JE, 13 ans et toutes ses dents !
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JE, 13 ans et toutes ses dents !
JE a treize ans. Elle tient un journal au présent. Sa mère entre dans sa chambre, elle écrit.
- Que fais-tu ma chérie ?
- Rien maman, rien.
- Encore ce maudit cahier... je t'avais pourtant bien dit d'arrêter d'écrire sur ce maudit cahier.
L'enfant referme son journal qui disparaît sous son lit. Elle sort, ferme la porte et rejoint sa mère dans l'escalier.
- Je t'ai prévenue, si je le trouve un jour, je le jette... ça suffit pas d'avoir la cervelle à l'envers, il faut que tu me… viens, nous avons du travail, il faut plier les draps, ensuite, tu iras chez Madame lui porter son repas.
JE aime bien Madame. ( Pourquoi aime t-elle cette femme ? Qui est-elle ? Quel est son nom ? Ce que je peux vous apprendre, c'est qu'elle a un certain âge, et que sa mère lui prépare ses repas ).
Madame ne lui dit rien, ou si peu. Lorsqu'elle lui demande comment elle va, elle ne lui répond pas, ou avec des mots qu'elle ne comprend pas. Ils lui font penser aux papillons qui s'envolent quand elle court dans les champs. Elle les trouve jolis, ses mots, quand ils s'envolent, mais elle ne les comprend pas. Elle ne sait même pas si c'est vraiment à elle qu'elle s'adresse. Mais elle aime bien rester avec Madame, elle se sent bien auprès d'elle. Elle joue avec ses chats, mais cela ne dure jamais longtemps ; au loin, elle entend déjà la voix de sa mère qui l'appelle.
..........JE est épileptique depuis l'âge de ses treize ans. Elle pourrait vous conter sa première crise, qui heureusement pour elle ..........fut sans gravités collatérales. Elle aurait pu se trouver devant un grand escalier en pierre ; elle en fera la ..........douloureuse expérience dans quelques années, mais...
Hier, à la même heure, au même instant que cet instant, elle était assise dans un fauteuil en simili cuir gris souris, casquée d'électrodes, élastiquée d'une pastille à chaque poignet qui enregistrait son rythme cardiaque. Un technicien lui demandait de fermer les yeux, d'ouvrir les yeux, de les fermer à nouveau, de les rouvrir, puis de les fermer ; soudain, des tâches-confettis multicolores illuminaient l'intérieur de ses yeux comme une guirlande de Noël. Elle passait un électro-encéphalogramme.
..........Ceux qui sont atteints de ce mal, ou possèdent quelques connaissances sur sa nature, savent de quoi il est question – il ne ..........s'agit pas de guérison ; ce mal se ne guérit pas mais s'accompagne. Il peut s'installer en viager ou disparaître comme il est ..........venu, comme l'inconnu qui viendrait s'incruster chez vous sans prévenir et commencerait par démonter ce que vous avez ..........mis des heures, des jours, des années à monter, avant de partir sans un mot avec des morceaux du Tout. Après cette ..........visite, il vous faudra accepter une réalité que vous porterez en vous, à jamais : l'absence de résilience.
..........Vous ne retrouverez jamais ce qu'il a emporté.
Le technicien porte une blouse blanche, il est gentil avec elle, lui fait la conversation.
Il installe des petits bouchons sur sa tête précisément sur le pâté de gelée froide. Quand elle rentre à la maison, une fatigue envahit son petit corps tout entier, toujours.
La souffrance, elle ne la ressent pas encore.
Elle ne sait pas encore qu'à grands coups,
sa tête frappera par deux fois l'angle de sa commode en sapin.
Elle a la nausée, allongée sur le tapis de sa chambre, éveillée.
Un filet de sang refroidit sa joue.
Sa tête lui fait mal.
Envie de dormir, à nouveau.
Elle se couche, côté gauche,
encore, peut-être...
La rue.
Elle entend les bruits de la rue.
Regard en coin,
rideaux levés, baissés,
elle aura oublié... demain...
Plier les draps, trouver un prénom à Madame... partir,
se laisser partir...
Cette souffrance,
cette souffrance... elle ne la ressent pas encore.
Et vous ne savez pas tout,
vous ne savez pas ce qu'elle écrit dans son petit cahier...
- Que fais-tu ma chérie ?
- Rien maman, rien.
- Encore ce maudit cahier... je t'avais pourtant bien dit d'arrêter d'écrire sur ce maudit cahier.
L'enfant referme son journal qui disparaît sous son lit. Elle sort, ferme la porte et rejoint sa mère dans l'escalier.
- Je t'ai prévenue, si je le trouve un jour, je le jette... ça suffit pas d'avoir la cervelle à l'envers, il faut que tu me… viens, nous avons du travail, il faut plier les draps, ensuite, tu iras chez Madame lui porter son repas.
JE aime bien Madame. ( Pourquoi aime t-elle cette femme ? Qui est-elle ? Quel est son nom ? Ce que je peux vous apprendre, c'est qu'elle a un certain âge, et que sa mère lui prépare ses repas ).
Madame ne lui dit rien, ou si peu. Lorsqu'elle lui demande comment elle va, elle ne lui répond pas, ou avec des mots qu'elle ne comprend pas. Ils lui font penser aux papillons qui s'envolent quand elle court dans les champs. Elle les trouve jolis, ses mots, quand ils s'envolent, mais elle ne les comprend pas. Elle ne sait même pas si c'est vraiment à elle qu'elle s'adresse. Mais elle aime bien rester avec Madame, elle se sent bien auprès d'elle. Elle joue avec ses chats, mais cela ne dure jamais longtemps ; au loin, elle entend déjà la voix de sa mère qui l'appelle.
..........JE est épileptique depuis l'âge de ses treize ans. Elle pourrait vous conter sa première crise, qui heureusement pour elle ..........fut sans gravités collatérales. Elle aurait pu se trouver devant un grand escalier en pierre ; elle en fera la ..........douloureuse expérience dans quelques années, mais...
Hier, à la même heure, au même instant que cet instant, elle était assise dans un fauteuil en simili cuir gris souris, casquée d'électrodes, élastiquée d'une pastille à chaque poignet qui enregistrait son rythme cardiaque. Un technicien lui demandait de fermer les yeux, d'ouvrir les yeux, de les fermer à nouveau, de les rouvrir, puis de les fermer ; soudain, des tâches-confettis multicolores illuminaient l'intérieur de ses yeux comme une guirlande de Noël. Elle passait un électro-encéphalogramme.
..........Ceux qui sont atteints de ce mal, ou possèdent quelques connaissances sur sa nature, savent de quoi il est question – il ne ..........s'agit pas de guérison ; ce mal se ne guérit pas mais s'accompagne. Il peut s'installer en viager ou disparaître comme il est ..........venu, comme l'inconnu qui viendrait s'incruster chez vous sans prévenir et commencerait par démonter ce que vous avez ..........mis des heures, des jours, des années à monter, avant de partir sans un mot avec des morceaux du Tout. Après cette ..........visite, il vous faudra accepter une réalité que vous porterez en vous, à jamais : l'absence de résilience.
..........Vous ne retrouverez jamais ce qu'il a emporté.
Le technicien porte une blouse blanche, il est gentil avec elle, lui fait la conversation.
Il installe des petits bouchons sur sa tête précisément sur le pâté de gelée froide. Quand elle rentre à la maison, une fatigue envahit son petit corps tout entier, toujours.
La souffrance, elle ne la ressent pas encore.
Elle ne sait pas encore qu'à grands coups,
sa tête frappera par deux fois l'angle de sa commode en sapin.
Elle a la nausée, allongée sur le tapis de sa chambre, éveillée.
Un filet de sang refroidit sa joue.
Sa tête lui fait mal.
Envie de dormir, à nouveau.
Elle se couche, côté gauche,
encore, peut-être...
La rue.
Elle entend les bruits de la rue.
Regard en coin,
rideaux levés, baissés,
elle aura oublié... demain...
Plier les draps, trouver un prénom à Madame... partir,
se laisser partir...
Cette souffrance,
cette souffrance... elle ne la ressent pas encore.
Et vous ne savez pas tout,
vous ne savez pas ce qu'elle écrit dans son petit cahier...
Pussicat- Nombre de messages : 4846
Age : 57
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: JE, 13 ans et toutes ses dents !
écrire devient, un médicament sans effet secondaire, une parenthèse associant la souffrance, et l'envie de faire de ses pas futurs, des mots pour éviter le pire
un texte qui retrace bien la douleur au quotidien
merci du partage
un texte qui retrace bien la douleur au quotidien
merci du partage
So-Back- Nombre de messages : 3658
Age : 101
Date d'inscription : 04/04/2014
Re: JE, 13 ans et toutes ses dents !
JE - VE ... le cahier, mais c'est bien sûr !
midnightrambler- Nombre de messages : 2606
Age : 71
Localisation : Alpes de Haute-Provence laclefdeschamps66@hotmail.fr
Date d'inscription : 10/01/2010
JE,13 ans et toutes ses dents
Un texte émouvant. Le précieux cahier de "JE"
RICHARD2- Nombre de messages : 160
Age : 64
Date d'inscription : 27/08/2010
Re: JE, 13 ans et toutes ses dents !
pourquoi ces espaces blancs disséminés dans le texte??
le probleme que j'ai avec ce texte, c'est que l'hypothèse de départ, l'interdit du maudit cahier, me parait assez improbable.
le probleme que j'ai avec ce texte, c'est que l'hypothèse de départ, l'interdit du maudit cahier, me parait assez improbable.
hi wen- Nombre de messages : 899
Age : 27
Date d'inscription : 07/01/2011
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