Les larmes du banyan
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Les larmes du banyan
Sans frontière
Lorsqu'on le ramena dans la cellule, sans ménagement aucun, tous s'aperçurent qu'il avait changé. Et chacun, en son for intérieur, se laissa grignoter par une sorte d'envie. Même si l'on avait craint pour lui un interrogatoire aussi agressif que celui de Giorgio, encore en train de geindre depuis la veille, recroquevillé sur sa jambe cassée, chacun pouvait constater à présent que quelque chose d'autre était arrivé à Stanislas. Ses appareils photos confisqués ou piétinés l'avant-veille l'avaient peu chagriné mais il était resté grave, préoccupé. A présent, le sourire à peine étiré dans sa barbe de dix jours, grisonnante, était indifférent, lointain. En aucun cas il ne s'agissait de folie. C'était plutôt comme une vision, revenue avec lui dans leur cellule. Stan, silencieux malgré la tache de sang à hauteur de son genou , ne les voyait pas ou plus, absorbé par son extase. Comme le Bouddha qui médite sous un banyan, comme le Christ à peine sorti d'un séjour au désert, il était parmi eux mais ses yeux qui fixaient la muraille voyaient au-delà de la pierre froide et suintante. Voyaient-ils le tissé luxueux d'un ciel que, depuis bien des semaines, il leur était interdit de contempler, impossible même d'apercevoir, suivaient-ils la confluence des gouttes que l'averse sonore de la veille avait fait couler jusque par le soupirail ou accompagnaient-ils la vitalité tortue des racines du grand banyan de la cour, drapant l'arbre de vert puissant, ardemment puisé dans l'humus d'un sous-bois proche? Dans ses yeux verts extatiques, à défaut de pouvoir, demeurait une lueur étrange, on aurait dit la joie de savoir, de voir, enfin.
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Il y a quelques mois, les derniers membres de l'O.N.G et le photographe ont été libérés. Lorsque l'avion du G.L.A.M l'a ramené à Villacoublay, avec mille précautions et une chaise roulante, Stanislas ne percevait plus sa vie d' avant que comme un étrange décor. Étranger. Une opération, puis deux. Douleur fidèle. Un staphylocoque entêté. Morphine. Dans les hallucinations dorées de l'hôpital, Stan a creusé, creusé encore ; compris enfin, avec rage et certitude ce qu'il n'avait fait qu'entrevoir là-bas, au-delà de la muraille de sa prison. Sincère, pour survivre, il a joué avec l'idée de fatalité, supporté l'insupportable, comme chacun, pour se dire : « Je vaincrai....j'ai vaincu !» . Mais le jouet, c'est lui, ligoté par l'illusoire sérénité du Bouddha, des racines du monde. Il doit avouer qu'il y a consenti , presque avec reconnaissance. Pour parvenir à chaque lendemain . Puis au suivant. Un jouet ! Mais pas le jouet de ces hommes armés et hurlants, terrorisés par la cruauté de leurs chefs ! En fait, il l'a toujours su : de sa vie, nul d'entre nous, jamais, ne peut réchapper. Jouer au Bouddha sous un banyan, au Christ dans les sables du désert ne peut sauver quiconque. Les humiliations subies là-bas, la férocité des interrogatoires, la haine stupide des geôliers l'ont détaché de ses dernières superstitions. Ce monde n'est pas humain.
Il éprouve de la pitié envers Muriel qui a changé, s'est éloignée de lui bien malgré elle, une vraie compassion pour la vie qu'il lui faudra affronter, seule. Ces derniers mois l'ont convaincu que leurs mondes étaient devenus différents. Certaines expériences sont incommensurables ; même à trente-cinq ans, incommunicables. Il a pourtant publié son histoire. Est resté dans son fauteuil, mais pas sagement. Par devoir. Puis il a joué au billard une fois et encore une fois pour faire plaisir à Muriel. Anesthésié, charcuté. Découdre, remplacer, ajuster le meccano, recoudre encore et :"Courage!" et: "Tenez bon " et étonné: "Vous avez de la chance de vous en sortir comme cela!" Il a remercié tout le monde , souri poliment. "Il faut toujours être poli avec les gens, disait la grand-mère , un jour on peut avoir besoin d'eux!"
Sa chair a encaissé; il a tenu. On lui promet qu'il remarchera; enfin presque. Ou bien est-ce à Muriel qu'on a promis? Où est-il lui? Il sourit doucement. Où? Pour ceux qu'on dit ses semblables il a fait ce qu'il pouvait. Tout est acquitté. Trop de laideurs. Il est libre désormais. Il sourit à son image, dans sa barbe bien taillée, filetée de gris. Il a revêtu le costume de cérémonie acheté pour la remise du prix Albert Londres, le clou de sa jeune carrière. C'était quand déjà ? Tout se brouille. Peu importe. Il vérifie l'appui de sa béquille. Il est un homme libre, un homme debout et ses yeux qui fixent l'eau du miroir rejoignent des confluences infinies. Au-delà des certitudes, des espoirs et des doutes, quelque part, il est l'eau qui ruisselle, abreuve les racines tortueuses d'un arbre paisible parmi ses semblables. Il porte sa main à hauteur de sa tempe, sourit une dernière fois de ce côté du miroir et tire. Infinies, des forêts pleuvent.
Lorsqu'on le ramena dans la cellule, sans ménagement aucun, tous s'aperçurent qu'il avait changé. Et chacun, en son for intérieur, se laissa grignoter par une sorte d'envie. Même si l'on avait craint pour lui un interrogatoire aussi agressif que celui de Giorgio, encore en train de geindre depuis la veille, recroquevillé sur sa jambe cassée, chacun pouvait constater à présent que quelque chose d'autre était arrivé à Stanislas. Ses appareils photos confisqués ou piétinés l'avant-veille l'avaient peu chagriné mais il était resté grave, préoccupé. A présent, le sourire à peine étiré dans sa barbe de dix jours, grisonnante, était indifférent, lointain. En aucun cas il ne s'agissait de folie. C'était plutôt comme une vision, revenue avec lui dans leur cellule. Stan, silencieux malgré la tache de sang à hauteur de son genou , ne les voyait pas ou plus, absorbé par son extase. Comme le Bouddha qui médite sous un banyan, comme le Christ à peine sorti d'un séjour au désert, il était parmi eux mais ses yeux qui fixaient la muraille voyaient au-delà de la pierre froide et suintante. Voyaient-ils le tissé luxueux d'un ciel que, depuis bien des semaines, il leur était interdit de contempler, impossible même d'apercevoir, suivaient-ils la confluence des gouttes que l'averse sonore de la veille avait fait couler jusque par le soupirail ou accompagnaient-ils la vitalité tortue des racines du grand banyan de la cour, drapant l'arbre de vert puissant, ardemment puisé dans l'humus d'un sous-bois proche? Dans ses yeux verts extatiques, à défaut de pouvoir, demeurait une lueur étrange, on aurait dit la joie de savoir, de voir, enfin.
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Il y a quelques mois, les derniers membres de l'O.N.G et le photographe ont été libérés. Lorsque l'avion du G.L.A.M l'a ramené à Villacoublay, avec mille précautions et une chaise roulante, Stanislas ne percevait plus sa vie d' avant que comme un étrange décor. Étranger. Une opération, puis deux. Douleur fidèle. Un staphylocoque entêté. Morphine. Dans les hallucinations dorées de l'hôpital, Stan a creusé, creusé encore ; compris enfin, avec rage et certitude ce qu'il n'avait fait qu'entrevoir là-bas, au-delà de la muraille de sa prison. Sincère, pour survivre, il a joué avec l'idée de fatalité, supporté l'insupportable, comme chacun, pour se dire : « Je vaincrai....j'ai vaincu !» . Mais le jouet, c'est lui, ligoté par l'illusoire sérénité du Bouddha, des racines du monde. Il doit avouer qu'il y a consenti , presque avec reconnaissance. Pour parvenir à chaque lendemain . Puis au suivant. Un jouet ! Mais pas le jouet de ces hommes armés et hurlants, terrorisés par la cruauté de leurs chefs ! En fait, il l'a toujours su : de sa vie, nul d'entre nous, jamais, ne peut réchapper. Jouer au Bouddha sous un banyan, au Christ dans les sables du désert ne peut sauver quiconque. Les humiliations subies là-bas, la férocité des interrogatoires, la haine stupide des geôliers l'ont détaché de ses dernières superstitions. Ce monde n'est pas humain.
Il éprouve de la pitié envers Muriel qui a changé, s'est éloignée de lui bien malgré elle, une vraie compassion pour la vie qu'il lui faudra affronter, seule. Ces derniers mois l'ont convaincu que leurs mondes étaient devenus différents. Certaines expériences sont incommensurables ; même à trente-cinq ans, incommunicables. Il a pourtant publié son histoire. Est resté dans son fauteuil, mais pas sagement. Par devoir. Puis il a joué au billard une fois et encore une fois pour faire plaisir à Muriel. Anesthésié, charcuté. Découdre, remplacer, ajuster le meccano, recoudre encore et :"Courage!" et: "Tenez bon " et étonné: "Vous avez de la chance de vous en sortir comme cela!" Il a remercié tout le monde , souri poliment. "Il faut toujours être poli avec les gens, disait la grand-mère , un jour on peut avoir besoin d'eux!"
Sa chair a encaissé; il a tenu. On lui promet qu'il remarchera; enfin presque. Ou bien est-ce à Muriel qu'on a promis? Où est-il lui? Il sourit doucement. Où? Pour ceux qu'on dit ses semblables il a fait ce qu'il pouvait. Tout est acquitté. Trop de laideurs. Il est libre désormais. Il sourit à son image, dans sa barbe bien taillée, filetée de gris. Il a revêtu le costume de cérémonie acheté pour la remise du prix Albert Londres, le clou de sa jeune carrière. C'était quand déjà ? Tout se brouille. Peu importe. Il vérifie l'appui de sa béquille. Il est un homme libre, un homme debout et ses yeux qui fixent l'eau du miroir rejoignent des confluences infinies. Au-delà des certitudes, des espoirs et des doutes, quelque part, il est l'eau qui ruisselle, abreuve les racines tortueuses d'un arbre paisible parmi ses semblables. Il porte sa main à hauteur de sa tempe, sourit une dernière fois de ce côté du miroir et tire. Infinies, des forêts pleuvent.
obi- Nombre de messages : 531
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Les larmes du banyan
J'ai dû le revisiter. Il ne se livre pas d'emblée, même il dérange. On s'est apprivoisé. La langue n'est pas facile.
Il y a un vrai beau sujet, qui se dévoile lecture après lecture. Un vrai beau personnage.
Le deuxième et le troisième paragraphes me perdent un peu, tu es exigent avec le lecteur ou ce qui te semble explicite ne l'est pas pour moi. Mais au bout je m'y retrouve et ne reste qu'une volonté de le comprendre, de le saisir. Je trouve la fin un peu paradoxale, pas dans la logique du personnage qui a tracé jusque-là une sorte d'acceptation assumée, sans fatalisme, transcendante. Peut-être était-ce trop pour lui, mais j'aurais aimé ce quelque chose de plus qu'humain, désespéré mais jusqu'au bout, définitif.
Bref, pas une lecture neutre.
Il y a un vrai beau sujet, qui se dévoile lecture après lecture. Un vrai beau personnage.
Le deuxième et le troisième paragraphes me perdent un peu, tu es exigent avec le lecteur ou ce qui te semble explicite ne l'est pas pour moi. Mais au bout je m'y retrouve et ne reste qu'une volonté de le comprendre, de le saisir. Je trouve la fin un peu paradoxale, pas dans la logique du personnage qui a tracé jusque-là une sorte d'acceptation assumée, sans fatalisme, transcendante. Peut-être était-ce trop pour lui, mais j'aurais aimé ce quelque chose de plus qu'humain, désespéré mais jusqu'au bout, définitif.
Bref, pas une lecture neutre.
'toM- Nombre de messages : 245
Age : 66
Date d'inscription : 10/07/2014
Re: Les larmes du banyan
J'ai plutôt apprécié la lecture de ce texte (je trouve le dernier paragraphe particulièrement efficace), malgré quelques passages que je ne comprends pas ("la vitalité tortue(euse) des racines ..." ?) et un début trop ampoulé à mon goût.
Quelque chose m'a laissé sur ma faim en ce qui concerne l'agencement des paragraphes. L'ensemble, je crois, pourrait être plus percutant en changeant l'ordre.
Merci pour le partage.
Quelque chose m'a laissé sur ma faim en ce qui concerne l'agencement des paragraphes. L'ensemble, je crois, pourrait être plus percutant en changeant l'ordre.
Merci pour le partage.
Hop-Frog- Nombre de messages : 614
Age : 34
Date d'inscription : 11/04/2012
Re: Les larmes du banyan
Ton texte ? une obsidienne.
Merci pour cette traversée. Ces fulgurances lentes et ces flous incandescents.
Merci pour cette traversée. Ces fulgurances lentes et ces flous incandescents.
Polixène- Nombre de messages : 3281
Age : 59
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
Re: Les larmes du banyan
oui l'obsidienne : la transparence noire, le volcanisme très ancien, le tranchant.
J'ai relu et relu et à chaque lecture je me suis sentie plus en accord avec ce récit d'une profondeur si insondable, pleine d'interrogations sans réponses toutes faites.
Se suicide-t-on d'avoir contemplé l'humain dans son plus inhumain, d'en avoir été modifié, de l'avoir accepté ?
J'ai relu et relu et à chaque lecture je me suis sentie plus en accord avec ce récit d'une profondeur si insondable, pleine d'interrogations sans réponses toutes faites.
Se suicide-t-on d'avoir contemplé l'humain dans son plus inhumain, d'en avoir été modifié, de l'avoir accepté ?
Re: Les larmes du banyan
mais on peut le lire de tant de manières : la métaphore du banian, ses racines descendant des branches pour encore mieux investir la puissance de l'humus, c'est peut-être ce qui a manqué au héros, privé de la force de ses deux jambes. La compassion des plantes, pour nous ?
C'est là qu'on sent ce qu'est l'inspiration : pas de théorie, des choses qui surgissent avec leur sens.
C'est là qu'on sent ce qu'est l'inspiration : pas de théorie, des choses qui surgissent avec leur sens.
Re: Les larmes du banyan
Merci à vous qui commentez mon texte:
'toM:"Il ne se livre pas d'emblée" C'est ce qui m'a été souvent reproché. J'avais pourtant fait quelques efforts mais ta lecture est très attentive. Oui, il y a un saut dans le texte, matérialisé par les points de suspension, car il y a eu une suite à mon début, racontant une évolution des événements et du personnage( quinze écritures différentes sont intervenues lors d'un atelier de confinement). Puis j'ai récupéré mon personnage à la fin avec Muriel ( cadeau d'un intervenant) et ai essayé d'en faire un concentré de ce que j'avais en tête au début lorsque j'avais lancé le texte.
Pour le publier ici et sur mon blog , je n'ai pris que ce que j'avais moi-même écrit (début et fin). Il m'a semblé que le texte pouvait se tenir ainsi, au prix de quelques efforts, ceux que vous avez tous fait pour le lire...
P.S: J'avoue avoir lu et relu "Tout va bien" et avoir été incapable de comprendre vraiment le texte et donc de le commenter. Je ne sais pas si ce sont les personnages qui me gênent, la maladie évoquée, l'ambiance... Ton écriture ironique me plonge dans un malaise que je ne parviens pas à définir. Bref, pour moi non plus la lecture de ton texte n'a pas été neutre.
Hop-Frog:Merci de tes commentaires. "tortu" est un adjectif peu usité, "littéraire" précise le petit Larousse. Je dois être dans ma période snob.... ;-)
Merci Polixène et seyne:
L'obsidienne est une pierre que j'aime. Son symbolisme me parle. Je me suis posé la même question que toi seyne. J'avoue que j'ai cherché sur internet et , hélas, après leur libération, des journalistes se sont suicidés. Ils avaient vécu des détentions éprouvantes. Mais se suicide-t-on pour une seule raison? Qui sait ce que charrient nos tortueuses racines intérieures?
P.S: Encore une fois, puis-je te ou vous prier de venir redire tout le bien ou le mal que vous pensez de mon texte sur mon blog?: egwalsknirblog.wordpress.com
ça le fera vivoter....
'toM:"Il ne se livre pas d'emblée" C'est ce qui m'a été souvent reproché. J'avais pourtant fait quelques efforts mais ta lecture est très attentive. Oui, il y a un saut dans le texte, matérialisé par les points de suspension, car il y a eu une suite à mon début, racontant une évolution des événements et du personnage( quinze écritures différentes sont intervenues lors d'un atelier de confinement). Puis j'ai récupéré mon personnage à la fin avec Muriel ( cadeau d'un intervenant) et ai essayé d'en faire un concentré de ce que j'avais en tête au début lorsque j'avais lancé le texte.
Pour le publier ici et sur mon blog , je n'ai pris que ce que j'avais moi-même écrit (début et fin). Il m'a semblé que le texte pouvait se tenir ainsi, au prix de quelques efforts, ceux que vous avez tous fait pour le lire...
P.S: J'avoue avoir lu et relu "Tout va bien" et avoir été incapable de comprendre vraiment le texte et donc de le commenter. Je ne sais pas si ce sont les personnages qui me gênent, la maladie évoquée, l'ambiance... Ton écriture ironique me plonge dans un malaise que je ne parviens pas à définir. Bref, pour moi non plus la lecture de ton texte n'a pas été neutre.
Hop-Frog:Merci de tes commentaires. "tortu" est un adjectif peu usité, "littéraire" précise le petit Larousse. Je dois être dans ma période snob.... ;-)
Merci Polixène et seyne:
L'obsidienne est une pierre que j'aime. Son symbolisme me parle. Je me suis posé la même question que toi seyne. J'avoue que j'ai cherché sur internet et , hélas, après leur libération, des journalistes se sont suicidés. Ils avaient vécu des détentions éprouvantes. Mais se suicide-t-on pour une seule raison? Qui sait ce que charrient nos tortueuses racines intérieures?
P.S: Encore une fois, puis-je te ou vous prier de venir redire tout le bien ou le mal que vous pensez de mon texte sur mon blog?: egwalsknirblog.wordpress.com
ça le fera vivoter....
obi- Nombre de messages : 531
Date d'inscription : 24/02/2013

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