L'écriture est un sport de combat.
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L'écriture est un sport de combat.
Gauche, droite, frappe, cogne encore, plus fort, encore, recommence, droite, gauche, bouge, saute, accélère, ralentis, reprends, gauche, droite, enchaîne, série, inverse, contrôle, pause...
- Tous ces dialogues qui traversent mon esprit, ces mots, ces sons qui s'entrechoquent, choquent, choquent, ces histoires à dormir debout, bout, debout, qui veulent se dresser, prendre forme, exister, exister !
Je m'interroge, tu comprends ? Je me lève, je tourne en rond, j'allume la télévision, je l'éteins, je bois un verre d'eau, je me recouche, rien n'y fait. Alors j'écris, c'est le seul remède, le seul poison.
- Maintenant, tu te crois obligée d'écrire à chaque fois que tu te sens mal.
- Mais cela me calme !
- Non cela prolonge le mal et accentue ta souffrance, et je m'aperçois que tu es incapable de t'en rendre compte ; c'est bien plus grave que je ne le pensais. Allez on reprend, gauche, droite, allez, c'est mou tout ça, cogne, change de jambe, étonne-moi, surprends-moi.
- Je ne comprends pas... au crime un mobile, à l'erreur une cause, quelle motivation ? je n'ai rien demandé, rien fait pour. Je ne comprends pas... pourquoi moi ?
- Ah ça pour sûr qu'elle doit avoir une casserole sur le feu pour ne pas te lâcher comme cela. Moi, tout je ce que vois, c'est qu'elle a enfoncé ses crocs dans ta jolie petite carcasse, et que ce n'est pas demain la veille qu'elle va desserrer ses mâchoires. Ne sois pas naïve, arrête de te plaindre et de jouer son jeu.
- Ce n'est pas si simple, si tu voyais comme elle se déploie, si tu me voyais quand elle est là ; une vraie loque, impossible de lui résister. Elle est forte, elle connaît toutes mes faiblesses. J'ai bien essayé de l'assommer... gauche, droite... comme tu me l'as appris, mais rien n'y fait, et pire, j'y prends goût.
- C'est bien pourquoi je suis toujours à tes côtés pour apprendre à la dompter. Allez on reprend.
- Mais... ce branle-bas de consonnes, de voyelles qui sonnent et n'en finit pas, elles floconnent mes nuits, filent sur un fil comme des perles en chapelet, parfois automate je suis.
- Surprends-les, mouvements furtifs, camouflage, et quand elles s'y attendent le moins, quand elles pensent avoir le dessus, tu les assommes : Paf ! uppercut, K.O les... con... sonnes, là.
- Ce n'est pas aussi facile que tu le dis, elles ont déjà pris le pouvoir et cela fait un moment que cela dure. Tu m'as vue ? non mais tu as vu ce qu'elles ont fait de moi ? rester sans dormir à surveiller tous ces vols de nuit !
Je tricote et rapièce comme une grand-mère des bouts rimés, des textes à rallonge dont je découpe, déplace, recolle des pans, des membres, comme si ils vivaient, comme si ils étaient de chair et de sang, je ne sais pas même d'où cela me vient.
J'essaie de piquer son orgueil, pour voir, j'ai fait la grève. Je n'ai pas tenu longtemps, trop faim.
- Arrête de te plaindre, tu me déçois. Remonte sur le ring : gauche, droite, frappe, cogne, encore, plus fort, encore, recommence, droite, gauche, bouge, saute, accélère, ralentis, reprend, gauche, droite, enchaîne, série, inverse, contrôle... on arrête, c'est fini pour ce soir. Va prendre une douche et rentre chez toi.
- Tous ces dialogues qui traversent mon esprit, ces mots, ces sons qui s'entrechoquent, choquent, choquent, ces histoires à dormir debout, bout, debout, qui veulent se dresser, prendre forme, exister, exister !
Je m'interroge, tu comprends ? Je me lève, je tourne en rond, j'allume la télévision, je l'éteins, je bois un verre d'eau, je me recouche, rien n'y fait. Alors j'écris, c'est le seul remède, le seul poison.
- Maintenant, tu te crois obligée d'écrire à chaque fois que tu te sens mal.
- Mais cela me calme !
- Non cela prolonge le mal et accentue ta souffrance, et je m'aperçois que tu es incapable de t'en rendre compte ; c'est bien plus grave que je ne le pensais. Allez on reprend, gauche, droite, allez, c'est mou tout ça, cogne, change de jambe, étonne-moi, surprends-moi.
- Je ne comprends pas... au crime un mobile, à l'erreur une cause, quelle motivation ? je n'ai rien demandé, rien fait pour. Je ne comprends pas... pourquoi moi ?
- Ah ça pour sûr qu'elle doit avoir une casserole sur le feu pour ne pas te lâcher comme cela. Moi, tout je ce que vois, c'est qu'elle a enfoncé ses crocs dans ta jolie petite carcasse, et que ce n'est pas demain la veille qu'elle va desserrer ses mâchoires. Ne sois pas naïve, arrête de te plaindre et de jouer son jeu.
- Ce n'est pas si simple, si tu voyais comme elle se déploie, si tu me voyais quand elle est là ; une vraie loque, impossible de lui résister. Elle est forte, elle connaît toutes mes faiblesses. J'ai bien essayé de l'assommer... gauche, droite... comme tu me l'as appris, mais rien n'y fait, et pire, j'y prends goût.
- C'est bien pourquoi je suis toujours à tes côtés pour apprendre à la dompter. Allez on reprend.
- Mais... ce branle-bas de consonnes, de voyelles qui sonnent et n'en finit pas, elles floconnent mes nuits, filent sur un fil comme des perles en chapelet, parfois automate je suis.
- Surprends-les, mouvements furtifs, camouflage, et quand elles s'y attendent le moins, quand elles pensent avoir le dessus, tu les assommes : Paf ! uppercut, K.O les... con... sonnes, là.
- Ce n'est pas aussi facile que tu le dis, elles ont déjà pris le pouvoir et cela fait un moment que cela dure. Tu m'as vue ? non mais tu as vu ce qu'elles ont fait de moi ? rester sans dormir à surveiller tous ces vols de nuit !
Je tricote et rapièce comme une grand-mère des bouts rimés, des textes à rallonge dont je découpe, déplace, recolle des pans, des membres, comme si ils vivaient, comme si ils étaient de chair et de sang, je ne sais pas même d'où cela me vient.
J'essaie de piquer son orgueil, pour voir, j'ai fait la grève. Je n'ai pas tenu longtemps, trop faim.
- Arrête de te plaindre, tu me déçois. Remonte sur le ring : gauche, droite, frappe, cogne, encore, plus fort, encore, recommence, droite, gauche, bouge, saute, accélère, ralentis, reprend, gauche, droite, enchaîne, série, inverse, contrôle... on arrête, c'est fini pour ce soir. Va prendre une douche et rentre chez toi.
Pussicat- Nombre de messages : 4846
Age : 57
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: L'écriture est un sport de combat.
« Non, cela prolonge le mal... »
« Allez, on reprend »
« Ah ça, pour sûr qu'elle doit avoir... »
« Non mais tu as vu... »
« Rester sans dormir à surveiller... »
« ralentis, reprends... »
« On arrête... »
Je mettrais plutôt un point-virgule ici...
« Ce n'est pas si simple ; si tu voyais comme elle se déploie... »
J'ajouterais une virgule après le « et », ici...
« Surprends-les, mouvements furtifs, camouflage, et, quand elles s'y attendent le moins, quand elles pensent avoir le dessus, tu les assommes... »
Ce texte auto-argumentatif particulièrement vivant, expressif (points d'interrogation, d'exclamation, de suspension, deux points, présentatifs, ébauche de marabout, onomatopée, etc.), m'apparaît comme une sorte de clin d'oeil au début de récit autobiographique « Enfance » de Nathalie Sarraute. Le travail d'écriture est évoqué ici comme un exercice de guérilla intime, violent, sauvage (« frappe, cogne encore, plus fort, encore », « elle a enfoncé ses griffes », « desserrer ses mâchoires », « j'ai bien essayé de l'assommer », « tu les assommes », « apprendre à la dompter ») dont l'ambiguïté fondamentale est signalée par l'antithèse (« le seul remède, le seul poison »). S'éprouver en écriture, c'est, insensiblement, se trouver ballotté entre sensation d'aliénation (gradation : « cela prolonge le mal et accentue ta souffrance ») et certitude de libération (phrase exclamative : « Mais cela me calme ! »).
Merci pour ce partage !
« Allez, on reprend »
« Ah ça, pour sûr qu'elle doit avoir... »
« Non mais tu as vu... »
« Rester sans dormir à surveiller... »
« ralentis, reprends... »
« On arrête... »
Je mettrais plutôt un point-virgule ici...
« Ce n'est pas si simple ; si tu voyais comme elle se déploie... »
J'ajouterais une virgule après le « et », ici...
« Surprends-les, mouvements furtifs, camouflage, et, quand elles s'y attendent le moins, quand elles pensent avoir le dessus, tu les assommes... »
Ce texte auto-argumentatif particulièrement vivant, expressif (points d'interrogation, d'exclamation, de suspension, deux points, présentatifs, ébauche de marabout, onomatopée, etc.), m'apparaît comme une sorte de clin d'oeil au début de récit autobiographique « Enfance » de Nathalie Sarraute. Le travail d'écriture est évoqué ici comme un exercice de guérilla intime, violent, sauvage (« frappe, cogne encore, plus fort, encore », « elle a enfoncé ses griffes », « desserrer ses mâchoires », « j'ai bien essayé de l'assommer », « tu les assommes », « apprendre à la dompter ») dont l'ambiguïté fondamentale est signalée par l'antithèse (« le seul remède, le seul poison »). S'éprouver en écriture, c'est, insensiblement, se trouver ballotté entre sensation d'aliénation (gradation : « cela prolonge le mal et accentue ta souffrance ») et certitude de libération (phrase exclamative : « Mais cela me calme ! »).
Merci pour ce partage !
jfmoods- Nombre de messages : 692
Age : 59
Localisation : jfmoods@yahoo.fr
Date d'inscription : 16/07/2013
Re: L'écriture est un sport de combat.
Ah oui, ce titre me va! Me suffirait même, qui suis friande d'aphorismes, proverbes, etc...
Mais tu files la métaphore jusqu'au bout, et plaisamment.
"Toute littérature, nous dit Kafka, est assaut contre la frontière"
Mais tu files la métaphore jusqu'au bout, et plaisamment.
"Toute littérature, nous dit Kafka, est assaut contre la frontière"
Polixène- Nombre de messages : 3298
Age : 62
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
Re: L'écriture est un sport de combat.
Des histoires et des sons comme ça, on redemande à en lire.
Sans technique un don n'est rien qu'une sale manie. La technique elle est là, alors laisse aller la bonne monomanie.
Invité- Invité
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