La logique des choses

Putain mais il me veut quoi ce sale pédé ?

C’était inattendu et remarquable comme toutes les choses inattendues. Le voilà qui nous apporte notre commande. Deux demi frais car il fait chaud. Il me regarde fixement et tente de coller l’addition au givre de mon verre. Tout comme moi, le papier refuse d’adhérer. Bénie soit ce papier ! Il retombe sur la table telle une pauvre feuille morte mais l’autre ne comprend pas, il s’acharne, un entêté. Il faut que ça colle qu’il me dit. Et va z’y ! Le symbolisme du mulet. L’addition se détache à nouveau du verre. Troisième tentative, échec supplémentaire. Je le vois qui gonfle le torse nu sous son marcel blanc immaculé, son cul moulé en jean serré. Les cheveux courts dressés de gel brillant, des tatouages tribaux pour décorer ses bras musclés. Il est grand, jeune et bronzé comme un adonis de foire. Je me demande ce qui chez moi peut l’attirer. Peut être mes cheveux longs ou mon air à la con. Sûr qu’il veut m’enculer. Putain, des fois on choisit des endroits pour être sûr de n’y croiser personne. Sur Montpellier c’est de cet ordre là je vous jure. Une putain de terrasse anonyme. A l’ombre d’un tilleul éparse. Coté préfecture place. La place des pédés avec des cafés de pédés, et des terrasses remplies de pédés. Des pédés partout qui s’affichent comme des pédés. Du genre tafioles cambrées, body buildées, coudes repliés. Jolies minets et hommes soignés. Cheveux courts, fashion à la clean, crossover de Nova magazine. Bref la bonne benz gay absolument ravie de se décoincer le derche.

Ah mais pardon je ne vous ai pas présenté ! J’aurai du commencé par là, par Mona. Parce qu’elle est bonne Mona je vous dis que ça. Le genre pulpeuse suceuse ça suffira. Sa face en face de moi, milieu de la terrasse.

Pouf l’autre parti. (Homme qui travaille, retourne à ses affaires).

« J’ai revue Chloé qu’elle me dit Mona.
_ Oh ! alors ?
_ Laisse tomber
_ Elle est toujours à Toulouse ?
_ Ouais. Depuis que Sonny est parti elle traîne avec Fleur. Tu la connais Fleur ? »

Vous pensez si je la connais Fleur ! Une bombe atomique (y a que des bombes dans cette histoire). Genre bitch de rap clipée. Tellement tellement trop bonne ; elle fait bander les mutilés.

_ Cette meuf elle est folle poursuit Mona, et Chloé tu la connais (sourire complice entendu).

Que la foudre me frappe si je ne connais pas Chloé ! La période étudiante, joints, thés, joints, joints, thé, joints. Un vrai scout Chloé, toujours prête. Bonne bien vivante à fond les ronds ballons. Petite, nerveuse et vachement carrossée. Ca fait au moins un an que je l’ai pas revu que je pensais. Crissement de chaises ferrées et bruits sac à patates en épaulé jeté.

Mona et moi tournons la tête en direction pour mater ce vacarme. Un couple de touristes allemands traditionnels s’installent à la table d’à coté. A leur manière. Gros short pour tous les deux, t-shirt sponsorisé, poitrail et cheveux gris ; sandales olé olé sur chaussettes blanches très remontées, Nike air estampillées.

On lève les sourcils, on se fait des grimaces, on se chauffe. Contenir le fou rire. Avec l’expérience on y arrive mieux de mieux. Nous ravalons les gros éclats et bobinons la discussion.

_ Alors elle va bien Chloé ? » que je lui demande à Mona.
_ Chloé je lui ai dit « eh t’as 30 ans là !»
_ …
_ Elle est resté dans son adolescence j’te jure, on dirai qu’elle a besoin de ça, je sais pas.

Je bois un coup, Mona aussi. Et puis elle fait aaaaahhheeeuu en retombant sur sa chaise. Un grand sourire. Hochement de tête mafioso et à nouveau les coudes sur la tables.

« Tu sais pas ce qu’elle faisait avec Fleur ? » qu’elle me relance sur l’air énigmatique des grands secrets. « Attend tu vas rire, non mais tu vas voir le niveau du truc ». Elle tend sa main en visière. « Une vraie gamine, je te jure j’étais morte de rire ».

Sourire, je bois un coup. Avec le sun, les grandes lampées de milieu d’après midi on les sent bien passer quand même. Et c’est plutôt agréable. Alors on s’enfile une nouvelle gorgée de bière et on se détend. Un coup de vent balance du frais en supplément. Mona rattrape une mèche de cheveux en train de se barrer et se la gare derrière l’oreille.
_ Ecoute » qu’elle me regarde en avançant un bras vers moi, Inspiration puis narration :
_ Fleur sur internet elle donne rendez-vous à des gars genre pour passer la soirée ensemble, enfin en leur faisant croire … tu vois comment elle est… ».

Si je vois comment elle est ? C’est simple Fleur est bouillante, même pas bouillonnante, tout simplement BOUILLANTE. Quand elle parle d’un mec qui lui plait bien, elle fait : « ce gars là j’vais m’le baiser, j’vais m’le baiser et y va s’en rappeler toute sa vie ». Un démon cette fille.

En face de moi Mona passe doucement sa langue sur toute la surface de ses lèvres, d’un coté et puis de l’autre. C’est sa manière à elle de ramener les mecs sur terre. Trêve de rêverie, l’image de Fleur, ses seins dressés son cul parfait, je récupère mon attention et prend la pose de l’attentif :
« Alors elles rencardent les gars sur internet, elle les rencardent genre dans un café ou un resto, un endroit anonyme tu vois.
_ Ouais un peu comme ici
_ Voilà. Donc elles donnent rendez-vous à des bourges, tu vois genre quarantaine avocat genre pour sortir tu vois, elles les chauffent à fond et pis elles leur tapent du cash pour aller chercher de la coke chez un pote à elles, genre « vous bougez pas on revient » tu vois ce que je veux dire ? Elles se débrouillent pour se barrer avec la thune. Et voilà après elles sortent toutes les deux, elles se bourrent le pif de coke et elles font les folles toute la nuit enfin tu vois le truc. C’est tout Chloé, elle changera jamais. Nan mais voilà quoi… » et dans un souffle elle ajoute :

« C’est n’importe quoi j’te jure. »

Grimace ambiguë, regards dans le vague, moment de suspension et puis Mona me sort :

_ Voilà les plans de Chloé, elle fait cul et chemise avec Fleur et je te dis pas le mélange explosif que ça donne, laisse tomber, j’te jure c’est une vrai gamine.
_ Et Sonny, t’as des nouvelles ? » je réoriente. Histoire de zapper, ne point trop s’enfoncer dans des considérations compliquées de meufs sur la psychologie de Chloé. Chloé c’est une débile mentale comme elles toutes et point barre. J’enfonce le clou :
_ Il est toujours en Guyane ?
Mona se rétracte et repart en arrière. Epaules tirées les seins en l’air.
_ Ouais ben lui y se planque. A Toulouse il est mort de toutes façons. Je connais le gars qu’il a balancé. Tu sais que quand il s’est fait serré il a collaboré avec les keufs pour faire serrer son grossiste ? Moi le grossiste je le connais, c’est un mec super sympa en plus, y vient juste de ressortir de prison et je peux te dire que Sonny il a pas intérêt à se pointer. C’est pour ça qu’il est parti en Guyane d’ailleurs. Mais bon voilà quoi. Sonny sous les tropiques ! » éclats de rires et pupilles pétillantes.

Regorgées de bière. Allumage de clope avec son briquet, un petit Bic rose tiré d’une poche oubliée.

_ Depuis quand tu l’as pas vu ? fait Mona en tirant sur sa clope.
_ Pfff depuis euh….Je réfléchie. « Super longtemps, on s’était capté à Toulouse juste avant qu’on lui passe les fers ».
_ Tu connais l’histoire ?

Oui je la connais. Mais en fait y a pas d’histoire, juste une suite logique d’enchaînements à la con. Dimension petite frappe ; catégorie bal populaire. Sonny s’inflige des pompes sur le gravier. Brasse du shit, des armes et de la cé. Il fait le beau dans les soirées, tout le monde connaît. Il est trop bête Sonny. Il se fait remarqué serré, puis il balance les gars du réseau. On apprend tous un peu plus tard que le gitan qui fournissait se fournissait chez ETA. Vous savez la bande armée, les responsables d’assassinats. Et l’autre il les a balancé, il a tapé un peu de zonzon pas cher et c’est barré en Guyane pour monter une école de danse. Je regardais vers le ciel, putain par le passé Sonny c’était le feu. Bonnie and Clyde avec Chloé..

_ Mais j’ai revu personne depuis un moment, même Chloé » je soupirais.
_ Tu sais qu’elle va se casser à Nice ? Franchement ça va lui faire du bien.
_ A Nice ? mais c’est pourri Nice, c’est trop laid. Qu’est-ce qu’elle va foutre là bas ?
_ Ah mais t’es au courant de rien c’est vrai, elle a eu son concours et elle est placée sur Nice. C’est pour bosser qu’elle va là bas.
_ Le concours de quoi ?
_ CEP, CED ou un truc comme ça.
_ Mais c’est pour faire quoi ?
_ C’est genre conseiller d’éducation pédagogique, c’est dans l’éducation, c’est pour les gamins, leur filer des conseils pour leur orientation dans l’avenir.

Eh ben dis-moi, ça en jette ! Tellement que je ferme les yeux sur les fautes.
Arrivée remarquée. Et réussie.
Bienvenue ici.

Pour en jeter, ça en jette !

Je n'ai absolument pas vu l'intérêt de ce dialogue de branleurs, relâché-n'importe-awak pour faire genre. Bienvenue sur Vos Écrits cela dit, à vous lire bientôt !

Pas mal d'erreurs de langue :
« Deux demis frais »
« Béni (et non « bénie ») soit ce papier »
« Et vas-y »
« c’est de cet ordre-là »
« Jolis (et non « jolies ») minets »
« J’aurais dû commencer »
« J’ai revu (et non « revue ») Chloé »
« Ça fait au moins un an que je l’ai pas revue »
« la table d’à côté »
« Elle est restée dans son adolescence »
« on dirait qu’elle a besoin »
« Attends tu vas rire »
« milieu d’après-midi »
« un mec qui lui plaît bien »
« d’un côté et puis de l’autre »
« je récupère mon attention et prends la pose »
« quand il s’est fait serrer »
« Je réfléchis »
« Il se fait remarqué serré » : ?
« il les a balancés »
« et s’est barré en Guyane »
« elle va là-bas »