Torpeur nocturne

La nuit se glisse aux pieds du lit insomniaque.
A son chevet s'échappe un lourd chuchotement,
Et mon corps, aux aguets, cherche inlassablement
Le sommeil déserteur comme un fuyard qu'on traque.

J’entends son pas si lourd sur le plancher qui craque…
Le bruit le plus ténu devient assourdissant…
Je le vois se sauver, fantôme vagissant,
Par le volet qui bat comme un drapeau qui claque !

Quand donc viendra la paix sous ce front tourmenté ?
Dans le fortin obscur de mon anxiété,
J’implore la torpeur de libérer mon être.

C'est l'heure où les démons, fantassins de la nuit,
Assiègent sans pitié l’esprit las qui les fuit
Entre le jour qui meurt et celui qui va naître.

s'il n'y a pas la grande histoire racontée où je puiserai ma réflexion du jour
dans ce morceau d'écriture il y a
la musique
modelée comme une sculpture

toi, t'es un grand poète

(Point n'aurais, cher ami, de conseils à donner,
Si je n'avais vécu pareilles nuits de peine
A rissoler sans fin au grill obscur de scènes
Abhorrées, me laissant au matin hébétée...)

En "torpeur", j'entends tort tout aussi fort que peur,
Ces deux malfaiteurs-là nous tissent des linceuls!
Ne les invoquons pas : la torpeur nous malmène,
Nous prive de nous-même et nous mène à trépas.

Fi des invocations, incantations, blasphèmes!
Fions-nous à la Plante aux vertus souveraines,
En son essence pure, elle agit, souterraine

et te révèle alors, sa&ns amour et sans haine,
Ton paysage vrai, intérieur, habité,
Où ton sourire éclot, comme à l'aube du monde.

Ton poème m'a inspirée, je me suis permis...
(Si ça te déplait, j'autorise la Modé à l'effacer, à ta demande)

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< Bien sûr que non : ce commentaire est tout à fait valable !
La Modération. >

Polixène ton poème m'honore, je le trouve superbe. Et tes commentaires fréquents et bienveillants me sont autant de baumes. Quant à Frédéric, tu es sans doute la personne que je respecte le plus ici. Voilà. BIses.

Du bon Legone c'est certain
Avec la touche qui va bien
Baudelaire en est baba
Et Verlaine boit un calva.

Un vrai p(r)oéte !!!

Tu as mis à profit ton insomnie pour nous pondre un sonnet de très haut niveau

Les rimes des quatrains sont très évocatrices, la sonorité bruyante des "aque" est souligné par le côté feutré des "ent"

Le second tercet et surtout la chute sont époustouflants

Superbe !
Franchement des insomnies qui me permettraient une telle inspiration
j'en rêve, mais s'il en est de formidables, d'autres sont plutôt forminables :-)

Très beau sonnet, Legone.
Ta muse ne s'appellerait pas Gabrielle par hasard ?

Eh oui embellie, c'était ma muse. Je regrette ce temps béni, crois-moi.

Et le temps de Fredo aussi d'ailleurs...

La clarté d'un sonnet ? Bougeoir à la fenêtre !
C'est un miroir tendu pour mieux se reconnaître.

Mon seul regret : la répétition du mot "nuit" (même si elle semble inévitable).

Question "indiscrète", Legone : es-tu édité quelque part ?
Si oui, j'achète :-)

J'arrive de vacance (oui, sans s) et je tombe là dessus : je suis bien content.
C'est très bon.
Pourquoi te transformes tu parfois en loup garou !
Bon, nous avons tous quelque chose de Hide en nous.
En tous cas : excellent sonnet.

Une très belle lecture que cette torpeur nocturne. Une consruction classique qui donne à ce poème une classe bien particulière. Un sujet maîtrisé.
J'aime vraiment beaucoup. Merci.

Sweet Heart

L'insomnie a du bon quand elle libère du temps pour la poésie.

Une forme classique qui parvient à créer la surprise et le plaisir de la lecture.

Portée par la métonymie ("le lit insomniaque"), les personnifications ("La nuit se glisse", "Le sommeil... son pas", "J'implore la torpeur"), les comparaisons ("comme un fuyard qu'on traque", "comme un drapeau qui claque"), les antithèses ("assiègent" / "fuit", "jour qui meurt" / "celui qui va naître"), les périphrases ("fantôme vagissant", "fantassins de la nuit") et le champ lexical, abondant, du conflit ("aux aguets", "déserteur", "fuyard", "traque", "se sauver", "drapeau", "paix", "fortin", "fantassins", "Assiègent sans pitié", "fuit"), la privation de sommeil semble résulter du travail de sape incessant d'une guérilla. La charge émotive de ce moment est extrême comme le manifestent la métaphore ("le fortin de mon anxiété"), l'adverbe d'intensité ("si lourd") et le superlatif ("le plus ténu").  La conjonction de coordination "donc", présente dans la question, légitime, du vers 9, appuie sur l'attente, toujours infructueuse, d'un improbable cessez-le-feu.

Merci pour ce partage !