Je ne me sauverai pas

Chloé tu es toi
Et je n'ai aucun droit
De te draper dans mes angoisses
De réclamer caresses et cris d'amour
Lors que les jours ne sont pas encore venus
Pour moi
De te voir nue pour la première fois


Mais viendront-ils seulement ces jours un jour je n'en sais rien
Vraiment
Et peu à peu comprends que la magie
N'agit pas toujours d'un claquement de doigts
Qu'elle peut naître aussi des pierres, de la patience
Et que l'essence de la passion
N'est pas toujours de celle qui embrase les forêts


Je me croyais foutu depuis longtemps
Et ne voyais pas que je savais encore être vierge
De temps en temps
Comme un enfant fragile s'abritant sous sa peau fine
Comme un cours d'eau léchant l'herbe des collines
Sans jamais s'attendre, modeste, à être retenu


Je ne te retiendrai pas, je te le jure
Tu n'auras pas à manger dans ma main
Tu n'auras pas à supporter mon corps déjà abîmé
Tu n'auras pas à être mère, tu n'auras pas à pleurer
Pour mon salut
Car je ne me sauverai pas
Car je ne me sauverai plus
Tant je suis las de n'être là que pour essayer d'aller mieux

Alors que je vais déjà très bien
vers toi

Sympathique texte. J'aime bien. Un peu différent des autres que j'ai lu. La délicatesse et la lumière te vont bien aussi, je trouve. Ce refus d'imposer sa noirceur à l'autre, cette volonté de lutter contre sa propre nature pour voir ce qu'on a et pour en profiter au lieu de se morfondre, par respect autant que par attachement à l'autre, c'est une belle chose. C'est bien aussi d'avoir échappé au niais, ce n'était pas joué d'avance.

LoreenaRuin exprime bien ce que d'autres ressentent. Le texte est d'ailleurs plus que sympathique. La chute est grande. Trouver la tendresse dans le drame ou contre toutes les rancoeurs n'est pas donné à tout le monde.

Et peu à peu comprends que la magie
N'agit pas toujours d'un claquement de doigts
Qu'elle peut naître aussi des pierres, de la patience
Et que l'essence de la passion
N'est pas toujours de celle qui embrase les forêts

Comme un enfant fragile s'abritant sous sa peau fine

Tu n'auras pas à être mère,, tout bête, mais rencontre une résonnance particulière ici...

Au-delà de ces bien jolies formules (à mes yeux), j'ai trouvé que le texte pataugeait un peu.
J'aurais aimé ne pas être la voix dissonante du cortège, mais rien à faire, je trouve que le poème se cantonne dans quelque chose d'assez convenu et... je ne suis pas parvenu à m'impliquer dedans (la faute au "je", peut-être, qui me fait souvent fuir). Cela dit, l'écriture est de bonne facture.

J'ai eu du mal au début, parce que la façon d'écrire me parait davantage relever de la prose, et ç'eut été peut-être mieux sous forme de lettre, par exemple, en tout cas sous la forme d'un texte et non d'un poème, c'est trop "parlé".

Et puis à partir de la troisième strophe j'ai trouvé ça plus émouvant.

Je perçois donc deux parties et la première, qui est celle du questionnement, est de mon point de vue moins réussie que la deuxième, celle de l'aveu.

J'ai essayé la version prose et, franchement, ça me plaît pas mal. C'est, je trouve, moins solennel, plus humble. La forme purement poétique n'allait pas, en fait. Enfin... Je n'ai pratiquement rien touché sinon.


Chloé tu es toi,
et je n'ai aucun droit de te draper dans mes angoisses ; de réclamer caresses, et cris d'amour, lors que les jours ne sont pas encore venus, pour moi, de te voir nue pour la première fois.
Mais viendront-ils seulement ces jours un jour je n'en sais rien. Vraiment. Et peu à peu comprends que la magie n'agit pas toujours d'un claquement de doigts ; qu'elle peut naître aussi des pierres, de la patience. Et que l'essence de la passion
n'est pas de celle qui embrase les forêts.
Je me croyais foutu depuis longtemps, et ne voyais pas
que je savais encore être vierge, de temps en temps, comme un enfant fragile s'abritant sous sa peau fine, comme un cours d'eau dévalant léchant l'herbe des collines, sans jamais s'attendre, modeste, à être retenu.
Je ne te retiendrai pas, je te le jure ; tu n'auras pas à manger dans ma main ; tu n'auras pas à supporter mon corps déjà abîmé ;tu n'auras pas à être mère, tu n'auras pas à pleurer pour mon salut.
Car je ne me sauverai pas.
Car je ne me sauverai plus.
Tant je suis las de n'être là que pour essayer d'aller mieux. Alors que je vais déjà très bien.
vers toi.

Yoni, si tu veux, on peut poster ce nouvel essai en section prose.

Plus humble, oui, moins exigeant, moins tyrannique, moins tapageur, je préfère moi aussi.
La tendresse est plus sensible et l'ensemble ne perd rien de sa poésie qui est, bien au delà de la forme, dans l'expression d'un désir apaisé, attentif aux besoins de l'autre.

mentor a écrit:Yoni, si tu veux, on peut poster ce nouvel essai en section prose.

Ca me dirait bien, oui. Merci.

Et merci à Arielle également, ton commentaire me touche.

Je préfère moi aussi la version "prose" qui donne davantage l'impression d'un narrateur s'adressant directement à Chloé et cherchant véritablement à se relier à elle... Nous ne sommes plus dans la déclamation solitaire d'un personnage mais bien dans l'univers intime d'un couple... Je rejoins Arielle. C'est plus émouvant ainsi.

C'est bien à cela que je pensais. J'ai constaté souvent que sur de la poésie libre, certains textes écrits ainsi ont presque plus de force poétique que sous forme de poème.

J'ai bien aimé, on sent bien une voix sincère qui parle et qui nous émeut. Et de belles images aussi. J'aime pas par contre la répétition, "car je je ne me sauverais plus", la phrase d'avant est presque identique. En fait, je trouve qu'elle n'apporte rien.

En fait j'ai essayé de jouer sur le sens de se sauver. A la fois s'enfuir, mais aussi chercher la rédemption.
Le je ne me sauverai pas parle de ce besoin à présent effacé de trouver la rédemption.
Et le je ne me sauverai plus parle du refus de s'enfuir.
Je ne sais pas si je suis assez clair mes voilà... C'est là où je veux en venir.

A mentor: en fait je pense qu'il faudrait laisser ce texte dans la rubrique "poésie". Car j'ai vraiment eu de bons commentaires... Que je ne veux pas perdre.

< Fait : réinséré en poésie, l'ensemble étant "fusionné".
La Modération >
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Fou comme la forme a tout changé ! Comme quoi, il reste primordial de s'y attacher et de bien la choisir. Excellent remaniement.

Curieux, ces quelques signes de ponctuation épars.

Je trouve que certaines phrases sonnent un peu lyrique-creux, un peu auto-centré, légèrement dans le pathos, par contre, on sent quelque chose de vraiment sincère, et ça donne des émotions simples, des passages très touchants, avec parfois des formulations élégantes aussi, qui sonnent juste.

Yoni Wolf a écrit:En fait j'ai essayé de jouer sur le sens de se sauver. A la fois s'enfuir, mais aussi chercher la rédemption.
Le je ne me sauverai pas parle de ce besoin à présent effacé de trouver la rédemption.
Et le je ne me sauverai plus parle du refus de s'enfuir.
Je ne sais pas si je suis assez clair mes voilà... C'est là où je veux en venir.

Je vois ce que tu veux dire et comme l'a dit Lyra Will, ce qui m'a justement gênée c'est que j'ai eu l'impression qu'on changeait de registre, ça ajoute une nuance pathétique, un peu fatale (justement refuser la rédemption) qui fait tâche dans le texte qui globalement est écrit sans pathos.

Je ne suis pas d'accord : je trouvais justement que la disposition précédente donnait des accents pathétiques à certaines passages, voire franchement geignards, ce qui a généralement beaucoup de mal à me toucher en poésie. Tel quel, ça passe beaucoup plus facilement.

Bonsoir,
Je crois que Zénobi a raison: la mise en forme prose oblige à la ponctuation, laquelle contraint le texte; Je préfère nettement la disposition poétique, qui n'est pas que disposition : qui est lancement d'emblée sur un accent rythme, images, ruptures. C'est une autre écriture. Comme la différence entre un film et une BD.