Nuit de novembre...

[Mademoisellelouise]

Je m'éloigne de moi comme on s'éloigne de tout.
Je m'éloigne pour mieux me perdre.
Je ne sais pas qui je suis. Je m'éloigne seulement.
Qui sait vers quelles rives le monde l'emportera?
Je sens que le monde m'engloutit et m'éloigne davantage, de jour en jour.
J'ai l'impression d'être seule face à cet éloignement. Que rien ne pourra me rapprocher.
Que rien ne réussira à me remettre sur le bon navire.
Je navigue sur une planche de bois laissée à l'abandon. Je m'abandonne. De plus en plus.
J'aimerais pourtant trouver un garde-fou, un chemin, une raison de faire ce chemin.
Les autres me sont soit bénéfiques, et alors je fuis leur route, soit écrasants, et alors je me laisse anéantir.
La force de certaines personnes m'attirent irrésistiblement et je me perds auprès d'eux. Je les laisse me rendre encore plus faible. Leur confiance en eux me terrifie et m'obsède sans que je puisse rien y faire. Je ne connais pas de demi-mesure. Jamais. Cela est fatiguant de ne pas se contenter du médiocre, de toujours chercher les flammes et les émotions fortes. De cela on peut mourir.
Mourir de ne pas trouver la nourriture suffisante.
Alors j'écris.
J'écris pour ne pas laisser ce trop-plein de pensées m'envahir tout à fait.
J'écris pour ne pas devenir folle.
Pour ne pas laisser s'échapper le maigre filet qui me relie à la raison.
Je lis l'histoire de Camille Claudel. Je lis une biographie. D'elle et de Paul. Je me reconnais en elle. Je souffre de n'être pas toute entière plongée dans l'art.
Je souffre de ne pas réussir à exorciser les souffrances de mon âme.
Je suis tout et rien à la fois. Je suis trop et trop peu. Je suis remuante et léthargique.
Je suis ce qu'on a fait de moi.
J'ai le cœur au bout des doigts et une flamme le dévore.
Cette flamme violente et lascive pénètre tout à fait mon âme.
Je suis Elle et Elle est moi.
Une flamme à la fois violente, hypersensible, mystérieuse.
Tout le contraire de ce que j'essaie de montrer.
Personne ne saura jamais quelle flèche m'a traversée quand je t'ai rencontrée.
Quel trou béant elle a laissé. Quel déversement. Quel empire.
Elle s'est faite reine à l'intérieur de moi.
Elle s'est construit un abri, longuement et avec une assurance insolente.
Elle a tout écrasé autour d'elle.
Cette reine est absolue, impériale et capricieuse.
Elle n'accepte pas d'adversaire. Elle veut régner, seule et majestueusement.
Je lui ai laissée toute la place, j'ai accepté cela. Consciemment. Tragiquement.
Plus rien après a su reconquérir l'espace entre la fine membrane de mon cœur et ma peau.
Je n'ai fait que mentir et faire semblant.
Je joue très bien la comédie quand les choses profondes sont en jeu.
Pour éviter les écueils que cache la vie normale j'ai choisi l'éloignement, la dispersion du moi au profit des autres. L'évitement de soi.
J'aime assez mes congénères.
Certains m'affligent et me désolent cependant beaucoup me distraient et me permettent de ne pas penser.
Mes pensées sont lourdes et graves.
Elles s'agitent obstinément dans un tourbillon incessant et fatiguant.
J'ai l'esprit reposé à la seconde où je tombe dans le sommeil.
Pas avant...

16 Novembre 2009.

[Poesita-Aestuat]

Tout d'abord bonjour Mademoisellelouise, fais donc ta présentation dans le topic approprié, les formalités sont toujours importantes pour moi (bonjour, merci... au-revoir^^)

Concernant ton texte je le trouve léger, les phrases sont tout sauf longues et c'est finalement une bonne chose ; j'aime bien, même beaucoup.

Par contre on me poserait une colle si on me demandait quelle suite donner à ce texte.
En tout cas je n'en suis pas l'auteur et tu as sans doute une idée pour cela, à moins que ce ne soit qu'une réflexion parmi d'autres.

Poesita

[Mademoisellelouise]

Bonjour Poesita.

Ce texte n'a aucune ambition. Il va certainement se poursuivre mais je n'écris pas un roman. Plutôt des pensées recueillies au jour le jour.
Merci pour ton intérêt.

[Poesita-Aestuat]

Très bien, en tout cas je le trouve bien écrit.

Ce n'est pas pour autant qu'il faut t'arrêter à mon seul avis, je suis loin d'être pointilleux en critique, et donc j'attends de voir ce que d'autres trouveront à ton texte qui puisse le faire progresser, car je suis conscient qu'un "c'est bien" réconforte peut-être mais ne permet pas à l'auteur d'améliorer certains points (car oui, il y a toujours quelque chose qu'on pourrait améliorer, ou relever pour progresser par la suite).

Poesita

[Mademoisellelouise]

Il est vrai que des améliorations sont sans doute possibles mais je ne cherche pas la perfection. Un texte n'est rarement parfait. Et pour ce genre d'écriture un peu écrite sur le moment il est difficile d'y revenir. J'essaye de trouver les mots qui résonnent en moi et les propositions d'autres personnes seraient du coup à contre-sens de ce que j'essaye de faire. Non que je sois une âme remplie de narcissisme mais plutôt en recherche d'une exactitude intérieure. Il est difficile de proposer des alternatives à un texte qui touche au plus profond de soi. Pour ma part je n'oserai pas proposer des choses à quelqu'un d'autre. Par contre j'aime l'idée de donner son avis sur un texte. La critique constructive est enrichissante.
Bien à toi.

[boc21fr]

[i]J
Je ne sais pas qui je suis. Je m'éloigne seulement.
Qui sait vers quelles rives le monde l'emportera?

J'ai beaucoup aimé ces deux phrases...
Vraiment.

[Mademoisellelouise]

Merci. J'ai lu qu'on ne devait pas trop répondre pour laisser de la place aux autres textes. Alors je ne le ferai qu'une fois.
Merci beaucoup. C'est chouette de pouvoir partager.

[Poesita-Aestuat]

Euh quand ton texte est en haut tu peux répondre aux commentaires dans celui-ci (comme jusqu'à présent) sinon en effet pour éviter de nuire à des textes qui seraient plus récents tu peux poster les réponses aux commentaires qu'on te fait dans un topic approprié dont tu trouveras toi-même aisément le nom au regard de ma flemme légendaire.

Pour en revenir au sujet, il est vrai que ce genre de texte s'écrit sur le moment et ne se retravaille pas vraiment ensuite.
Mais comme tu l'as dit les avis sont intéressants !
Surtout d'ailleurs les avis exigeants^^

[boc21fr]

Tu peux tout à fait répondre dans le fil "commentaires".
Mais sinon, si ton texte est déjà "en haut de page", ne te prive pas de répondre comme tu le fais ici dans son propre fil...
L'idée est d'éviter que ton texte "remonte" sans cesse au détriment des autres, tout simplement.

[boc21fr]

Héhé...quand poésita et prosita se rencontrent...

[Invité]

J'ai trouvé que le texte patinait trop, tournant sans cesse autour de la même idée, qu'il s'étalait verbeusement. En outre, je dois dire que le sujet ne m'intéresse guère et que, à mon avis, son traitement n'apporte rien de neuf. J'ai eu l'impression de lire quelque chose déjà exprimé mille fois, mieux ou moins bien.

« L'évitement de soi. » : j'ai trouvé ce bout de phrase franchement marrant dans la mesure où la narratrice passe précisément tout le texte à détailler ses états d'âme !

Ne vous laissez pas décourager par cet avis négatif : ce n'est que mon avis. Bienvenue sur Vos Écrits, à vous lire bientôt !

Quelques remarques :
« Qui sait vers quelles rives le monde l'emportera (« m’emportera », non ?) »
« La force de certaines personnes m'attire (c’est la force qui attire) irrésistiblement et je me perds auprès d'elles (les personnes). Je les laisse me rendre encore plus faible. Leur confiance en elles (les personnes) »
« Cela est fatigant (et non « fatiguant », je sais, c’est paradoxal, mais ici je pense qu’il s’agit de l’adjectif et non du participe présent du verbe « fatiguer ») de ne pas se contenter du médiocre »
« Je lui ai laissé (et non « laissée ») toute la place »
« Je n'ai fait que mentir et faire semblant » : la répétition de « faire » se voit, je trouve
« un tourbillon incessant et fatigant (et non « fatiguant ») »

[Mademoisellelouise]

Je m'éloigne de moi comme on s'éloigne de tout.
Je m'éloigne pour mieux me perdre.
Je ne sais pas qui je suis. Je m'éloigne seulement.
Qui sait vers quelles rives le monde l'emportera?
Je sens que le monde m'engloutit et m'éloigne davantage, de jour en jour.
J'ai l'impression d'être seule face à cet éloignement. Que rien ne pourra me rapprocher.
Que rien ne réussira à me remettre sur le bon navire.
Je navigue sur une planche de bois laissée à l'abandon. Je m'abandonne. De plus en plus.
J'aimerais pourtant trouver un garde-fou, un chemin, une raison de faire ce chemin.
Les autres me sont soit bénéfiques, et alors je fuis leur route, soit écrasants, et alors je me laisse anéantir.
La force de certaines personnes m'attire irrésistiblement et je me perds auprès d'elles. Je les laisse me rendre encore plus faible. Leur confiance en elles me terrifie et m'obsède sans que je puisse rien y faire. Je ne connais pas de demi-mesure. Jamais. Cela est fatigant de ne pas se contenter du médiocre, de toujours chercher les flammes et les émotions fortes. De cela on peut mourir.
Mourir de ne pas trouver la nourriture suffisante.
Alors j'écris.
J'écris pour ne pas laisser ce trop-plein de pensées m'envahir tout à fait.
J'écris pour ne pas devenir folle.
Pour ne pas laisser s'échapper le maigre filet qui me relie à la raison.
Je lis l'histoire de Camille Claudel. Je lis une biographie. D'elle et de Paul. Je me reconnais en elle. Je souffre de n'être pas toute entière plongée dans l'art.
Je souffre de ne pas réussir à exorciser les souffrances de mon âme.
Je suis tout et rien à la fois. Je suis trop et trop peu. Je suis remuante et léthargique.
Je suis ce qu'on a fait de moi.
J'ai le cœur au bout des doigts et une flamme le dévore.
Cette flamme violente et lascive pénètre tout à fait mon âme.
Je suis Elle et Elle est moi.
Une flamme à la fois violente, hypersensible, mystérieuse.
Tout le contraire de ce que j'essaie de montrer.
Personne ne saura jamais quelle flèche m'a traversée quand je t'ai rencontrée.
Quel trou béant elle a laissé. Quel déversement. Quel empire.
Elle s'est faite reine à l'intérieur de moi.
Elle s'est construit un abri, longuement et avec une assurance insolente.
Elle a tout écrasé autour d'elle.
Cette reine est absolue, impériale et capricieuse.
Elle n'accepte pas d'adversaire. Elle veut régner, seule et majestueusement.
Je lui ai laissé toute la place, j'ai accepté cela. Consciemment. Tragiquement.
Plus rien après a su reconquérir l'espace entre la fine membrane de mon cœur et ma peau.
Je n'ai fait que mentir et dissimuler.
Je joue très bien la comédie quand les choses profondes sont en jeu.
Pour éviter les écueils que cache la vie normale j'ai choisi l'éloignement, la dispersion du moi au profit des autres. L'évitement de soi.
J'aime assez mes congénères.
Certains m'affligent et me désolent cependant beaucoup me distraient et me permettent de ne pas penser.
Mes pensées sont lourdes et graves.
Elles s'agitent obstinément dans un tourbillon incessant et fatigant.
J'ai l'esprit reposé à la seconde où je tombe dans le sommeil.
Pas avant...

16 Novembre 2009.

[Mademoisellelouise]

Bonjour socque,

Merci pour vos remarques. Pour l'orthographe due l'adjectif "fatigant" cela m'a bien été utile.
Par contre l'effet de patinage dont vous parlez est exactement ce que je cherchais à obtenir. Une spirale qui revient toujours sur le même sujet. Je ne cherche pas à écrire quelque chose d'innovant et relevant du génie littéraire. Je me contente d'écrire simplement. Néanmoins vos remarques me touchent, c'est toujours intéressant d'avoir un feed-back. Je n'ai aucune ambition littéraire.
Pour la phrase "Qui sait vers quelles rives le monde l'emportera?", je veux dire "Quel homme sait vers quelle rives le monde l'emportera?"

Et pour l'évitement de soi, mon texte n'est pas une fiction juste une retranscription de pensées réelles. Du coup ce paradoxe me semble intéressant, je n'y avais jamais pensé. Devenir omniprésent dans les écrits et absent de soi dans la vie.
L'écriture est peut-être un moyen de s'affirmer et en ce sens je pense que ce n'est pas honteux.
Dernière remarque, je lui ai laissé toute la place même si on parle d'une femme ça ne s'accorde pas? Je dois réviser mes bases je pense.
Bonne journée et merci encore.

Mademoiselle Louise.

[Invité]

Pour vous répondre sur "Je lui ai laissé toute la place".
Lors de la conjugaison d'un verbe au passé composé avec l'auxiliaire avoir, le participe passé du verbe s'accorde avec le complément d'objet direct du verbe (non le sujet), si celui-ci est placé avant le verbe. Ici, j'ai laissé quoi ? la place. Le participe passé s'accorderait donc avec "la place", féminin, si ce complément était placé avant le verbe. Ce n'est pas le cas, donc on n'accorde pas.

En revanche, on écrirait "La place que je lui ai laissée est la meilleure."

J'espère qu'avec ceci ce sera plus clair.

Sinon, je comprends bien ce que vous me dites sur le désir de transcrire vos pensées sans chercher forcément à créer une histoire, écrire un véritable texte... mais vous vous doutez sans doute que le lecteur dudit texte, en général, n'a pas les mêmes priorités. Je vous ai donné mon ressenti de lectrice, libre à vous ensuite d'en tenir compte ou non, on est bien d'accord.

[Titia_____]

Bonjour et Bienvenue Mademoisellelouise

Je ne comprends pas trop : pourquoi poster un texte si tu refuses d’avance de le retoucher ?

Je comprends tout à fait quand tu expliques être « en recherche d'une exactitude intérieure », qu’il est « difficile de proposer des alternatives à un texte qui touche au plus profond de soi ».
A savoir si tu es prête à ouvrir ton monde au lecteur (et donc le prendre un minimum en compte dans l’écriture) ou si tu n’écris que pour toi.

« ... sur le bon navire.
Je navigue… »
ça fait répétition, je trouve.
Comme : empire, reine, reine, impériale, régner
sur 6 lignes.
Quelques tournures trop faciles, trop explicatives. D’autres que j’ai appréciées.
Mais ce n’est que mon - très humble - avis personnel.

[Invité]

Ouah ! J'aperçois dans mon commentaire un "vous vous doutez sans doute" du plus bel effet. Entendez : je suppose que vous vous doutez...

[Mademoisellelouise]

Bonjour Titia,

Ce n'est pas que je refuse de le retoucher bien au contraire, vos remarques sont pertinentes, c'est plutôt que vous avez plus d'ambition que moi pour ce texte. Je tâcherai désormais de mieux prendre en compte le lecteur, ce qui, il est vrai, n'était pas forcément le cas pour ce premier essai.
Merci en tout cas pour vos remarques. C'est agréable que des gens prennent vraiment le temps de lire ce qu'on écrit.
Je comprends mieux le but de ce forum.
Bien à vous.

< Dans ce forum, on s'efforce également de ne pas faire remonter son propre texte en haut de page en répondant systématiquement à chaque commentaire.
Il est recommandé de répondre ici :
https://vosecrits.1fr1.net/forum-vos-ecrits-prose-f1/reponses-aux-commentaires-prose-t5329-360.htm
Merci de votre compréhension.
La Modération. >
.

[Sahkti]

Que de je, moi je ceci, moi je cela... de quoi donner au lecteur l'envie de laisser ce JE méditer sur son sort; il semble le faire tout seul comme un grand sans avoir besoin des autres.
Passée à côté, désolée, j'ai trouvé que c'était proche de la jérémiade et je ne suis pas fan du genre.

PS: la plus grande souffrance de Camille Claudel n'était pas de ne pas se plonger tout entière dans l'art mais de voir son art nié et incompris, à son image à elle, en particulier pendant ses années d'enfermement arbitraire.

[Lyra will]

En fait c'est presque trop dur de lire ça comme ça. Je ne sais pas si on est vraiment dans quelque chose d'ordre littéraire ou peut-être plus dans un billet d'humeur/journal intime ?
C'est dérangeant parce que tout à coup je me sens voyeuse, et pas pris en compte en tant que lectrice comme disait Socque (je crois), parce que tu fais de ton expérience personnelle un texte en "particulier" au lieu d'étendre, de généraliser, justement de t'éloigner de toi pour en faire un truc qui parle à tous. Je veux dire que la solitude, le fait de perdre pieds, le rapport aux autres, etc etc sont des grands thèmes qui parlent à peu près à tout le monde à un moment où à un autre, donc forcément surexploités, donc à exploiter peut-être autrement. Traité de cette manière, je ne serai pas capable d'en lire plus, par ennui déjà, lassitude parce qu'un peu trop de "je" et aussi parce que je le trouve difficile, oui.

[Contenu sponsorisé]