Moi aussi je suis beau (2)

- Ô mère, l’Apollon que tu fis naître ici
Aux hommes fait le beau tant il a peur des nymphes !

- Artémis* mon enfant, sous l’emprise des lymphes,
Homérique il devient. La lyre que voici
À Delphes, son musée, enchantera les filles.

- Pythie* me fait pitié ! La Jacinthe* tu dois
Arroser de poison car la prochaine fois
Ce précieux coquet séduira ma fifille !

- L’Apollon, mon amour, d’une corde à son arc,
Au cuistre Cupidon fera bander sa flèche
Et la Sirène* alors, que ce coquin allèche,
Chantera mon héro dans l’olympique parc.

- Mais mère, nom de Zeus, sur son cheval à Troie
Belle Hélène il combat pour l’Hector* impuissant !
L’Achille* et son talon vont botter son séant,
Pauvre poire, frérot masculera* ma joie !


Oncques, si m’en croyez, ne le ferez pencher,
Ni grecques ni troyens à l’Apollon ne plaisent.
Seul vers moi son émoi a tôt fait de trancher,
Comme lui je suis beau, pour vos cœurs je suis aise.

*
Artémis : sœur jumelle d’Apollon
Pythie : prêtresse de l’oracle de l’Apollon
Jacinthe : de son vrai nom Hyacinthe. Prince de Sparte dont l’Apollon était éperdument amoureux
Sirène : de son vrai nom Cyrène. Belle nymphe dont l’Apollon s’enticha
Hector : chef guerrier troyen
Achille : chef guerrier grec (ou hellène) qui voulut piquer Delphes à l’Hector
Masculer : vieux grec pour émasculer. En effet ce sont les hellènes qui ont inventé la métrique. Les arabes, eux, ont inventé l’algèbre. Et nous ? Or dans la prosodie de la Grèce antique, ce sont les œufs du début qui étaient sourds.

Chaque homme, même le plus laid, nourrit en soi une amorce et un secret par lequel il se relie directement à la beauté même.
[Jean Giraudoux]
Extrait de L'Apollon de Bellac


Apollon représente la beauté juvénile. Il est le dieu de arts et de la musique.
Son image la plus parfaite est l'Apollon du Vatican ou du Belvédère, découvert à la fin du XVe siècle dans les ruines d'Antium, Le bras droit et la main gauche manquaient; un élève de Michel-Ange, Giov.-Angelo Montorsoli, restaura la statue. Le dieu a la figure ovale, les joues imberbes, le front haut et voûté autour des sourcils, la chevelure longue, épaisse et flottant librement; sa poitrine est développée, ses hanches étroites; une chlamyde, nouée sur l'épaule, lui retombe derrière le dos; il est représenté au moment où il vient de triompher de Python et de décocher une flèche.

Mes petits bémols:
Pythie (e) non élidé
émoi à (hiatus)
Plaisent et aise ( les pluriels)
Ma fifille ( pas très joulie...)

J'ai bien aimé l'humour dans le dernier quatrain. Pour ce qui est de la beauté, l'important à mon avis, est d'y croire...(lol)

Bravo!

Réjouissant comme l'est la mythologie grecque dans son ensemble, habillée de cocus magnifiques et de fraternités pendables.
Un doute cependant me taraude si c'est Artémis qui parle, comment se fait-il qu'elle se trouve "beau" dans le dernier vers ? On m'avait caché quelque chose au sujet de son sexe ?
J'adore les textes qui revisitent ainsi avec humour nos grands mythes fondateurs.

Achille : chef guerrier grec (ou hellène) qui voulut piquer Delphes à l’Hector
Oups ! C'est Troie que l'Achjlle voulait tchourer à l'Hector

Ils utilisaient l' "oncques", les Troyens ?????

Excellent travail de mémoire*, même si je ne comprends pas l'utilité des définitions ???
*Les anciens pensaient que les dieux n'existaient que si l'on parlait d'eux.

Suis-je C !
Je viens d'expliquer !!!!! ;-)

Gaelie
Merci beaucoup pour ta recherche instructive.
La beauté des laids
Se voit sans délais
S.Gainbourg

Bravo pour les remarques prosodiques, sauf pour plaisent qui n'est pas, à ma connaissance, considéré comme un pluriel.

Arielle
Non, à la fin, c'est Bibi qui parle...

Eh bien Bibi, mes félicitations, te voilà entrant du coup au panthéon de nos dieux et héros !

Je fais amende honorable pour le (ent) Ma mémoire est une petite faculté qui oublie (lol)
En ce qui concerne les définitions, il me semble intéressant pour ma part de pouvoir m'y référer surtout pour la mythologie car on s'y perd facilement dans tout le répertoire des dieux et de leurs progénitures...

Bonne journée kiki mais Bibi voyons (lol)

J'ai souri et j'ai bien aimé.


Il se fixe à l'héro ? votre héros ?
Là, "Oncques, si m’en croyez, ne le ferez pencher,
Ni grecques ni troyens à l’Apollon ne plaisent" n'auriez-vous pas omis les majuscules ?

C'est chouette de voir son nom en face d'une ligne où il est écrit que, oui, nous aussi, on est beau.