Le Vieux Fou et le Sage

L’histoire que je vais vous conter vient de loin. Elle a traversé les plaines de Serbie, plusieurs pays d’Europe et est arrivée en Provence où je l’ai entendu. Je l’ai trouvée si belle que j’ai eu envie de la transmettre à mon tour.

Il était une fois un vieux fou. Les gens le prenaient pour fou car il pouvait rire de joie comme un enfant tout comme se révolter face au bavardage inutile. Ce vieux fou avait été d’abord un jeune fou. Il avait eu foi en l’Homme, il avait pris plaisir à les regarder vivre. Et surtout il avait appris à libérer la vie et à l’aimer. Avec le temps, de jeune fou amoureux de la vie, il était tout naturellement devenu un vieux fou amoureux de la vie.

Un jour un jeune homme vit voir le vieux fou, alors qu’il était déjà très vieux, mais toujours aussi amoureux de la vie. Le jeune homme arriva à la demeure du vieux fou. Il frappa à la prote et dit à l’homme qui lui ouvrit :

- On m’a dit qu’un Maître habite ici

Le vieux fou se mit à rire de bon cœur et lui répondit avec joie :

- Bonne nouvelle ! Nous pouvons le chercher ensemble. Entre !

Le jeune homme entra et vit qu’il n’y avait que lui et le vieux fou dans la maison. Il fut pris d’une grande déception

- Sans doute s’est-on joué de moi. Il n’y a pas de sage ici.

Le vieux fou s’assit à même le sol et invita le jeune homme à s’installer sur un coussin devant lui.

- Assied-toi confortablement
- Je ne compte pas rester longtemps, répondit le jeune homme
- Tu veux vraiment le trouver ce Maître ?
- Oui bien sûr
- Alors, installe-toi.

Le jeune homme s’approcha de la pote et dit

- Je ferais mieux de partir, le Maître que je cherche est sans doute ailleurs
- Comme tu voudras, répondit le vieux fou.

Puis il ferma les yeux, et se mit à respirer.
Le jeune homme fut fasciné par la liberté et le bien-être qui émanait du vieillard. Son corps vibrait au rythme de sa respiration aisée. Il fut tellement en admiration qu’il ne put s’empêcher de s’asseoir calmement sur le coussin devant lui et de le suivre.

Après un temps, qui pourrait sembler long à certain, le vieux fou ouvrit les yeux, sourit et dit au jeune homme :

- Ah te voilà prêt à trouver ton Maître. Je ne sais pas encore lequel de nous deux est ce fameux Sage dont on t’a parlé. Je peux t’apprendre ce que je sais, la vie nous offrira le reste.

Le jeune homme resta longtemps à ses côté. Il apprit a respirer librement, à laisser vibrer son corps au rythme de la vie. Il se mit à aimer chaque instant, à rire comme un enfant et à se révolter contre le bavardage inutile. Il était tout naturellement devenu un jeune fou amoureux de la vie.

Un jour le vieux fou lui dit :

-Je vais bientôt quitter cette vie merveilleuse, mais toi tu dois continuer.
Va vivre au Sommet en plein soleil. Sois ce que je n’ai jamais été : un grand Maître, un Sage. Et oublie-moi ? je ne suis qu’un vieux fou amoureux de la vie qui croit encore aux miracles.(*)

Le jeune homme prit la route. Il traversa des villes, des plaines désertes, des rivières asséchées, des torrents, il grimpa des collines, dévala les vallées… jusqu’à atteindre le sommet en plein soleil. Et, avec le temps, il devint, tout naturellement, un vieux fou amoureux de la vie.

On dit que ce vieux fou vit toujours au sommet, en plein soleil, profitant de chaque instant. Quand ils font silence, les gens qui vivent dans la vallée peuvent l’entendre rire.




(*) Vlady Stévanovitch in La voie de l’énergie.

Dans le premier paragraphe, vous aurez compris que j'ai oublié de taper un "e" à entendu...

Dans la citation, il ne doit pas y avoir de point d'interrogation. "Et oublie-moi." Erreur de frappe....

C'est écrit avec le bon ton: c'est limpide, ça va à l'essentiel, c'est lumineux!!
Suis tu l'enseignement de ces vieux fous?

"vint" et "porte" également au troisième paragraphe mais ce n'est pas bien grave !
Une très belle histoire qui respire la sérénité, le calme, la joie de vivre, la sagesse... Une vrai ambiance très bien rendue, un style adapté : les répétitions donnent une touche innocente. Bref, j'aime beaucoup !

Eh bien, on en raconte de belles choses dans la région, Fée Clo !
Merci de nous avoir fait participer à cette belle histoire que tu racontes si bien.
Personnellement, je préfère quand même quand tu nous racontes ton nouveau pays d'adoption.
Y a-t-il encore de la neige ? Ici, le ciel est gris, mais par terre c'est tout blanc !

J'aime bien ces légendes qui se transmettent de bouche à oreille et qui se modifient un peu au grè du conteur... C'est sympa de nous avoir fait partager celle-ci Feeclo.
Il reste quelques coquilles qui gènent un peu la lecture et certains passages auraient pu être étoffés pour mieux poser l'atmosphère autour de ce personnage atypique mais le tout se lit plutôt bien.

Edifiant à souhait, très... ;-)

Aegis a écrit:C'est écrit avec le bon ton: c'est limpide, ça va à l'essentiel, c'est lumineux!!
Suis tu l'enseignement de ces vieux fous?

Pour répondre à ta question Aegis, je n'ai malheureusement rencontré qu'une seule fois Vlady.... il est décédé début novembre. Et ce 27 décembre il y avait une pratique de tai chi en son hommage un peu partout dans le monde, ses élèves et les élèves de ses élèves.
Moi, j'ai été élève d'une de ses élèves. Ce conte était aussi une manière de lui faire un clin d'oeil.

Très belle petite légende, semblant faite pour le bouche à oreille! les moyens de communication ont changé mais pas le contenu. Je retiendrai de cette leçon du maître que faire silence et rire, ça a souvent du bon...