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La nuit

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Yoni Wolf
Cerval
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Message  Cerval Mer 11 Déc 2013 - 9:58

La Nuit : Bonjour

L'Ennui : Bonsoir

La Nuit : C'est étrange

L'Ennui : Quoi donc ?

La Nuit : De parler à son miroir

L'Ennui : Certes ce n'est pas commun mais vous

Vous qui vous regardez parfois dans les yeux de qui vous aimez

Vous et parfois on ne sait plus si c'est soi-même

Vous ou le reflet n'est que couleurs abîmées

Ah et pourtant pourtant si loin qu'il me souvienne

J'ai toujours eu peur à me voir à ces yeux là

Ce n'est plus jouer tout à coup Ce n'est pas rire

Que faire Quels sont les mots pour le dire
On dit…

La Nuit : Non mais taisez-vous. Vous vous prenez pour qui à chanter en ma présence, insupportable.

L'Ennui : La nuit
sur le pont, sur le pont
on y chante on y danse
sur le pont, sur le pont
sur le pont DES SUICIDES.


La Nuit : Je ne suis pas tout à fait d'accord avec votre interprétation, pas tout à fait d'accord
Pourquoi c'est toujours moi qu'on accuse
La nuit est le juif de ce siècle décharné
La nuit elle ne vous a pourtant rien demandé

Ceux qui me tiennent compagnie sont tristes ou saouls
Et pourtant ne suis-je pas prompte à inspirer l'amour
J'en ai marre de tous ces gens comme des bêtes de somme
Qu'on mène à l'abattoir des songes
Ah dormez ah dormez ça vaudra mieux
Et moi je jouirai de mon grand langage
Même le vent qui touche à toutes choses le jalouse
Car ce langage tient en lui tout l'univers
Oui les astres sont les virgules de mes phrases


L'Ennui : La nuit on ne peut voyez-vous rien faire.
(Un temps).


PROCES DE LA NUIT


Le Juge : Nous voici ici réunis pour faire le procès de la Nuit. Décidément le droit c’est des conneries. J'APPELLE LA DEFENSE A LA BARRE
Le Procureur : Permettez. J'ACCUSE

Le Juge : L'accusation, donc.

Le Procureur : J'ACCUSE LA NUIT DE PERDRE LES HOMMES DE LEUR FAIRE INVENTER LES DIEUX ET LES MACHINES D'ENVENIMER LES ÉPINES QUI PARSÈMENT DÉJÀ LEURS COEURS FATIGUÉS
J'ACCUSE LA NUIT A CE QU'ON DOIT Y ALLUMER L'ÉLECTRICITE CE QUI N'EST GUERE ÉCOLOGIQUE
J'ACCUSE LA NUIT DE CHARRIER AINSI QUE LA MER LES SUICIDES
J'ACCUSE LA NUIT DE CONDAMNER A L'INSOMNIE OU AU SOMMEIL
QUI SONT DEUX IMAGES DE LA MORT

L'on n'a point par respect des traditions & des convenances, songé à la discuter à ce jour (un temps). Mais l'homme dans sa quête infinie de sa propre évolution s'avance, le pas inexorable, le pas du tracteur sur les terres labourées. Il est temps D'ABOLIR LA NUIT


LE PROCES S'ENTRACTE

L'Ennui : Ô jour Ô jour perpétuel
Ô jour des promesses et des occupations
A moi les jeux de la lumière
A moi l'espoir et le plaisir recommencés

Je marcherai longtemps sous de doux primevères
Un châle de ses épaules couvrira la journée
Les pierres tendrement garderont leurs secrets
Ô langage des choses coloriées
Adieu la nuit
Adieu la nuit qui rebat les cartes des sens
Ce qui parle au coeur est désormais la forme des choses
Ce sera toujours au café dans le parfum des roses
Voir la lumière frémir lorsque jolie tu t’assieds


LE PROCES ROUVRE

Porte grinçante.

La Nuit : Puisque l'Ennui conjointement au ministère public porte contre moi plainte, permettez-moi au moins de lui répondre. Cher ami, c'est bien joli tout ça, mais d'une, on n'y comprend pas grand-chose, de deux, votre métrique est bien incertaine pour ne pas dire n'est pas (sur ces délicates questions de l'adresse au non-être je ne saurais que vous renvoyer au Sophiste de Platon), et de trois enfin je trouve ces reproches que vous me faites bien forts de café, ah la suffisance humaine. Engageons si vous le voulez bien le mouvement de ping-pong de la dialectique.

La nuit si elle vous rend triste c'est bien votre faute : non la mienne. La couverture que je vous procure mille gens ont trouvé façons de s'en faire robe et pour la plupart elle épouse le sommeil. Il n'y a pas cependant que malheur à ceux qui ne dorment. Demandez-leur. Mais vous ne les connaissez pas.

Vous ne voyez dans moi ce que vous y mettez. Accusez-vous les miroirs de votre laideur ? Blâmez-vous en votre coeur votre fiancée des justes reproches qu'elle vous adresse ?


Le Procureur : « Et si on me fait du mal, est-ce que je ne pleure pas comme vous ? » on connait la chanson. Au bout d'un moment il faut répartir comme les talents les torts. Chacun doit prendre ses responsabilités ainsi que l'on se prend une femme. Tout s'organise. C'est miraculeux. Cela (maintenant le Procureur se tourne vers les jurés, en agitant grand les bras) est notre héritage que nous nous devons de préserver. Or l'accusée, ici présente, nous en empêche, précisément, ou si tout du moins non point par sa volonté, mais par le fait de son être et c'est déjà beaucoup, n'a-t-on pas rasé bien des forêts pour y faire des autoroutes ? Personne, que je sache, n'y trouva à redire. Eh bien c'est pareil.

L'Ennui : Maître, vous êtes un diable de rhétorique.

Le Juge : Je voudrais entendre plus précisément les arguments de l'accusation. Le témoin peut-il se lever...

Le Poète : Voilà, voilà.

Le Juge : Je vous écoute.

Le Poète : La nuit c'est de la merde. De complexion chétive, j'eus le malheur de naître impressionnable. Je voyais des heures mes camarades courir sur le sable des sentes, dévaler et remonter comme un hochement de tête les collines. Je les voyais rire et pleurer, crier et s'aimer, tout le parfum de l'insouciance. Leurs joues pures comme un miroir sans ombres. Les gestes pleins de l'odeur du meilleur linge. (Un temps. Il se lève).

Moi, j'étais un peu impressionnable, alors je ne parlais pas trop, je m'occupais surtout dans les livres, mais heureux encore, à tout ce que joie faisait j'y participais, au moins par le regard, et n'est-ce pas là le grand privilège de l'eau. Mais chaque soir, l'angoisse m'abandonnait à la nuit. Je ne voyais plus rien des formes connues. Oui, la nuit m'a pris mon âme. Je me suis tu. Je n'ai plus ri. Je suis devenu plus sérieux que le plus bas des plaisirs. J'étais un garçon brillant vous savez, j'aurais pu être un médecin, ou un ingénieur, peut-être un banquier. Eh bien je suis devenu Poète. La faute à la nuit.

Le Juge : Hum, hum, voilà qui est grave. La Nuit, qu'avez-vous à répondre ?

La Nuit : Mais puisque je vous dis que...

LE PROCES S'ENTRACTE

L'Ennui : Je parle de ce qui me plait
Et ce qui me plait parlera

Parfois tu viens ici tu entres
Toi immobile comme un mot sur la page
Un mot étrange que j'avais dû oublier
Un qui vous vient du profond du langage
Et que la phrase ne sait pas plier

Il chante seul seul comme font les églises
Il s'en vient du même vent que vont les voiliers
L'éclat de sa venue suit ce parfum de brise

La nuit est une cigarette que les corps fument pour moi
Mon regard y est un kaléidoscope hasardeux
Je perds le sens des lieux quand tu t'en vas

Je connais la nuit mais ne t'en vas pas


LE PROCES REPREND PAGE 37.


Le Juge : La défense à la barre.

La Nuit : C'est moi-même : n'ai-je pas la couleur des robes d'avocats.

Le Juge : Dépêchez-vous, il faut que le texte finisse, je crains que le lecteur ne se lasse.

La Nuit : Sans moi, l'Ennui, vous n'existeriez plus.

L'Ennui : ....

La Nuit : Pensez-y.


CHANT COROLLAIRE

L'Ennui : Je parle de toi ou de la nuit je ne sais
C’est la même chose lorsque tu es absente
Il y a longtemps j'ai cru que je n'aurais de la nuit
Plus que l'ombre d'une voisine sur le palier aperçue
Je disais
Cela ne me touche plus
Contrairement à tes mains blanches tes mains réelles
Contrairement ha ha contrairement

Je te vois
Le vent à son habitude tremble la balançoire
Je te vois grand ouvrir les volets de ce soir

Je te vois
Le jour est ce ballon que tu rendis à l'air
Le linge garde cette odeur cette odeur claire
Qu'a ta voix

Au procès.

L'Ennui : Je retire mon accusation.

Le Juge : Enfin, vous vous croyez où là monsieur, on n'est pas chez Macdo.

L'Ennui : Attendez. Je viens de comprendre que la Nuit me permet d'être.

Le Procureur : Et alors ? Ce ne balaie en rien mes chefs d'accusation.

L’Ennui : Comprenez : si je ne suis plus, et comme pourtant, je suis nécessaire, je veux dire que je suis cet agacement du cerveau nécessaire à la survie de l'espèce, cet agacement qui vous permit de faire la roue et le bluray... si je ne suis plus, Entité Platonique, c'est donc que comme l'Être je participerai à toutes choses. Le jour sera navrant et vous vous dégoûterez des couleurs. Oui, la Nuit comme le trot du cheval apporte ce mouvement alterné nécessaire au pas comme à la parole... réfléchissez. Il faut que je sois lié à la Nuit, pour que je sois moi, je suis sûr que vous n'avez pas envie d'être moi, vous me le disiez tout à l'heure.

Le Procureur : Ah, tiens, c'est juste. (Il fouille son bréviaire). Ce n'était point indiqué : faiblesse des Docteurs.

L'Ennui : Oui mais la nuit c'est bien plus que cela
La nuit est ce qui lit derrière votre épaule
Et remet à votre lit la couverture tombée
Elle retient tout près de votre corps le parfum
Que le vent dévêt
Elle vous donne le goût de l'amour la nuit

Le premier venu elle le laisse entrer en son jardin
Elle est tout ce que vous faites quand je ne suis pas là
La nuit c'est à dire le vrai tout ce que je jalouse
En plus d'être le paysage épicé de vos rêves
La nuit rougit des femmes
Les lèvres
Dormez ou veillez

On ne se sent jamais plus vivant que lorsqu'on sort de la nuit


CLAP CLAP CLAP, tout le monde est heureux de cette réconciliation inattendue.

****

EPILOGUE

La Nuit : Ah, lecteurs, lecteurs. C'est bien sûr à moi qu'il revenait de conclure.
Le texte s'arrête ici. Il fut écrit en une moitié d'heure quelque part dans une nuit, mais l'auteur ne dit pas ça pour se justifier : il n'aurait pu mieux faire. Cependant, à ceux qui diront que cette sorte de poésie-là ne plait pas, à ceux qui n'en comprennent point la philosophie, ceux qui ne peuvent aimer les enfants de la nuit pour ce qu'ils sont... il les emmerde.

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Message  Yoni Wolf Mer 11 Déc 2013 - 10:07

Je n'ai pas pu aller jusqu'au bout, c'est trop foutraque, ça part dans tous les sens, les images se succèdent tellement vite qu'on ne voit plus rien, on ne sent plus rien, et le coup du pet c'est un peu too much. Pour moi c'est raté, les ingredients sont bons en eux-mêmes, mais la mayonnaise ne tient pas. C'est trop. Sorry.
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http://lespigeonsecrases.blogspot.com/

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Message  Pussicat Mer 11 Déc 2013 - 11:08

je suis venue te lire attirée par le titre... on ne se refait pas !
j'ai décroché de (temps) en (temps)... je reviendrai...
la nuit, l'ennui, le sommeil, les rêves, l'insomnie.. tout cela me parle trop pour bâcler une lecture, lire en diagonale, et passer à côté... je reviendrai.
De plus, la longueur de ton texte demande une certaine attention, une attention certaine.

d'accord avec Yoni sur "le coup du pet"
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Message  Cerval Mer 11 Déc 2013 - 11:44

j'ai demandé à la modération d'y mettre une version un peu plus serrée, café noir



< C'est fait.
La Modération. >

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Message  Cerval Ven 13 Déc 2013 - 9:48

La nuit est douce et ses épaules de lavande Trahissent à ses doigts une ombre séchée La nuit a cherché les fruits des songes au marché Sa saison comme une chanson recommence Les uns après les autres au calendrier Les mois ont par leur bouche prune le même sourire Ce sont comme des enfants par la main attachés Pareils à tes mots lorsque tu expires

Et le jour au carreau ne veut plus se cacher

Je pousse la porte de son jardin
Je marcherai longtemps sous de doux primevères
Un châle de ses épaules couvrira la journée
Les pierres doucement garderont leurs secrets
Et les vents ce qu'ils gagnèrent de parfum

Je te vois parmi les choses coloriées
Ton pas est celui d'une eau qui s'avance Tout semble au début de son enfance Midi entre au ciel à son tour et s'assied Ce qui parle Ce qui chante seul comme font les églises Ce qui s'en vient du même pas que viennent les brises Au hasard du hasard ou bien d'un voilier Sont tout sont tout sont tous les mots qui te disent

Je te vois Le vent à son habitude tremble la balançoire Je te vois grand ouvrir les volets de ce soir Je te vois indécise à choisir tes habits

Je te vois
Dispersée comme un pissenlit
Bercée comme un hamac aux bras
D'une après-midi qui finit

Et une chose à ta main est une chose cueillie

Cerval

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Message  seyne Mar 17 Déc 2013 - 17:54

Le texte du procès mérite vraiment une lecture serrée. Si j'étais plus courageuse, je le commenterais paragraphe par paragraphe, mais je serais sans doute souvent dans la paraphrase - alors je me contente de dire : "très juste, profond".
Et le deuxième poème, très beau comme toujours.
Le crépuscule, entre chien et loup, est entre présence et absence, ou présence hallucinée.
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http://www.angle-vivant.net/claireceira/

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Message  Invité Sam 21 Déc 2013 - 12:52

Qu'est-ce qu'il est beau ce deuxième poème, il est doux, il bruisse de partout.

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Message  Sahkti Dim 5 Jan 2014 - 10:40

Plus d'un propos me séduit dans le premier texte, pour ce qu'il raconte (mais pas comment il le fait, ça me paraît trop carré, trop tarabiscoté, simple avis perso bien sûr).
Le second texte, certes agréable, me touche un peu moins, désolée.
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Message  Annie Lun 6 Jan 2014 - 9:10

Au début j'ai pensé à Jean Tardieu, et puis ça m'a lassée... il me semble que le propos est intéressant mais il faudrait renoncer à des lieux communs comme le suicide (en majuscule s'il vous plaît) et resserrer, préciser, par exemple "DE PERDRE LES HOMMES" c'est du vague.
" A CE QU'ON DOIT Y ALLUMER L'ÉLECTRICITE" la forme est douteuse.

Bref... bref !


Annie

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