Solitude matinale

[Phylisse]

Ce matin me réveille au son des solitudes
On dirait que la nuit a gardé dans son lit
La vie qui s'écoulait en torrent de quiétude
Jusqu'à ce pli fané où mon coeur a flétri.

J'entends pourtant le chant d'un oiseau qui s'éveille
De son aile habillant la fraîcheur des matines
Qui plissent le rideau d'un rayon de soleil
Que je ne sais cueillir tant mon âme est chagrine.

On dirait que cent ans ont passé dans la nuit
En laissant dans mon lit tous les matins du monde,
De ces matins sans faim, sans saveur et sans bruit,
Plombant de tout leur poids le silence qui gronde.

J'entends pourtant couler votre amour et son feu
Que vous m'avez confiés avant de me quitter.
J'en ai pris soin bien sûr, mais il fut ambitieux
D'oublier le cristal dans lequel je suis née.

On dirait que mille ans vous séparent de moi
Je ne sais plus le temps, je ne sais plus l'espace
Dans ce bruyant matin qui me parle tout bas
Du vide qui me pèse et que plus rien n'efface.

[Invité]

J'ai bien aimé la mélancolie qui se dégage de ce poème.
Petites remarques: j'ai trouvé l'association torrent-quiétude antinomique.
Et dans le deuxième paragraphe, une accumulation de pronoms relatifs.
Mais dans l'ensemble le poème est beau, et je n'en ferais pas autant. Donc bravo !

[Marvejols]

En laissant dans mon lit tous les matins du monde,

Voilà un très beau vers. Il transmet plutôt une sensation d'amour, lequel est pourtant cassé par le vers qui suit et tout le reste du texte. Je trouve l'ensemble très dramatique sans m'être résolu à définir si le départ était une mort ou le départ de l'être aimé. Je reproche seulement au début du texte une certaine affectation ou plutôt une certaine conventionalité qui nuit à l'expression du sentiment pat ailleurs tristement bien rendu.

[Invité]

Je viens de revoir "le goût des autres" et en relisant ce poème j'entendais la voix de la comédienne qui déclamait Bérénice
C'est très beau, très harmonieux
En même temps le discours est fluide comme celui d'une conversation.
Une belle réussite

[Invité]

Une belle idée, mais les "qui - que" sont bien trop nombreux, selon moi, ce texte -lu à voix haute- en est tout alourdi.

"En laissant dans mon lit tous les matins du monde" ça me gêne un peu cette reprise du titre de Pascal Quignard... D'ailleurs, les emprunts me gênent toujours.

[Rebecca]

Moi aussi je pense que tu peux alléger un peu des qui et que. Cependant le propos reste harmonieux
et de jolies images surgissent, dans un climat bien rendu, mélancolique à souhait.

[Invité]

Du bon, du classique bien tourné malgré quelques petites irrégularités.
A lire à voix haute.

[Frédéric Prunier]

belle lecture où la fin est doucettement nostalgique
merci

[Phylisse]

J'ai un grand plaisir à lire vos différentes réactions qui donnent sens à ce que j'ai voulu transmettre de ce matin chagrin coulant sous le poids du silence et de la solitude.

Concernant les "qui" et les "que", j'avais répondu ceci à Iris sur le fil de discussion :

L'accumulation de pronoms relatifs a été soulignée dans un autre de mes poèmes, et du coup je me rends compte que j'ai quelques progrès à faire de ce côté là, c'est vrai que ce n'est pas très poètique.

"Tous les matins du monde"

Dusha, j'ai eu quelques scrupules à utiliser ce titre, mais il était tellement représentatif dans mon esprit de ce poids immense qui pesait sur moi que je n'ai pas su résister.

Tizef, j'aime bien cette image de "conversation", car il est vrai que j'avais, en l'écrivant, comme une intention de me confier à quelqu'un.

Marjevols, pas de mort dans ce poème, mais le départ de l'être aimé, oui.

Merci à tous de vos lectures.

[Legone]

Jolis alexandrins. Pour ce qui est des pronoms relatifs, je n'ai pas trouvé que le poème en comportait trop.
Je suis de l'avis de Dusha pour la reprise du titre du roman de Quignard.

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