La voyageuse solitaire

Ce matin-là, un matin comme tant d’autres, dès le levé du jour, toujours quelques minutes avant le réveil, machinalement, elle se prépare…Ces gestes, des milliers de fois, avant de partir…Et, toujours, elle peste contre tout ce qu’elle n’a pas pu finir, faute de temps, tout ce qu’elle a du laisser en plan pour partir…Mais même dans la précipitation, elle n’oublie jamais la dose de doux câlins de ses enfants, qui lui donnent toute l’énergie nécessaire pour affronter la vie, ses tournis, tourments, turpitudes. Elle s’en va, elle va prendre son train comme on part en voyage, mais celui-ci, ne l’emmène jamais vraiment nulle part. Il lui offre, le temps du trajet, de quoi laisser vagabonder ses pensées par monts et par vaux, au gré de musiques qu’elle choisit pour bercer son cœur de femme, ce cœur parfois tellement infâme... Cette escapade, en solitaire n’a pour elle pas de prix. C’est Son Moment à elle, rien qu’à elle. Et bien souvent, elle trouve le voyage presque trop court. Tous les jours, le rituel est le même, mais au final, chaque jour est différent : Les lieux, les personnes, les horaires restent les mêmes, mais les regards, les sourires et les silences changent au fil des jours…Elle aime observer les retrouvailles, les départs, les adieux…

Aujourd’hui, elle part de chez elle, la tête remplie de ces petites frustrations quotidiennes…Ces soucis, toujours source de cette angoisse de ne pas réussir à les gérer dans la journée : Demain est un autre jour et l’on ne sait jamais si l’on sera là pour voir le jour se lever. Alors quand on lui dit de laisser faire le temps, elle plonge dans une profonde mélancolie. Elle ne mange plus que très peu : Une boule, là, à l’intérieur, l’en empêche ; Elle ne dort que le strict minimum de peur que quelque chose lui échappe si elle ferme les yeux, toujours plein de larmes, sans raison, pour un mot, un regard, un sourire…Elle a le blues, et pas seulement celui qui joue au creux de ses oreilles…
Ce matin, c’est donc la tête ailleurs, les yeux dans le vague, qu’elle quitte la maison et déambule dans le petit matin blême…Une amie doit passer la chercher pour l’emmener prendre son train…Et le temps est aussi gris que son cœur…Son cœur aussi triste qu’un Pierrot…Le flux et le reflux de pensées, comme un ressac, ne s’arrêtent jamais de la torturer… Un de ses amis lui avait même dit un jour que cet état, c’était elle qui le provoquait et que cette situation lui plaisait…Elle en avait été particulièrement affectée…Mais, force était de constater que malgré tout, elle avait ce besoin d’ajouter une touche dramatique à sa vie…Elle avait ce besoin de ne pas se contenter de quelque chose d’ordinaire…Elle avait besoin de se sentir exister…Mais à brûler sa vie par les deux bouts, à tirer sur la corde…Elle s’était usé la santé ses dernières années…

Sur la route, elle fredonne les paroles de chansons qui berce le plus souvent ses escapades dans son monde à elle, impénétrable par le quidam de passage, et ce matin ce sont les paroles de la chanson « Hallellujah » qui viennent animer ses lèvres. Elle aime beaucoup la version de Jeff Buckley. D’ailleurs, elle figure en bonne place dans son lecteur mp3. Elle le cherche, fouille son sac avec empressement, il ne la quitte jamais, lui…Mais elle est bien obligée de constater qu’aujourd’hui, elle l’a oublié…Paniquée, elle fait demi-tour, sans réfléchir, pour aller le chercher…Comme un animal affolé, elle marche sans prêter attention à ce qui se passe autour d’elle…Son cœur bat à tout rompre dans son corps fatigué…A ce moment, un rayon de soleil perce le ciel brumeux de ce matin d’octobre : Le sol se dérobe sous ses pieds et elle se retrouve à terre, le pouls filant, les yeux rivés vers le ciel qui paraît soudainement bien paisible. Son teint est d’une pâleur diaphane…Toute seule, sans bruit… Elle est en train de partir comme elle avait toujours vécu, discrètement, sans cors et sans cris, avec pour seule compagne sa solitude…Ses espoirs, désespoirs, ses remords et ses regrets, elle les laisse là avec son corps déjà froid, épuisé de les avoir trop porté…

Bonsoir Sweetty...

Que de tristesse, je suis sûr qu'un jour, tu me raconteras un truc gai avec des chaussettes en laines sous le tunnel de F......., ou un départ pour le Texas en Aéroplane, va savoir ?

Chronique d'une dépression mortelle ? Je trouve que ça tombe un peu trop dans le pathos , je ne suis pas accrochée par le style non plus, un peu mièvre , larmoyant et sans surprises.

Pareil par ici. Ce n'est pas que ce genre de littérature me laisse froide, puisque ça a tendance à m'agacer. Et puis la fin, non, bien trop rapide, vraiment, pas possible pour moi d'adhérer.

Bonsoir,

Une thérapie bien écrite qu'il faut déchiffrer comme un médecin lit les symptômes d'une maladie sans s'impliquer ni se sentir concerné !

Amicalement,
midnightrambler

Marchevêque, je ne désespère pas d'écrire des choses un peu plus gaies et je m'y suis quelquefois essayé... Tu n'y as pas été étranger ;-) En même temps, je suis mélancolique dans l'âme alors j'ai beau chasser le naturel, il revient au galop...

Rebecca, désolée de t'avoir fait perdre ton temps avec cette lecture... Son origine, tu as mis le doigt dessus...

Easter (Island), merci malgré tout d'être passé me lire. Le choix que j'avais fait de développer la description de la souffrance intérieure plus que cette mort par épuisement était volontaire. Je ferais mieux la prochaine fois...

Midnightrambler, ça me fait plaisir qu'au moins une personne aie réussit à prendre ce texte pour ce qu'il était.

En tout cas, merci à vous quatre de vos remarques toujours source de remise en question.