Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
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Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
Texte original
En partant de là et en allant trois jours vers le levant, l'homme se trouve à Diomira, une ville avec soixante coupoles d'argent, des statues en bronze de tous les dieux, des rues pavées d'étain, un théâtre en cristal, un coq en or qui chante chaque matin sur une tour. Toutes ces beautés, le voyageur les connaît déjà pour les avoir vues aussi dans d'autres villes. Mais le propre de celle-ci est que si l'on y arrive un soir de septembre, quand les jours raccourcissent et que les lampes multicolores s'allument toutes ensemble aux portes des friteries, et que d'une terrasse une voix de femme crie : hou !, on en vient à envier ceux qui à l'heure présente pensent qu'ils ont déjà vécu une soirée pareille et qu'ils ont été cette fois-là heureux.
Putain de bled ! Trois jours à bouffer de la piste caillouteuse plus crevassée d’entonnoirs qu’un fromage helvète, pour y arriver, à ce patelin de merde. Une vraie ville de curetons, entre parenthèses : au moins soixante églises plus tarabiscotées les unes que les autre, avec des clochers ridicules au toit arrondi, c’est simple : quand t’arrives tu vois que ça ! Et tu peux pas faire un mètre sans donner du pare-choc dans un mannequin de métal, à croire qu’y a plus de sculptures que d’êtres vivants, dans ce patelin à la con. Et je te cause pas du macadam lisse comme un miroir, que tu faut que tu te cramponnes sérieux au bastingage pour pas te retrouver les quatre fers en l’air tous les deux pas ! Question distractions, par contre, tu repasseras : pas un cinoche, pas un peep-show, pas même un bête bordel de garnison, non juste un théâtre à la con, tout en verre, et de toutes façons bouclé. Circulez on fait relâche ! Le bouquet : tous les matins, pas besoin d’attendre le clairon, t‘as un fumier de coq aux plumes jaunes qui te carbonise ton sommeil en braillant du sommet d’un pylône tellement haut que tu peux même pas le dégommer au fusil d’assaut ! Le pitaine, de toutes façons, y dit que c’est pareil que dans tous les autres bleds qu’il a déjà vus, et je peux dire que le pitaine, avec ses vingt ans de baroud, y a pas beaucoup de coins où il a pas trimballé ses rangers. En plus, l’a fallu qu’on s’y pointe juste au début de l’automne, où que t’y vois déjà plus clair à six heures du soir. Heureusement, le pitaine avait fait mettre des lanternes à l’entrée de tous les troquets, en fait d’abominables gargotes puant le graillon et l’huile de vidange recyclée ! Y a une moukère qu’à voulu faire du suif en braillant comme une chouette quand notre convoi est passé sous son balcon, mais le pitaine, la sérénade, ça lui colle des boutons et il se l’est faite à la 12,43 bitube. Ca me fait comme une bizarre impression de déjà vu. Sans doute le climat pourri. En tous cas, demain, on fait péter tout ce bordel et on met les bouts. Je t’en recauserai de Diomira !
2ème classe Gobu
En partant de là et en allant trois jours vers le levant, l'homme se trouve à Diomira, une ville avec soixante coupoles d'argent, des statues en bronze de tous les dieux, des rues pavées d'étain, un théâtre en cristal, un coq en or qui chante chaque matin sur une tour. Toutes ces beautés, le voyageur les connaît déjà pour les avoir vues aussi dans d'autres villes. Mais le propre de celle-ci est que si l'on y arrive un soir de septembre, quand les jours raccourcissent et que les lampes multicolores s'allument toutes ensemble aux portes des friteries, et que d'une terrasse une voix de femme crie : hou !, on en vient à envier ceux qui à l'heure présente pensent qu'ils ont déjà vécu une soirée pareille et qu'ils ont été cette fois-là heureux.
PUTAIN DE BLED
Putain de bled ! Trois jours à bouffer de la piste caillouteuse plus crevassée d’entonnoirs qu’un fromage helvète, pour y arriver, à ce patelin de merde. Une vraie ville de curetons, entre parenthèses : au moins soixante églises plus tarabiscotées les unes que les autre, avec des clochers ridicules au toit arrondi, c’est simple : quand t’arrives tu vois que ça ! Et tu peux pas faire un mètre sans donner du pare-choc dans un mannequin de métal, à croire qu’y a plus de sculptures que d’êtres vivants, dans ce patelin à la con. Et je te cause pas du macadam lisse comme un miroir, que tu faut que tu te cramponnes sérieux au bastingage pour pas te retrouver les quatre fers en l’air tous les deux pas ! Question distractions, par contre, tu repasseras : pas un cinoche, pas un peep-show, pas même un bête bordel de garnison, non juste un théâtre à la con, tout en verre, et de toutes façons bouclé. Circulez on fait relâche ! Le bouquet : tous les matins, pas besoin d’attendre le clairon, t‘as un fumier de coq aux plumes jaunes qui te carbonise ton sommeil en braillant du sommet d’un pylône tellement haut que tu peux même pas le dégommer au fusil d’assaut ! Le pitaine, de toutes façons, y dit que c’est pareil que dans tous les autres bleds qu’il a déjà vus, et je peux dire que le pitaine, avec ses vingt ans de baroud, y a pas beaucoup de coins où il a pas trimballé ses rangers. En plus, l’a fallu qu’on s’y pointe juste au début de l’automne, où que t’y vois déjà plus clair à six heures du soir. Heureusement, le pitaine avait fait mettre des lanternes à l’entrée de tous les troquets, en fait d’abominables gargotes puant le graillon et l’huile de vidange recyclée ! Y a une moukère qu’à voulu faire du suif en braillant comme une chouette quand notre convoi est passé sous son balcon, mais le pitaine, la sérénade, ça lui colle des boutons et il se l’est faite à la 12,43 bitube. Ca me fait comme une bizarre impression de déjà vu. Sans doute le climat pourri. En tous cas, demain, on fait péter tout ce bordel et on met les bouts. Je t’en recauserai de Diomira !
2ème classe Gobu
Gobu- Nombre de messages : 2400
Age : 70
Date d'inscription : 18/06/2007
Re: Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
Tout nu dans ma serviette… :-)
Bien vu, Gobu l'Italo je l'aime davantage Pitaine que Calvino.
Bien vu, Gobu l'Italo je l'aime davantage Pitaine que Calvino.
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 60
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
Belle gouaille Gobu ! C'est la septième compagnie à Diomara dialoguée par Audiard :-) Excellente reprise, et très amusante !
Loupbleu- Nombre de messages : 5838
Age : 52
Localisation : loupbleu@vosecrits.com
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
Un monologue très réussi. Il semble plus vrai que nature, malheureusement ;-)
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Réécriture Italo Calvino : Putain de bled
Ca sent le crasse et la transpiration midasse... L'ambiance et les couleurs y sont... Bonne idée... Ca m'a plu
ninananere- Nombre de messages : 1010
Age : 49
Localisation : A droite en haut des marches
Date d'inscription : 14/03/2007
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