La traite des blondes
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CROISIC
Jean Lê
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La traite des blondes
C’était en novembre pendant une campagne de traite des blondes, on avait relâché à Bilbao.
On remontait en cabotage vers le cap Finistère. Au large des Asturies, avarie ! Voilà la courroie qui lâche. On met le cap sur Ribadesella pour faire réparer cela. C’est un port de pleines eaux drossé à la montagne.
En attendant la marée le cap’tain décide de mouiller. Avec le mécano on a sorti nos planches à voile pour voguer vers le port poussé par le solaire. Les ibères ahuris nous ont vu grimper en combinaison et courir sur la jetée pour aller se réchauffer dans un estaminet.
Plus tard “le refuge des marins” a accosté, il y en avait des badauds sur le quai. Il faut dire qu’un chalutier avec un tape-cul ça court par les rus. Puis le cap’tain et les tribordais nous ont rejoint au troquet. Y z’ont un bon cidre là-bas qu’il font pétiller en le versant de haut comme au Maroc le thé. A l’heure de la fermeture on était déjà plus sortable. Mais si certains meurent de soif, les bretons naissent avec. Alors avec le zodiac on est parti vers un port plus loin, pour aller boire un dernier verre.
Au retour nous étions pleins mais la nourrice était vide et ce fut la panne. On a pu apprécier la fleur du couchant puis l’obscurité est doucement montée de la mer. Avec la force du courant les lumières du port se sont rapidement éloignées. On a sorti les pagaies et nagé toute la nuit dans le courant pour se tenir à distance des ombres de la falaise. Pas question d’accoster sur ce rivage plein de rochers, le cap’tain ne savait pas nager. Au petit jour, sans eau et sans biscuit, la gueule de bois brassée par la houle, on a moins goûté la fleur du soleil qui dardait ses pétales sur la falaise.
Vers onze heures on a pu tirer une fusée et une barcasse s’est déroutée pour nous récupérer. Arrivée au port on a encore lâché quelques fusées pour décorer la jetée. Quand la guardia civil nous a interviewé on marchait encore à la mode de Penmarch : le plus saoul à la barre !
Ils ont bien gobé notre baragouin dit plus tard le cap’tain en se reprenant un tapas à l’apéro.
On remontait en cabotage vers le cap Finistère. Au large des Asturies, avarie ! Voilà la courroie qui lâche. On met le cap sur Ribadesella pour faire réparer cela. C’est un port de pleines eaux drossé à la montagne.
En attendant la marée le cap’tain décide de mouiller. Avec le mécano on a sorti nos planches à voile pour voguer vers le port poussé par le solaire. Les ibères ahuris nous ont vu grimper en combinaison et courir sur la jetée pour aller se réchauffer dans un estaminet.
Plus tard “le refuge des marins” a accosté, il y en avait des badauds sur le quai. Il faut dire qu’un chalutier avec un tape-cul ça court par les rus. Puis le cap’tain et les tribordais nous ont rejoint au troquet. Y z’ont un bon cidre là-bas qu’il font pétiller en le versant de haut comme au Maroc le thé. A l’heure de la fermeture on était déjà plus sortable. Mais si certains meurent de soif, les bretons naissent avec. Alors avec le zodiac on est parti vers un port plus loin, pour aller boire un dernier verre.
Au retour nous étions pleins mais la nourrice était vide et ce fut la panne. On a pu apprécier la fleur du couchant puis l’obscurité est doucement montée de la mer. Avec la force du courant les lumières du port se sont rapidement éloignées. On a sorti les pagaies et nagé toute la nuit dans le courant pour se tenir à distance des ombres de la falaise. Pas question d’accoster sur ce rivage plein de rochers, le cap’tain ne savait pas nager. Au petit jour, sans eau et sans biscuit, la gueule de bois brassée par la houle, on a moins goûté la fleur du soleil qui dardait ses pétales sur la falaise.
Vers onze heures on a pu tirer une fusée et une barcasse s’est déroutée pour nous récupérer. Arrivée au port on a encore lâché quelques fusées pour décorer la jetée. Quand la guardia civil nous a interviewé on marchait encore à la mode de Penmarch : le plus saoul à la barre !
Ils ont bien gobé notre baragouin dit plus tard le cap’tain en se reprenant un tapas à l’apéro.
Jean Lê- Nombre de messages : 591
Age : 65
Localisation : Bretagne
Date d'inscription : 22/11/2010
Re: La traite des blondes
j'adore le parfum de vécu et les petites touches d'humour !
ou " ça court pas les rues" ?Il faut dire qu’un chalutier avec un tape-cul ça court par les rus.
ArrivésArrivée au port
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
Oh, j'allais oublier l'essentiel : vous faisiez de la traite de gourdes ?
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
Le tape-cul est le nom de la voile qu'il y avait sur le petit mat d'artimon de ce vieux chalutier. Les rus sont les petits ruisseaux.
Pas de méprise, je ne suis pas un négrier, terme bien malheureux pour des blondes. Ces blondes n'étaient pas des gourdes mais aussi de celles qui partent en fumée quand on les allume, "la traite des blondes" c'est la contrebande de cigarettes.
Bien vu Coline c'est du vécu, merci pour la correction.
Pas de méprise, je ne suis pas un négrier, terme bien malheureux pour des blondes. Ces blondes n'étaient pas des gourdes mais aussi de celles qui partent en fumée quand on les allume, "la traite des blondes" c'est la contrebande de cigarettes.
Bien vu Coline c'est du vécu, merci pour la correction.
Jean Lê- Nombre de messages : 591
Age : 65
Localisation : Bretagne
Date d'inscription : 22/11/2010
Re: La traite des blondes
Quoique les blondes... SERAIENT parait il des gourdes ! Là, je ne vais pas me faire que des amies.
Beaucoup, beaucoup aimé ce texte... et le retour du bel avatar.
Beaucoup, beaucoup aimé ce texte... et le retour du bel avatar.
Re: La traite des blondes
Il y a un rythme particulier, teinté d'une poésie étrange. Ton texte me laisse un goût que j'ai beaucoup de mal à définir, je ne sais vraiment ce qui me plaît dedans. Je crois que j'ai accroché aux rimes ( volontaires ou involontaires ? ) qui ponctuent ta prose et nous entraînent dans l'ambiance et la narration. "Fleur du couchant", c'est vraiment sympa comme expression, de la même façon que pour "sans eau et sans biscuit", ensemble que j'ai apprécié. L'humour, joli aussi.
"Arrivés au port on a encore lâché quelques fusées pour décorer la jetée."
Ce genre de phrase dit beaucoup plus de choses que le texte lui-même, il dépeint vraiment des caractères, une ambiance, et c'est par cet humour étrange que tu captes notre attention.
"Arrivés au port on a encore lâché quelques fusées pour décorer la jetée."
Ce genre de phrase dit beaucoup plus de choses que le texte lui-même, il dépeint vraiment des caractères, une ambiance, et c'est par cet humour étrange que tu captes notre attention.
Espérance- Nombre de messages : 25
Date d'inscription : 13/03/2010
Re: La traite des blondes
Le dernier paragraphe me semble moins enlevé que ce qui précède mais dans l'ensemble, j'ai apprécié cette tranche de vie marine, ce pub crawling à la bretonne, l'humour qui s'en dégage.
Tu as l'art de la formule, je retiens celles-ci, la première pour le jeu de mots, les deux autres parce qu'elles m'ont fait sourire :
Il faut dire qu’un chalutier avec un tape-cul ça court par les rus.
Mais si certains meurent de soif, les bretons naissent avec.
Quand la guardia civil nous a interviewé on marchait encore à la mode de Penmarch : le plus saoul à la barre !
Tu as l'art de la formule, je retiens celles-ci, la première pour le jeu de mots, les deux autres parce qu'elles m'ont fait sourire :
Il faut dire qu’un chalutier avec un tape-cul ça court par les rus.
Mais si certains meurent de soif, les bretons naissent avec.
Quand la guardia civil nous a interviewé on marchait encore à la mode de Penmarch : le plus saoul à la barre !
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
Je vois après coup l'explication du titre, c'est en effet un éclaircissement nécessaire...
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
J’aime bien cette tranche de virée de matelots, j’ai l’impression de lire un capitaine Haddock breton, plein d’humour, vivant, bien croqué.
Et aussi cette sensation que chaque mot est nécessaire, à sa place et irremplaçable. Un texte ciselé.
Et aussi cette sensation que chaque mot est nécessaire, à sa place et irremplaçable. Un texte ciselé.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: La traite des blondes
ah, j'avais zappé ce texte: ciselé, c'est le terme, éléa a raison. L'ambiguité du titre est-elle voulue ? oui, j'imagine... Une atmosphère vraiment bien croquée, et un texte qui sait être compact. Merci.
Lizzie- Nombre de messages : 1162
Age : 57
Localisation : Face à vous, quelle question !
Date d'inscription : 30/01/2011
Re: La traite des blondes
Les Asturies, j'adore ! Ma région préférée d'Espagne je crois
Le cidre aussi, là-bas, ça me rappelle de ces cuites, vingt-dieux...(il est plus alcoolisé que par chez vous) On doit, comme tu le dis dans ton texte, "escanciar", c'est à dire faire choquer le liquide sur le rebord du verre à cidre, geste super compliqué à faire, surtout avec plusieurs bouteilles dans le nez. Puis comme on geste le cul du verre, en général on ne boit même pas la moitié de la bouteille...
Par contre "un" tapas, ça ne marche pas, parce que "tapas", c'est pluriel. Mais mis à part ça, j'ai trouvé ça criant de vérité. on s'y croirait, sacré nom. Dommage que ça ne fasse pas une histoire entière...
Le cidre aussi, là-bas, ça me rappelle de ces cuites, vingt-dieux...(il est plus alcoolisé que par chez vous) On doit, comme tu le dis dans ton texte, "escanciar", c'est à dire faire choquer le liquide sur le rebord du verre à cidre, geste super compliqué à faire, surtout avec plusieurs bouteilles dans le nez. Puis comme on geste le cul du verre, en général on ne boit même pas la moitié de la bouteille...
Par contre "un" tapas, ça ne marche pas, parce que "tapas", c'est pluriel. Mais mis à part ça, j'ai trouvé ça criant de vérité. on s'y croirait, sacré nom. Dommage que ça ne fasse pas une histoire entière...
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
j'en ai pas bu aujourd'hui pourtant !vincent M. a écrit: comme ongestejette le reste dans le cul du verre,
Invité- Invité
Re: La traite des blondes
Une histoire bien salée à déguster avec plaisir et avec les tapas.
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
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