Et d'un œil sombre elle a souri
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Et d'un œil sombre elle a souri
https://www.youtube.com/watch?v=sdy4ell_dtM&feature=related
Et d'un œil sombre elle a souri. La rustaude ! Elle sait très bien, elle, ce que moi je vis en moi. Pourquoi qu'elle a décidé que je dois payer la note ? T'en as pas assez de me dire que je dois payer la note que tu dois encore en plus de surcroît me regarder d'un œil noir? Non mais, des fois, que je lui ai dit en laissant mes cordes vocales bien flasques pour pas qu'elle entende.
En fait plus j'y pense, plus je me dis que ç'a toujours été comme ça. Terminé par un œil noir. Mais cette fois-ci, c'est comme-ci c'était pire, comme si elle s'en fichait vraiment. De moi.
Il doit être environ cinq heures du matin, et je n'ai pas encore dormi. Je me demande si les gens s'endorment facilement quand leur bourreau ronfle à côté. Attention ! D'un ronflement léger, subtil, presqu'érogène. Mais quand même : leurs bourreaux.
Ben en fait, c'est simple. Ça a commencé d'une manière extraordinaire ; de la même manière que ça commence toujours : un genre de regard que tu crois qu'il est plus important qu'un autre. Je me demande ce qu'on y met dedans ce regard. Sûrement quelques amandes, un peu d'ondée, Tom Waits qui chante et pis des sentiments. Du vent quoi ! (Sauf pour Tom Waits, qui est un ouragan). Je l'ai prise par la taille et pis je lui ai dit qu'elle me faisait penser à un soldat de plomb, mais en vachement bien peint, à un genre de début de printemps vers le mois du mois d'août, à un pianiste qui aurait trop bu et dont les doigts s'affolent. Elle est belle comme une fossette ou comme un puits décoré de houx sauvage. Il y a, parfois, comme un chapelet d'oiseaux minuscules et géniaux qui courent dans l'encolure de ses seins chamarrés que je voudrais croquer. Et puis ses yeux sont comme des écureuils que les sables caressent.
Elle est jolie, quoi. Et pis je l'aime bien. Et pis après on sort ensemble.
Alors… oui, o.k., des fois, c'est vrai j'ai pensé à d'autres filles ou bien à la quitter, mais en fait je l'aime bien. Beaucoup même. Mais au bout d'un moment, on s'habitue à ce que les histoires d'amour finissent. Mal. Je me dis que ça doit être normal, comme un genre de règle pour prouver qu'on s'aimait bien, un passage obligé. Mais là c'est comme-ci c'était la goutte qui fait déborder le vase, comme si je supportais plus. Comme si j'avais pas tant que ça adoré son œil noir, ce serait la fois de trop, qu'on dirait si on saurait. (Ce que c'est que ce genre de relation, je veux dire !).
Alors bon, moi je suis là, comme un con, pis à côté t'as elle qui ronfle, le bourreau. Prêt à lancer l'assaut, comme elle a dit, même si elle l'a pas dit exactement comme ça, désolé si je m'en rappelle plus. Et en définitive on est là comme deux cons, pour une énième fin. Alors je me souviens plus comment c'est venu, si même c'est pas la fatigue ou l'alcool qui m'a fait penser à ça, mais je me suis dit comme ça que j'en avais marre d'entendre que mon bourreau il ronfle. C'est presque moins sexy que quand elle m'a redit qu'elle croit qu'elle m'aime plus trop ; ça me les brise ! Surtout que moi je me rappelle très bien qu'elle ressemble à un soldat de plomb bien peint, alors au moins qu'elle voie que je vois. C'est comme ça en réfléchissant pas que je suis allé à la fenêtre pour prendre un bol d'air.
Le vide, c'est beau. C'est aussi comme un soldat de plomb, mais en bien peint, mais en mieux. C'est comme une chaleur. C'est un peu comme quand on va à la piscine et qu'on n'ose pas sauter des dix mètres, c'est excitant (mais plus : que dix et que excitant). C'est comme si cette fosse c'était enfin le bourreau que j'élis. Comme si ce puits sans fin de ses bras délicat voulait être l'accueil des écueils de mes nuits ; comme une odeur en creux caressant mes pupilles. Je contemple le trou et je veux y plonger, c'est mon appel au large : marin, enfin ! Sans bourreau, ici, mon hôtesse, la fosse, est sensuelle et douce. J'enivre mes rétines de sa chaude noirceur, le vide est délectable. Avant de m'y pencher, je me demande quand même s'il n'y a pas maldonne. Mais là, mon hôtesse insensée ne ronfle pas et n'a pas un œil noir. Insolent et serein, j'ausculte son macabre. Alors quand je me penche, je sens, insensiblement plus, le vent de son ardeur tourner dans mes cheveux et des fourmis fugaces qui parcourent mon ventre. Comme quand on tombe amoureux, au début.
Et pis, finalement, j'ai dû me gourrer, que je me dis, mais très vite, car ça va vite. J'ai dû me gourer pis aller vers un autre bourreau, que je pense, mais de plus en plus vite, car là, ça se rapproche.
Et d'un œil sombre elle a souri. La rustaude ! Elle sait très bien, elle, ce que moi je vis en moi. Pourquoi qu'elle a décidé que je dois payer la note ? T'en as pas assez de me dire que je dois payer la note que tu dois encore en plus de surcroît me regarder d'un œil noir? Non mais, des fois, que je lui ai dit en laissant mes cordes vocales bien flasques pour pas qu'elle entende.
En fait plus j'y pense, plus je me dis que ç'a toujours été comme ça. Terminé par un œil noir. Mais cette fois-ci, c'est comme-ci c'était pire, comme si elle s'en fichait vraiment. De moi.
Il doit être environ cinq heures du matin, et je n'ai pas encore dormi. Je me demande si les gens s'endorment facilement quand leur bourreau ronfle à côté. Attention ! D'un ronflement léger, subtil, presqu'érogène. Mais quand même : leurs bourreaux.
Ben en fait, c'est simple. Ça a commencé d'une manière extraordinaire ; de la même manière que ça commence toujours : un genre de regard que tu crois qu'il est plus important qu'un autre. Je me demande ce qu'on y met dedans ce regard. Sûrement quelques amandes, un peu d'ondée, Tom Waits qui chante et pis des sentiments. Du vent quoi ! (Sauf pour Tom Waits, qui est un ouragan). Je l'ai prise par la taille et pis je lui ai dit qu'elle me faisait penser à un soldat de plomb, mais en vachement bien peint, à un genre de début de printemps vers le mois du mois d'août, à un pianiste qui aurait trop bu et dont les doigts s'affolent. Elle est belle comme une fossette ou comme un puits décoré de houx sauvage. Il y a, parfois, comme un chapelet d'oiseaux minuscules et géniaux qui courent dans l'encolure de ses seins chamarrés que je voudrais croquer. Et puis ses yeux sont comme des écureuils que les sables caressent.
Elle est jolie, quoi. Et pis je l'aime bien. Et pis après on sort ensemble.
Alors… oui, o.k., des fois, c'est vrai j'ai pensé à d'autres filles ou bien à la quitter, mais en fait je l'aime bien. Beaucoup même. Mais au bout d'un moment, on s'habitue à ce que les histoires d'amour finissent. Mal. Je me dis que ça doit être normal, comme un genre de règle pour prouver qu'on s'aimait bien, un passage obligé. Mais là c'est comme-ci c'était la goutte qui fait déborder le vase, comme si je supportais plus. Comme si j'avais pas tant que ça adoré son œil noir, ce serait la fois de trop, qu'on dirait si on saurait. (Ce que c'est que ce genre de relation, je veux dire !).
Alors bon, moi je suis là, comme un con, pis à côté t'as elle qui ronfle, le bourreau. Prêt à lancer l'assaut, comme elle a dit, même si elle l'a pas dit exactement comme ça, désolé si je m'en rappelle plus. Et en définitive on est là comme deux cons, pour une énième fin. Alors je me souviens plus comment c'est venu, si même c'est pas la fatigue ou l'alcool qui m'a fait penser à ça, mais je me suis dit comme ça que j'en avais marre d'entendre que mon bourreau il ronfle. C'est presque moins sexy que quand elle m'a redit qu'elle croit qu'elle m'aime plus trop ; ça me les brise ! Surtout que moi je me rappelle très bien qu'elle ressemble à un soldat de plomb bien peint, alors au moins qu'elle voie que je vois. C'est comme ça en réfléchissant pas que je suis allé à la fenêtre pour prendre un bol d'air.
Le vide, c'est beau. C'est aussi comme un soldat de plomb, mais en bien peint, mais en mieux. C'est comme une chaleur. C'est un peu comme quand on va à la piscine et qu'on n'ose pas sauter des dix mètres, c'est excitant (mais plus : que dix et que excitant). C'est comme si cette fosse c'était enfin le bourreau que j'élis. Comme si ce puits sans fin de ses bras délicat voulait être l'accueil des écueils de mes nuits ; comme une odeur en creux caressant mes pupilles. Je contemple le trou et je veux y plonger, c'est mon appel au large : marin, enfin ! Sans bourreau, ici, mon hôtesse, la fosse, est sensuelle et douce. J'enivre mes rétines de sa chaude noirceur, le vide est délectable. Avant de m'y pencher, je me demande quand même s'il n'y a pas maldonne. Mais là, mon hôtesse insensée ne ronfle pas et n'a pas un œil noir. Insolent et serein, j'ausculte son macabre. Alors quand je me penche, je sens, insensiblement plus, le vent de son ardeur tourner dans mes cheveux et des fourmis fugaces qui parcourent mon ventre. Comme quand on tombe amoureux, au début.
Et pis, finalement, j'ai dû me gourrer, que je me dis, mais très vite, car ça va vite. J'ai dû me gourer pis aller vers un autre bourreau, que je pense, mais de plus en plus vite, car là, ça se rapproche.
levaran82- Nombre de messages : 145
Age : 42
Localisation : belgique
Date d'inscription : 26/01/2010
Re: Et d'un œil sombre elle a souri
hello! j'ai lu ton texte. j'aime bien, surtout les descriptions, genre "Elle est belle comme une fossette ou comme un puits décoré de houx sauvage". par contre, une remarque : je trouve le changement de registre de vocabulaire assez perturbant. les premiers phrases laissent penser qu'on a affaire à quelqu'un de plutôt rustre, ou peu éduqué. et ensuite, dès le 2eme paragraphe, on a une rupture de ton, et un type qui cite Tom Waits.
jeanne75- Nombre de messages : 40
Age : 47
Date d'inscription : 24/03/2011
Re: Et d'un œil sombre elle a souri
Il me semble y avoir disproportion entre la cause et la conséquence mais j'ai en fait je m'en fiche tellement j'aime ce texte, sa poésie, son air faussement bêta, son déroulé tarabiscoté juste ce qu'il faut, la façon dont il s'entortille pour mieux se délier le moment venu.
Juste un petit reproche sur l'emploi parfois trop voyant du "que" (qu'on dirait si on saurait. ; que je pense,)
Cela n'empêche, j'ai vraiment beaucoup beaucoup beaucoup aimé. Et cela ne tient pas qu'à Tom Waits, pas qu'à cette aïe aïe de chanson :-)
Bravo.
Juste un petit reproche sur l'emploi parfois trop voyant du "que" (qu'on dirait si on saurait. ; que je pense,)
Cela n'empêche, j'ai vraiment beaucoup beaucoup beaucoup aimé. Et cela ne tient pas qu'à Tom Waits, pas qu'à cette aïe aïe de chanson :-)
Bravo.
Invité- Invité
Re: Et d'un œil sombre elle a souri
J’ai beaucoup aimé, ce ton du début, un peu boudeur, déçu, qui plonge peu à peu vers une fin forte, légère et grave à la fois.
La description du bourreau m’a plu, l’inventivité des comparaisons, leur poésie, leur fausse naïveté amoureuse, la manière de raconter l’érosion des sentiments. Et cette chute (si je puis dire) poignante.
Même remarque qu’Easter sur les que, il servent parfois le texte et à d’autres moments le desservent parce qu'on ne voit plus qu’eux.
La description du bourreau m’a plu, l’inventivité des comparaisons, leur poésie, leur fausse naïveté amoureuse, la manière de raconter l’érosion des sentiments. Et cette chute (si je puis dire) poignante.
Même remarque qu’Easter sur les que, il servent parfois le texte et à d’autres moments le desservent parce qu'on ne voit plus qu’eux.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
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