Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
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CROISIC
RICHARD2
Janis
elea
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Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Le ciel est bleu, d’un bleu inquiétant de décor angélique qui veut tromper son monde. Pas un nuage ne le trouble, ils s’amoncellent à d’autres strates.
Le sable est blanc, d’un blanc aveuglant cacheur d’apparences. Lumineux et fin comme un jour de drame.
La mer est pour l’instant sans couleur, insipide et fade, comme absente du décor. Seules les vagues et leur ritournelle régulière et entêtante actent de sa présence. Leur bruit accompagne nos bavardages comme une berceuse murmurée, lancinante, un peu dérangeante, en bruit de fond persistant, angoissant.
Je discute avec mon père.
Tout autour des enfants jouent et crient, s’amusent, se perchent en chat, se tirent les cheveux, se font chuter sur le sable blanc qui brûle les bouts de peau découverts, s’insinue sournoisement sous les vêtements et dans les oreilles, gratte le cuir chevelu jusqu’au sang et se colle aux lèvres humides de rires.
Leurs jeux ont la cruauté de l’innocence et la perversité du temps qui coule entre eux implacablement.
Du coin de l’œil j’aperçois un mouvement sur la mer. Je tourne mon regard vers lui, mécaniquement attirée, curieuse de mettre des mots sur l’imperceptible. Comme pour le dominer, le faire mien dans un recoin de mémoire visuelle.
Un bateau, il vogue. Ce navire lointain sur une mer sans saveur semble placé là juste pour détourner l’attention, créer un leurre de vie et d’animation empêchant de voir la mort frapper juste à côté.
Mon œil avide, comblé par cette vision banale, se reporte sur la plage pour y découvrir le carnage.
Les enfants, il y a une seconde encore riants et courants, gisent sur le sable teinté du rose de leurs veines, égorgés.
Ils bouchent l’horizon, semblent s’être démultipliés dans l’agonie pour recouvrir la plage à perte de vue. De ma vue stupéfaite qui glisse vers mon père et sa mine hagarde, sabre ensanglanté pendant au bout du bras telle une prothèse macabre.
Il lave ses mains rouges dans la mer et elle se colore enfin, comme si elle n’attendait que le jus de la mort pour prendre vie.
Et la mer devient rouge-sang.
Jusqu’à l’horizon. Se perd dans le bleu du ciel dans un mariage violet.
Et la mer devient rouge-sang.
Elle réveille mes instincts d’ogresse et j’arpente la plage à la recherche des plus tendres têtes blondes à croquer. Avec un peu de sable fin délicatement collé à leur peau, des petits radis à la croque au sel.
Mon père range son couteau sabre et m’accompagne dans ce délicieux festin orgiaque.
La bouche pleine de quenottes innocentes et de bouts de jeunes chairs, je le remercie d’un regard enamouré. La reconnaissance du ventre. A peine perturbée à l’idée de laisser les restes se décomposer sur le sable, toute cette bonne nourriture gâchée.
Au large le navire s’éloigne sur la mer devenue rouge-sang.
Le sable est blanc, d’un blanc aveuglant cacheur d’apparences. Lumineux et fin comme un jour de drame.
La mer est pour l’instant sans couleur, insipide et fade, comme absente du décor. Seules les vagues et leur ritournelle régulière et entêtante actent de sa présence. Leur bruit accompagne nos bavardages comme une berceuse murmurée, lancinante, un peu dérangeante, en bruit de fond persistant, angoissant.
Je discute avec mon père.
Tout autour des enfants jouent et crient, s’amusent, se perchent en chat, se tirent les cheveux, se font chuter sur le sable blanc qui brûle les bouts de peau découverts, s’insinue sournoisement sous les vêtements et dans les oreilles, gratte le cuir chevelu jusqu’au sang et se colle aux lèvres humides de rires.
Leurs jeux ont la cruauté de l’innocence et la perversité du temps qui coule entre eux implacablement.
Du coin de l’œil j’aperçois un mouvement sur la mer. Je tourne mon regard vers lui, mécaniquement attirée, curieuse de mettre des mots sur l’imperceptible. Comme pour le dominer, le faire mien dans un recoin de mémoire visuelle.
Un bateau, il vogue. Ce navire lointain sur une mer sans saveur semble placé là juste pour détourner l’attention, créer un leurre de vie et d’animation empêchant de voir la mort frapper juste à côté.
Mon œil avide, comblé par cette vision banale, se reporte sur la plage pour y découvrir le carnage.
Les enfants, il y a une seconde encore riants et courants, gisent sur le sable teinté du rose de leurs veines, égorgés.
Ils bouchent l’horizon, semblent s’être démultipliés dans l’agonie pour recouvrir la plage à perte de vue. De ma vue stupéfaite qui glisse vers mon père et sa mine hagarde, sabre ensanglanté pendant au bout du bras telle une prothèse macabre.
Il lave ses mains rouges dans la mer et elle se colore enfin, comme si elle n’attendait que le jus de la mort pour prendre vie.
Et la mer devient rouge-sang.
Jusqu’à l’horizon. Se perd dans le bleu du ciel dans un mariage violet.
Et la mer devient rouge-sang.
Elle réveille mes instincts d’ogresse et j’arpente la plage à la recherche des plus tendres têtes blondes à croquer. Avec un peu de sable fin délicatement collé à leur peau, des petits radis à la croque au sel.
Mon père range son couteau sabre et m’accompagne dans ce délicieux festin orgiaque.
La bouche pleine de quenottes innocentes et de bouts de jeunes chairs, je le remercie d’un regard enamouré. La reconnaissance du ventre. A peine perturbée à l’idée de laisser les restes se décomposer sur le sable, toute cette bonne nourriture gâchée.
Au large le navire s’éloigne sur la mer devenue rouge-sang.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Très honorée !
De plus, j'ai un faible pour les ogres et leurs compagnes les ogresses (ou l'inverse)
j'aime bien la façon dont tu as distillé mon cauchemar dans ta fantaisie
Certes, ton écriture est un peu "chargée" d'adjectifs et d'intentions à mon goût, je trouve qu'il faudrait un peu tailler là-dedans, mais l'esprit y est et je ne renie pas le festin final !
Merci
De plus, j'ai un faible pour les ogres et leurs compagnes les ogresses (ou l'inverse)
j'aime bien la façon dont tu as distillé mon cauchemar dans ta fantaisie
Certes, ton écriture est un peu "chargée" d'adjectifs et d'intentions à mon goût, je trouve qu'il faudrait un peu tailler là-dedans, mais l'esprit y est et je ne renie pas le festin final !
Merci
Janis- Nombre de messages : 13490
Age : 63
Date d'inscription : 18/09/2011
Exo rêves et cauchemars : Sang et Ocre
On ressent bien l'appétit des ogres. Un peu trop de rouge à mon goût !! et puis... j'adore les enfants ! ...
RICHARD2- Nombre de messages : 160
Age : 64
Date d'inscription : 27/08/2010
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Charmante famille. J'adore : les petits radis à la croque au sel ; j'ai toujours eu envie de dévorer des jeunes enfants - ne l'ai fait qu'en rêve - celui-ci est très goûteux.
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Un récit trés fidèle au rêve de Janis...Avec ce réalisme (!) qui apporte l'explication qu'on était en droit d'espérer ,la clé : mais c'est bien sur : des ogres !
J'aime beaucoup l'ogresse au regard enamouré devant la plage transformée en relais gastronomique ...
J'aime beaucoup l'ogresse au regard enamouré devant la plage transformée en relais gastronomique ...
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Bien rendu !
J'apprécie particulièrement ce mélange entre onirisme et réalisme. Tu racontes une histoire à laquelle tu dois te tenir et en même temps, tu donnes au récit toute la richesse que peuvent contenir les rêves. Cela fourmille de détails, de couleurs, de sons, c'est très visuel, on arrive presque à voir défiler tout cela dans sa tête et en même temps ce n'est pas chargé ou figé par une avalanche de précisions pas forcément utiles. Non, ici, tout prend son sens, nous sommes dans le domaine alambiqué du rêve, celui par lequel tout est permis et on le ressent très fortement en te lisant; très agréable !
J'apprécie particulièrement ce mélange entre onirisme et réalisme. Tu racontes une histoire à laquelle tu dois te tenir et en même temps, tu donnes au récit toute la richesse que peuvent contenir les rêves. Cela fourmille de détails, de couleurs, de sons, c'est très visuel, on arrive presque à voir défiler tout cela dans sa tête et en même temps ce n'est pas chargé ou figé par une avalanche de précisions pas forcément utiles. Non, ici, tout prend son sens, nous sommes dans le domaine alambiqué du rêve, celui par lequel tout est permis et on le ressent très fortement en te lisant; très agréable !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
J'ai dévoré ces trésors de la mer rouge-sang.
Jean Lê- Nombre de messages : 591
Age : 65
Localisation : Bretagne
Date d'inscription : 22/11/2010
Re: Exo rêves et cauchemars : Sang et ocre
Ton écriture est très fluide en dépit des adjectifs nombreux. Rien n'est superflu. J'ai ressenti cette atmosphère glauque dès les premières lignes. J'ai beaucoup aimé.
Frédéric M- Nombre de messages : 29
Age : 53
Date d'inscription : 04/10/2011
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