Printemps (belle absente)

Jonquille, muguet, là, bref chemin de violettes
Que savent donc les béjaunes – chétif plumage
de l'humble gavotte des pâquerettes ? Franc jeu
la grive siffle jusqu'au bout du champ
qui s'ouvre à la prochaine giboulée, déjà formée.
Jasmin blanc, un hardi pur-sang va forniquant
jacinthe blonde, le fragile orvet se planque.
Fable chimérique, glose du stade juvénile
j'achève, ô germinal, ta fabrique du pré.
****

nb: j'ai ajouté le titre pour éviter cette remarque "il y a déjà X poèmes portant ce titre" qui m'est imposé.

l'effet d'une accumulation qui se veut rapide
perso, c'est une façon d'écrire que je trouve un peu trop "sans sauce",
comme des images que l'on veut m'imposer comme fortes et cinglantes... parce que l'on a retiré verbes et charnières

voilà, ce que ma simple pensée écrit après une lecture
je relis
et j'ai bien ce même effet.
donc, pour cette fois, je ne suis pas convaincu

Amitié

Pas trop charmée pour les mêmes raisons que Frédéric.
Le printemps est cette saison où tout s'emballe et là le rythme et le côté (seulement) descriptif ne le font pas trop sentir.

La " belle absente " étant un exercice oulipien, il est difficile d'obéir à la contrainte tout en faisant de la vraie poésie.
Je trouve ici une honorable réussite, surtout pour le vers sans " E " tout fringant...
Bravo Annie

J'ai du mal à entrer dans vos textes parfois, mais celui là me parle. J'y vois, et vous le dîtes d'ailleurs, une allégorie et peut-être quelques allusions. Et la frénésie et le foisonnement de nouvelles vies qui commencent sont bien rendus par la juxtaposition des descriptions brèves. J'aime.

Le problème avec les contraintes annoncées au départ c'est que j'ai tendance à les chercher dès la première lecture sans me laisser aller au rythme et au plaisir des mots.

J'aime bien "l'humble gavotte des pâquerettes" moins "le fragile orvet se planque"
Je vois distinctement une des tapisseries de la dame à la licorne

Merci chers lecteurs, les avis sont suffisamment divers pour ne laisser de place ni à la déception, ni à la vanité!

Arielle, je suis bien de ton avis en ce qui concerne l'énonciation de la contrainte, je préfère ne pas la donner d'entrée, en parler ultérieurement si le cas se présente, voire pas du tout. Queneau parlait de "retirer l'échafaudage".
Encore un point d'accord "la gavotte des pâquerettes": c'est à mon goût le meilleur vers du poème, et je tiens à le souligner, le mot gavotte m'a été soufflé par ma petite Emilie, une mystérieuse correspondance, elle m'a parlé de gavotte au moment précis où ce mot a résolu mon problème. Pour tout vous dire, une petite copine d'école s'appelle Gavotte, elle sait aussi que c'est le nom d'un biscuit, et je lui ai appris que c'est aussi celui d'une danse.

Frédéric, que ce poème ne vous plaise pas, soit. Mais je trouve votre remarque "parce que l'on a retiré verbes et charnières" inexacte. Prenons pour comparaison le poème de Charles d'Orléans
http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/charles_d_orleans/le_temps_a_laissie_son_manteau.html
comptez les verbes et les pronoms relatifs, il me semble que le mien est aussi fourni. Ce qui évidemment n'a rien à voir avec la qualité du poème, qui n'est pas une norme comptable.

Je le voyais en l'écrivant comme un tableau de Chagall - Arielle parle de tapisserie - rempli de bêtes et de personnages dans tous les coins, pas forcément reliés entre eux. "la frénésie et le foisonnement de nouvelles vies" c'est exactement ce que j'ai cherché à reproduire, en mettant un peu de malice dans les noces du pur-sang, le serpent de verre a intérêt à se planquer quand le cheval est en rut.

Merci encore à vous tous, de me donner l'occasion de parler de mon travail. Il est évident, qu'on n'envoie un poème que si on lui trouve au moins une bonne qualité. Alors le retour sur le travail (je me répète) est intéressant.

De belles et surprenantes images inusitées : "bref chemin de violettes//chétif plumage/de l'humble gavotte des pâquerettes", ce poème dont j'ai appris qu'il est un exercice oulipien a une couleur particulière, intrigante et qui ne manque pas de charme.

Mais malgré la précision "(belle absente") je ne suis pas parvenu à déterminer la contrainte ou les contraintes. Parcourt ou parcourent-elle(s) un ou quelques vers ou tout le poème ?

Quelqu'un(e) peut-il (elle) éclairer ma pauvre lanterne ?

Annie ?

Ü

Nonobstant le froncement de sourcils de la modération, il me semble qu'une interpellation aussi directe m'oblige à répondre.

Je n'ai mentionné la contrainte dans le titre (titre Printemps obligatoire) que pour distinguer ce texte d'autres qui pourraient le porter également, sinon je pense qu'il est plus juste de lire en l'ignorant. D'ailleurs vous l'avez bien noté, l'intérêt pour celui qui écrit, est de chercher à "sortir du parcours rassurant du mot trop subit, trop confiant, trop commun".

La contrainte est décrite ainsi sur le site de l'oulipo
"Poème composé en l’honneur d’une personne d’un sexe ou de l’autre. Le poème comporte autant de vers que les lettres du nom de la (ou du) destinataire (comme dans l’acrostiche). L’on s’interdit d’utiliser dans le premier vers la première lettre du nom, dans le deuxième vers la deuxième lettre, et ainsi de suite. Toutes les autres lettres de l'alphabet doivent au contraire être présentes dans chaque vers."
A ce détail près: on néglige les lettres KWXYZ. Voir comme modèle exemplaire le poème dédié à l'oulipo par Georges Perec.

Waouh ! Composition remarquable Annie !

Félicitations !


Merci d'avoir éclairé ma lanterne, je me sens un peu moins bête grâce à vous. Désormais je peux englober en panoramique ce qu'est l'oulipo. Et non plus en cherchant point par point ou règle par règle...


Ü