ France
Date d'inscription : 05/07/2013
Re: L'homme à la formule
Je remercie les ceuss qu'ont laissé un ptit mot. Bisous.
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 51
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: L'homme à la formule
J'ai bien aimé également !
La chute est un grand classique, mais là je trouve que ça fonctionne bien.
Merci pour cette lecture.
La chute est un grand classique, mais là je trouve que ça fonctionne bien.
Merci pour cette lecture.
Re: L'homme à la formule
Deux packs de bière pour aller cueillir les champignons, c'est lourd quand même ! Je subodore que notre personnage aime téter du goulot.
L'anecdote est plaisante mais trop courte, vite expédié. j'aurais bien vu une surenchêre dans l'absurde.
L'anecdote est plaisante mais trop courte, vite expédié. j'aurais bien vu une surenchêre dans l'absurde.
Jano- Nombre de messages : 1000
Age : 55
Date d'inscription : 06/01/2009
Re: L'homme à la formule
j'ai bien aimé votre texte avec ses descriptions ... je partage l'idée de ceux qui ont dit que cela aurait pu être un peu plus long mais j'ai pris un grand plaisir en vous lisant. merci
andrewalyacoub- Nombre de messages : 66
Age : 27
Localisation : Iraq
Date d'inscription : 01/05/2012
Re: L'homme à la formule
Ah ! l’odeur du houblon le soir au fond des bois ! Pour les yeux voulant sortir de leurs orbites, un décapsuleur me semble approprié. Pour ce qui est de la durée de vie, c’est une canette par jour supplémentaire (à ingurgiter, canette et jour).
Amusant, mais pas assez déjanté.
Amusant, mais pas assez déjanté.
Invité- Invité
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