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Ce trou intime et universel

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Message  Raoulraoul Dim 16 Sep 2012 - 8:13

CE TROU INTIME ET UNIVERSEL
J’étais en train de lire les origines du mythe dans la civilisation babylonienne,
lorsque soudain… Il faisait chaud, c’était le soir, les volets étaient entrouverts.
Gilgamesh était d’une beauté parfaite, alors que son cœur était froid et tyrannique.
Il faisait chaud, je viens de le dire. Lorsque soudain, sur le lit, dans la lumière douceâtre… J’avais refermé le bouquin. Trottait en moi la question des origines de la création du monde, mais aussi de celle de l’écriture.
Sur le lit, près de moi, dans la lumière blanche, je te découvris. Tu étais découverte.
Gilgamesh, par son grand courage, avait découvert et traversé des régions épouvantables, la Forêt des Cèdres.
Tu étais sur le lit, couchée sur le ventre. Partout c’était le silence. La parc était baigné dans la clarté jaune de ses lampadaires. Quelqu’un aurait pu te voir par les volets entrouverts. Mais non.
Gilgamesh était accompagné de Enkidou, un homme fort laid mais qui lui procurait beaucoup de bonté. Ils affrontèrent ensemble le terrible monstre Kumbaba.
Couchée sur le ventre, nue, seulement de la taille aux pieds, une jambe un peu repliée. Ce n’était pas l’écriture cunéiforme qui pourrait traduire cette image.
Pourtant je remontai ainsi à la naissance de l’écriture, au siècle de Gilgamesh,
et l’origine de Toi s’ouvrait largement à moi, sur le lit, un soir de fin d’été, cette jambe repliée, ta nudité, ton cul, l’origine de quelque chose se révélait.
Gilgamesh avec les femmes n’était pas tendre, il abusait d’elles avec violence. Enkidou m’empêchait de vouloir forcer l’orifice, qui me conduirait à ton origine. Mais je me penchai et frôlai de mes lèvres ton extraordinaire Montagne des Cèdres.
Tu te serais appelée Isthar, la déesse de l’amour. Aussi voluptueuse qu’elle tu étais.
Que faire ?
Rien ne devait plus arrêter Gilgamesh, pour que l’écriture de son mythe puisse se graver dans les tablettes d’argiles. Le cul de lune de la belle Isthar était à ma portée. Le peuple des babyloniens de l’immeuble sommeillait dans son ignorance. Mais un autre œil, derrière les volets, matait le cul de Isthar, plus blanc que lune, d’une pâleur-porcelaine. Du stylet de ma langue, je l’ouvris.
Bien sûr l’origine babylonienne n’est pas originelle sans fondement. Du ravin de la Montagne des Cèdres, montent des parfums qui rendent fou.
Gilgamesh le devint. Je voulus mourir, sans connaître la mort, mais l’immortalité seulement de cet instant. Ah ! béance sauvage, terreuse ! Humus ! Béance de l’origine de Toi,
sur le lit, ta jambe relevée.
Gilgamesh avait connu ces contrées, d’où l’on pouvait ne jamais revenir. De ces profondeurs, il ramena le goût d’une plante rare, qui le ferait immortel.
Oh oui !
Nonchalante, tu te laissas modeler. Ton T-shirt noir faisait saillir davantage ta Montagne des Cèdres, opaline, douce, lisse, au nez de Gilgamesh.
Gilgamesh avait osé. Gilgamesh avait bravé les gouffres, ta possible origine. Il remerciait l’écriture cunéiforme de tes formes.
Mais tu éteignis la lampe de chevet.
Il fallut retomber dans l’ordinaire. Devenir mortel. Mourir. Se souvenir. Rêver au néant des orifices.
Dans l’entrebâillement des volets, peut-être déjà un lecteur indiscret, avait-il maté la scène, pour témoigner de l’anus du monde ? Cette splendeur, dont des milliers de tablettes cunéiformes, androïdes, allaient maintenant transmettent planétairement le mythe.


Raoulraoul
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Message  Invité Dim 16 Sep 2012 - 17:18

Et tout le reste n'est que littérature...

Un texte qui fait inévitablement penser à Courbet, un récit à l'érotisme prégnant quoique discret ; un exercice audacieux dans le sens où il prend le parti de puiser à diverses sources pour les détourner et les faire se plier au propos du narrateur.
Ainsi, j'avoue avoir souri à plusieurs reprises en cours de lecture et plus encore à la toute fin du texte, cette façon de prendre le lecteur en défaut.
J'aime aussi la fusion graduelle autant qu'implacable entre le narrateur et Gilgamesh.


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Message  Janis Mar 18 Sep 2012 - 8:20


Trop de références pour l'in(cul)te que je suis, mais j'ai tout de même bien apprécié cette diablerie bien tournée, et la liberté du ton assez réjouissante.
Janis
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Message  Louis Dim 23 Sep 2012 - 23:52

Un rapport est tissé entre écriture et perception, entre ce qui est lu et ce qui est vu, mais aussi entre le lointain passé et la proximité immédiate.

Dans ce rapport, c’est d’abord l’écrit qui l’emporte. La réalité est absorbée dans le texte écrit.
Le livre fermé, l’écrit se poursuit, et ce qui existe par lui absorbe la réalité perçue et l'enchâsse dans son récit.
Ainsi tout est langage écrit.
Surgit pourtant une image vue irréductible à l’écriture : « Couchée sur le ventre, nue, seulement de la taille aux pieds, une jambe un peu repliée. Ce n’était pas l’écriture cunéiforme qui pourrait traduire cette image. »
Cette image est un dehors inassimilable, elle est le dehors de l’écriture, mais un dehors sans lequel elle ne pourrait être, le dehors qui en est l’origine. Origine de l’écriture et l’origine du monde. Origine du monde tel que l’a peint Courbet.

Des images métaphoriques, internes à l’écriture, représentent l’image perçue. La « forêt des Cèdres » ; la « Montagne des Cèdres » ; « Ravin » ; « béance » : autant d’images métaphoriques et mythiques des parties intimes de la femme nue, l’image perçue.
Mais c’est toute l’écriture dans son être originel cunéiforme qui est métaphore, « Il remerciait l’écriture cunéiforme de tes formes. » Le graphe cunéiforme est l’image stylisée de la zone génitrice féminine.

Chaque mot est alors géniteur, chaque phrase est une origine, une ouverture sur un monde. L’écriture, dans sa graphie, comme dans sa signifiance, engendre un univers.
Le texte est un corps, le corps est un texte, dans une interpénétration mutuelle.
Le mythe, écriture de l’origine, se confond avec l’origine de l’écriture.
Ainsi l’origine du mythe est dans l’Origine du monde.
L’origine n’est pas le commencement historique, du côté de la Mésopotamie ( Région entre deux fleuves, celui du perçu, celui de l’écrit. Leur confluence.), l’origine n’est pas dans un passé lointain, elle est toujours présente. Elle est là, devant le narrateur. Narrateur qui suscite un lecteur voyeur, un propagateur du mythe, celui qui le transmet et l’interprète, celui sans lequel il ne peut y avoir de mythe.

Bravo Raoul pour ce texte.


Louis

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