Songes sans visages

[Loreena Ruin]

On croyait
à la transcendance du temps

la main pourtant
n’avait rien à en dire

et le cœur était sec
comme ces branches qui grattaient

à la fenêtre


***


On perçait la nuit à force de s’aimer


***

Il n’y avait presque plus d’espace
entre le dire et le faire

Les mots quittaient la bouche

Extraction vaine

Et ces silhouettes mortes
qui jaillissaient du jouir
ne me parlaient pas


***


Haïr —
Comme une fêlure
dans la poitrine


***


Révolte contre le corps
rugissant de désir

Faites mon plaisir

Vêtements tombés
peaux rassasiées

Sentir comme une envie
de
tuer


***


Il fallait achever
mais on osait pas

On avait peur

Partir
en dedans
c’était bien trop

dur

[abstract]

J’avoue avoir hésité à lire à cause du titre qui ne me parlait pas trop. Songes, visages... je pensais que ça allait être un texte bateau... c’était une erreur.
J’ai un gros coup de coeur pour le dernier poème de la série qui ouvre pas mal de perspectives. J’ai trouvé plus de défauts aux autres, peut-être des images plus souvent vues. Mais le dernier vraiment, il me parle celui-là.

[Janis]

Ah oui ça parle
j'aime beaucoup l'alliage de mots tout doux tout bêtes et soudain au détour du vers bang, ça gratte, ça hait, ça rugit, ça tue

[Invité]

Lu une bonne vingtaine de fois déjà (j'ai laissé la page ouverte sur mon navigateur) ; je reviendrai.

[Béatrice44]

[Polixène]

Un texte qui demande une lenteur, une absorption pour être apprécié.
Je m'y sens à l'aise .

[loic]

des bribes d'introspection poétique

touché par cette démarche

[Loreena Ruin]

Merci à tous pour vos remarques ! J'essaye de me renouveler, je cherche, j'explore de nouvelles émotions, un univers plus sombre jusque là laissé de côté. Un travail introspectif, oui, mais le but est tout de même que ça "traverse" quelque part, vers l'autre.

@ alex, j'attends donc tes réactions, quoique tu ais, si je ne me trompe, déjà lu et donné ton avis sur la plupart de ces petits poèmes.

@ Béatrice44 : curieuse mise en parallèle qui me fait réfléchir. Associer cet ensemble de texte à la vision d'une mante dévorant un serpent... Pouvez-vous me dire ce qui vous a inspiré cette image ? Je suis sincèrement curieuse de saisir quelle émotion la lecture de mon texte peut provoquer.

[Invité]

Oui, mais je n'arrive pas à aller plus loin que la dernière fois, ce qui m'irrite.

[Béatrice44]

Haïr le désir et haïr l'objet du désir, mais y succomber et ensuite vouloir le détruire pour cela.
Un texte très fort que j'avais du mal à commenter mais que j'ai beaucoup aimé.

La mante s'est tout de suite imposée à mon esprit quand j'ai lu votre poème.

[Terrains Vagues]

le but est tout de même que ça "traverse" quelque part, vers l'autre

But atteint.

[Invité]

Beaucoup aimé ! Touchée au coeur !
Bravo !

Ceci surtout qui, en quelques mots, dit l'essentiel d'un sentiment complexe :
Haïr —
Comme une fêlure
dans la poitrine

[Lyra will]

Le titre me faisait fuir, et puis comme j'ai vu qu'il remontait régulièrement, ça a attisé ma curiosité... :0)

J'ai bien fait, parce que j'ai beaucoup aimé, et j'adore les branches qui grattent à la fenêtre. (vraiment beau ça!)
Le coeur sec...

Et ça me rappelle un peu un passage d'Yves Bonnefoy.

"Perçait la nuit" aussi.
Et voilà j'aime la douceur et la violence qui se dégagent de l'ensemble !

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