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Quick, jusqu'aux toilettes

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Quick, jusqu'aux toilettes Empty Quick, jusqu'aux toilettes

Message  Raoulraoul Mer 20 Juin 2012 - 13:59

QUICK, JUSQU'AUX TOILETTES

Habillée en noir, elle fumait. Elle se levait de temps en temps, expliquait à l'autre en se désignant elle-même de la main, debout elle se rasseyait, parlait toujours, souriante, de sa bouche parlante la fumée s'échappait.
Sur la sono, un rap anglais.
Deux garçons en chemise et pull mangeaient des frites silencieusement.
Sur la sono, un rap français.
Dans la mayonnaise, frites trempées par le garçon qui s'essuya la bouche. La fille en noir pencha sa tête, ses cheveux tirés dégageaient son front et dans les yeux de l'autre l'écoutant allait la fumée de la cigarette entre l'index et le majeur tendus de la fille en noir.
La serveuse débarrassa une table derrière moi. Un garçon seul s'y assit. Une fille le rejoignit puis deux autres filles. Contre mon dossier, le dossier de l'une d’elle, collé, bougeant derrière moi, si je me retournais, d'elle, je visais sa nuque rasée court, masculine. Les rejoignirent encore d'autres filles. L'une avait un accent anglais. Le garçon seul n’était plus seul mais la femme en noir s’en alla, un gros cartable à la main, l'autre l'accompagnait.
- Il fait quoi comme boulot ?
- Des mecs comme Sanders, c’est génial !
- Un stage ! répondit la fille derrière moi.
A la sono, la musique, comme si on tapait sur une enclume.
Une autre grande fille s'approcha, t-shirt rayé avec sac à dos et chandail sur les épaules. Enclume sur la sono. Filles et garçons qui la suivaient piochaient leurs frites dans son cornet.
Un rap connu sur la sono. La fille lançait des regards mélancoliques au garçon en face d'elle. Rock sur la sono. La serveuse sceau et balai allaient et venaient.
Dans mon dos, il parlait nombreusement, heureusement, activement, le groupe. Un couple tendre jeta gobelets, serviettes et boîtes dans la poubelle. Autour de moi les trois tables étaient déjà prises.
Sur la sono, c'était Kaled chantant.
La grande fille qui relevait ses cheveux alla aux toilettes. Un gars costumé, cravaté, en lunettes, par la porte principale rentra.
Pubs sur la sono entrecoupant Kaled.
La grande fille revint des toilettes tirant sur son sweat. La serveuse, gants de caoutchouc en main alla aux toilettes. Une rousse apparut avec son garçonnet, souriante, elle avait un passe doré dans ses cheveux. Une fille, fesses grassouillettes et chignon raide alla aux toilettes. Les garçons se tâtèrent l'estomac, grimaçants, repus, sirotant leur gobelet avec paille. Une fille s'essuya la bouche avec du papier froissé. La fille au chignon revint des toilettes, les mains pantelantes devant comme un animal. A la même place que la femme en noir, elle s'assit, habillée aussi noir que l’autre femme avant en noir qui fumait. Si les sièges avaient une âme ils parleraient.
Une serveuse discutait avec le patron, en montrant la porte des toilettes. La serveuse semblait nerveuse, puis un gars, cheveux longs, catogan, solitaire, beau, angélique, enleva son long foulard et commença à manger ses frites, lorsque un autre gars, cheveux courts avec longues pattes, s'assit à la même table, la grande fille s'en alla vidant son plateau, s'en alla avec ses copains, sac à dos, bretelles, esquissant un léger mouvement sur la musique, puis s'en allèrent définitivement.
La pluie lentement s'égouttait au bord des toits dans la jaune lumière des lampadaires. Le gars au catogan était maintenant entouré de trois autres jeunes. Un gars en noir, crâne tondu, avec petites lunettes, s'assit à la table en face de moi. Sa chaînette d'argent brillait sur son cou boutonneux.
La pluie tombait toujours. Toutes luisantes de pluie étaient les tables de bois sur la terrasse. Flaques d'eau que tambourinaient les gouttes. Spectacle brillant de lumière.
Une fille au visage pâle et lèvres maquillées s'installa avec son copain. Elle avait enlevé sa veste noire et son sweat dévoilait ses bras maigres et blancs. Sous sa frange ses yeux disparaissaient. Le copain portait un sweat sur lequel on pouvait lire somptueusement en lettres somptueuses ; Punch créole. Il avait des fesses moulées dans un jean et une montre également somptueuse au poignet. La fille maquillée alors ouvrit sa bouche très grande et y engouffra une poignée de grosses frites. Aucun d’eux ne parlait. Les gouttes brillaient dehors en guirlande.
Un enfant très petit mangeait, installé dans sa chaise pour bébé. Un autre gars en ciré jaune portait son plateau avec deux menus Giant XL, le sien et celui de son flirt.
- On a le choix, dit la fille s'asseyant à une table libre, ses doigts flirtant avec ceux du ciré jaune. Dans l'encolure de son chemisier, bien mis, un foulard mignonnement quadrillé elle avait.
L'enfant barbouilla ses frites dans son jus de tomate. Les jambes trop fines de la serveuse disparaissaient entre les tables. Il pleuvait toujours comme au ralenti. L'enfant riait grassement. De ses doigts boudinés et gras il montrait les gens qui sortaient. Il saluait de sa petite main grasse les gens sortis dehors. Puis une fille en noir, cartable à la main, rentra tandis que l’enfant regardait attentivement un prospectus. Je ne parvenais pas à voir la marque du produit nettoyant de la serveuse. L'enfant riait gravement, de plus en plus grave son rire retentissant. Sa bouche grande ouverte et brillante et graisseuse.
La mère lui fit :
- Chut !
- Alexandre, Alexandre ! sermonna le père à l'enfant qui faisait Ahahahaaa.
J'eus le sentiment que c'était une marque américaine le produit entre les mains de la serveuse. Toujours le prospectus l'enfant regardait en riant, dramatique, d'un rire de gorge, guttural. La mère autour d'elle jetait des regards, se passant dans les cheveux ses ongles vernis. La fille en noir s’approcha de la table de l’autre fille en noir, celle grassouillette avec chignon. Sur une affiche, on pouvait voir Tintin poursuivi par un dragon. Ou suis-je ? disait une autre affiche en lettres écarlates. L’homme costumé avait enlevé ses lunettes et était devenu brusquement pâle. L'enfant riait comme une réplique au père qui s’énervait. La fille en noir au cartable s’était assise, exactement au même endroit que la fille en noir grassouillette disparue.
- Allez, on y va ! dit le père se levant. La mère se leva, une large ceinture lui soutenant le ventre. Un autre bébé elle attendait, ses genoux étaient exagérément ronds et effroyablement mous dans ses bas Nylon. Ils partirent.
Je me dirigeai vers la porte des toilettes que je poussai. Dans la cuvette des vécés flottait une boule sanguinolente. C’était un fœtus.
Quand je vins me rasseoir à ma table, la fille derrière moi, en anglais, commençait une histoire probablement drôle.
Raoulraoul
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Message  Invité Mer 20 Juin 2012 - 15:25

Alors là ! Surprise complète.
Après les états successifs par lesquels je suis passée en cours de lecture.
D'abord, l'attente, l'expectative, toute concentrée sur cette femme en noir : quelque chose va se passer.
Puis un ennui fugace : rien ne se passe, je m'y perds dans tous ces personnages si peu différents, tellement anonymes.
Et après, l'intérêt grandissant pour cette galerie de portraits, qui ne serait que ça ? Pourquoi pas.
Et finalement, cette chute, tout de suite après le dernier personnage (la femme enceinte), et qui m'a frappée en plein plexus, comme si j'avais été moi témoin de la scène.

Cela dit, il y a des maladresses dans l'expression, pas toujours claire, par exemple : "et dans les yeux de l'autre l'écoutant allait la fumée de la cigarette entre l'index et le majeur tendus de la fille en noir.", une ou deux virgules ne seraient pas de trop.
Idem, ici : "La serveuse sceau et balai allaient et venaient." Les virgules et aussi l'orthographe.

Et puis je ne suis pas fan des nombreux cas de rejet du sujet + verbe en fin de proposition, il y en a trop, c'est vraiment trop appuyé, visible, et finit par faire procédé.

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Message  Sahkti Mer 20 Juin 2012 - 16:20

Il a fallu que de temps à autre, je revienne en arrière, je relise, histoire de bien fixer les personnages, parce que ça s'embrouillait un peu alors j'ai créé le film dans ma tête, je leur ai donné des formes, des visages, c'est devenu plus clair, avec un intérêt grandissant pour ce mystérieux manège vers les toilettes. Je ne m'attendais guère à cette chute, partant plutôt dans des directions de trafics en tous genres. La fin, sobre, donne un coup de fouet au récit, elle le clôt habilement car il ne servait à rien d'en dire plus.
Quelques aérations, ceci dit, ne me sembleraient pas superflues.
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Message  lol47 Mer 20 Juin 2012 - 18:52

La fin, trop abrupte clôt rapidement le texte. Comme s’il fallait en finir de ces nombreuses descriptions.
Quelques fautes repérées par-ci par-là. Des redites, des petits détails qui perturbent le texte.
Et puis cette sono, l’effet répétitif, trop lourd.
D’accord avec easter, le verbe à la fin, ça devient abusif à force.

il parlait nombreusement ???

J'eus le sentiment que c'était une marque américaine le produit entre les mains de la serveuse

La grande fille s'en alla vidant son plateau, s'en alla avec ses copains, sac à dos, bretelles, esquissant un léger mouvement sur la musique, puis s'en allèrent définitivement.

sur lequel on pouvait lire somptueusement en lettres somptueuses

D'autres que j'ai la flemme de reprendre.

A mon humble avis, un texte à retravailler.
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Message  Louis Jeu 28 Juin 2012 - 13:02

Unité de lieu : une salle de restauration rapide, véritable microcosme social.
Tout y est rapide, accéléré, c’est la vie en « fast ». Fast life, et fast death.

On y parle avec animation, de soi, du boulot, de la vie « Elle se levait de temps en temps, expliquait à l'autre en se désignant elle-même de la main, debout elle se rasseyait, parlait toujours ».
La sono diffuse du rap, paroles rapides, précipitées, syncopées.
Des hommes et des femmes. Des rencontres éphémères. On va, on vient. On s’attable, on repart. On mange, pour la survie, on mange. On se voit, on se cause, et on mange. Vite fait.
Des couples, des familles, des enfants, toutes les étapes de la vie.
Rien de nouveau, tout se répète, et le vocabulaire, « somptueusement» par exemple, répété lourdement, accentue cette impression à l’image des gouttes de pluie évoquées qui répètent inlassablement, avec monotonie, leur chute. Rien de nouveau, et toujours ces mêmes frites avalées…

La musique se fait plus forte, se ramène à des coups martelés, « A la sono, la musique, comme si on tapait sur une enclume. » Le restaurant se fait forge, atelier au vacarme assourdissant, usine où se produisent industriellement la vie, la survie, et la mort.
Plus forte, la musique, les coups frappés, comme une musique de film quand un événement dramatique va se produire.

Des allées et venues aux toilettes. L’inhabituel va-t-il survenir dans ce lieu où il n’y a rien de nouveau sous les frites ? Dans ce lieu de la banalité ordinaire ?

La mort est le grand évènement. Elle a lieu, ici aussi ; elle aussi est produite en ce lieu. Mais elle n’est pas la grande tragédie, pas l’évènement dramatique, elle est noyée dans les toilettes, diluée dans la banalité.
Le drame qui survient, c’est qu’il n’y a plus de drame, plus de tragédie.
On ôte la vie comme on va pisser après avoir mangé ses frites-mayonnaise. On ôte la vie aussi vite que l’on mange, en passant, entre la frite et le hamburger.
Plus que quick, oui plus que couic.
Et quick dans les toilettes, et couic.
Dans les toilettes, le narrateur trouve la mort en « fast ».
La vie continue, dans ce lieu où tout est dévalué, où plus rien n’est précieux, où tout est aussi banal qu’une assiette de frites, toute nourriture, la vie et la mort elles-mêmes.

Toujours intéressants, tes textes, Raoulraoul, toujours lus avec plaisir et intérêt.

P.S. : une suggestion au sujet de la forme du texte. Il est écrit au passé, il me semble qu’il aurait plus de force, plus de mouvement, de vivacité, s’il était écrit au présent

Louis

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