Le syndrome de l'ambition

Le syndrome de l'ambition

Mon ami,

Depuis que je me confie aux questionnements, je craque. J’ai peur d’être plongé dans une telle haine de mon brillant passé que ça en devienne totalement disproportionné. Et pourtant... je touche du doigt quelque chose qui est surement encore à l'état latent chez toi et que j’aimerais mettre en lumière sous tes yeux. Cette fois je ne te demande pas de foncer vers une réponse mais de te poser simplement sur mon problème avec une bonne demi-heure devant toi. Envoi moi ensuite un mail de retour singulier et authentique.

Plutôt que la fainéantise artistique, nous avons préféré le plus hostile barreau de l’échelle sociale, le plus doré à la teinte et le plus scintillant au toucher : « Moi, je suis trader ». Personnellement, à bien y réfléchir, les évènements de mon existence qui auraient pu s’apparenter à des escales temporelles sont quasi-inexistants. Aucune pause. Me voici devant un constat : j’ai passé 47 ans sans les vivre. J’irais même jusqu’à dire que ma terrible maladie inaugure une révélation tout comme je pense qu’il faut être à bout de souffle, dans l’extrême-onction suffocatoire pour entendre que l’on respire et à ce moment précis prendre conscience de la vie; c’est une sorte de répit.

Nos erreurs …

Alors que l’échelle artistique est surement verticale, l’échelle sociale est, à mon humble avis, horizontale; Nos pas se dirigent vers quelque chose d’attirant qui est loin devant nous mais à notre hauteur et j’ai des maux de cou à force de ne pouvoir lever la tête plus haut que je ne suis. Voilà ce que nous sommes : emplis de gravité et englué vers le bas. A mon dernier rendez-vous médical je me suis refusé d’aborder ce sujet car il semblerait plutôt qu’il s’agisse d’un non-symptôme; c’est une sorte de vertige qui me prend quand je suis le plus bas possible, le vertige d’être à même le sol. As-tu déjà ressentis ce genre de chose ? Sais-tu si ça a un nom ?

En attendant mes derniers résultats sanguins, j’ai passé une très bonne journée. C’est surement la première fois que j’ai laissé quelques heures se déplier devant moi sans être désireux de savoir ce qu’elles auraient à m’offrir. Que penses-tu du temps qui passe ? Ça te fait de l'effet quand tu y réfléchis ou non ? De mon côté j'ai l'impression d'avoir passé ma vie à le couper en tranche pour mieux le bouffer. Mouvement rotatif de la tête à droite vers le passé, à gauche vers le futur sans passer par le milieu et tu sais mieux que moi que nous exécutons cet acrobatie à la perfection. Le présent est devenu – sinon vide – un appui pour accéder au futur qui lui-même une fois devenu présent, sera encore reporté à demain. Quant au passé, qui exige un torticolis par le regard, avons nous la mémoire si courte pour oublier qu’il est déjà clos depuis belle lurette ? Mon ami, en prenant de l’avance nous avons reculé, alors qu’en prenant du recul nous aurions avancé. Tu me dira le fric et bien sur je serait d'accord avec toi. Nous en avons et tant mieux. Argent et richesse. Contrairement à avant, je pense que l’argent est la distance qui sépare l’homme de la richesse et l’ambition, celle qui sépare l’homme de son génie. Il y a du temps, de l'espace et des désirs qui s'épanchent en dehors de nous - par les pores que nous avons creusés - de façon à ce tout soit incontrôlable. Essaye d’être avec le temps et non contre lui. Retournes vers toi ...

Ce que je te demande c'est d’observer attentivement les problèmes mais de ne pas te précipiter; j'aimerais que tu aborde cela avec un courage simple. Si j'ai parlé de manière si abrupte et que j'ai évité de me perdre dans la nuance, c'est que je ne veux pas que tu finisse comme moi, un pauvre type qui découvre les choses..

PS : As tu déjà écris un poème ?

Bien Amicalement

Nicolas

" je touche du doigt quelque chose qui est surement encore à l'état latent chez toi et que j’aimerais mettre en lumière sous tes yeux"
trop charmant le garçon

"Cette fois je ne te demande pas de foncer vers une réponse mais de te poser simplement sur mon problème avec une bonne demi-heure devant toi"

une demi heure !! mais est ce assez?

"Envoi moi ensuite un mail de retour singulier et authentique"
et vigoureux à qui de droit.

" Moi, je suis trader "
y'a pas de honte.

"Alors que l’échelle artistique est surement verticale, l’échelle sociale est, à mon humble avis, horizontale; Nos pas se dirigent vers quelque chose d’attirant qui est loin devant nous mais à notre hauteur et j’ai des maux de cou à force de ne pouvoir lever la tête plus haut que je ne suis. "

ça j'l'dis toujours à M'ame renné. ça donne des torticolis, dud'iou.

"c'est que je ne veux pas que tu finisse comme moi, un pauvre type qui découvre les choses.."

d'où l'imprécation de la première phrase? y'a erreur sur la personne alors.

Un texte où on fait semblant de s'adresser à l'autre pour mieux parler de soi (le narrateur s'entend ici, je préfère préciser). Pourquoi pas mais ça fonctionne pas vraiment dans le cas présent car c'est trop hésitant, c'est nombriliste sans pour autant jamais élever le débat.
Il y a de la recherche dans l'écriture, un soin particulier y est apporté et je me demande si cet aspect parfois très scolaire n'est pas ce qui empêche ce texte de réellement se libérer. Là, il tourne autour de lui-même sans jamais expulser ce qu'il a en lui, dommage.

Petit détail: dommage de voir le mot mail au milieu de toute cette recherche de vocabulaire. Je ne voudrais pas jouer les puristes, mais ça fait un peu tache dans tout ceci et courriel aurait sans doute été plus heureux.