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Megiddo

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Message  Invité Dim 8 Avr 2012 - 11:57

Le vent ; un vieux chant, sinueux, nostalgique ; des histoires, un lieu, des strates et des noms, des peuples et des dieux. Nous devinions aussi des charniers enfouis et des champs transformés en ossuaires.

Ah ! Le bruit du vent dans les ruines, un vent plus vieux que toutes celles qu'à nos yeux il dévoilait et masquait tour à tour, aidé en cela par le sable et les jeux d'ombres du soleil. On devinait çà et là des bas reliefs, des sculptures à demi effacées, mortes mais néanmoins susceptibles de renaître par la magie de l'imaginaire et des dieux oubliés.

Parfois des rafales mêlées de sable, véloces, sauvages, féroces, tiraient des pierres des sons rauques, des mélodies que nous n'aurions pas cru possibles ; parfois, des gémissements s'échappaient comme si elles s'étaient mises à parler, à nous conter leurs histoires éternelles, celles des hommes qui les avaient sculptées et assemblées.

La lumière turbulente et limpide les magnifiait ; des constructions arcanes* pourvues d'arches à demi écroulées nous guettaient, attendant que nous les restaurions et les fassions revivre pour nous raconter.

C'était une vieille cité, ou plutôt devrais-je dire, de vieilles cités. Elles furent puissantes. Situées sur un promontoire elles contrôlaient toute la vallée, les voies commerciales et militaires ; également la Via Maris menant du nord de l'Égypte à l'Assyrie, la Phénicie, l'Anatolie et la Mésopotamie.

Du haut de la colline de Megiddo nous pouvions apercevoir la vallée de Jezréel, le mont Carmel, jusqu'à la Galilée et la ville de Nazareth. Ce tel*, constitué d'une trentaine de cités empilées, amas de ruines de calcaire et de basalte, était la clef ; celle de l'âge de bronze et du fer, des temps bibliques, lieu du combat entre le Bien et le Mal, lieu des combats entre les peuples. Ici et ailleurs les hommes n'ont jamais véritablement compris qu'ils avaient la tête tournée vers le sol, jamais écouté les voix sortant de terre ; qu'à vouloir s'élever pour atteindre aux cieux, ils ne faisaient que s'embourber, mourir étouffés par leur orgueil.

Et, véritablement, à voir ces vestiges, on devinait qu'ici avait eu lieu l'Apocalypse, qu'elle n'avait pas attendu la fin des temps et et que ces ruines n'étaient plus un lieu d'attente messianique. On savait aussi que d'autres Apocalypses surviendraient. Les dieux n'y seraient pour rien, les hommes s'en chargeraient ; ils n'avaient besoin de personne, surtout pas d'intervention divine et régleraient leurs comptes avec toute la sauvagerie voulue. Leur imagination pour le faire était incommensurable ; ils atteignaient en ce domaine à la divinité : c'est pourquoi ils avaient tué tous leurs dieux et continuaient à s'éliminer avec acharnement…
Pour que la dernière divinité fût.

* arcanes : mystérieuses, secrètes
* tel : colline (ex : Tel-Aviv)

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Message  AliceAlasmartise. Dim 8 Avr 2012 - 15:02

Votre écriture me fait voyager, j'adore ça. Très beau texte, je ne sais pas quoi dire d'autre, il me laisse sans voix :-)
AliceAlasmartise.
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Message  Lucy Dim 8 Avr 2012 - 17:26

Ce texte est-il un segment ? En tout cas, le vent nous porte bien loin dans ces terres où j'aurais aimé à me poser plus longuement.
Lucy
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Message  Invité Dim 8 Avr 2012 - 21:58

J'ai beaucoup aimé ce voyage plein d'arrières-plans et cette écriture !

La lumière turbulente et limpide les magnifiait
m'a donné une sensation très précise , une véritable vision ...

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Message  Invité Lun 9 Avr 2012 - 9:35

Un texte qui me fait penser aux écrivains voyageurs, Loti, Cendrars, Bouvier... Kessel aussi...

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Message  Invité Lun 9 Avr 2012 - 9:36

Mais trop court pour commenter autrement que succinctement.

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Message  Louis Lun 9 Avr 2012 - 10:09

Une méditation intéressante devant une terre ancienne, chargée d’histoire.
S’offre au regard une colline formée par l’épaisseur du passé, étagée de strates successives laissées par les civilisations qui, depuis des millénaires, sont nées en ces lieux, se sont épanouies pour décliner et mourir ensuite, léguant à la terre leurs vestiges.
Le temps des hommes a donné ici son relief au paysage.

Les ruines sont silencieuses.
Les civilisations anciennes, florissantes autrefois dans cet espace, se sont tues. Le vent s’est substitué à ces voix d’un passé révolu, le vent « vieux chant, sinueux, nostalgique ». Le vent se fait l’écho des temps anciens, il libère la parole emprisonnée dans les pierres, « Parfois des rafales mêlées de sable (…) tiraient des pierres des sons rauques (…) parfois, des gémissements s'échappaient comme si elles s'étaient mises à parler, à nous conter leurs histoires éternelles ».
Si le vent réveille les voix mortes, la lumière donne aux vieilles pierres un éclat, une beauté. « La lumière turbulente et limpide les magnifiait ». Le passé figé dans les pierres ne demeure pas dans l’obscurité, enfoui dans les ténèbres de temps lointains et inconnus, il se tient dans la pleine lumière, prêt à se révéler « attendant que nous les restaurions et les fassions revivre pour nous raconter. » A la fois présent et absent, il attend une autre voix que celle du vent, il attend une voix qui le fera parler, et lui redonnera vie.

Pour le moment, c’est la méditation du narrateur,observateur, qui s’exprime. Elle plonge dans cette terre des dieux, dans les profondeurs du passé humain, vers l’époque des premières grandes civilisations, vers les temps bibliques, ces temps anciens vers lesquels fait signe la colline de Megiddo, et la constituent.

L’effondrement des mondes anciens retient l’attention. Grandeur et décadence des civilisations. Les lieux de leur émergence furent aussi ceux des rivalités violentes, des conflits entre les peuples, qui les menèrent à leur perte. Ici a déjà eu lieu l'apocalypse.
Cette terre des dieux suggère au narrateur, dans sa méditation, les causes qui mènent les hommes à leur perte, entre terre et ciel. La principale se situe dans leur orgueil. « à vouloir s'élever pour atteindre aux cieux, ils ne faisaient que s'embourber, mourir étouffés par leur orgueil. » Les humains sont en proie à une démesure, à un excès, ils cherchent à s’élever jusqu’au « ciel », au-dessus d’eux-mêmes, incapables de se tenir dans les limites de leur condition. Fils de la terre, ils n’ont « jamais écouté les voix sortant de terre », mais les sirènes célestes. A vouloir s’élever, ils se rabaissent, s’enfoncent, « s’embourbent ».
La méditation ne se fait plus plongée dans le passé, mais leçon tirée pour le présent et l’avenir.
Les hommes ont tué leurs dieux, mais pour prendre leur place. Les hommes cherchent à être des dieux pour d’autres hommes, ils cherchent à les dominer, à se constituer en maîtres et seigneurs. Ils cherchent aussi à dominer la « terre », toute la nature. Ainsi, ils s’entretuent, aujourd’hui comme hier, « c'est pourquoi ils avaient tué tous leurs dieux et continuaient à s'éliminer avec acharnement… ». Pour qu’advienne la dernière divinité, l’homme-dieu, « Pour que la dernière divinité fût. » Ils préparent ainsi une nouvelle apocalypse. Notre civilisation s’effondrera, pour donner plus de hauteur encore à la colline de Megiddo. Notre terre n’est plus que « tel ».
Ainsi les hommes, à se vouloir plus qu’hommes, des dieux, se rabaissent à être moins qu’hommes, des bêtes sauvages.

Le sujet de la médiation peut se discuter, il se fait d’ailleurs prophétique en ces lieux où vécurent les prophètes, mais la belle image métaphorique de la colline de Megiddo est bien vue.



Louis

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Message  Jano Lun 9 Avr 2012 - 12:04

J'ai trouvé l'écriture moins aboutie que d'autres de vos textes, avec certaines phrases presques maladroites, du moins fortement alambiquées :"Le bruit du vent dans les ruines, un vent plus vieux que toutes celles qu'à nos yeux il dévoilait et masquait tour à tour, aidé en cela par le sable et les jeux d'ombres du soleil."

Des précisions m'apparaissent superflues : "attendant que nous les restaurions et les fassions revivre pour nous raconter."

Ce passage n'est pas clair, plutôt ambigu :"Ici et ailleurs les hommes n'ont jamais véritablement compris qu'ils avaient la tête tournée vers le sol, jamais écouté les voix sortant de terre ; qu'à vouloir s'élever pour atteindre aux cieux, ils ne faisaient que s'embourber, mourir étouffés par leur orgueil."

Primo, les mots "cieux" et "embourber" sont antagonistes.

Secundo, quelles sont ces voix sortant de la terre qui sauveront l'humanité ? On comprend que vous opposez deux sortes de cultes ; l'un païen, rattaché à la terre, et l'autre spirituel chargé d'une dimension destructrice. Une vision très discutable. Il me semble au contraire que c'est en répudiant les vieilles croyances animistes que l'homme a pu élevé son esprit.

Le dernier paragraphe ne m'emballe guère, avec de nouveau des contradictions :

"c'est pourquoi ils avaient tué tous leurs dieux et continuaient à s'éliminer avec acharnement…
Pour que la dernière divinité fût."


Vous dites qu'ils ont tué tous leurs dieux et juste après qu'il reste une dernière divinité. J'en perds mon latin ...
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Message  Invité Lun 9 Avr 2012 - 15:20

Ce texte (un tout tout "pitit" texte comme dit AliceAlasmartise) a été écrit il y a 2 ans déjà. Je venais à peine de découvrir la plume et l'encrier (:-)). Ce fut un de mes tout premiers. L'idée m'en est venue après la lecture d'un mensuel d'histoire et de "Mémoire d'Hadrien" de M. Yourcenar. Ces récits m'ont inspiré cette réflexion philosophico-historique (si on peut dire). Il ne s'agit pas d'un segment, tout au plus d'une ébauche, d'un tout petit voyage si l'on se fie à la longueur du texte, mais d'un grand voyage quant au devenir des hommes ; une méditation.

Louis en a fait une excellente analyse (comme à son habitude). Elle devrait éclairer Jano que j'invite à lire le commentaire de Louis et relire le texte si l'envie lui en prend. Ni phrases alambiquées, ni antagonisme entre les mots. Une lecture un tant soit peu attentive devrait en faciliter la compréhension (ce n'est pas un reproche). Je n'écris pas pour distraire (pour cela il y a les polars et j'en lis beaucoup) mais pour interroger. Mes phrases sont toujours très travaillées, relues, polies jusqu'à ce que la musique qu'elles sont censées véhiculer soit douce à mes oreilles (et poétique). L'écriture, c'est comme la musique : les harmoniques et les silences en sont les principales composantes.

Une précision pour Jano qui dit : "Vous dites qu'ils ont tué tous leurs dieux et juste après qu'il reste une dernière divinité. J'en perds mon latin .."
Voici l'explication de Louis : "Les hommes ont tué leurs dieux, mais pour prendre leur place. Les hommes cherchent à être des dieux pour d’autres hommes, ils cherchent à les dominer, à se constituer en maîtres et seigneurs. Ils cherchent aussi à dominer la « terre », toute la nature. Ainsi, ils s’entretuent, aujourd’hui comme hier, « c'est pourquoi ils avaient tué tous leurs dieux et continuaient à s'éliminer avec acharnement… ». Pour qu’advienne la dernière divinité, l’homme-dieu, « Pour que la dernière divinité fût. » Ils préparent ainsi une nouvelle apocalypse. Notre civilisation s’effondrera, pour donner plus de hauteur encore à la colline de Megiddo. Notre terre n’est plus que « tel »."
J'espère que cela aidera Jano à retrouver son latin. (:-)))

J'invite AliceAlasmartise (une écriture prometteuse que celle de cette jeune auteure) et Lucy à lire mes autres textes : "Absence", "Le sacrifice" et éventuellement "Cathédrale" (mais pas "Tchernobyl" qui est particulièrement violent) sur VO ou sur mon site.

Merci à toutes et tous pour vos commentaires.

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