douves

elle porte un tee shirt avec un coeur noir
frange sur les yeux et ses mains menues
dessine fillette le trou de ta vie
et le grand château qui n’existe pas.

frange sur les yeux et ses mains menues
tout manque partout à part le désir
et le grand château qui n’existe pas
restent le dessin l’image et les yeux.

tout manque partout à part le désir
les créneaux la herse et les douves vertes
restent le dessin l’image et les yeux
le roi n’est sorti qu’un après-midi.

les créneaux la herse et les douves vertes
elle cligne des yeux le temps est si court
le roi n’est sorti qu’un après-midi
elle porte un tee shirt avec un coeur noir.

Ce texte bien que peu joyeux ne me déplaît pas, j'apprécie l'enchaînement des images et son rythme marqué par une sorte de balancement mélancolique. Je suis toutefois moins convaincu par 2 passages :

dessine fillette le trou de ta vie

je trouve l'expression peu heureuse (le trou de la fillette...) et surtout fort grave : l'association de la jeunesse à la mort, symptôme de sociétés en déclin moral, me choque toujours (c'est l'un de ces trucs qui font que bien des textes me détournent de la poésie qu'ils pensent pour cela même "contemporaine", comme ces artistes genre BD qui mettent du gore et de la mort partout)

Second point, d'un tout autre ordre :
partout à part le désir

le "à part" me paraît fort peu poétique, un peu trop langage familier. Le vers gagnerait à trouver un subsitut ou, sans doute mieux, une tournure différente pour exprimer cette dérogation

Je ne suis pas beaucoup descendue alors je remonte.
Juste pour dire que c'est un pantoum (je viens d'apprendre cette forme : 4 quatrains de decasyllabes (ici en vers libérés). Chaque quatrains reprend en 1er et 3eme le second et quatrième du quatrain précédent et le dernier vers du poème reprend le premier.
Pour le trou de la fillette je n'ai pas fait exprès mais comme c'est un poème un peu psychanalytique qui parle du désir et du manque, ce ne serait pas forcément gênant...mais je vais quand même le reprendre, tu es le second à me renvoyer cette image un peu crue.

Pour autant que je sache, le pantoum ne se fait pas nécessairement sur 4 strophes
https://lettresdemalaisie.com/2012/05/14/au-fait-vous-avez-dit-pantoun-ou-pantoum/

Tu peux leur proposer ton texte, ils sont accueillants.

Beau poème ici, manifeste d'empathie pour une fillette qui se croit déjà un peu grande, mais se prend peut-être, encore, un peu pour une princesse. Sale temps l'adolescence !
"Tout manque"

oui, tu as raison pour le pantoum.
et la fillette du poème est une enfant, qui n'a vu son père qu'une fois, et qui dessine. Peut-être "fillette" est-il trop large. Je vais y réfléchir.

pantoum or not pantoum
il est où le pont levis.
un chateau sans pont levis n'est pas un chateau

hi wen a écrit:il est où le pont levis.

levis Strauss of course

annie a résumé mon impression
par contre trou me semble pas si cru que cela, tout depend la signification qu'on lui donne

Très beau pantoum seyne (mais je suis biaisé : j'adore cette forme, hypnotique à souhait, depuis l'excellentissime Harmonie du soir de notre cher Baudelaire). Les décasyllabes sont de l'ordre du langage oral plutôt qu'ils ne suivent les règles de prononciation classique, mais ça n'enlève pas le rythme entêtant de la chose, ça lui donne simplement un côté plus moderne.
Tu as fait le choix de proposer des points, comme fin de phrases (?) à la fin de chaque strophe alors même que tu t'affranchis de toute majuscule et du reste de la ponctuation. Mon avis serait d'abandonner aussi ces points, et de laisser le lecteur construire sa propre lecture du texte, au fil des lectures et relectures.
J'aime le "choc des cultures" entre les images résolument modernes (un tee-shirt avec un cœur noir) et les autres (le château, le roi).
Quant au trou qui a fait couler tant d'encre déjà (c'est relatif)... je n'ai pas d'avis sur la question. L'image ne me choque pas, même si la sonorité très agressive m'étonne un peu. Et si tu remplaces par "dessine fillette de ta vie le gouffre" ?

Amicalement

Silence écrit