Le petit chat
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Lyra will
hi wen
Marine
M-arjolaine
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Le petit chat
Dès que j'ouvris les yeux, je fus convaincue qu'il manquait quelque chose dans ma chambre. Je ne sus dire ce que c'était ; assurément j'étais toujours sur mon lit, il était donc bien là. Je tâtonnais à mes côtés, me rendis compte que ma table de nuit n'avait pas bougé, ni ma lampe de chevet, ni mon paquet de biscuit (je les recomptai pour être sûre, il en restait deux cent quarante sept, comme hier soir, on ne m'en avait pas volé, heureusement !), je vérifiai chacun de mes habits, chacun de mes romans... puis, comme je ne trouvais pas, je haussai les épaules et descendit prendre mon petit déjeuner.
« Tu es rentrée dans ma chambre cette nuit ? demandai-je à ma mère en me préparant un bol de céréales.
- Non. Non ! Pourquoi tu insistes ? Non ! »
Elle laissa le lait déborder, cassa une assiette, et quitta la pièce en criant :
« Je n'y suis pas allée ! Je n'y suis pas allée, je n'ai pas pris ton petit chat ! Non, non, ce n'est pas moi ! »
Je me promis d'arrêter de lui poser des questions trop intimes, cela la perturbait tant qu'elle était alors capable de tout et de n'importe quoi. Elle était si sensible ! Elle avait manqué se suicider trois fois, lorsque je lui avais demandé où elle avait rangé les assiettes, si le père noël existait, et combien de baguettes de pain je devais aller lui chercher. Heureusement, mon père veillait toujours à ce qu'il n'y ait aucun objet coupant dans la maison, ni aucun fer à repasser. Cela étant dit, lorsque je lui demandai en décembre dernier si je pouvais lui prendre un tube de colle, elle était parvenue à dénicher une règle et une équerre. Je n'oserais décrire les tortures qu'elle s'infligea avec.
Je descendis voir mon papa, qui travaillait au garage.
« Tu t'en sors ?
- Ma princesse ! s'écria-t-il, avant de me prendre dans ses bras et de me faire sauter dans les airs, ma jolie petite douceur, as tu bien dormi ? Tes rêves étaient-ils merveilleux ? Raconte les moi mon petit ange, raconte à ton papa ! »
J'allais m'exécuter quand je vis -ô ciel !-, écrasé dans le jardin, mon petit chat blanc incrusté parmi les herbes et les violettes.
« Tu as écrasé mon petit chat ?
- Tu crois que je ne m'en veux pas ? Je me déteste, seigneur, je me déteste ! » hurla mon père en se tapant la tête contre les murs.
Il pleurait à chaudes larmes ; cela ne m'attendrit pas, je lui donnai mille coups de pieds, et arrachai sa moustache. Puis je courus prendre la petite chose, et remontai à l'étage en la berçant doucement.
Les deuils ont cela de terrible qu'on ne peut les faire par soi même ; toute la famille fut invitée autour d'un repas, et me présenta ses condoléances. Je n'en pouvais plus de sanglots. Ma mère parla pour moi, car je ne parvenais à émettre que de vagues borborygmes pleins de morve et de glaires, et dégoûtés, personne n'osait toucher aux plats présentés sur la table.
« On a offert son petit chat à Marjolaine à sa naissance. Quelle histoire d'amour, grands Dieux, quelle histoire d'amour ! Sur les photos, on ne la voit jamais sans sa petite bête. Toujours dans ses bras, elle dormait même avec ! Pauvre petit chat ! Il a vécu avec une petite fille qui l'aimait trop, qui l'a estropié à force de le cajoler. Il a fallu lui recoudre la queue, il a perdu un oeil, et l'autre est devenu tout jaune. Son pelage est devenu rêche, et sec. Pauvre, pauvre chose ! Marjolaine s'en est désintéressée en grandissant, bien entendu. Mais elle le gardait dans sa chambre, malgré tout. Je l'ai seulement descendu au garage parce que je voulais le passer à la machine... je... Il arrivait qu'elle le prenne et lui dépose un baiser sur le front... elle a continué de l'aimer comme le nourrisson qu'elle était... elle... vous... excusez moi... »
L'émotion la submergea. Mon père, en larmes, l'accompagna dans la cuisine pour être sûre qu'elle ne se charcuterait pas avec la télécommande. Mes frères, leurs femmes et leurs enfants pleuraient eux aussi. Quant à moi mon cri s'était mué en une longue plainte qui ne cessait jamais, et allongée sur les carreaux de la terrasse, je martelais le sol de mes points en hurlant « Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? ».
Il n'y eut que la nouvelle petite amie de mon plus jeune frère, fraîchement débarquée chez nous, qui avait gardé les yeux secs et chuchota à l'oreille de mon frangin :
« Elle n'en fait pas un peu trop, juste pour son doudou d'enfance ? »
Mon frère était un homme de bien ; il ne pouvait aimer une femme sans coeur. Le cou tendu, il lui désigna la porte du doigt et lui demanda de partir, à jamais. J'en fus contente : je la sentais mauvaise. Et pour preuve ; la salope passa dans ma chambre entre temps. Quand j'y revins, il manquait six gâteaux dans mon paquet.
« Tu es rentrée dans ma chambre cette nuit ? demandai-je à ma mère en me préparant un bol de céréales.
- Non. Non ! Pourquoi tu insistes ? Non ! »
Elle laissa le lait déborder, cassa une assiette, et quitta la pièce en criant :
« Je n'y suis pas allée ! Je n'y suis pas allée, je n'ai pas pris ton petit chat ! Non, non, ce n'est pas moi ! »
Je me promis d'arrêter de lui poser des questions trop intimes, cela la perturbait tant qu'elle était alors capable de tout et de n'importe quoi. Elle était si sensible ! Elle avait manqué se suicider trois fois, lorsque je lui avais demandé où elle avait rangé les assiettes, si le père noël existait, et combien de baguettes de pain je devais aller lui chercher. Heureusement, mon père veillait toujours à ce qu'il n'y ait aucun objet coupant dans la maison, ni aucun fer à repasser. Cela étant dit, lorsque je lui demandai en décembre dernier si je pouvais lui prendre un tube de colle, elle était parvenue à dénicher une règle et une équerre. Je n'oserais décrire les tortures qu'elle s'infligea avec.
Je descendis voir mon papa, qui travaillait au garage.
« Tu t'en sors ?
- Ma princesse ! s'écria-t-il, avant de me prendre dans ses bras et de me faire sauter dans les airs, ma jolie petite douceur, as tu bien dormi ? Tes rêves étaient-ils merveilleux ? Raconte les moi mon petit ange, raconte à ton papa ! »
J'allais m'exécuter quand je vis -ô ciel !-, écrasé dans le jardin, mon petit chat blanc incrusté parmi les herbes et les violettes.
« Tu as écrasé mon petit chat ?
- Tu crois que je ne m'en veux pas ? Je me déteste, seigneur, je me déteste ! » hurla mon père en se tapant la tête contre les murs.
Il pleurait à chaudes larmes ; cela ne m'attendrit pas, je lui donnai mille coups de pieds, et arrachai sa moustache. Puis je courus prendre la petite chose, et remontai à l'étage en la berçant doucement.
Les deuils ont cela de terrible qu'on ne peut les faire par soi même ; toute la famille fut invitée autour d'un repas, et me présenta ses condoléances. Je n'en pouvais plus de sanglots. Ma mère parla pour moi, car je ne parvenais à émettre que de vagues borborygmes pleins de morve et de glaires, et dégoûtés, personne n'osait toucher aux plats présentés sur la table.
« On a offert son petit chat à Marjolaine à sa naissance. Quelle histoire d'amour, grands Dieux, quelle histoire d'amour ! Sur les photos, on ne la voit jamais sans sa petite bête. Toujours dans ses bras, elle dormait même avec ! Pauvre petit chat ! Il a vécu avec une petite fille qui l'aimait trop, qui l'a estropié à force de le cajoler. Il a fallu lui recoudre la queue, il a perdu un oeil, et l'autre est devenu tout jaune. Son pelage est devenu rêche, et sec. Pauvre, pauvre chose ! Marjolaine s'en est désintéressée en grandissant, bien entendu. Mais elle le gardait dans sa chambre, malgré tout. Je l'ai seulement descendu au garage parce que je voulais le passer à la machine... je... Il arrivait qu'elle le prenne et lui dépose un baiser sur le front... elle a continué de l'aimer comme le nourrisson qu'elle était... elle... vous... excusez moi... »
L'émotion la submergea. Mon père, en larmes, l'accompagna dans la cuisine pour être sûre qu'elle ne se charcuterait pas avec la télécommande. Mes frères, leurs femmes et leurs enfants pleuraient eux aussi. Quant à moi mon cri s'était mué en une longue plainte qui ne cessait jamais, et allongée sur les carreaux de la terrasse, je martelais le sol de mes points en hurlant « Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? ».
Il n'y eut que la nouvelle petite amie de mon plus jeune frère, fraîchement débarquée chez nous, qui avait gardé les yeux secs et chuchota à l'oreille de mon frangin :
« Elle n'en fait pas un peu trop, juste pour son doudou d'enfance ? »
Mon frère était un homme de bien ; il ne pouvait aimer une femme sans coeur. Le cou tendu, il lui désigna la porte du doigt et lui demanda de partir, à jamais. J'en fus contente : je la sentais mauvaise. Et pour preuve ; la salope passa dans ma chambre entre temps. Quand j'y revins, il manquait six gâteaux dans mon paquet.
Re: Le petit chat
Et la fin est absolument irrésistible !M-arjolaine a écrit:Je tâtonnai à mes côtés,
descendis prendre mon petit déjeuner.
« Tu es entrée dans ma chambre
Je me promis d'arrêter de lui poser des questions trop intimes, cela la perturbait tant qu'elle était alors capable de tout et de n'importe quoi. Elle était si sensible ! Elle avait manqué se suicider trois fois, lorsque je lui avais demandé où elle avait rangé les assiettes, si le père noël existait, et combien de baguettes de pain je devais aller lui chercher. Heureusement, mon père veillait toujours à ce qu'il n'y ait aucun objet coupant dans la maison, ni aucun fer à repasser. Cela étant dit, lorsque je lui demandai en décembre dernier si je pouvais lui prendre un tube de colle, elle était parvenue à dénicher une règle et une équerre. Je n'oserais décrire les tortures qu'elle s'infligea avec.
J'adore ce passage !!!
Les deuils ont cela de terrible qu'on ne peut les faire par soi même ; toute la famille fut invitée autour d'un repas, et me présenta ses condoléances.
L'émotion la submergea. Mon père, en larmes, l'accompagna dans la cuisine pour être sûre qu'elle ne se charcuterait pas avec la télécommande.
Et ça aussi !
je martelais le sol de mes poings
Il n'y eut que la nouvelle petite amie de mon plus jeune frère, fraîchement débarquée chez nous, qui avait gardé les yeux secs et chuchota à l'oreille de mon frangin :
« Elle n'en fait pas un peu trop, juste pour son doudou d'enfance ? »
Mon frère était un homme de bien ; il ne pouvait aimer une femme sans coeur. Le cou tendu, il lui désigna la porte du doigt et lui demanda de partir, à jamais. J'en fus contente : je la sentais mauvaise. Et pour preuve ; la salope passa dans ma chambre entre temps. Quand j'y revins, il manquait six gâteaux dans mon paquet.
En revanche, je trouve que le début a quelque chose d'un peu maladroit, forcé...
Invité- Invité
Re: Le petit chat
J'aime toujours autant l'allure cauchemardée de tes textes, cette sorte de tourbillon déjanté dans lequel tu nous prends.
Si j'avais un oeil critique je trouverais peut-être le procédé un peu facile -genre, on met de l'absurde parce que ça permet de faire rire et de créer une ambiance sans grands efforts littéraires- mais je ne vais pas faire le rabbat-joie : j'ai passé un bon moment.
A bientôt !
Si j'avais un oeil critique je trouverais peut-être le procédé un peu facile -genre, on met de l'absurde parce que ça permet de faire rire et de créer une ambiance sans grands efforts littéraires- mais je ne vais pas faire le rabbat-joie : j'ai passé un bon moment.
A bientôt !
Re: Le petit chat
Un petit texte inconséquent, gentiment absurde, un peu gratuit aussi.
J'en aime la chute : elle consacre une imagination décidément débordante !
J'en aime la chute : elle consacre une imagination décidément débordante !
Invité- Invité
Re: Le petit chat
Sans aller jusqu'à dire que c'est décousu, je me risquerai toutefois à trouver que ça manque de liant, et puis ça m'a l'air un peu expédié, sans le soin habituel, la cruauté du détail, la finesse de l'analyse. Pas abouti, en un mot.
Invité- Invité
Re: Le petit chat
l'écriture est très douce. une absurdité/fatalité assumée, dans un regard posé sur le monde plein d'acceptation. ça me change des récits attrapes-couilles.
hi wen- Nombre de messages : 899
Age : 27
Date d'inscription : 07/01/2011
Re: Le petit chat
Et pour preuve ; la salope passa dans ma chambre entre temps. Quand j'y revins, il manquait six gâteaux dans mon paquet.
ça, ça me fait beaucoup rire :0)
Sonne tellement vrai et sorti du coeur !
Sinon je te lis toujours avec plaisir, et là encore, j'aime vraiment.
(Et non, elle n'en fait pas trop, wooh ! c'est son doudou d'enfance :0)
ça, ça me fait beaucoup rire :0)
Sonne tellement vrai et sorti du coeur !
Sinon je te lis toujours avec plaisir, et là encore, j'aime vraiment.
(Et non, elle n'en fait pas trop, wooh ! c'est son doudou d'enfance :0)
Re: Le petit chat
Vilaine et adorable petite M-arjolaine qui nous crée des alters ego à l'égo altéré; ça m'évoque une Série Martine revisitée : Marjolaine et son chat, Marjolaine à l'école de la cruauté, Marjolaine chez les barges, Marjolaine et la salope, L'histoire de Marjolaine, Marjolaine est hystérique, Marjolaine où est ton doudou dis donc etc...
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Le petit chat
Je trouve plus de fautes et moins de soin que d'habitude, comme si tu avais écrit et posté dans l'urgence. Et certains passages en disent trop sur le même thème, devraient sans doute être raccourcis, je pense notamment à la tendance suicidaire de la mère et au monologue du père dans le garage.
Ces réserves mises à part j'aime beaucoup la manière dont tu narres ce deuil quasi obligé du doudou de l'enfance, quelles que soient les circonstances, et j‘adore la fin.
Ces réserves mises à part j'aime beaucoup la manière dont tu narres ce deuil quasi obligé du doudou de l'enfance, quelles que soient les circonstances, et j‘adore la fin.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Le petit chat
Je me suis bien amusée à vous lire...
Béatrice44- Nombre de messages : 125
Age : 55
Date d'inscription : 04/10/2011
Re: Le petit chat
Terribles les histoires d'animaux, j'ai vu des repas périr à cause de nos amies les bêtes.
Quant aux mères glissons sur leur utilité ;-)
Quant aux mères glissons sur leur utilité ;-)
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
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