Douleur
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Douleur
"Comme la nuit paraît longue à la douleur qui s'éveille." (Horace)
La nuit. Cette nuit tant aimée. Elle arrive. Silencieuse. Elle s'installe à pas feutrés et elle attend. L'attente. Quelle attente... Quelle attente?
Celle du premier battement de coeur. Ce battement que l'on devine au plus profond de sa chair. Ce battement régulier presque irréel. Il est là. Bel et bien là. Il se fait sourd. Avant de frapper à la porte. De plus en plus vite. De plus en plus fort. Il crie, il hurle, il est vivant. Impossible d'entendre autre chose que ce battement de coeur perdu tout au fond de soi. Bruit régulier. Agaçant. Insupportable. Insurmontable. Il résonne dans chaque partie du corps.
A chacun de ses coups, sa complice sourit. Cette compagne fidèle qui veille depuis trois jours. Sans jamais prendre de repos. Présente. Toujours présente.
La douleur...
Amante des jours et maîtresse des nuits. Répétant ses gammes sur cet instrument qui lui est offert. Quel bel objet de plaisir dont s'emparer avec volupté.
Le ballet peut commencer. Les notes de musique ont envahi l'espace. Stridentes. Les danseurs sont en place, le chef d'orchestre donne le ton. Symphonie infernale. Cacophonie. Embouteillage des sons. Elle doit se faire entendre. Elle veut faire l'amour à ce corps qui lui est livré, abandonné à ses supplices. Quelle intensité. Quelle ferveur dans son attaque. Chacun de ses coups la renforce dans son envie de se répandre. D'exploser. Exploser. Oui. Une explosion. Un feu d'artifice de souffrance. La chair humaine n'est pas en reste. Elle participe, se tord, se convulse, épouse cette moitié enracinée.
Le corps humain est magnifique. Il va chercher au plus loin de ses réserves vitales l'essence même de sa résistance pour entreprendre cette chevauchée avec la douleur. Il lutte, il pactise, il ironise, il fraternise, il séduit, il surprend.
Infatigable combat, inégal conflit. Chorégraphie interne dont on ne peut être que spectateur.
Attendre. Attendre encore et toujours. Mais attendre quoi? Que ce soit fini...
"Fini! Mot absurde. Pourquoi fini? Fini et pur néant sont absolument identiques.
Emporter l'être créé et le réduire à rien? C'est comme si cela n'avait jamais été.
Et cependant cela s'agite dans le cercle comme si cela existait. J'aimerais mieux encore le vide éternel." (Faust)
Le vide. Rêver de vide. De vide et de vertiges. De tours de manège à la vitesse de la lumière. D'âme qui se libère. De corps qui se consume.
La représentation est terminée...
Devant les cris des spectateurs, une ouvreuse leur a distribué des bonbons. Des petits bonbons tout roses. Tout ronds.
Dans un ultime sursaut, le corps traverse un dernier spasme et s'apaise.
Epuisé. Moribond. Réclamant son répit. Demandant grâce. Souhaitant fermer les yeux. Juste ça. Les fermer. Longtemps. Le plus longtemps possible.
Non! Il faut les garder ouverts. Regarder le soleil. Admirer les étoiles. Se plonger dans la lumière. Surtout pas d'obscurité muette. Elle invite les battements de coeur. Ces battements de coeur qui... Et leur complice qui...
Les invités de la séance nocturne sont déjà arrivés. Le spectacle peut recommencer. A guichets fermés. Roulement de tambour. Le premier battement de coeur vient saluer...
Et si on faisait comme si aujourd'hui c'était relâche? Non? Dites oui. S'il vous plaît...
Même si la douleur morale est plus intense que la souffrance physique...
La nuit. Cette nuit tant aimée. Elle arrive. Silencieuse. Elle s'installe à pas feutrés et elle attend. L'attente. Quelle attente... Quelle attente?
Celle du premier battement de coeur. Ce battement que l'on devine au plus profond de sa chair. Ce battement régulier presque irréel. Il est là. Bel et bien là. Il se fait sourd. Avant de frapper à la porte. De plus en plus vite. De plus en plus fort. Il crie, il hurle, il est vivant. Impossible d'entendre autre chose que ce battement de coeur perdu tout au fond de soi. Bruit régulier. Agaçant. Insupportable. Insurmontable. Il résonne dans chaque partie du corps.
A chacun de ses coups, sa complice sourit. Cette compagne fidèle qui veille depuis trois jours. Sans jamais prendre de repos. Présente. Toujours présente.
La douleur...
Amante des jours et maîtresse des nuits. Répétant ses gammes sur cet instrument qui lui est offert. Quel bel objet de plaisir dont s'emparer avec volupté.
Le ballet peut commencer. Les notes de musique ont envahi l'espace. Stridentes. Les danseurs sont en place, le chef d'orchestre donne le ton. Symphonie infernale. Cacophonie. Embouteillage des sons. Elle doit se faire entendre. Elle veut faire l'amour à ce corps qui lui est livré, abandonné à ses supplices. Quelle intensité. Quelle ferveur dans son attaque. Chacun de ses coups la renforce dans son envie de se répandre. D'exploser. Exploser. Oui. Une explosion. Un feu d'artifice de souffrance. La chair humaine n'est pas en reste. Elle participe, se tord, se convulse, épouse cette moitié enracinée.
Le corps humain est magnifique. Il va chercher au plus loin de ses réserves vitales l'essence même de sa résistance pour entreprendre cette chevauchée avec la douleur. Il lutte, il pactise, il ironise, il fraternise, il séduit, il surprend.
Infatigable combat, inégal conflit. Chorégraphie interne dont on ne peut être que spectateur.
Attendre. Attendre encore et toujours. Mais attendre quoi? Que ce soit fini...
"Fini! Mot absurde. Pourquoi fini? Fini et pur néant sont absolument identiques.
Emporter l'être créé et le réduire à rien? C'est comme si cela n'avait jamais été.
Et cependant cela s'agite dans le cercle comme si cela existait. J'aimerais mieux encore le vide éternel." (Faust)
Le vide. Rêver de vide. De vide et de vertiges. De tours de manège à la vitesse de la lumière. D'âme qui se libère. De corps qui se consume.
La représentation est terminée...
Devant les cris des spectateurs, une ouvreuse leur a distribué des bonbons. Des petits bonbons tout roses. Tout ronds.
Dans un ultime sursaut, le corps traverse un dernier spasme et s'apaise.
Epuisé. Moribond. Réclamant son répit. Demandant grâce. Souhaitant fermer les yeux. Juste ça. Les fermer. Longtemps. Le plus longtemps possible.
Non! Il faut les garder ouverts. Regarder le soleil. Admirer les étoiles. Se plonger dans la lumière. Surtout pas d'obscurité muette. Elle invite les battements de coeur. Ces battements de coeur qui... Et leur complice qui...
Les invités de la séance nocturne sont déjà arrivés. Le spectacle peut recommencer. A guichets fermés. Roulement de tambour. Le premier battement de coeur vient saluer...
Et si on faisait comme si aujourd'hui c'était relâche? Non? Dites oui. S'il vous plaît...
Même si la douleur morale est plus intense que la souffrance physique...
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Douleur
Très beau, très émouvant. Presque douloureux à lire, tellement c'en est poignant. Merci, Sahkti.
Giny- Nombre de messages : 1802
Age : 36
Localisation : Dijon
Date d'inscription : 14/12/2005
Re: Douleur
Fascinant ce parallèle entre la souffrance et la volupté Sahkti. Un très beau texte où l'angoisse tient son rôle magistralement.
Re: Douleur
Merci Arielle!
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Douleur
C'est un beau texte, on ne peut le nier.
Pour autant, je ne peux pas m'empêcher de mettre un bémol : je pense qu'une meilleure utilisation de la forme - et je parle surtout, ici, de la manière de découper ton texte - servirait mieux tes desseins, j'en suis sûr.
Le tout n'en reste pas moins admirable; j'ose espérer que poser sur le clavier ces mots fut une bonne bouffée d'air.
Pour autant, je ne peux pas m'empêcher de mettre un bémol : je pense qu'une meilleure utilisation de la forme - et je parle surtout, ici, de la manière de découper ton texte - servirait mieux tes desseins, j'en suis sûr.
Le tout n'en reste pas moins admirable; j'ose espérer que poser sur le clavier ces mots fut une bonne bouffée d'air.
Herzy Leid- Nombre de messages : 29
Age : 35
Date d'inscription : 12/06/2008
Re: Douleur
C'est tellement simple d'écrire.
Touchant.
En même temps, je me dis que tu peux faire mieux.
Disons que je garderais tout ou presque jusqu'à "Le ballet peut commencer.".
Ce texte restera.
J'aime vraiment beaucoup.
L'avant-dernière est un monument : Et si on faisait comme si aujourd'hui c'était relâche? Non? Dites oui. S'il vous plaît...
...la dernière, enlève-la, ça gâche tout le texte.
Touchant.
En même temps, je me dis que tu peux faire mieux.
Disons que je garderais tout ou presque jusqu'à "Le ballet peut commencer.".
Ce texte restera.
J'aime vraiment beaucoup.
L'avant-dernière est un monument : Et si on faisait comme si aujourd'hui c'était relâche? Non? Dites oui. S'il vous plaît...
...la dernière, enlève-la, ça gâche tout le texte.
Re: Douleur
Merci Lol!
Tu as raison dans ce que tu dis. C'est un texte que je considère aujourd'hui autrement, avec le recul et un regard très différent porté sur cette période difficile que j'ai voulu rentranscrire dans ces lignes. Mais je ne sais pas si je pourrais le retravailler. A tenter, qui sait...
Tu as raison dans ce que tu dis. C'est un texte que je considère aujourd'hui autrement, avec le recul et un regard très différent porté sur cette période difficile que j'ai voulu rentranscrire dans ces lignes. Mais je ne sais pas si je pourrais le retravailler. A tenter, qui sait...
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Douleur
Oui il mérite ce up . Intense, rythmé, presqu'étourdissant.
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Douleur
Fulgurant. Je suis toute chavirée et pourtant éblouie d'avoir rencontré ce texte...merci Sahkti.
Re: Douleur
Ce ne sera que la quatrième fois que je le remonte.
Mais en ce jour, il m'est si particulier. Pour des raisons très personnelles.
Comme tout chagrin qui se respecte.
Avec une langueur d'avance...
Mais en ce jour, il m'est si particulier. Pour des raisons très personnelles.
Comme tout chagrin qui se respecte.
Avec une langueur d'avance...
Re: Douleur
Lu et approuvé. Très beau texte.
Ce mélange douleur-voluptuosité décrit donne au texte plusieurs lectures possibles, donne lieu à une vraie ambigüité, du coup je trouve dommage cette dernière phrase, trop directe, trop didactique à mon goût.
Ce mélange douleur-voluptuosité décrit donne au texte plusieurs lectures possibles, donne lieu à une vraie ambigüité, du coup je trouve dommage cette dernière phrase, trop directe, trop didactique à mon goût.
Invité- Invité
Re: Douleur
L'intertextualité (Horace, Faust) souligne, s'il en était besoin, le caractère universel, intemporel du propos. Trois types de phrases sont convoqués pour figurer anaphoriquement, obstinément, l'épreuve à venir (déclarative, exclamative et interrogative : "L'attente. Quelle attente... Quelle attente ?"). L'événement décrit s'assimile aux formes les plus variées d'un spectacle (danse : "ballet", "pas feutrés", "danseurs", "chorégraphie" / théâtre : "frapper", "coups", "représentation", "relâche" / cinéma : "ouvreuse", "séance" / concert : "gammes", "instrument", "chef d'orchestre", "notes de musique" / cirque : "cris des spectateurs"). Sans doute à l'image du masque de la douleur qui nous fait autre, nous forçant à jouer un contre-rôle. Ce masque qui renvoie, métaphoriquement, aux masques divers que portent les artistes pour travestir leur identité réelle avant de se produire devant un public. D'où cette métaphore, paradoxale ("feu d'artifice de souffrance"), présentant ce moment comme celui d'une représentation. Par le procédé de l'accumulation ("Il lutte, il pactise, il ironise, il fraternise, il séduit, il surprend."), le corps se donne à voir dans un combat où l'on tente par tous les moyens, tous les subterfuges, toutes les ruses, de circonvenir l'ennemi de toujours. Les gradations ("De plus en plus vite. De plus en plus fort.", "Il crie, il hurle, il est vivant.", "Agaçant. Insupportable. Insurmontable.", "Elle participe, se tord, se convulse...") et les gradations anaphoriques ("Il est là. Bel et bien là.", "Attendre. Attendre encore et toujours.", "Longtemps. Le plus longtemps possible.") mettent en évidence le caractère impitoyable de cette guerre de tranchées faite d'assauts successifs et de trêves. À un triptyque de nominales ("Symphonie infernale. Cacophonie. Embouteillage des sons.") répond, vers la fin du texte, un triptyque d'infinitives ("Regarder le soleil. Admirer les étoiles. Se plonger dans la lumière."). Comme si l'apaisement, le répit provisoire d'ici répondait à la tempête qui commençait à vriller le corps là-bas. Cependant, cette lutte, terrible, connaît déjà son vainqueur comme le préfigure l'antithèse ("Infatigable combat, inégal conflit.").
Merci pour ce partage !
Merci pour ce partage !
jfmoods- Nombre de messages : 692
Age : 58
Localisation : jfmoods@yahoo.fr
Date d'inscription : 16/07/2013
Re: Douleur
ultra rapide, comme tempo;
le lapin métronome.
le lapin métronome.
hi wen- Nombre de messages : 899
Age : 27
Date d'inscription : 07/01/2011
Re: Douleur
J’ai envisagé le pire sachant que la douleur t’aspire
Te suce les os, les rendant blanc de peau
Puisant dans ton cerveau ta sève
Elle vole même ta dignité sans gène
Te regarde et profère des cris, des mots
Elle ne fait pas mystère de sa grande voracité
Elle se sait carnassière, pas casanière
mon expérience de la douleur que je retrouve dans votre texte qui l'a décrit avec une réalité émouvante
Te suce les os, les rendant blanc de peau
Puisant dans ton cerveau ta sève
Elle vole même ta dignité sans gène
Te regarde et profère des cris, des mots
Elle ne fait pas mystère de sa grande voracité
Elle se sait carnassière, pas casanière
mon expérience de la douleur que je retrouve dans votre texte qui l'a décrit avec une réalité émouvante
So-Back- Nombre de messages : 3652
Age : 100
Date d'inscription : 04/04/2014
Re: Douleur
Superbe.
Pascal-Claude Perrault- Nombre de messages : 5422
Age : 63
Localisation : Paris, ah Paris, ses ponts, ses monuments et ses merdes de chiens !
Date d'inscription : 20/02/2012
Re: Douleur
"Le corps humain est magnifique. Il va chercher au plus loin de ses réserves vitales l'essence même de sa résistance pour entreprendre cette chevauchée avec la douleur. Il lutte, il pactise, il ironise, il fraternise, il séduit, il surprend. "
Rien à commenter, tout est dit ...
Rien à commenter, tout est dit ...
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: Douleur
Quel texte !
En effet il a mérité tout son statut de texte poignant, émouvant, j'ajouterai (si cela n'a pas été fait) étouffant même.
On a le coeur qui bat, palpite, fait mal à se cogner encore et encore comme si la douleur entretenait malinement ces battements trop forts par leur intensité.
On imagine en effet quel soulagement une fois les mots posés ..
Mais le corps parfois prend le dessus sur l'esprit et c'est là que c'est d'autant plus difficile de ne pas s'y soustraire. Juste équilibre à trouver .... Force et conviction !
Merci pour ce partage !
En effet il a mérité tout son statut de texte poignant, émouvant, j'ajouterai (si cela n'a pas été fait) étouffant même.
On a le coeur qui bat, palpite, fait mal à se cogner encore et encore comme si la douleur entretenait malinement ces battements trop forts par leur intensité.
On imagine en effet quel soulagement une fois les mots posés ..
Mais le corps parfois prend le dessus sur l'esprit et c'est là que c'est d'autant plus difficile de ne pas s'y soustraire. Juste équilibre à trouver .... Force et conviction !
Merci pour ce partage !
Madeleine Adèle- Nombre de messages : 38
Age : 43
Date d'inscription : 11/04/2014
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