Autres histoires courtes…

Bonjour à tous...
Un petit échantillon de micro-nouvelles, aventures au quotidien d'un usager des TER, avec un délire en fin de parcours.

1) Cinquante nuances, et des jambes...
La fille aux cheveux dorés s'est assise à mes deux heures , ce qui me donne vingt minute de bonheur à suivre. Comme tous les matins, mes yeux l'ont trouvée sans la chercher. Elle a accroché son regard au mien, un regard si doux que j'en ai mal au corps, encore. Elle a sorti un bouquin de son immense sac tout vert, ouvert. Un gros livre qui ressemble à ''Fifty Shades of Grey'', j'espère que non, sans l'avoir lu, idée reçue certainement. Puis elle est partie, ailleurs, au fil de ces pages qu'elle tourne en s'appliquant. J'ai pu l'observer à loisir, mon roman à moi si fade soudain. La perfection existe, j'en suis persuadé et elle est à deux rangées de sièges devant moi. Des cheveux soleil en cascade dorée , des yeux de mers du sud, une nuance de bleu que tu ne trouves nulle part ailleurs. Les pommettes hautes, à peine teintées de poudre aux yeux, parcelle d'étoiles, le nez fin et droit. Une bouche aux lèvres couleur framboise et si elles n'en ont pas le goût, c'est que les rêves sont mensonges. Elle est habillée de simplicité recherchée, pas de paillettes, ni de strass. La classe et le charme discret de celle qui, consciente de sa beauté n'en fait pas l'étalage. Les vingt minutes sont passées, on nous annonce le terminus, je n'ai rien vu venir. Elle ferme son gros livre, et me voilà rassuré. J'ai vu la couverture et elle n'était pas grise. La belle a levé les yeux sur moi, j'ai baissé les miens, absorbé soudain par ma lecture. Vite, ranger mon sac, enfiler ma veste. Aujourd'hui j'ai ma chance, et je me retrouve à trente-six centimètres de sa nuque, son dos, ses fesses, ses jambes, longues, interminables. Sa nuque est découverte, elle a relevé ses cheveux. Une chaine en or comme un trait de lumière, son dos est droit. J'ai du mal à respirer, avale ma salive et j'ose. Mon Dieu, ses fesses...les jeans sont faits pour elles. La courbe est perfection et je l'imagine en Darjeeling. Un coup de frein, brusque et me voilà contre elle. Je bredouille une excuse, ne la vois pas sourire, mais j'espère qu'elle l'a fait. Et son parfum, Yves St Laurent sans aucun doute...
Une bousculade, le quai, la foule, les escalators. Sa vie, ailleurs, la mienne de l'autre côté.
Demain...


2)L'été indien de la femme en potiron

Il y a cette femme en Soleil d'Automne
Ou alors c'est le potage au potiron qui l'habille; elle est vieille, non, elle est agée mais elle est belle, avec un grand "B" comme bonheur.
Elle lit un livre avec des gants noirs en bas résille, à l'ancienne.
Un livre noir où de vilaines filles assassinent leurs parents à coup de phrases Gilette.
Elle est agée mais elle est belle, Dieu qu'elle est belle.
Elle aime le roux et l'ocre, des branches de ses lunettes à ses escarpins, et ce reflet dans ses cheveux que j'aimerais souffler.
Je tends la main pour...
Elle s'est retournée, je suspends le vol de cet instant perdu à tout jamais.
Un regard,...
J'ai dix ans tout à coup et je me blotti dans le creux de son châle qu'elle a posé sur le siège innocupé.
Elle est belle, encore, à l'infini...
Il y a cette femme en Soleil d'Automne...
En été indien..

3) Le retour du gars qui aimait bien la fille en blond avec des yeux d'émeraude.Il venait d'ouvrir, de réouvrir plutôt, cette porte trop longtemps fermée. Elle était là, comme dans ses souvenirs. Si ce n'étaient ces petites griffures du temps aux coins des yeux, et ce pli aux commissures. Il se rapprocha et lui prit la main. Elle leva son regard d'émeraude à l'éclat intact, à peine voilé d'une improbable tristesse et elle lui sourit. Quelque chose avait changé et il se remémora ses nuits passées à la suivre dans sa non-vie. Son sourire avait changé, oui, de ça il en était certain. Il sut à cet instant qu'elle était libre et que celà pouvait commencer. Elle se leva, repoussa une méche en blondeur de soleil d'hiver, serra sa main dans la sienne, plus fort, plus longtemps. Une larme, à peine en rigole de joue duveteuse, sucrée peut-être...Ils seraient deux maintenant.

4) L'enfer au paradis

Y arriver lui avait été fort simple,
Elle avait tout d'un Ange
De son regard bleuté à l'or de ses cheveux
et de son Âme, si douce...
Un leurre !!!
Le premier à morfler fût l'autre nain là
le joufflu avec son air affable.
Une bastos dans sa tronche de cake
Une autre dans le cœur...l'avait qu'a pas piquer le sien.
Cupidon repeint les murs du Paradis avec sa cervelle de Piaf!!!
Un angelot qui passait par hasard en prit une dans l'oeil
Le gauche, ça fait plus mal!!!
Bien fait pour sa gueule,
L’avait qu'a pas décorer la chambre des marmots
et leur faire croire que la vie est belle.
Elle dégoupilla trois grenades qu'elle balança sans s'arrêter
Sur le nuage d’à côté
Saint Pierre gicla vite fait, façon spray !!!
Du rouge partout, et du noir aussi
Elle traça un sillon sanglant à travers le ciel
Il fallut Dieu pour l’arrêter !!!
Trois légions d’Archanges n’y suffirent point
Il envoya son mouflet
Qui eut de la chance
….
Plus de cartouche !!!
….
Incapable du moindre mal,
il la renvoya sur Terre
Où depuis Elle erre….
….
Elle n’ira pas au ciel, jamais
De toute façon, elle voulait pas y aller…
….
L’enfer la tente,

Elle n’ira pas non plus….
Satan balise, il l’a vue faire…

Je suis montée dans ce wagon, j'ai vu l'homme qui voit les femmes hologrammes.
Ces transports en commun évitent bien le commun des transports, dans les rêves...

Je donnerai un commentaire plus détaillé fin de semaine, mais la première impression est très bonne. Le texte est vivant, visuel, et se donne à lire comme on regarderait un film. Je n'ai pas trop saisi le sens du dernier texte (je vais relire), les autres sont écrits de façon fluide et agréable. On a envie d'être à la place de femme mystérieuse et ainsi regardée. C'est bien décrit.

...aux sympathiques lecteurs/commentateurs.
"Vos Ecrits" ronronne, quel calme.

J'aime beaucoup ces trois portraits de femmes. L'inachevé, leur délicatesse, le refus de l'ostentatoire... je trouve dommage parfois la faiblesse du narrateur qui nous expose trop l'attendu, la concupiscence, sans être puritain, il me semble que l'écriture qui nous le montre cédant à la banale tentation n'est plus de même qualité. Cette fois elle dit trop. Le domaine des pulsions tolère difficilement leur description. Par contre j'aime aussi "L'enfer au paradis" pour d'autres raisons ; sa radicalité, sa fulgurance, le capharnaüm du style n'est pas sans humour. Tout ceci démontre une riche palette d'écriture.

La démarche me plaît et je trouve le procédé intéressant mais quelque me manque sans que j'arrive à préciser clairement de quoi il s'agit. Je me demande si ce n'est pas l'aspect fugace de certains instants, le caractère éphémère de ces rencontres que je ne ressens pas ici. Le narrateur prend le temps de donner des détails, de poser une partie du décor mais la notion de mouvement, de temps, n'apparaît pas et ça laisse un vide, le texte me paraît incomplet. Pas sûre d'être très claire là-dessus, désolée.