Sans excuse, sans drame, sans amour

Je suis sans excuse, sans drame, sans amour. Je porte un balluchon d'ignorance, de doute, de flou, et je m'arrête. La lumière a défait ses cheveux décolorés, jeté ses habits aveuglants ; fille apeurée, elle a couru tous les yeux puis s'est dérobée comme une voleuse nue. Parfum de comète, elle a laissé sur son chemin autant de petits cailloux blancs que de regrets. Je reprends la route, une larme voulait assister mon voyage, mais elle reste sans lit : ma paupière la rejette. Je pose mon crâne sur le sol mouvant de la nuit comme pour prier. Mon front baigne dans une colline d'ennuis, mes doigts de sable ne m'appartiennent plus, un vent froid les a emporté loin de toute expérience, de tout souvenir migraineux, aux frontières du sommeil, où tous les diamants se brisent. L'horizon fragile colore cependant les gestes du monde, mais les regards muent, clignent, ne voient jamais deux fois la même étoile. Cette lumière du désir, douleur tendre et obsessionnelle, d'où tient-elle son art d'élever un homme à ses rêves ? D'où tient-elle son mystère, sa gloire, sa nature ? On répondra que la buée aime la vitre, que la vitre aime la buée, et que le regard aime l'amour, l'amour léger qui danse avec la tristesse, son insécable reflet.