1488

Timide tentative de reprise de l'écriture après de longues années d'interruption.

merci de vos commentaires.

Bonne lecture.

...


Cinquante balais. Et douze années de placard. Mon sac de sport quasi vide se balance au bout de mon bras alors que je descends l’avenue en direction du TJ’s dans l’espoir d’y retrouver une de mes vieilles connaissances. Dans la poche de mon jean, j’ai les quelques billets qu’on m’a remis à ma sortie de taule, quelques heures plus tôt. De quoi tenir quelques semaines en étant raisonnable… ou de me payer une pute et une bouteille de gnole en ne l’étant pas.

Je regarde autour de moi, il n’y a pas de réel changement. Juste un léger décalage. La mode a un peu évolué, rien de frappant pour les femmes curieusement. Les jeunes mecs sont bizarrement coiffés et portent de falses qui les moulent comme des tafioles.  Un truc, c’est que beaucoup de monde avance les yeux rivés sur son Smartphone.

Mais je m’en fous. Je suis libre… libre et préoccupé. Pas de famille, peu d’amis, pas de fric,… et les couilles débordantes d’amour… Va falloir que je m’organise.

Le bon côté de la taule, c’est l’alimentation. C’est tellement de la merde,… si tu veux perdre du poids mec, y a pas de meilleur endroit. Je suis sec comme une trique. En plus, comme t’as pas autre chose à foutre que de soulever de la fonte, en douze ans tu changes pas mal.

Là-bas, si t’es seul tu te fais enculer… et c’est le moins grave qui puisse t’arriver. Alors, même moi qui suis assez peu sociable, j’ai dû faire l’effort de me rapprocher d’un gang : des suprématistes blancs. Parce que mec, dans la boite, si t’es blanc tu vas avec les blancs. C’est comme ça. Les blacks vont avec les blacks, les latinos avec les latinos,…

Et même comme ça, faut faire gaffe à ton cul.

Pour être dans la note, je me suis rasé le crane. Je me suis fait tatouer une croix celtique sur l’avant-bras droit et deux marteaux croisés sur le gauche. Plus un 1488 sur la main. Je suis pas spécialement suprématiste. Je m’en tape un peu en fait. Le seul truc c’est que, là d’où je viens, si tu es un blanc isolé au milieu des blacks, il t’arrive des bricoles.

C’est juste une question de survie tu vois ? Faut choisir un camp. Et quand je dis choisir,… t’as pas vraiment le choix en fait.

Donc voilà. J’ai fait ce qu’il fallait pour survivre et j’ai parfaitement conscience de ce à quoi je ressemble en descendant cette putain d’avenue.

Bon. Je suis pas en train de dire que je suis un ange et que je me suis retrouvé là par hasard. Quand tu prends dix-huit piges et qu’on ne te relâche en conditionnelle qu’au bout de douze, c’est que t’as fait des trucs pas racontables. Et, des trucs pas racontables, j’en ai fait aussi en taule… ce qu’il y a mec, c’est que je me suis pas fait chopper.

Donc remise de peine avec deux ans de mise à l’épreuve. Tout ça, grâce à ma « bonne conduite ». Je me demande parfois s’ils sont vraiment cons ou s’il faut juste qu’ils libèrent de l’espace.

C’est en pensant à ça que j’arrive au TJ’s. La devanture n’a pas beaucoup changé. Elle a dû être repeinte une ou deux fois en douze ans. L’enseigne est toujours la même, un bock de bière stylisé sur un fond vert. Pub irlandais oblige.

Je pousse la porte et le tintement de la clochette m’accueille, comme à l’époque. Je m’attends presque à ce que Melvin soit derrière le bar. Au lieu de ça, c’est un jeune rouquin au cheveu ras qui me toise d’un air méfiant. La peau très claire, constellée de tache de rousseur, le regard noir. Une vraie caricature, le type même du jeune irlandais.

Je lui fais un signe de tête et vais m’assoir à une table, dans le fond. La salle est vide à part deux types qui jouent au billard. C’est une heure creuse. Les gens bossent à cette heure… même les truands, grands ou petits.

Je commande un bock de bière et des cacahuètes, puis je me cale le plus confortablement possible sue la banquette. J’en ai pour trois bonnes heures à attendre. Mais ce n’est pas un problème. La taule t’apprend ça. Tu sais mec ? Une infinie patience.

Les yeux mi-clos, je regarde les deux types qui jouent à la neuf. Ils ne sont pas très bons et je me demande s’il n’y a pas un ou deux billets à se faire en attendant que ça bouge.

Je décide que non. Me fondre dans le décor, c’est ça que je dois faire. Observer et ne pas me faire remarquer.

L’après-midi passe lentement. Les deux gars ont dégagé et un vieux type est entré. Il a pris un café au comptoir en discutant avec le rouquin, puis il s’est barré lui aussi.

Je commande un autre bock en allant pisser. J’en suis à la moitié quand les premiers clients arrivent. Toujours le même genre qu’il y a douze ans. Beaucoup d’ouvriers, quelques motards. De rares femmes qui viennent boire un verre entre copines après avoir quitté le bureau. La première vague habituelle.
Ceux que j’attends viendront un peu plus tard.

Je patiente tranquillement devant une nouvelle coupelle de cacahuètes et un troisième bock de bière. Je ne suis pas pressé. Personne ne m’attend.

C'est plutôt fluide, équilibré, ça tient sur la longueur, c'est classe. Peut-être un peu d'affectation à certains endroits. Le passage sur les suprémacistes (à ne pas confondre avec les suprématistes, artistes du mouvement du même nom) est un tantinet trop pesant à mon goût, on voit tout de suite où ça va mais ça s'attarde…

Pour "suprémaciste", je l'avais écrit comme ça... Word me l'a souligné en rouge et m'a proposé "suprématiste"... On ne discute pas avec Word, même quand il a tort. Encore souligné ici d'ailleurs...

Pour le reste,...

Fraîchement écrit, à peine relu,... c'est le début d'un truc plus long.

Par contre, si tu sais où ça va, tu m'en touches un mot ? Parce que moi je n'en ai aucune idée.

Merci d'avoir lu et commenté.

Quand je disais qu'on voit où ça va, je parlais du passage sur les suprémacistes: à la première lecture il m'a semblé que l'idée "j'ai fait ça parce qu'il le fallait mais idéologiquement je m'en fous" était présentée de façon trop appuyée. Mais en relisant, je me dis que ça le fait. Bonne continuation alors, au plaisir de lire la suite !

Merci pour les commentaires.

Une petite suite rapidement écrite. C'est un premier jet... Soyez indulgents.

…

Je ne l’avais encore jamais rencontré, mais j’ai tout de suite su que c’était lui. Josey a une gueule comme on en voit peu. Cheveux gris, tondus très courts, bouc argenté, musculature puissante, tatouage « AB » bien visible sur son avant-bras gauche, il correspond parfaitement à l’image que je me faisais de lui.

AB, pour Aryan Brotherhood. C’est une marque déposée, et il en est le représentant local.

- Victor Cahill ? Yep ! Farrell m’a parlé de toi.

Nous sommes assis à son bureau, dans l’arrière salle du TJ’s. Nous baignons dans une lumière tamisée qui se reflète sur la bouteille de Jameson posée entre nous.

- Ouais. C’est lui qui m’a envoyé. Il m’a dit que tu pourrais me trouver quelque chose.

Josey se laisse aller contre le dossier de sa chaise. Il se lèche le pouce droit et s’en sert pour lisser sa moustache.
Il me toise longuement avant de s’envoyer une gorgée de whiskey.

- Tu sais conduire Cahill ?
- Je savais… ça devrait encore fonctionner.

Il a un sourire froid.

- Tu dois pointer quand chez ton agent de probation ?

J’ai envie de lui dire que j’en ai rien à foutre. Mais, à mon avis, s’il me pose cette question c’est qu’il ne veut pas que je sois recherché. Probablement que ça poserait problème pour le job qu’il pense me confier.

- Demain, et ensuite fin de semaine prochaine.

Il pose une liasse de billets devant moi, toujours souriant.

- Va t’acheter une caisse Cahill. Une charrette de bouseux.

Il sort un cigare de sa poche de poitrine et prend le temps de l’allumer.

- Une brouette passe partout qu’on remarquera pas trop chez les culs-terreux.

OK. Je vais faire le facteur. Pourquoi pas ? C’est pas comme si je croulais sous les propositions après tout. Non ?

- Tu vas pointer chez ton probateur, tu achètes une caisse, et tu me retrouves sur le parking, juste derrière, demain, en début d’après-midi.

Il se lève, me signifiant la fin de la conversation.

- Attend une seconde… C’est quoi le colis ?

Son sourire devient moqueur.

- Tu verras ça demain Cahill. Ça devrait te plaire…

…

J’ai choisi un pickup. Un Dodge RAM de 2005, double cabine, à la peinture grise un peu défraîchie et monté sur de gros boudins. Pour compléter l’équipement, je me suis payé une casquette kaki, et une chemise à carreaux, des chaussures de sécurité avec coque de protection métallique intégrée et des lunettes de soleil.

J’examine mon reflet dans une vitrine. Parfait. J’ai l’air de débarquer d’un coin perdu du Wyoming ou du Nebraska.

J’ai trouvé uns station de rap redneck et c’est sur le son des Jawga Boyz que je stationne derrière le TJ’s.

Il fait chaud. Le soleil écrase l’esplanade poussiéreuse et déserte. Sur la droite, le long du grillage, un amoncellement de poubelles et de détritus en tous genres masque la vue sur la voie rapide. Putain, ça pue par ici…

Josey devait m’attendre. J’ai à peine coupé le contact que la porte arrière du bar s’ouvre et qu’il dévale les trois marches vermoulues de l’escalier de bois. De jour, il a l’air encore plus massif, plus impressionnant… même pour un type comme moi.

Il me fait un salut nazi auquel je réponds mollement… Je suis pas fan des symboles moi. Le malabar ne s’en formalise pas et se retourne vers la porte qui s’est refermée.

- Allez ! Amène-toi ! Pas que ça à foutre moi !

La porte reste close pour l’instant et Josey grimace en marmonnant quelque chose dans sa barbe. Il s’approche, un sac de sport au bout du bras qu’il vient poser sur le capot du Dodge.

- Salut Cahil. Bien passé avec ton probateur ?
- Yep ! Je suis un bon garçon… Pas eu de problème.

Il ne répond pas et tire sur le zip du sac à l’intérieur duquel il y a un fusil à pompe, un Winchester M1300 Defender, ainsi qu’un Glock 17 et des munitions. Du classique, de l’éprouvé, quasiment du standard. De la poche arrière de son pantalon il tire une grosse liasse de billets et me la tend.

- Pour tes frais… Si tout se passe bien, tu auras la même à l’arrivée.

J’en évalue l’épaisseur en me disant que ça fait, au bas mot, le double de ce que je pensais empocher.

- Hé mec ! C’est quoi que je vais trimbaler ? Une tête de missile nucléaire ?

Josey a un sourire amusé.

- Presque Cahill… Presque.

Il se tourne à nouveau vers la porte.

- Oh ! Tu le bouges ton cul ?

Lentement le battant pivote et elle apparaît.

Susie. Petit bout de femme aux cheveux bleus d’à peine un mètre cinquante cinq.

...

Comment dire ? Il y a pour moi quelque chose qui fonctionne et quelque chose qui coince.
Ce qui fonctionne c’est le personnage. Même s’il utilise ( trop) un argot (trop conventionnel) qui ne colle pas vraiment avec ses descriptions assez élaborées, on voit par ses yeux, on commence à avoir envie de savoir ce qu’il va vivre, on est déjà entré dans l’histoire et ça c’est beaucoup.

Ce qui coince : trop de lieux communs sur les prisons américaines...je crois qu’on ne peut pas faire l’économie, quand on écrit sur un pays et un milieu étrangers, d’un travail de documentation qui aille au delà des films que tout le monde a vus. Amener des choses que le lecteur ne connaît pas.
Et puis l’héroïne surgit trop vite et là encore ça ressemble trop à un film qu’on a vu.

Je veux dire : on voit trop vite que c’est l’héroïne et où tu veux en venir : il va finir par coucher avec elle.

Je veux dire : on voit trop vite que c’est l’héroïne et où tu veux en venir : il va finir par coucher avec elle.

Merci d'avoir lu et commenté.

Alors.

Les prisons américaines ne sont absolument pas le sujet. Je n'en ai parlé au début que pour donner un background au personnage principale et expliquer rapidement pourquoi il est dans un gang de suprémacistes blancs. Donc, du coup, et même si je me suis documenté, j'avoue que je ne m'en suis pas préoccupé plus que ça. Parce que là où on en est dans l'histoire, ce n'est plus le sujet.

Concernant l'héroïne... Non. Il ne couchera pas avec elle. Mais, si tu y as cru, c'est plutôt bon signe. Parce que ça signifie que, justement, le lecteur est embarqué sur une fausse piste et que, donc, la suite devrait pouvoir l'intéresser... et peut-être même le surprendre. Qui sait ?

Quant à l'argot, les dialogues, les descriptions... Comme expliqué, c'est un premier jet et j'ai toujours besoin d'un minimum de recul pour corriger, modifier, réécrire certains passages. D'où l'importance de commentaires constructifs comme le tien pour mettre le doigts sur ce qui ne fonctionne pas.

Merci encore de m'avoir lu.