Houston (exercice)
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Houston (exercice)
"Déjà onze heures! Il faut que je me dépêche, je vais être en retard à mon rendez-vous. Quelle pagaille dans le métro ce matin, rarement vu ça! Je vais couper par Austerlitz et appeler Jeanne depuis une cabine pour la prévenir de mon retard. Zut! La cabine est occupée! Tant pis, je vais voir ailleurs, il faut que je me grouille!"
"J'en veux deux! Oui, deux! On se débrouillera, tu m'entends?!"
Alain ne prête pas vraiment attention à ces propos échappés d'une conversation téléphonique. Son regard est plutôt attiré par l'air affairé du type au téléphone, cheveux en bataille, pâle comme du gingembre et mine hirsute. On le devine soucieux, ça ne fait pas l'ombre d'un pli. Il tient une petite mallette dont s'échappe un courrier à en-tête de la NASA. Cela fait sourire Alain. Il se souvient en avoir fabriqué quand il était môme, il voulait épater ses copains et leur faire croire que son père était astronaute. Aujourd'hui il s'en veut d'avoir eu honte de son père plombier mais à l'époque, il rêvait d'origines plus glorieuses.
Pendant qu'il patiente au feu rouge, Alain se retourne et regarde l'homme au téléphone. Il paraît décidément bien nerveux.
Chemin faisant, Alain commence à se demander qui peut bien être ce drôle de personnage. Il repense au papier à l'effigie de la NASA. Peut-être un ingénieur ou un directeur. Quelqu'un avec des responsabilités qui justifient sa mauvaise humeur. Oui, ça doit être ça.
Alain poursuit sa route sans comprendre pourquoi l'image de cet homme ne le quitte plus. Il ne le connaît pas, ne l'a jamais croisé auparavant, tout au plus a-t-il perçu quelques bribes de conversation. Etrange...
L'heure tourne, Alain a presque oublié son rendez-vous, il ne pense plus qu'à cette lettre de la NASA et aux mots de l'ingénieur. Il ne comprend rien à cette soudaine obsession. Pourquoi ce type s'excitait-il comme ça? En passant devant un marchand de kebab, notre homme plus vraiment pressé tombe sur un journal abandonné sur une table. Une grande photo à la Une et un titre en lettres capitales: "Mission Bush Conquest - Les astronautes reviendront-ils vivants?"
Intrigué, Alain s'attable, sans plus se préoccuper du temps qui passe, et entame la lecture de l'article. La NASA a envoyé la veille une navette dans l'espace, deux morceaux de tuile en métal se sont détachés au décollage, personne ne sait où ils sont retombés et la NASA se perd en conjectures. L'heure est grave, d'autant plus que le Sénat américain vient de couper les vivres au programme spatial, le jugeant inutile et trop onéreux. L'argent doit aller à la guerre contre la Corée, pas dans les étoiles. Le bon sens incarné ces politiciens!
Alain quitte le bistrot en emportant le journal, quelque chose le chiffonne sans qu'il sache quoi. Bon sang mais bien sûr! Le type tout à l'heure, si mal en point, livide comme un drap lavé avec Ariel, il bosse à la NASA et il doit faire partie de l'équipe technique de la navette. Pauvre gars, y a de quoi être tout retourné, c'est clair!
L'esprit d'Alain part dans tous les sens. Il visualise l'équipe au commandement central de Houston, des hommes qui hurlent et qui s'arrachent les cheveux, un président qui veut faire tomber des têtes, des astronautes qui ne savent peut-être même pas encore que leur vie est en jeu... mais…mais… que fiche cet ingénieur de la NASA ici à Paris si tout se déroule au Texas? Et qu'est-ce qu'il fabrique dans une cabine téléphonique? Ce genre de type haut placé doit posséder un téléphone satellite hyper branché, pourquoi se casser la tête à faire vivre France Telecom dans une cabine pourrie? Alain se ravise. Après tout, lui aussi allait faire pareil. Oui mais lui, ce n'est pas de sa faute, on lui a volé son portable hier et il attend le mois prochain pour en acheter un autre. Un gars de la NASA, ça doit avoir de quoi acheter tous les téléphones du monde. Tout cela est vraiment bizarre.
Les mots prononcés par l'homme reviennent à Alain.
"J'en veux deux! Oui, deux! On se débrouillera, tu m'entends?!"
De quoi pouvait-il bien parler? Alain ne tient plus en place, il s'assied au bord d'une fontaine, se prend la tête entre les mains et se gratte les cheveux en réfléchissant. Deux quoi? Deux téléphones? Tout cela n'a pas de sens. Pourquoi lui faudrait-il deux téléphones? Deux voitures? Pour rejoindre un aéroport? Pourquoi deux? Deux réparateurs? Alain cherche.
Deux femmes pour la nuit? Il se met à rire. Non, tout de même pas, pas un type de la NASA, ils sont trop sérieux ces gens-là... Deux quoi, bon sang?! Deux... deux... qu'est-ce qui va par deux? Pourquoi deux?
Tout cela rend Alain un peu dingue. Maintenant, c'est lui qui a l'air aussi secoué que l'ingénieur de la NASA, l'air perdu et le regard sombre. Il transpire à grosses gouttes, comme si il portait un manteau de fourrure en plein été. C'est d'ailleurs ce qu'il se dit en pensant qu'il fait sacrément chaud dans ce fichu pays et qu'il doit faire bien plus respirable dans des endroits comme la Finlande ou la Sibérie. Sibérie... Russie... Russes... Les mots s'entrechoquent dans l'esprit d'Alain, il réfléchit à toute vitesse, il ne contrôle plus le flot de ses pensées.
Et si les Russes étaient dans le coup? Et si ce mec de la NASA était un espion à la solde de Vladmimir Mochkatine? Il était peut-être en train de lui vendre les secrets de fabrication de la navette. Une navette presque en panne, tu parles…
Mais non! Alain se dit qu'il est vraiment idiot. Le gars était sûrement en train de passer commande à la Russie de deux pièces d'occasion pour la navette spatiale! Alain hésite à y croire puis réfléchit un peu. Tout se tient! L'ingénieur fait ça depuis une cabine à Paris parce que son portable est sur écoute et qu'il vit dans la capitale comme agent de liaison avec les Pays de l'Est. La Russie regorge de navettes démantibulées, de vaisseaux remisés au placard et n'importe qui est prêt à se faire un peu de blé en revendant des pièces d'occasion. En les commandant de la sorte, rien d'officiel ne transparaît, personne n'est au courant, ça évite à la presse de s'emparer de l'affaire et d'ébruiter que la NASA n'a même plus de nouvelles pièces en stock. Oui, ça ne peut-être que cela…
Soudain, Alain prend peur. Une navette américaine bricolée avec des pièces russes et qui doit passer au-dessus de Paris lors de son atterrissage... Dangereux! Et si elle s'écrase sur la ville? Et si il y a des milliers de morts? Tout cela à cause de deux petits morceaux de tuile made in URSS achetés au noir. Pas possible! Il faut empêcher cela! Alain bondit comme un diable hors de sa boîte, refait le chemin en sens inverse. Evidemment, l'homme de la NASA a disparu! Qu'à cela ne tienne, Alain sait quoi faire. France Telecom a sûrement le relevé des appels passés depuis les cabines, ils pourront retrouver la trace du mercenaire russe sans scrupules. Il faut agir. Vite!
Police nationale. Quand Alain aperçoit l'enseigne, il se sent soulagé. Il entre en courant dans le commissariat, demande à voir un responsable, bafouille, transpire. Un inspecteur le prend en charge en attendant le retour du commissaire divisionnaire. Alain perd les pédales, il commence à crier.
"Dépêchez-vous, il faut faire quelque chose! Une navette spatiale va s'écraser sur Paris le 7 août lors de son retour sur terre. Prévenez le gouvernement, l'armée, les pompiers, la Croix-Rouge. Les Américains aussi. Vite!"
A ce moment, le commissaire pénètre dans le bureau, l'inspecteur le regarde l'air mi-goguenard mi-consterné.
"Chef! Y a quelqu'un pour vous. Le cousin de Paco Rabanne..."
"J'en veux deux! Oui, deux! On se débrouillera, tu m'entends?!"
Alain ne prête pas vraiment attention à ces propos échappés d'une conversation téléphonique. Son regard est plutôt attiré par l'air affairé du type au téléphone, cheveux en bataille, pâle comme du gingembre et mine hirsute. On le devine soucieux, ça ne fait pas l'ombre d'un pli. Il tient une petite mallette dont s'échappe un courrier à en-tête de la NASA. Cela fait sourire Alain. Il se souvient en avoir fabriqué quand il était môme, il voulait épater ses copains et leur faire croire que son père était astronaute. Aujourd'hui il s'en veut d'avoir eu honte de son père plombier mais à l'époque, il rêvait d'origines plus glorieuses.
Pendant qu'il patiente au feu rouge, Alain se retourne et regarde l'homme au téléphone. Il paraît décidément bien nerveux.
Chemin faisant, Alain commence à se demander qui peut bien être ce drôle de personnage. Il repense au papier à l'effigie de la NASA. Peut-être un ingénieur ou un directeur. Quelqu'un avec des responsabilités qui justifient sa mauvaise humeur. Oui, ça doit être ça.
Alain poursuit sa route sans comprendre pourquoi l'image de cet homme ne le quitte plus. Il ne le connaît pas, ne l'a jamais croisé auparavant, tout au plus a-t-il perçu quelques bribes de conversation. Etrange...
L'heure tourne, Alain a presque oublié son rendez-vous, il ne pense plus qu'à cette lettre de la NASA et aux mots de l'ingénieur. Il ne comprend rien à cette soudaine obsession. Pourquoi ce type s'excitait-il comme ça? En passant devant un marchand de kebab, notre homme plus vraiment pressé tombe sur un journal abandonné sur une table. Une grande photo à la Une et un titre en lettres capitales: "Mission Bush Conquest - Les astronautes reviendront-ils vivants?"
Intrigué, Alain s'attable, sans plus se préoccuper du temps qui passe, et entame la lecture de l'article. La NASA a envoyé la veille une navette dans l'espace, deux morceaux de tuile en métal se sont détachés au décollage, personne ne sait où ils sont retombés et la NASA se perd en conjectures. L'heure est grave, d'autant plus que le Sénat américain vient de couper les vivres au programme spatial, le jugeant inutile et trop onéreux. L'argent doit aller à la guerre contre la Corée, pas dans les étoiles. Le bon sens incarné ces politiciens!
Alain quitte le bistrot en emportant le journal, quelque chose le chiffonne sans qu'il sache quoi. Bon sang mais bien sûr! Le type tout à l'heure, si mal en point, livide comme un drap lavé avec Ariel, il bosse à la NASA et il doit faire partie de l'équipe technique de la navette. Pauvre gars, y a de quoi être tout retourné, c'est clair!
L'esprit d'Alain part dans tous les sens. Il visualise l'équipe au commandement central de Houston, des hommes qui hurlent et qui s'arrachent les cheveux, un président qui veut faire tomber des têtes, des astronautes qui ne savent peut-être même pas encore que leur vie est en jeu... mais…mais… que fiche cet ingénieur de la NASA ici à Paris si tout se déroule au Texas? Et qu'est-ce qu'il fabrique dans une cabine téléphonique? Ce genre de type haut placé doit posséder un téléphone satellite hyper branché, pourquoi se casser la tête à faire vivre France Telecom dans une cabine pourrie? Alain se ravise. Après tout, lui aussi allait faire pareil. Oui mais lui, ce n'est pas de sa faute, on lui a volé son portable hier et il attend le mois prochain pour en acheter un autre. Un gars de la NASA, ça doit avoir de quoi acheter tous les téléphones du monde. Tout cela est vraiment bizarre.
Les mots prononcés par l'homme reviennent à Alain.
"J'en veux deux! Oui, deux! On se débrouillera, tu m'entends?!"
De quoi pouvait-il bien parler? Alain ne tient plus en place, il s'assied au bord d'une fontaine, se prend la tête entre les mains et se gratte les cheveux en réfléchissant. Deux quoi? Deux téléphones? Tout cela n'a pas de sens. Pourquoi lui faudrait-il deux téléphones? Deux voitures? Pour rejoindre un aéroport? Pourquoi deux? Deux réparateurs? Alain cherche.
Deux femmes pour la nuit? Il se met à rire. Non, tout de même pas, pas un type de la NASA, ils sont trop sérieux ces gens-là... Deux quoi, bon sang?! Deux... deux... qu'est-ce qui va par deux? Pourquoi deux?
Tout cela rend Alain un peu dingue. Maintenant, c'est lui qui a l'air aussi secoué que l'ingénieur de la NASA, l'air perdu et le regard sombre. Il transpire à grosses gouttes, comme si il portait un manteau de fourrure en plein été. C'est d'ailleurs ce qu'il se dit en pensant qu'il fait sacrément chaud dans ce fichu pays et qu'il doit faire bien plus respirable dans des endroits comme la Finlande ou la Sibérie. Sibérie... Russie... Russes... Les mots s'entrechoquent dans l'esprit d'Alain, il réfléchit à toute vitesse, il ne contrôle plus le flot de ses pensées.
Et si les Russes étaient dans le coup? Et si ce mec de la NASA était un espion à la solde de Vladmimir Mochkatine? Il était peut-être en train de lui vendre les secrets de fabrication de la navette. Une navette presque en panne, tu parles…
Mais non! Alain se dit qu'il est vraiment idiot. Le gars était sûrement en train de passer commande à la Russie de deux pièces d'occasion pour la navette spatiale! Alain hésite à y croire puis réfléchit un peu. Tout se tient! L'ingénieur fait ça depuis une cabine à Paris parce que son portable est sur écoute et qu'il vit dans la capitale comme agent de liaison avec les Pays de l'Est. La Russie regorge de navettes démantibulées, de vaisseaux remisés au placard et n'importe qui est prêt à se faire un peu de blé en revendant des pièces d'occasion. En les commandant de la sorte, rien d'officiel ne transparaît, personne n'est au courant, ça évite à la presse de s'emparer de l'affaire et d'ébruiter que la NASA n'a même plus de nouvelles pièces en stock. Oui, ça ne peut-être que cela…
Soudain, Alain prend peur. Une navette américaine bricolée avec des pièces russes et qui doit passer au-dessus de Paris lors de son atterrissage... Dangereux! Et si elle s'écrase sur la ville? Et si il y a des milliers de morts? Tout cela à cause de deux petits morceaux de tuile made in URSS achetés au noir. Pas possible! Il faut empêcher cela! Alain bondit comme un diable hors de sa boîte, refait le chemin en sens inverse. Evidemment, l'homme de la NASA a disparu! Qu'à cela ne tienne, Alain sait quoi faire. France Telecom a sûrement le relevé des appels passés depuis les cabines, ils pourront retrouver la trace du mercenaire russe sans scrupules. Il faut agir. Vite!
Police nationale. Quand Alain aperçoit l'enseigne, il se sent soulagé. Il entre en courant dans le commissariat, demande à voir un responsable, bafouille, transpire. Un inspecteur le prend en charge en attendant le retour du commissaire divisionnaire. Alain perd les pédales, il commence à crier.
"Dépêchez-vous, il faut faire quelque chose! Une navette spatiale va s'écraser sur Paris le 7 août lors de son retour sur terre. Prévenez le gouvernement, l'armée, les pompiers, la Croix-Rouge. Les Américains aussi. Vite!"
A ce moment, le commissaire pénètre dans le bureau, l'inspecteur le regarde l'air mi-goguenard mi-consterné.
"Chef! Y a quelqu'un pour vous. Le cousin de Paco Rabanne..."
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