La vaisselle souffre

Voilà un poème un peu spécial, je sais pas trop comment ça peut être pris. bonne lecture


La vaisselle souffre

Ma femme était dans une autre pièce,
occupée avec l'ordinateur,
dans la cuisine, la vaisselle m'attendait,
comme on attend
un esclave
j'ai pris quelques minutes pour moi
et j'ai mis les passions de St Matthieu
dans le lecteur CD
(Bach pour ceux qui l'ignorent)
le violon a commencé à gémir
des gémissements plein d'espoir
et une femme a commencé à supplier Dieu
en allemand
et je ne comprends pas l'allemand
mais je comprends la souffrance
et cette femme souffrait
et les violons souffraient
et moi même je souffrais
bien que je ne crois pas en Dieu
la souffrance n'a rien à avoir avec Dieu
et j'entendais cette femme pleurer
et j'entendais les violons pleurer
et j'ai moi même commencé à pleurer
et ma femme est entré dans la pièce
et m'a demandé ce que j'avais
« - Rien » je lui ai dit
et qu'est ce que je pouvais bien
lui répondre d'autre ?
« - Oublie pas la vaisselle »
elle m'a répondu.
J'ai attendu que les violons se taisent
j'ai attendu que la femme se taise
et que la souffrance s'évade
et j'ai été faire
la vaisselle.

cher mickelange,

juste un petit mot pour vous faire patienter
entre deux tournées de brocolis
... je viendrai faire la vaisselle avec vous
quand jusse finite la dégustation ....

et comme on dit en cuisine,

Buenaroti ! ! ! *(comprenne qui peut)

Souffrir c'est pâtir, du verbe latin patior (être en état de souffrance). A ce titre la passion (le fait de souffrir) devrait s'écrire pation comme addition ou attention. Votre Vaisselle souffre est un titre puissant, bien choisi. On pourrait lui préférer Vaisselle passion ou Passion (de) vaisselle.

Le renversement de rôle sur lequel vous basez le poème est bien vu (et nécessaire). C'est d'ailleurs un net ressort théâtral. La spécularité où l'homme voyant la condition qu'il fait / qui est faite à la femme et la femme assistant à sa condition faite homme est efficace.

Reste quand même que cette situation réclame pour réussir de ne pas céder en son degré littéraire. Or vous passez localement parfois en dessous du poétique. Il vous faut (il nous faut) vous extraire (nous extraire) du quotidien, voire forcer le trait ou grandiloquer à l'occasion, pour atteindre le coeur de l'expression, du comique ou du dramatique de la situation renversée ainsi créée.
Ainsi :
"Ma femme était dans une autre pièce,
occupée avec l'ordinateur," est trop banal et trop plat même si on en sent le potentiel. Vous êtes à la télé et non pas au théâtre d'auteur. Faites plus fort. Il me vient deux idées: avec pièce celle de Théâtre ou théâtral et avec occupée celle de couplée... Ou alors gardez intacte la banalité de ce passage mais littératurifiez-la dans les vers qui vont suivre.

Dans le même temps, toilettez votre texte en commençant par améliorer les lignes trop brutes de décoffrage (me semble-t-il). Par exemple:
« - Rien » je lui ai dit
et qu'est ce que je pouvais bien
lui répondre d'autre ?
« - Oublie pas la vaisselle »
elle m'a répondu.

« - Rien » lui ai-je dit
Que pouvais-je bien lui répondre?
« - N'oublie pas la vaisselle »
M'a-t-elle répondu. etc.

Pour "les passions selon St Mathieu", je pense que c'est plutôt La passion (la souffrance du Christ).

J'espère que vous ne prendrez pas en mal ces quelques remarques, l'âge parfois nous confine au conseil
admirant en jeunesse à défaut de merveilles un travail en éveil.

Bienvenue !
En cours de lecture, j'ai pensé que ce poème aurait pu être une prose. Finalement, non, les vers écrits ainsi lui vont très bien.
J'ai aimé cette "litanie" de la souffrance collée à cette souffrance -relative, ok- dans la quotidien. Sous-jacent, les questions de communications.
Vraiment bien aimé.

Non aucun souci pour ces remarques Marvejols, au contraire bien sur !
Je suis même bien d'accord, notamment avec celle-ci "Reste quand même que cette situation réclame pour réussir de ne pas céder en son degré littéraire. Or vous passez localement parfois en dessous du poétique."

Pour la refonte du dialogue, pourquoi pas ? A voir comment ça sonne à l'oreille, je vais voir ça de plus près.

et pour "les passions", c'était voulu de les mettre au pluriel, mais l'effet n'est pas peut être pas très réussi




Merci bien éclaircie pour ton commentaire (et d'avoir remarqué le passage des questions (problèmes) de communication ! )