Exo musique : Sur le fil

Petite et grise et pluie, elle danse
dans le cirque désert
sur son filin mouillé
incertaine et têtue
ne musique rouillée
qui égrène de l’or dans sa tête embrumée

Les pieds menus sautillent
là-haut, très haut elle danse
sur un rêve de fil, dans un halo cendré,
elle court, légère et glisse et retourne et revient
un éclat de miroir fiché dans la poitrine
ses bras d’oiseau ouverts
Et lorsque la musique qu’elle écoute en dedans
balance sa tristesse
bémol
bémol ou dièse ?
elle s’en fiche, elle est loin
accrochée au trapèze.

"ne" une musique ?

D'entrée, j'aime l'effet créé par l'association des deux adjectifs et du nom ; la rythmique un peu cassée que cela donne. Quelque chose d'à la fois évident et inattendu.

Quand une musique en amène une autre : la petite acrobate m'évoque la ballerine infirme de Cabrel dans "Elle dort".

Tu restitues, à la fois, la légèreté de la main droite qui "là-haut, très haut" s'envole sur le clavier et le martèlement entêtant de la main gauche, qui se déporte un peu, pas trop, pour toujours revenir à ses premiers accords. C'est comme pour Dior, J'Adore. ^^

L'image de cette funambule, toute seule sur son fil, dans la grisaille et qui se rêve trapéziste va remarquablement à la musique génialement claudiquante de Satie.
Joli poème

Accrochée à son fil c'est une goutte de pluie que je vois danser sur l'écran de ma fenêtre. Elle égrène ses notes entre les doigts du vent et cet "éclat de miroir fiché dans la poitrine" m'en rappelle d'autres qui tournent dans ton jardin ...
Délicieusement mélancolique, j'aime "ses bras d’oiseau ouverts"

Le début me transporte, la suite m'enchante, mais je perds un peu Satie ...

comme un rêve fragile et ténu
quelque chose qui se tient sur le fil du rasoir
une bulle imaginaire prête à éclater
mais qui avant nous élève
l'instant magique où la réalité morne s'éclipse
bien rendu

J'aime bien cette "hauteur" par rapport à la musique, l'expression épurée (mots simples) et les images vraiment belles, un petit décalage aussi entre l'action (de cette funambule) et la pensée (de l'auteur).

A lire ton poème je comprends ce choix d'un cheminement périlleux, d'un équilibre sans cesse menacé.
La musique,légère, répétitive, lancinante, s'accorde bien avec le talent de la danseuse de corde.
Je trouve très belle ton évocation.