Avant l'orage touristique

I

De nouveau avec ma canne (que j'ai cassée en route), de nouveau la nuit qui tombe vite. C'est une habitude ici.

Avec mes complices habituelles, nous devinons la mer, nous regardons les bourdons qui dorment sur la lavande, nous courons à contre-jour pour se revoir avec surprise.

Si on ne tourne pas la tête au bon moment, il est possible de rater les deux allumettes au-dessus des collines.

Le petit cimetière de Llauro a la plus belle vue sur ce qu'il reste de France. Nous avons la plus belle sur ce qu'il reste de vie. Un pied sur le caveau, l'autre dans le vide.

Plus haut, après être passés par le square du Souvenir, s'ouvre un chemin décoré par des fleurs jaunes, comme des légions d'or-neuf.
En parlant du Souvenir, rappelons-nous de la table qui le surmonte, la source, pour café froid ou liqueur anisée.

Les deux plaines qui nous entourent sont maintenant invisibles. Elles ne sentent sûrement pas le vent. Ou bien est-ce celui de l'Est.



II

Ce sont les derniers matins lozériens. Sans grande peine. Sans grande joie. Une fin prévisible et presque arrangée. Comme un mariage mais à l'inverse.

Aujourd'hui, j'ai eu plaisir à retrouver Saint-Frézal comme je l'avais vu pour la première fois. Il fallait presque chercher l'ombre. C'est un luxe. Après les jours de neige, après les jours sans courant, sans chauffage.
Voici venu le temps de l'inconfort. Parce que l'été est presque là et qu'il est plus agréable d'être assis dans de l'herbe que dans un lit.

Toutes les feuilles étaient mouillées et mes pieds recevaient cet eau. Je me rince aux abreuvoirs des insectes.

Une limace grosse comme deux petites. Des bruits environnants. Je me sèche les yeux au soleil de 10H et je pense aux mois qui viennent. A la chaleur. Elle me suivra autre part, dans une ville qui deviendra, elle aussi, un souvenir.

Libéré de tes concepts tu écris vraiment bien. Tes carnets de route sont biens, loin de la route 66 et c'est une bonne nouvelle. Le passage du cimetière est particulièrement émouvant. Marrant, en attaque, J'aurais modifié "de nouveau" pour "du nouveau". Bonne nuit.

c'est beau et ça me touche, je garde ce texte pour la journée, il m'accompagnera en voyage

Une belle élégie que cette balade mélancolique. J'ai aimé, je l'aurais voulu plus long le dépaysement.

Ah oui ! une grande pertinence d'évocation, une belle écriture avec de la profondeur.

Moi, ce que je préfère c'est : "je me rince à l'abreuvoir des insectes".
Super ton texte. Merci.

Je te découvre dans un registre qui me plaît davantage de ce que j'ai pu lire précédemment de toi. C'est un régal, simple mais pas simpliste

Il y a pas mal de nostalgie et de mélancolie dans tes lignes, presque de l'amertume aussi, comme si ce regard posés sur le passé et des lieux-souvenirs apportait de la douleur et de la résignation. Cela donne dès lors une allure dramatique au texte, assez réussie même si de ci de là un peu pesante.
C'est un registre qui te va bien, Ole.