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Charles

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Message  roro Mar 12 Juin 2012 - 21:57

Ils ont descendu Charles, des barbelés cernaient le quartier. Elle en avait déjà vu, lors de ses nombreuses visites humanitaires en Afrique, et des plus tranchants. Ceux-ci ne payaient pas de mine, des barbelés de villes riches, Occidentales. Elle les a contournés avec prudence, pour ne pas rayer les chaussures rouges cirées, achetées pour un dixième de salaire, il y a une semaine à peine.

Charles, il avait pas de famille, ou du moins, pas de manière visible. Rien d'ostentatoire, un militant de gauche, convaincu par toutes les causes qui ne concernaient ni directement ni indirectement sa propre vie: les réfugiés, les immigrants, les sans-papiers, les Palestiniens, les Yougoslaves, les Roumains, les ouvriers, les artistes, tout ce monde-là... Et sans-le sou avec ça, le Charles, tout le temps. La maison sale, les dents noircies avant le temps par le tabac. Pas de relation suivie, à ce qu'on sache, une petite passe, certainement, de temps en temps. Mais c'est tout. Et quelques amis du Parti.

Il vient de partir dans l'éclaboussure générale, le quartier a eu droit à toutes les télévisions, venues tenir le siège avec le Parti et enquêter, à droite, à gauche, et même au centre. On a fini par mettre des barbelés, l'affaire s'est calmée, et tout le monde est reparti. Il reste une petite souris sur la place. Avec son foulard rouge, elle attend encore que Charles vienne la nourrir, elle a faim. Pauvre petite. Attendrie, Elsa ouvre son sac, la souris saute dedans. On essaiera de parler au chat, se dit Elsa...

Les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés, lui avait-il dit une fois.

Elle n'avait pas su s'il parlait alors d'elle ou de lui. Elle travaillait depuis toujours dans le même magasin de chaussures, et c'est vrai que c'était une gamme hors de prix. Alors, ne pouvant s'offrir de belles choses, elle s'est convaincue que ce n'était qu'un truc de riches, les apparances, et elle se contenta de ses souliers élimés. Cendrillon, c'était une autre époque, pensa-t-elle. Elle ne croyait plus à grand chose Elsa, alors quand le dimanche, son unique jour de congés arrivait, elle s'ouvrait sans grande émotion une boîte de raviolis, qu'elle saupoudrait d'emmental bon marché.

A l'entrée de l'immeuble, un policier lui demande son identité, elle se présente, locataire du quatrième étage, sans ascensseur. Il la laisse passer, Charles habitait au deuxième. Seul, depuis une bonne dizaine d'années, ses petites luttes n'impressionnaient plus personne, lui-même n'y croyait plus trop. La police ne restera plus trop longtemps, il y en a de moins en moins chaque jour, le quartier ne passe plus au journal télévisé, toute cette histoire va enfin ce tasser.

Battu à mort pour ses idées, parait-il, pour avoir défendu un petit Ahmed, ou Omar, Elsa ne sait plus, elle a suivi de loin cette affaire, se contentant des commérages du quartier. Et puis qu'est-ce que cela changerait à sa vie, de comprendre pourquoi le locataire du deuxième avait été battu à mort.
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Message  Invité Mer 13 Juin 2012 - 16:07

Un récit quelque peu anachronique pour un portrait touchant, un hommage appuyé, grâce - paradoxalement- à une pudique économie de mots. Le personnage de Charles est bien cerné.
Ce qui ne semble pas être le cas de Elsa. Dont je n'arrive pas à complètement réconcilier l'expérience humanitaire et la modestie de sa condition de vendeuse de chaussures de luxe. Quelque chose cloche de ce côté pour moi.
Par ailleurs, je ne suis pas sûre que le ton du langage courant adopté dans le deuxième paragraphe apporte quoi que ce soit au récit.

Quelques remarques :

des barbelés de villes riches, Occidentales. ("occidentales", sans majuscule)
sans ascensseur. ("ascenseur")
lui-même n'y croyait plus trop. La police ne restera plus trop longtemps,
toute cette histoire va enfin ce tasser. ("se")

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