La pipelette

Dans sa cuisine minuscule
Qu'orne une splendide photo
Du sémillant Luis Mariano,
Elle épluche un vieux tubercule

Et traîne tel un somnambule
Sa détresse sur le lino.
Midi : l'heure de son porto
Vient de sonner à la pendule.

La pluie avec ses becs d'oiseaux
Tambourine sur les carreaux
Son rythme triste et monotone.

La pipelette, en son hiver,
Attend sa pantoufle de vair
En priant la sainte Madone.

Chouette, Légone, ta pipelette
Qui me met des souvenirs en tête ;
Hélas, elle n'est plus à la mode,
Anéantie par le digicode

Les becs d'oiseau de la pluie = petite merveille de poésie qui fait un superbe contrepoint à la triste trivialité de ton anti-héroïne.
j'adore !

Imagé, touchant...
Le premier tercet est de très haut niveau
Surtout la pluie avec ses becs d'oiseaux, sublime

Ça c'est de la poésie que j'aime : de simples petits mots qui sous-entendent de grandes solitudes "sa détresse sur le lino" et de grandes illusions "attend sa pantoufle de vair."
Tout ceci dans la monotonie des habitudes "midi, l'heure de son porto."
Pour le décor, c'est dans la veine de "la mère à Titi" de Renaud, sympathique.
Comment ne pas penser à Balasko dans "le hérisson" ?
Sonnet octosyllabique à la prosodie parfaite (ce qui ne gâte rien) et bourré de tendresse et d'humanité.
J'aime.

Legone, tu me fais penser à Pierre Perret. Comme lui tu es un excellent argotier à l'humour désopilant et par ailleurs un humaniste capable de profondeur avec une expression simple mais parfaite, qui va droit au cœur.

Je trouve ce court poème plutôt sympathique et évocateur.
" La pluie avec ses becs d'oiseaux "
est effectivement une bonne idée, et je trouve très intéressant le fait que la dite pipelette soit prise à un moment où elle n'a absolument aucune possibilité de parler. J'ai néanmoins quelques réserves quand à la faiblesse grammaticale de certaines tournures de phrase, par exemple ici :

" La pluie avec ses becs d'oiseaux
Tambourine sur les carreaux
Son rythme triste et monotone. "

on ne tambourine pas quelque chose, tambouriner étant un verbe intransitif. De même, au vers :

" La pipelette, en son hiver, "

Je trouve "en son hiver " maladroit et mal venu. C'est dommage car ça gâche un moment important du poème. J'ai également un peu de mal avec le vers :

" Attend sa pantoufle de vair "

je trouve que cette allusion à cendrillon placée en contraste avec la réalité est banale et déjà vue cent fois, et je trouve que ça laisse un arrière-goût à la lecture du poème.

Est-ce que la détresse de la concierge ne viendrait pas de ses "becs de perroquet" ? Ces mêmes becs qui inviteraient la pluie à venir jouer de la flûte à bec sur ses carreaux ? C'est un cercle infernal que j'adore.

super

Toute une atmosphère qui se dégage en si peu de vers? Bravo.

Touchante pipelette qui cendrillonne en "Belle de Cadix" sous l'éclatant sourire du "Chanteur de Mexico"

Toute une époque, toute une histoire contée en quelques mots dont la simplicité a le naturel de la vraie poésie du quotidien. J'aime beaucoup.

Beauté des choses et des mots simples... J'ai aimé.

Celle-là ne restera pas dans l'escalier +++++

Merci à tous les commentateurs. Espérons que ce soit le cas Ba :o)

Un tableau, un arrêt sur image.

Chaque mot illustre parfaitement la situation, la vision, le moment. J'adore cette pendule qui sonne l'heure du porto et l'épluchure du vieux tubercule (je sens que l'image me viendra la prochaine fois que j'éplucherai un topinambour, genre).

Bien aimé ce petit moment de poésie en cuisine, qui est souvent prétexte à l'évasion, en effet.

up pour ce texte réaliste

les pipelettes agissent encore ( covid aboie et la caravane passe)