Complainte des poèmes oubliés aux marchands du quai.

Oh ! Bouquiniers de la Seine
Voyagez ! Vendez ! Voyagez !
Par-delà la fortune
et plus encore . . .

en lecture, Partez !
Partez ! Invincibles libraires
sur des péniches galères
aux redondantes voilures

pour inventer
la grisante liberté
de nos destins d'éphémères


et nos reliures d'orgueil
conquérants d'aventures
vous les emporterez
en vos cales, en vos coffres de gloire !


entassés, pêle-mêle
nous serons les esclaves
de votre imaginaire
en si belle dérive
sur des flots de paroles
égarés, au lointain univers


Flibustiers ! Mercenaires !
Vous serez ! Nous serons !
À l'assaut des rêves !
Fiers Capitaines !
Héros !

*

Voguez ! Lisez !
Négriers de lecture
découvreurs d'inconnu
bouquiniers infâmes
et nos pages en colères
vous seront tempêtes infernales
au chemin des Enfers...

tant d'écrits de délire …
vous nous abandonnerez, naufragés,
emportés par le désir
noyés

engloutis
jusque nos dernières lignes
au-delà des océans d'écriture
où nous vous laisserons glisser

en d'immenses pages abandonnées
à de vagues souvenirs

J'aime assez, il y a du souffle, une tonalité rimbaldienne sans doute. Une sous-tonalité Villon un peu aussi, dans l'aspect complainte, adresse d'un perdu.
Peut-être un peu long au total. Et quelques heurts ou impedimenta côté rythme. Par exemple ces ! et cette ponctuation tonitruante qui me semblent inutiles et même constituer des obstacles (y compris à la liaison entre partez zé zinvicibles. Essayons la preuve expérimentale :

Ô Bouquiniers de la Seine
Voyagez vendez voyagez !
Par-delà la fortune
et plus encore

en lecture, Partez
Partez, Invincibles libraires

vs

Oh ! Bouquiniers de la Seine
Voyagez ! Vendez ! Voyagez !
Par-delà la fortune
et plus encore ...

en lecture, Partez !
Partez ! Invincibles libraires

Dans les heurts je range l'alinea introduire après "pour inventer" et surtout le D' juste avant Ephémères : le lecteur n'attend pas ce D et le coulant De nos destins éphémères me paraît avoir totalement le même sens

pour inventer
la grisante liberté
de nos destins d'éphémères

Mais voilà, pour moi c'est du bon Prunier. Dans sa version lyrique peut-être.

On se sent tout petit à passer après Marvejols.

j'aime !
remarque : la couleur dans les calligraphies me chiffonne un peu, j'aurais bien vu un simple parchemin bis, qui se serait marié avec l'évocation de la flibuste

"nos pages en colères" le "s" à colère m'a surprise, est-il volontaire ?
"tant d'écrits de délire" n'est pas très musical.
(ces deux remarques se rattachent à la partie que je trouve (aussi) un peu longue).

Sinon, j'embarque avec ces boutiquiers ! et vogue la galère !

un commentaire de passante qui passe ?
Un Cap'tain à la Hérédia... du souffle.
Des livres plein les malles. Du rêve, des grimoires comme j'aime.

bon alors je vais me faire toute petite et dire que j'aime tout simplement ce texte et que les calligraphies colorées ne me gênent nullement au contraire azurées fondu gris d'accord avec Marvejols sur les ponctuations tu vois Fred moi j'aurais écrit ce poème sans aucune ponctuation et concernant la longueur de quoi s'agit-il de voyage alors laissons-nous bercer par la prose moi je ne vois rien d'autre qui heurte ma lecture sinon qu'une vaguelette dans les coupes des strophes et ces points qui ne cessent d'exclamer mais quel travail quel voilier et hissez hissez haut !