Exo « Anonyme » : Mon rendez-vous

Sous les néons bleutés de la ville endormie
A l'heure des marchands de sable blanc, fées d'or,
J'attends mon rendez-vous comme l'amant sa belle.

Il est encore temps de faire demi tour
Pensé-je en allumant ma blonde sous la pluie
Quand un bruit de moteur tel un chat ronronna.

Le monstre dans la nuit se confondait si bien
Que jamais un instant je l'avais deviné.
Il était déjà là, m'épiant, méfiant, avide,

Et moi comme une proie j'étais à sa merci.
Je tire sur ma clope et je regarde en l'air
La fumée mentholée s'échapper en corolles.

Je m'approche à pas lents excitée comme une folle
Brûlée par le désir de passer le miroir :
Depuis deux cent deux jours et autant de nuits blanches

J'attends ce rendez-vous comme l'amant sa belle.

Naïve je surfais sur le net pas très nette,
Exilée, sans foyer, je voyageais à l'œil
Cherchant le sûr moyen de tromper le lecteur

Savais-je seulement, seulement le savais-je ?

Un jour j'ai décidé de planter mon tipi
Dans un pré verdoyant dont les fleurs purpurines
Brunissaient mon teint blanc et coloraient mon thé.

Là je fis connaissance avec un beau zozo
Un poète sans sous qui me fit des avances,
Comprenez mon émoi devant cet oxymore.

Tous les deux possédés par la littérature -
Les textes médiévaux sont pour nous des joyaux -
Nous avons décidé, fous, de passer le pas.

Nous avions balisé notre première fois,
Notre rencontre vraie, dans ses moindres détails
Postant ici et et là des messages codés ;

Tous nos amis blogueurs n'y virent que du feu.
Nous nous en amusions, parfois, mais peu souvent,
Le vieux françois servait à tisser autre chose.

Clic, clac, les yeux jaunes de la longue berline
M'aveuglent d'un regard et je perds tout contrôle.
Pauvre âme sidérée à quoi tiens-tu vraiment ?

Je défaille et trébuche et reprends mes esprits
Je m'avance en tremblant (c'est toi qui l'a voulu),
J'essaie de maîtriser la peur qui m'envahit.

La pluie glisse en filets sur les vitres teintées
Ne laissant percevoir qu'un halo de lumière
Au dessus du reflet d'un visage mouvant.

Effrayée je recule et prends de la distance,
C'est un réflexe humain : découvrir son image,
Et je ris doucement, idiote que tu es !

Une voix rauque aboie un ordre, une demande
Par la vitre à demi baissée de mon côté,
Une autre bien plus douce et bien plus policée

Laisse échapper un vœu que je ne veux saisir :
- Madame voulez-vous bien monter s'il vous plaît ?
- Demande-lui combien, j'ai pas que ça à faire.

Je pense et je le crois n'avoir jamais couru
Aussi vite devant un danger de ma vie.
J'ai perdu mes talons, mes poumons me brûlaient,

Je ne voyais plus rien qu'une rue longue et noire.
Mon espoir disparut, mon rendez-vous avec,
Sous les néons bleutés de la ville endormie.

Oh, la, la, quelle histoire, et drôlement bien racontée !
Des alexandrins non rimés mais dont j'apprécie le rythme.
J'aime bien ce passage:
Et moi comme une proie j'étais à sa merci.
Je tire sur ma clope et je regarde en l'air
La fumée mentholée s'échapper en corolles.

Je m'approche à pas lents excitée comme une folle
Brûlée par le désir de passer le miroir :
Bien vu le flash-back pour expliquer la situation du personnage qui attend son rendez-vous.
Et j'aime aussi que le dernier vers reprenne le premier.
Il s'en passe des choses "sous les néons bleutés de la ville endormie"...

les phrases sont tranquilles
comme le début d'un film
j'aime bien cet instant de littérature, de lecture, d'histoire

j'ai la galanterie de ne pas demander son nom à la dame....
qu'importe son nom .. pour lu on a l'ivresse


juste... alors ?
lelales quel'd'entre nous étaient dans la voiture ?

D'accord avec Fred, on dirait le scénario d'un film, ça déroule comme une bobine, je vois le court métrage... le coup des alexandrins non rimés est bien trouvé (je ne sais pas si c'était voulu au départ... à demander), ça coule et... bon, pas sympa le coup du lapin ! c'est toujours les mêmes qui trinquent... un poète aussi, faut se méfier des poètes...

D'accord aussi avec embellie (encore !) sur le vers qui commence et termine l'histoire, comme une boîte (de film) qui se referme, que le lecteur referme. Et pis des vers que je retiens, bon c'est long, je peux pas tout citer mais comme embellie (re-encore !!) le coup de la cigarette qui se consume et la femme "Brûlée par le désir de passer le miroir'

Là j'ai ri :
Un poète sans sous qui me fit des avances,
Comprenez mon émoi devant cet oxymore.

Et pour la musique, les images :
A l'heure des marchands de sable blanc, fées d'or,
J'attends mon rendez-vous comme l'amant sa belle.

Et pis je sais toujours pas c'est qui... suis pas douée pour les devinettes !

Oulà, je sèèèèèche !
Des beaux vers, de la régularité, mais de la malice... Embellie ?

Oh ben mince, la queue de poisson finale ! C'est bien mené tout ça, pas mal, pas mal du tout, et bravo pour la rythmique !

bien tourné, une vraie histoire fort bien racontée
intrigant !
on cherche, on cherche !

j'avoue, c'est moi l'auteure de cette petite histoire de rendez-vous nocturne... il y a quelques jours, je relisais un recueil de paroles de chansons de Serge Gainsbourg et je me suis inspirée de celles que l'on peut écouter sur Melody Nelson ou l'Homme à la tête de choux...

je me suis lancée dans l'auto-commentaire pour brouiller les pistes et pour m'amuser...

alors non, certains textes en proses que j'ai vraiment aimé ne sont pas de moi, mais c'est étrange de lire un texte qui vous touche au point de penser : ça, j'aurais pu l'écrire, c'est dans ma chair, dans mes tripes.

merci pour vos commentaires les amis, embellie, Fred, coline Dé, Chako Noir, Janis... et Pussicat ! et à tous ceux qui on lu mon texte.

belle expérience, vraiment, et quel suspens !

Oh ! Pardon ! Je croyais avoir commenté ! Je viendrai (re)lire, en tout cas.

"Et moi comme une proie j'étais à sa merci.
Je tire sur ma clope et je regarde en l'air
La fumée mentholée s'échapper en corolles.

Je m'approche à pas lents excitée comme une folle
Brûlée par le désir de passer le miroir :
Depuis deux cent deux jours et autant de nuits blanches"

ça, me questionne la logique!

zut, j'ai perdu les trois quarts de mon comm'
attend!
je refais

"Il est encore temps de faire demi tour
Pensé-je en allumant ma blonde sous la pluie"

"Un poète sans sous qui me fit des avances,
Comprenez mon émoi devant cet oxymore."

ça, j'adore!

et ça, m'a fait beaucoup rire: c'est tout toi!

"Je défaille et trébuche et reprends mes esprits
Je m'avance en tremblant (c'est toi qui l'a voulu),
J'essaie de maîtriser la peur qui m'envahit.

La pluie glisse en filets sur les vitres teintées
Ne laissant percevoir qu'un halo de lumière
Au dessus du reflet d'un visage mouvant.

Effrayée je recule et prends de la distance,
C'est un réflexe humain : découvrir son image,
Et je ris doucement, idiote que tu es !"

Une histoire moderne habillée de classique, toute en rythme et qui maintient le suspens jusqu'au bout. En tout cas, ce texte donne vraiment l'impression que l'auteur(e) s'est bien amusé(e) en l'écrivant et le plaisir est communicatif :-)