La demande

avant que je ne borde
le grand monde et ses mers
avant que je ne file
le grand pull de la terre
avant que je ne chante
ses grands airs en corail
avant que je ne ripe
sur sa surface épaisse
avant que ne reviennent
les grands temps des malheurs
avant que ne s’immiscent
la douleur et la peur
veux-tu bien avec moi
vibrer d’un seul écho

d'un seul echo, vibrer encore sur les rives salées
ou se prélassent les pieds fatigués, les années
dont les maux les ont bercé avec l'incertitudes
qui sied quand les peurs enfantent des habitudes


bravo j'aime ce rythme d'avant que qui donne le là pour l'après

Bonjour Pussicat,
De ce poème j'ai beaucoup aimé les deux parties suivantes :
"avant que je ne borde
le grand monde et ses mers
avant que je ne file
le grand pull de la terre
avant que je ne chante
ses grands airs en corail
avant que je ne ripe
sur sa surface épaisse"
et
"veux-tu bien avec moi
vibrer d’un seul écho"
composées de belles images, (les quatre vers non cités me semblent trop explicites dans l'ensemble)
Une "demande" simple et claire au bon rythme.

Éclaircie

Bonjour Pussicat,
De ce poème j'ai beaucoup aimé les deux parties suivantes :
"avant que je ne borde
le grand monde et ses mers
avant que je ne file
le grand pull de la terre
avant que je ne chante
ses grands airs en corail
avant que je ne ripe
sur sa surface épaisse"
et
"veux-tu bien avec moi
vibrer d’un seul écho"

Pareil.
Les quatre vers omis me semblent inappropriés dans le sens où les malheurs, la douleur et la peur, et la sueur sont toujours présents, dans le monde, sinon pour toi, pour quelqu'un, quelque part. Voudrais-tu te renfermer sur je et tu ?

Amicalement

J'ai toujours quelques difficultés avec l'anaphore qui a une vocation quelque peu hypnotiqueà la manière d'un mantra. Il faut alors que la répétition régulière de la partie anaphorIique soit porteuse d'un rythme quasi musical pour que l'effet soit pleinement réussi. Ici, tel n'est pas vraiment le cas, avec le côté un peu « lourd » de la formule « avant que je ne… ». Cela dit le texte est parcouru de jolies formules telles que «e grand pull de la terre » ou «crands airs en corail » qui lui donnent une certaine allure.

Hello Pussicat, merci pour le partage !

Je peux comprendre les commentaires ci-dessus sur l'anaphore. Je suis en revanche un fervent défendeur du "avant que je ne", qui m'a paru au contraire apporter une sorte d'articulation fébrile, que je trouve bien aller avec le fond de ce joli poème. Quelque chose de particulièrement touchant dans cette formulation, dite dans une sorte d'empressement, comme écrite dans une lettre d'amour.
Ai beaucoup aimé les grands airs de corail aussi !

Ce poème en hexasyllabes se compose de 3 parties (1 à 6, 7 à 12, 13 et 14). Le recours au "ne" explétif confère au propos une touche d'élégance.

L'anaphore (locution conjonctive de temps : "avant que") crée un effet de martèlement au fil des deux premières parties, matérialisant l'obsession de l'échéance à venir.

Les vers 1 à 6 développent le thème de la création (artisanat : "borde", "file", art : "chante") avec le jeu de mots ("airs en corail"/"air en choral") qui met en exergue une somptuosité vocale à l'œuvre.

En écho antithétique, les vers 7 à 12 sont dévolus à un véritable exercice de destruction (blessure suggérée : "je [...] ripe/sur sa surface épaisse", images de fléaux inévitables ("reviennent/les [...] malheurs", "s'immiscent/la douleur et la peur").

Toute la beauté que je suis en état de créer, je devrais ainsi la voir disparaître. Les 4 occurrences de l'adjectif "grand" soulignent, par effet de contraste, la modestie de la condition humaine. Les sons "an" et "eur" (que l'on reçoit ici comme un "heurt") retentissent comme autant de points d'appui douloureux à cette désagrégation.  

C'est la considération de ce champ de ruines de l'existence qui justifie la question fermée des deux derniers vers, cette "demande" annoncée par le titre et qui prend l'aspect non d'une invite, mais d'une prière adressée à l'Autre (adverbe : "bien"). Ardemment désirée, la mélodie des corps aboutira-t-elle à une combustion spontanée qui fera renaître de ses cendres le phénix amoureux ?

Merci pour ce partage !

Pour l'usage de l'anaphore j'invite à relire le "Notre Père" de notre cher Prévert.
Amitiés

très beau.
mon passage préféré :
avant que je ne ripe
sur sa surface épaisse