La béatitude du coureur de fond
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La béatitude du coureur de fond
Cela devait être le plus beau jour de ma vie. J'allais enfin donner corps à mon rêve ! Fendre l'air comme une proue de navire et me laisser porter par les acclamations.
Je me suis longtemps résigné à l'immobilité. Je ne me souviens plus où j'ai entendu cette phrase : « On se taille des envies en fonction de son profil ». Le mien ? Cloué à l'horizontale depuis la naissance... Une chrysalide à jamais... J'aurais manqué d'oxygène à ce qu'on dit.
Puis un jour, ce profil est devenu dévorant, je ne pouvais plus me sentir ratatiné dans un fauteuil, condamné à une routine débilitante. Autour de moi tout s'agite, tout vit et se réjouit. Gravitant inlassablement dans les parages, deux êtres chers, mes parents, ont déplacé par leur amour les limites du possible. Ils ont tenu tête aux médecins, levé les obstacles et déniché des réponses à la moindre question technique. Comme les gens sont bizarres ! On a commencé à me prendre au sérieux le jour où j'ai souri à une plaisanterie ! A force de suivre des matches sur écran, je suis devenu un mordu de sport et je les ai tous scotchés quand mes premières paroles, transcrites sur ordinateur interactif, ont été pour mon équipe de hockey préférée !
Dès lors, tout est devenu permis.
Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Ma mère a secoué ses mèches bouclées, un pétillement est passé dans le regard de mon père, le militaire à la retraite.
J'ai ajouté :
-Nous formerons un tandem... et nous courrons annoncer nous aussi une victoire...
Je ne croyais pas si bien dire. Il a fallu concevoir un « pousse-pousse » allégé avec deux poignées reposoir pour mon co-équipier et tout le nécessaire.
Mais quelles sensations ! A chaque entraînement, je me sens picoter de plaisir. Mes yeux pourtant cachés derrière des lunettes noires ruissellent de larmes sous les coups du vent, mes pores s'ouvrent à tout, la fraîcheur, les odeurs, les rayons du soleil. J'entends sans cesse le tip tap de ses pas sur le macadam comme deux cœurs qui propulsent ensemble ardeur, folie et joie. Je devine son souffle, une vapeur d'espoir toujours renouvelé. J'en suis béat d'admiration. Mes bras, mes jambes prennent vie, ils brinquebalent ou clapotent au rythme. Je bois l'oxygène à pleins bouillons. J'unis mes efforts aux siens, j'alimente intérieurement cette flamme qui nous lie.
Depuis hier soir, nos deux paires de chaussures officielles trônent dans l'entrée.
-Vous feriez bien de vous allonger tôt. Demain sera une chaude journée, dit maman pour conjurer le crachin de la soirée.
Et le trio s'est séparé à mon chevet.
Je suis trop excité pour trouver le sommeil. Je repasse le parcours par le menu, ses faux plats, ses talus riants, ses touffes sévères, ses bandes blanches, ses pointillés... Sous le baobab au grand cœur, des enfants font cercle autour du conteur. Ils voudraient percer le mystère de la cicatrice qui lui zèbre la joue. Lui raconte les ruses de la panthère qui guette en tapinois. A contre-jour un enfant souffle des bulles de savon. Un air léger les entraîne toujours plus loin et les agglutine sur une toile d'araignée. Anneaux aux couleurs olympiques...
Rêve coloré, réveil précipité... Sur mes pieds surélevés le drap a glissé. Mes chevilles ont franchement l'air d'avoir enflé pendant la nuit ! Je ne vais pas pouvoir chausser les belles chaussures achetées pour l’événement.
Qu'à cela ne tienne ! Je ne serai pas le premier à faire le marathon pieds nus.
Je me suis longtemps résigné à l'immobilité. Je ne me souviens plus où j'ai entendu cette phrase : « On se taille des envies en fonction de son profil ». Le mien ? Cloué à l'horizontale depuis la naissance... Une chrysalide à jamais... J'aurais manqué d'oxygène à ce qu'on dit.
Puis un jour, ce profil est devenu dévorant, je ne pouvais plus me sentir ratatiné dans un fauteuil, condamné à une routine débilitante. Autour de moi tout s'agite, tout vit et se réjouit. Gravitant inlassablement dans les parages, deux êtres chers, mes parents, ont déplacé par leur amour les limites du possible. Ils ont tenu tête aux médecins, levé les obstacles et déniché des réponses à la moindre question technique. Comme les gens sont bizarres ! On a commencé à me prendre au sérieux le jour où j'ai souri à une plaisanterie ! A force de suivre des matches sur écran, je suis devenu un mordu de sport et je les ai tous scotchés quand mes premières paroles, transcrites sur ordinateur interactif, ont été pour mon équipe de hockey préférée !
Dès lors, tout est devenu permis.
Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Ma mère a secoué ses mèches bouclées, un pétillement est passé dans le regard de mon père, le militaire à la retraite.
J'ai ajouté :
-Nous formerons un tandem... et nous courrons annoncer nous aussi une victoire...
Je ne croyais pas si bien dire. Il a fallu concevoir un « pousse-pousse » allégé avec deux poignées reposoir pour mon co-équipier et tout le nécessaire.
Mais quelles sensations ! A chaque entraînement, je me sens picoter de plaisir. Mes yeux pourtant cachés derrière des lunettes noires ruissellent de larmes sous les coups du vent, mes pores s'ouvrent à tout, la fraîcheur, les odeurs, les rayons du soleil. J'entends sans cesse le tip tap de ses pas sur le macadam comme deux cœurs qui propulsent ensemble ardeur, folie et joie. Je devine son souffle, une vapeur d'espoir toujours renouvelé. J'en suis béat d'admiration. Mes bras, mes jambes prennent vie, ils brinquebalent ou clapotent au rythme. Je bois l'oxygène à pleins bouillons. J'unis mes efforts aux siens, j'alimente intérieurement cette flamme qui nous lie.
Depuis hier soir, nos deux paires de chaussures officielles trônent dans l'entrée.
-Vous feriez bien de vous allonger tôt. Demain sera une chaude journée, dit maman pour conjurer le crachin de la soirée.
Et le trio s'est séparé à mon chevet.
Je suis trop excité pour trouver le sommeil. Je repasse le parcours par le menu, ses faux plats, ses talus riants, ses touffes sévères, ses bandes blanches, ses pointillés... Sous le baobab au grand cœur, des enfants font cercle autour du conteur. Ils voudraient percer le mystère de la cicatrice qui lui zèbre la joue. Lui raconte les ruses de la panthère qui guette en tapinois. A contre-jour un enfant souffle des bulles de savon. Un air léger les entraîne toujours plus loin et les agglutine sur une toile d'araignée. Anneaux aux couleurs olympiques...
Rêve coloré, réveil précipité... Sur mes pieds surélevés le drap a glissé. Mes chevilles ont franchement l'air d'avoir enflé pendant la nuit ! Je ne vais pas pouvoir chausser les belles chaussures achetées pour l’événement.
Qu'à cela ne tienne ! Je ne serai pas le premier à faire le marathon pieds nus.
Invité- Invité
Re: La béatitude du coureur de fond
J'apprécie le clin d’œil au film et l'anecdote comme tu la déroules, avec son humour discret.
Quelques remarques de forme.
Tout d'abord, je ne comprends pas pourquoi le texte commence avec " Cela devait être le plus beau jour de ma vie. J'allais enfin donner corps à mon rêve ! " qui pourrait laisser supposer que la suite va démentir ces dires, alors que, si j'ai bien compris, il n'en est rien, le rêve va se réaliser, même si pas tout à fait comme prévu.
Ensuite, moins important, trivial même, ici : “ Sous le baobab au grand cœur, des enfants font cercle autour du conteur. Ils voudraient percer le mystère de la cicatrice qui lui zèbre la joue. Lui raconte les ruses de la panthère qui guette en tapinois. A contre-jour un enfant souffle des bulles de savon. Un air léger les entraîne toujours plus loin et les agglutine sur une toile d'araignée. Anneaux aux couleurs olympiques..”
j’aurais peut-être isolé le paragraphe pour ne pas dérouter le lecteur mais surtout pour lui donner vie indépendamment du reste...
Et là :
"Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Ma mère a secoué ses mèches bouclées, un pétillement est passé dans le regard de mon père, le militaire à la retraite. "
Peut-être plus concis :
"Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Un pétillement est passé dans son regard de militaire à la retraite (ou "Un pétillement est passé dans son regard, le militaire à la retraite") , ma mère a secoué ses mèches bouclées."
enfin, quelque chose de ce genre.
Quelques remarques de forme.
Tout d'abord, je ne comprends pas pourquoi le texte commence avec " Cela devait être le plus beau jour de ma vie. J'allais enfin donner corps à mon rêve ! " qui pourrait laisser supposer que la suite va démentir ces dires, alors que, si j'ai bien compris, il n'en est rien, le rêve va se réaliser, même si pas tout à fait comme prévu.
Ensuite, moins important, trivial même, ici : “ Sous le baobab au grand cœur, des enfants font cercle autour du conteur. Ils voudraient percer le mystère de la cicatrice qui lui zèbre la joue. Lui raconte les ruses de la panthère qui guette en tapinois. A contre-jour un enfant souffle des bulles de savon. Un air léger les entraîne toujours plus loin et les agglutine sur une toile d'araignée. Anneaux aux couleurs olympiques..”
j’aurais peut-être isolé le paragraphe pour ne pas dérouter le lecteur mais surtout pour lui donner vie indépendamment du reste...
Et là :
"Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Ma mère a secoué ses mèches bouclées, un pétillement est passé dans le regard de mon père, le militaire à la retraite. "
Peut-être plus concis :
"Je me souviens du jour où j'ai demandé à mon père :
-Tu veux bien courir un marathon avec moi ?
Un pétillement est passé dans son regard de militaire à la retraite (ou "Un pétillement est passé dans son regard, le militaire à la retraite") , ma mère a secoué ses mèches bouclées."
enfin, quelque chose de ce genre.
Invité- Invité
Re: La béatitude du coureur de fond
bon !
je connaissais la solitude du coureur de fond
pas la béatitude (personnellement jamais atteinte, je crache mes poumons au bout de deux minutes)
mais bon texte
je ne sais pas si c'est moi mais
je te conseillerai, comme je l'ai fait depuis hier pour d'autres textes, d'aérer un peu plus !
de sauter des lignes
même si c'est court, c'est compact !
Janis- Nombre de messages : 13490
Age : 63
Date d'inscription : 18/09/2011
Re: La béatitude du coureur de fond
Oui, le titre m'a été inspiré par le film, mais l'histoire est à voir sur team hoyt you tube.
Je la réécrirai sans doute, en tenant compte des remarques. Le rêve était en effet à détacher du reste.
Je me rends compte que souvent j'ai du mal à me mettre à la place du lecteur.
Je la réécrirai sans doute, en tenant compte des remarques. Le rêve était en effet à détacher du reste.
Je me rends compte que souvent j'ai du mal à me mettre à la place du lecteur.
Invité- Invité
Re: La béatitude du coureur de fond
Pas vu le film. Texte que je trouve bien écrit, l'histoire est touchante. Pas assez d'aérations en effet. Le passage baobab il s'agit bien d'un rêve ?
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 51
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: La béatitude du coureur de fond
Oui évidemment. Oublie cette question :o)
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 51
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: La béatitude du coureur de fond
Moi, ce qui m'a touchée, c'est cet optimisme, cette volonté de concrétiser son rêve.
Et le passage qui décrit les sensations physiques nouvelles, éprouvées.
ils brinquebalent ou clapotent au rythme.
A la lecture, on a tendance à attendre un complément. Au rythme de ?
-Vous feriez bien de vous allonger tôt
Le verbe allonger m'a étonnée. Il me semble que "coucher" aurait été plus approprié.
Merci pour cette lecture émouvante.
Et le passage qui décrit les sensations physiques nouvelles, éprouvées.
ils brinquebalent ou clapotent au rythme.
A la lecture, on a tendance à attendre un complément. Au rythme de ?
-Vous feriez bien de vous allonger tôt
Le verbe allonger m'a étonnée. Il me semble que "coucher" aurait été plus approprié.
Merci pour cette lecture émouvante.
Invité- Invité
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