Exo Lunatik : Sauve qui peut
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Janis
Rebecca
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Exo Lunatik : Sauve qui peut
-« C’est moi qui n’ai pas voulu d’avocat, figurez-vous. Ni passer en cour de justice. Je ne relève pas de votre justice. Bien que je ne sois pas angélique au point de ne pas savoir que vous essaierez de m’enfermer dans une de vos geôles. Je sais très bien ce que vous voulez : salir l’amour que je porte à mon époux et à nos enfants. Mais ça, vous ne l’emporterez pas au paradis. Tandis que moi, je les y retrouverai »
-« Parlez- moi d’eux, s’il vous plait. »
-« Avant, mon mari ne cessait de me le répéter sur tous les tons : Angélique, tu as la beauté et la douceur des anges. Et il me remerciait pour les trois angelots qui étaient venus bénir notre union.
Pourtant en secret, j’avais du replier mes ailes pour vivre sur cette terre parmi vous, et comme vous, aveugles sourds et muets. Mes ailes sont comme des vibrisses savez-vous ? Des capteurs ultra-sensibles.
Or, je n’ai jamais cessé d’entendre le bruit du monde, le bruit, oh si vous saviez, l’affreux bruit, que l’on perçoit et qui peu à peu nous transperce. Vous n’êtes pas transpercé, vous ? C’est dangereux de s’approcher du cœur des hommes. Vous entendez les voix officielles et leurs discours hypocrites ? Leurs voix délatrices et leurs cris guerriers ? Vous entendez ce qu’ils tentent d’écraser et d’enterrer ?
Oh mon Dieu, ce monde de haute solitude, ce monde d’idoles monstrueuses. Je vois bien que les humains bredouillent, ils éructent, ils crient et ils implorent, parfois ils espionnent, ils complotent ils dénoncent ils traquent et se complaisent dans la fange. Ils souffrent mais ne restent pas longtemps innocents.
Ces derniers temps, je ne pouvais plus lui cacher que mes ailes toutes flapies me servaient de mur de résonnances. Je lui répétai : je suis le réceptacle de vos consciences, et de ce que vous taisez ou étouffez sous vos soupirs.
Au début, il m’appelait son ange encore. Puis il soupirait.
Mais vous voyez, les anges savent qu’en secret les humains espèrent que vienne le silence. Un genre de silence entier, immense, exigeant, le genre qui puisse les consoler d’avoir été jetés sur cette planète. Dans la douleur et la violence d’un cri. Qui se perpétuera jusqu’en enfer.
Mes angelots. Et leur père si humain et si inhumain. Je n’ai voulu que les consoler.
Je n’ai voulu que les soulager.
-« Vraiment ? »
-« Oui . Les délester. De leurs soupirs d’enfants déjà blessés, de leurs supplications présentes ou futures d’amoureux délaissés.De leurs chagrins d’éternels orphelins quoiqu’on dise, quoiqu’on fasse. De leurs larmes de bourreaux involontaires aussi. De leurs sanglots de squelettes ambulants. »
-« Ne sommes-nous que des squelettes ambulants, Angélique ? »
-« Qu’est-ce que vous croyez ? Vous, autant qu’eux .
Oh bien sur, j’ai entendu parfois leurs souffles entre deux espoirs, leurs rires entre deux folies. C’était joli.
J’ai même vu des fleurs s’épanouir au creux de leurs reins, au détour de leurs rêves, sous la peau de leurs mains…juste avant qu’on n’en arrache les pétales une à une…. Je t’aime un peu beaucoup passionnément à la folie …pas du tout.
Des squelettes ambulants avec à la place du cœur une fleur dévastée.
Un jour, mon mari m’a dit : Angel, tu es folle. Et ça voulait dire : je ne t’aime plus du tout. Un jour ; il m’a dit, Angel je pars et j’emmène les enfants, là où tu ne pourras pas leur nuire.
J’ai vu ce que la folie des hommes provoquait et comme il fallait les protéger de leur inconscience et des sournoises manipulations du mal. J’ai vu le mal fondre sur mon amour et nos petits…. ».
-« Et ? »
-« Et j’ai pris leur aveuglement, leur chagrin, leur douleur, le massacre de l’innocence sur mon dos, entre mes ailes déployées.
- ?
-"Je les ai sauvés. D’eux-mêmes et de la laideur du monde. Ils sont redevenus tous les quatre ce qu’ils auraient du ne jamais cesser d’être. Mes anges à moi. Ils se sont envolés en paix, tandis que je veillais sur leurs rêves. Leurs rêves de paradis. Je ne suis pas une meurtrière. »
-« Bien je vois que vous n’êtes pas prête encore à me parler d’eux. Eux : Jacques, Lilas, Mélody et Enzo.
Parlez moi de vous. Vous, Angélique. Et donc si vous n’êtes pas une meurtrière, qui êtes-vous ?»
-« Vous ne m’entendez pas. Je n’arrête pas de vous le dire. Je suis l’amour qui ne fane pas, la paix qu’on ne piétine pas, je suis dure comme la pierre des murs derrière lesquels vous voulez m’enfermer et je suis douce comme la somme de vos murmures.
Si vous aviez la moindre idée de la fragilité des hommes et de leur besoin de protection, et d’empathie, vous m’aideriez plutôt à déplier mes ailes. »
-« Bien Angélique, » dit le médecin psychiatre se levant et ouvrant la porte aux deux infirmiers qui se tenaient cois derrière, « à demain pour notre prochaine séance. »
Puis la regardant sous toutes les coutures, il ajouta :
-« Pour information, j’ai appris que vous avez tenté de sauver votre infirmière référente, ce matin ; c’est seulement si vous acceptez de prendre vos cachets que j’ accèderai à votre demande que l’on retire votre camisole, et ce même si elle abime vos ailes. »
-« Parlez- moi d’eux, s’il vous plait. »
-« Avant, mon mari ne cessait de me le répéter sur tous les tons : Angélique, tu as la beauté et la douceur des anges. Et il me remerciait pour les trois angelots qui étaient venus bénir notre union.
Pourtant en secret, j’avais du replier mes ailes pour vivre sur cette terre parmi vous, et comme vous, aveugles sourds et muets. Mes ailes sont comme des vibrisses savez-vous ? Des capteurs ultra-sensibles.
Or, je n’ai jamais cessé d’entendre le bruit du monde, le bruit, oh si vous saviez, l’affreux bruit, que l’on perçoit et qui peu à peu nous transperce. Vous n’êtes pas transpercé, vous ? C’est dangereux de s’approcher du cœur des hommes. Vous entendez les voix officielles et leurs discours hypocrites ? Leurs voix délatrices et leurs cris guerriers ? Vous entendez ce qu’ils tentent d’écraser et d’enterrer ?
Oh mon Dieu, ce monde de haute solitude, ce monde d’idoles monstrueuses. Je vois bien que les humains bredouillent, ils éructent, ils crient et ils implorent, parfois ils espionnent, ils complotent ils dénoncent ils traquent et se complaisent dans la fange. Ils souffrent mais ne restent pas longtemps innocents.
Ces derniers temps, je ne pouvais plus lui cacher que mes ailes toutes flapies me servaient de mur de résonnances. Je lui répétai : je suis le réceptacle de vos consciences, et de ce que vous taisez ou étouffez sous vos soupirs.
Au début, il m’appelait son ange encore. Puis il soupirait.
Mais vous voyez, les anges savent qu’en secret les humains espèrent que vienne le silence. Un genre de silence entier, immense, exigeant, le genre qui puisse les consoler d’avoir été jetés sur cette planète. Dans la douleur et la violence d’un cri. Qui se perpétuera jusqu’en enfer.
Mes angelots. Et leur père si humain et si inhumain. Je n’ai voulu que les consoler.
Je n’ai voulu que les soulager.
-« Vraiment ? »
-« Oui . Les délester. De leurs soupirs d’enfants déjà blessés, de leurs supplications présentes ou futures d’amoureux délaissés.De leurs chagrins d’éternels orphelins quoiqu’on dise, quoiqu’on fasse. De leurs larmes de bourreaux involontaires aussi. De leurs sanglots de squelettes ambulants. »
-« Ne sommes-nous que des squelettes ambulants, Angélique ? »
-« Qu’est-ce que vous croyez ? Vous, autant qu’eux .
Oh bien sur, j’ai entendu parfois leurs souffles entre deux espoirs, leurs rires entre deux folies. C’était joli.
J’ai même vu des fleurs s’épanouir au creux de leurs reins, au détour de leurs rêves, sous la peau de leurs mains…juste avant qu’on n’en arrache les pétales une à une…. Je t’aime un peu beaucoup passionnément à la folie …pas du tout.
Des squelettes ambulants avec à la place du cœur une fleur dévastée.
Un jour, mon mari m’a dit : Angel, tu es folle. Et ça voulait dire : je ne t’aime plus du tout. Un jour ; il m’a dit, Angel je pars et j’emmène les enfants, là où tu ne pourras pas leur nuire.
J’ai vu ce que la folie des hommes provoquait et comme il fallait les protéger de leur inconscience et des sournoises manipulations du mal. J’ai vu le mal fondre sur mon amour et nos petits…. ».
-« Et ? »
-« Et j’ai pris leur aveuglement, leur chagrin, leur douleur, le massacre de l’innocence sur mon dos, entre mes ailes déployées.
- ?
-"Je les ai sauvés. D’eux-mêmes et de la laideur du monde. Ils sont redevenus tous les quatre ce qu’ils auraient du ne jamais cesser d’être. Mes anges à moi. Ils se sont envolés en paix, tandis que je veillais sur leurs rêves. Leurs rêves de paradis. Je ne suis pas une meurtrière. »
-« Bien je vois que vous n’êtes pas prête encore à me parler d’eux. Eux : Jacques, Lilas, Mélody et Enzo.
Parlez moi de vous. Vous, Angélique. Et donc si vous n’êtes pas une meurtrière, qui êtes-vous ?»
-« Vous ne m’entendez pas. Je n’arrête pas de vous le dire. Je suis l’amour qui ne fane pas, la paix qu’on ne piétine pas, je suis dure comme la pierre des murs derrière lesquels vous voulez m’enfermer et je suis douce comme la somme de vos murmures.
Si vous aviez la moindre idée de la fragilité des hommes et de leur besoin de protection, et d’empathie, vous m’aideriez plutôt à déplier mes ailes. »
-« Bien Angélique, » dit le médecin psychiatre se levant et ouvrant la porte aux deux infirmiers qui se tenaient cois derrière, « à demain pour notre prochaine séance. »
Puis la regardant sous toutes les coutures, il ajouta :
-« Pour information, j’ai appris que vous avez tenté de sauver votre infirmière référente, ce matin ; c’est seulement si vous acceptez de prendre vos cachets que j’ accèderai à votre demande que l’on retire votre camisole, et ce même si elle abime vos ailes. »
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
rhho bien aussi !
demain demain
je suis éblouie des talents divers et variés
demain demain
je suis éblouie des talents divers et variés
Janis- Nombre de messages : 13490
Age : 63
Date d'inscription : 18/09/2011
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
J'ai préféré l'autre version. Ceci dit, on est dans un univers plus poétique (avec un contraste fort et bien vu entre l'ange et la meurtrière qu'est tout à la fois l'héroïne) mais c'est peut-être justement l'emploi d'un vocabulaire plus recherché dans un dialogue parlé qui m'a un peu tenue à distance.
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 64
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
j'ai adoré, me suis laissé porter par la douce voix
(sauf que j'avais la gueule de bruno ganz en tête)
c'est plein de tendresse, de poésie, j'ai eu peur au début que tu surjoues, mais non, c'est habilement dosé et joliment écrit
bémol : le premier paragraphe, s'il contient des éléments essentiels, qui méritent d'être conservés, est trop explicite pour entamer le texte.
je l'aurais dilué dans le reste et aurais commencé là :
"-« Parlez- moi d’eux, s’il vous plait. »"
(sauf que j'avais la gueule de bruno ganz en tête)
c'est plein de tendresse, de poésie, j'ai eu peur au début que tu surjoues, mais non, c'est habilement dosé et joliment écrit
bémol : le premier paragraphe, s'il contient des éléments essentiels, qui méritent d'être conservés, est trop explicite pour entamer le texte.
je l'aurais dilué dans le reste et aurais commencé là :
"-« Parlez- moi d’eux, s’il vous plait. »"
grieg- Nombre de messages : 6156
Localisation : plus très loin
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
moi, j'ai préféré celui-là
Janis- Nombre de messages : 13490
Age : 63
Date d'inscription : 18/09/2011
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
Beaucoup aimé ce texte, ce qu’il explique du geste, l’angle choisi de nous placer "dans la tête de", et la manière dont il le fait, avec la tendresse glaçante de l’ange exterminateur. Ça fonctionne parfaitement, y compris avec l’ironie finale sur la tentative de sauvetage de l’infirmière.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Exo Lunatik : Sauve qui peut
Idem pour moi.Janis a écrit:moi, j'ai préféré celui-là
Faut dire que je ne suis pas fan des jeux de mots, du coup l'autre texte n'avait aucune chance de m'accrocher.
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